Texte intégral
Monsieur le Ministre, Cher Mevlüt,
Mesdames et Messieurs,
Tout d'abord merci Monsieur le Ministre de votre accueil et du temps que vous me consacrez. Je suis très heureuse d'être à Ankara pour que nous poursuivions le dialogue nourri que nous avons engagé depuis la prise de mes fonctions et qui a porté principalement sur la crise ukrainienne - mais pas seulement - mais de fait nous en avons beaucoup parlé au cours des échanges téléphoniques ou directs que nous avions eus. Notre relation dépasse ce sujet et dans le prolongement de l'entretien que le président de la République et le président Erdogan ont eu mi-juillet, il est important que nous puissions approfondir et développer notre dialogue pour l'ensemble des sujets d'intérêt commun, même lorsque nous avons des analyses différentes. Le ministre a souligné que cela nous arrivait parfois, mais pas tout le temps, donc je lui ai dit ma détermination à augmenter le nombre des sujets dans lesquels nous serions d'accord, et nous devons nous mettre d'accord et assumer les différences lorsque nous en avons.
Nous avons bien évidemment évoqué la guerre en Ukraine et bien sûr l'importance de maintenir une approche ferme à l'endroit de la Russie, le ministre l'a dit, c'est la Russie qui a choisi la guerre, qui a choisi d'agresser un État indépendant et souverain et qui a choisi de violer les principes, les fondamentaux du droit international. Les messages donc que les uns et les autres nous passons à ce pays se complètent, je crois l'un et l'autre. Il faut espérer que la Russie réalise qu'elle a engagé son pays dans une impasse et le continent et au-delà, créant des difficultés à de très nombreux pays dans le monde par les conséquences de son agