Texte intégral
STEPHANE CARPENTIER
C'est l'homme qu'on avait envie d'entendre ce matin et ça tombe bien, c'est sur RTL, alors que s'annonce une sacrée bataille à l'Assemblée nationale à partir d'aujourd'hui sur le paquet pouvoir d'achat, le ministre de l'Economie est avec nous en direct et en studio, Bruno LE MAIRE. Avant de plonger ensemble dans ce projet phare de l'été, ce paquet de mesures en faveur du pouvoir d'achat des Français, je voudrais entendre ce matin le numéro 2 du Gouvernement sur les propos d'hier de la porte-voix de la France insoumise, pas des propos, mais un tweet signé de la députée Mathilde PANOT le jour des commémorations de la rafle du Vel d'Hiv, un tweet sans le mot « juifs » et reprochant à Emmanuel MACRON d'avoir rendu honneur à PETAIN en 2018. Vous l'avez vécu, vous, comment ?
BRUNO LE MAIRE
Très mal, très mal, comme, je pense, des millions de nos compatriotes. J'ai été touché par les discours du président de la République, de la Première ministre, j'ai eu l'occasion de lui dire d'ailleurs hier, mais j'ai vécu très mal le tweet de Mathilde PANOT parce qu'elle joue avec ce avec quoi on ne devrait jamais jouer, la douleur des mémoires. Nous avons tous des douleurs qui sont enfouies dans nos mémoires, les citoyens français de confession juive ont une douleur profonde, intime, déchirante, qui date de la rafle du Vel d'Hiv de 1942, jouer avec ça c'est sortir du champ de la politique, c'est sortir du champ de la démocratie, et j'espère que Mathilde PANOT saura revenir sur ses propos.
STEPHANE CARPENTIER
Est-ce que c'est ça l'opposition en 2022, Bruno LE MAIRE, faire de tous sujets une occasion de conflit, sans respect pour rien, c'est ça la politique qu'on offre aux Français ?
BRUNO LE MAIRE
En tout cas c'est la politique de la France insoumise, le bruit, la fureur en permanence, le mensonge, la manipulation, les excès, enfin quand je vois Jean-Luc MELENCHON qui dit " la République c'est moi ", excès dérisoire, quand je vois que pendant la campagne des législatives il a fait croire que nous voulions augmenter la TVA, alors que le Gouvernement n'a cessé de baisser les impôts, manipulation et mensonge, et ce tweet est finalement dans le droit fil de ce jeu du bruit et de la fureur, mais la France a besoin de tout sauf de bruit et de fureur, elle a besoin de calme, elle a besoin d'apaisement et elle a besoin de raison.
STEPHANE CARPENTIER
Bruno LE MAIRE, vous ciblez La France insoumise dans vos propos, mais vous avez vous-même une ministre qui a eu des propos homophobes, Madame CAYEUX, qui a été très critiquée, elle s'est excusée, mais est-ce qu'elle peut, avec tout ça, rester au Gouvernement ?
BRUNO LE MAIRE
Je pense qu'elle a su trouver les mots qui étaient indispensables, parce que là aussi ce sont des phrases qui, même si elles ne sont pas comparables, ce sont des mots qui ont blessé, qui ont profondément blessé, et vous voyez bien que la politique, ce sont les mots, qu'on doit choisir avec soin les mots qu'on emploie, on doit respecter chacun, et on droit mettre au coeur du débat politique le principe d'égalité des droits. Ce qui relie tous ces sujets c'est l'égalité des droits, nous sommes tous des citoyens avec des droits égaux, et ils ne doivent jamais, à aucun moment, n'être remis en cause. Oui, les propos de Caroline CAYEUX ont blessé beaucoup de nos compatriotes parce qu'ils remettaient en cause un droit pour lequel, d'ailleurs personnellement je me suis battu, donc vous voyez que, au moment où nous abordons un débat à l'Assemblée nationale, qui est un débat fondamental, revenons dans le cercle démocratique qui doit être animé par la raison, le débat, le respect des autres, ni la violence, ni l'invective, ni la blessure.
STEPHANE CARPENTIER
Ces excuses ça va suffire, c'est-à-dire que, vous n'avez pas répondu à ma question, mais elle peut rester au Gouvernement ?
BRUNO LE MAIRE
Je pense que ce n'est pas à moi de décider qui peut ou ne peut pas rester au Gouvernement, ces propos ont profondément blessé, je pense que Caroline CAYEUX l'a compris, elle les a retirés.
STEPHANE CARPENTIER
L'opposition, Bruno LE MAIRE, elle vous attend dans les tribunes de l'Assemblée nationale à partir de ce lundi concernant donc les 20 articles du projet de loi pouvoir d'achat, il va y avoir une avalanche d'amendements, des votes qui s'annoncent extrêmement serrés, est-ce que vous vous attendez à un vrai parcours du combattant ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, mais c'est bien le parcours du combattant, surtout dans cette période estivale où on ne prend pas de vacances, du coup on peut trouver un peu de sport à l'Assemblée nationale, mais un sport, là aussi, qui doit reposer sur des règles de fair-play, d'écoute et de respect des autres. Moi j'ai la conviction que nous pouvons trouver, avec certains représentants de l'opposition, des compromis sur ce texte sur le pouvoir d'achat, parce que dans le fond ce qui compte ce n'est pas nous qui sommes rassemblés à l'Assemblée nationale, la seule chose qui compte c'est nos compatriotes, c'est ceux qui nous écoutent, qui sont en train de faire leurs courses du matin, qui parfois sont en vacances, qui trouvent que tout est trop cher, que l'alimentation dans les rayons est trop chère, que l'essence est trop chère, que le gaz, l'électricité, ils sont inquiets sur ce qui peut se passer par la suite, donc si nous nous rassemblons aujourd'hui c'est pour répondre à ces inquiétudes des Français et leur apporter des réponses qui soient crédibles et immédiates, comme le Gouvernement et le président de la République ne cessent de le faire depuis des mois. Si nous gardons ce cap, qui est celui de nos compatriotes, nous devons pouvoir trouver des compromis.
STEPHANE CARPENTIER
Vu l'ambiance du moment, et ce qui s'est passé la semaine dernière, vous y croyez Bruno LE MAIRE à la notion de fairplay dans l'Assemblée nationale ?
BRUNO LE MAIRE
Oui j'y crois parce que… non, mais il y a l'ambiance médiatique et puis la réalité des discussions politiques, nous discutons avec les Républicains, nous discutons avec le président du groupe de l'Assemblée nationale des Républicains Olivier MARLEIX, nous avons des décisions qui sont constructives, chacun essaye de faire un pas l'un vers l'autre, et nous verrons ce qui se passera cette semaine à l'Assemblée, mais je suis convaincu que c'est possible.
STEPHANE CARPENTIER
On a du mal à croire à des compromis, Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
J'ai eu l'occasion de discuter un certain nombre de socialistes également, il y a des progrès qui sont possibles, je ne veux pas citer de noms, mais je vois, avec des socialistes, des écologistes, les Républicains bien entendu, des compromis possibles, et nous devrons avancer pas à pas.
STEPHANE CARPENTIER
Sur quoi, donnez-nous un exemple, un compromis sur quoi ?
BRUNO LE MAIRE
Je vous donne l'exemple des carburants, je sais que pour les Républicains c'est un sujet qui est fondamental, je le comprends, c'est un sujet fondamental pour tous nos compatriotes, nous avons mis en place une remise de 18 centimes d'euros par litre, certains veulent la prolonger, certains veulent l'augmenter, il y a matière à discussion, je ne veux pas préempter les débats parlementaires, mais je dis que sur ce sujet-là, comme sur d'autres, il y a matière à discussion. La seule chose sur laquelle je veux être très clair c'est qu'il y a un cadre et que les propositions doivent s'inscrire dans ce cadre, rien qui puisse dégrader les finances publiques, rien qui puisse affecter le climat, et tout pour valoriser le travail, parce qu'aujourd'hui ceux qui travaillent ont encore plus besoin d'être soutenus.
STEPHANE CARPENTIER
Les Républicains, ils veulent le litre à 1,50 euro.
BRUNO LE MAIRE
Mais ça je l'ai dit très clairement…
STEPHANE CARPENTIER
Ce n'est pas possible.
BRUNO LE MAIRE
Ça fait partie des lignes rouges. Pourquoi ? parce que ça fait exploser les dépenses publiques, et que le cadre des finances publiques il a été défini, nous devons avoir 5% de déficit en 2022, nous avons un paquet à 20 milliards d'euros, qui s'ajoute à 26 milliards d'euros qui ont déjà été dépensés, parce que je rappelle que le prix du gaz est gelé, que le prix d'électricité est plafonné à 4% au lieu des 35% qu'on aurait dû avoir, donc le cadre des finances publiques il n'est pas négociable parce que ce serait mauvais pour nos compatriotes, mauvais pour nos enfants, et que ça alourdirait la charge de la dette, je pense que ce raisonnement les Républicains peuvent parfaitement l'entendre et que donc nous pouvons progresser.
STEPHANE CARPENTIER
Bruno LE MAIRE, je voudrais qu'on s'arrête sur le carburant parce que les Français vous écoutent ce matin sur RTL. Vous allez prolonger la remise de 18 centimes par litre, on est d'accord ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, nous allons la prolonger…
STEPHANE CARPENTIER
Pour combien de temps ?
BRUNO LE MAIRE
Nous nous avons prévu de la prolonger jusqu'au 1er octobre, mais je ne ferme pas la porte à des propositions de compromis qui pourraient être faits par d'autres forces politiques à l'Assemblée nationale, est-ce qu'il faut la prolonger davantage, est-ce qu'il faut l'augmenter, nous verrons quelles seront les propositions, je ne ferme pas la porte du moment que nous restons dans le cadre budgétaire que j'ai indiqué. Je ferme totalement la porte à une baisse massive des taxes sur les énergies fossiles parce que ce serait contraire à nos engagements de finances publiques. Est-ce que vous trouvez que ce serait très malin de baisser les taxes sur les énergies fossiles au moment où on veut décarboner notre économie ?
STEPHANE CARPENTIER
Vous allez aider ceux qui roulent beaucoup, c'est confirmé ?
BRUNO LE MAIRE
Ça fait partie de nos propositions, mais je ne veux pas dire ce matin c'est à prendre ou à laisser, ce serait totalement contraire avec un esprit de compromis, un esprit de compromis c'est être capable de renoncer à certaines choses, d'en prendre d'autres, mais pour que le compromis ne soit pas le renoncement il faut un cadre, je le redis, respect des finances publiques, respect du climat, soutien à ceux qui travaillent.
STEPHANE CARPENTIER
Et ceux qui roulent beaucoup ce sont ceux qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler ?
BRUNO LE MAIRE
Bien sûr.
STEPHANE CARPENTIER
Ils sont combien de millions de Français concernés ?
BRUNO LE MAIRE
La proposition que nous avons faite concernait 11 à 12 millions de personnes qui travaillent et qui n'ont pas d'autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler, ça peut être des professions libérales, ça peut être des salariés, ça peut être des jeunes qui sont en alternance, voilà la proposition que nous faisons.
STEPHANE CARPENTIER
Ils auraient quoi comme prime, quel montant ?
BRUNO LE MAIRE
Ils auraient une prime qui pourra aller de 100 à 300 euros, en fonction du nombre de kilomètres qu'ils parcourent, il faut que le dispositif soit simple, je sais qu'il y a des inquiétudes sur la complexité du dispositif, mais le débat parlementaire est là pour répondre à toutes ces questions, et au bout du compte l'objectif c'est que tous ceux qui travaillent puissent être davantage soutenus, ça peut être avec les heures supplémentaires, ça peut être avec les RTT, ça peut être avec le carburant, on doit sortir de l'Assemblée nationale et des discussions parlementaires avec un soutien plus important à tous ceux qui travaillent et qui, en gros, font tourner la France.
STEPHANE CARPENTIER
Bruno LE MAIRE, le bouclier tarifaire sous l'énergie, le gaz bloqué, c'est jusqu'à la fin de cette année, ça c'est validé, c'est entendu ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, je confirme que nous maintiendrons l'intégralité du bouclier énergétique, gel des prix du gaz, plafonnement des prix de l'électricité à 4%, jusqu'à la fin de l'année 2022, et qu'il n'y aura pas de rattrapage en 2023 sur d'éventuelles hausses supplémentaires d'ici la fin de l'année.
STEPHANE CARPENTIER
Et après, en 2023, ça se passe comment ? Je vous avais entendu chez nos confrères de LCI, je crois, dire que ça pourrait être à la carte.
BRUNO LE MAIRE
Oui, moi j'ai surtout écouté le président de la République le 14 juillet, qui a très clairement indiqué que nous ferions le point, nous verrions où en seraient les prix du gaz et de l'électricité à la fin de l'année, mais nous ne pourrons pas maintenir éternellement un gel des prix du gaz, un plafonnement des prix de l'électricité, il faudra voir où nous en sommes à la fin de l'année, mais nous ne pourrons pas maintenir éternellement ce genre de bouclier.
STEPHANE CARPENTIER
Bruno LE MAIRE, il y a des patrons qui vous écoutent ce matin sur RTL, qui veulent savoir, concernant la prime Macron défiscalisée, désocialisée, cette prime elle va augmenter, elle va être multipliée ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, elle va être multipliée par trois, jusqu'à 6000 euros, pour les entreprises qui ont un accord d'intéressement, et la chose très importante c'est que, chacun comprenne que face à ce pic inflationniste, qui va durer encore quelques mois, et puis ensuite qui va s'atténuer, c'est pour ça que nous voulons des mesures transitoires et que je refuse des baisses définitives de fiscalité, face à un choc qui est transitoire il faut des mesures transitoires, il faut pouvoir les retirer pour respecter nos finances publiques le jour où l'inflation sera moins forte, mais dans ce pic, qui est très dur pour beaucoup de nos compatriotes, il faut répartir la charge, il y a ce que fait l'Etat, que nous discutons à l'Assemblée. Et puis il y a ce que doivent faire les entreprises, elles doivent augmenter les salaires lorsqu'elles le peuvent, et d'ailleurs beaucoup d'entre elles l'ont fait et je tiens à les en remercier, une PME qui s'inquiète, qui dit " moi je ne peux pas faire passer une augmentation de salaires parce que s'il y a un retournement de conjoncture, eh bien je vais prendre le bouillon ", eh bien il faut qu'elle utilise la prime Macron, parce que précisément cette prime c'est uniquement pour l'année 2022, et si ça se passe moins bien en 2023 l'entreprise ne sera pas menacée. Enfin je les invite toutes à multiplier les accords d'intéressement et de participation, qu'on a encore simplifiés, et qui sont la meilleure manière d'associer les salariés aux résultats de l'entreprise.
STEPHANE CARPENTIER
Bruno LE MAIRE, avant de se quitter, face à cette inflation galopante les Français redoutent de plus en plus leurs courses dans les supermarchés, parce que tout augmente, le panier RTL dévoilé la semaine dernière l'a encore confirmé, même les produits, vous savez, de marques…
BRUNO LE MAIRE
De marques, oui.
STEPHANE CARPENTIER
De marques directement, tout augmente. C'est quoi l'excuse du moment face à ça ? La guerre en Ukraine elle n'a pas un peu bon dos pour dire que tout augmente à cause de ça ?
BRUNO LE MAIRE
Il y a une augmentation objective du prix des matières premières, c'est le cas pour le blé, simplement moi je vois qu'il n'y ait aucune entreprise, ou qui que ce soit, qui profite de la situation pour gonfler ses marges…
STEPHANE CARPENTIER
Il y en a forcément.
BRUNO LE MAIRE
Oui, c'est bien pour ça que nous avons demandé à la Direction générale de la consommation, de la répression des fraudes, de contrôler avec encore plus d'attention ce risque de voir des entreprises gonfler illégitimement leur marge, que nous avons lancé un certain nombre d'enquêtes filière de production par filière de production, et j'ai également lancé une mission de l'Inspection générale des finances qui va associer des parlementaires, des agriculteurs, pour nous assurer que lorsqu'il y a une remise qui est faite c'est bien le producteur qui peut en bénéficier, et le production en priorité.
STEPHANE CARPENTIER
On a flirté avec les 6% d'inflation au mois de juin, on sera à 7% après l'été, on est d'accord ?
BRUNO LE MAIRE
On est dans le pic inflationniste, je le dis depuis le début de l'année, j'ai dit au début de l'année « le plus dur est devant nous », le plus dur nous y sommes, mais ce pic inflationniste il n'a pas vocation à durer encore des années, nous notre évaluation reste que le pic inflationniste devrait décroître à partir de l'année 2023 et que nous devrions retrouver des niveaux d'inflation plus raisonnables fin 2023.
STEPHANE CARPENTIER
Les choses sont claires. Bruno LE MAIRE invité de RTL Matin.
BRUNO LE MAIRE
Merci à vous.
STEPHANE CARPENTIER
Merci à vous, ministre de l'Economie, entretien évidemment qu'on va retrouver très très vite sur notre site rtl.fr.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 juillet 2022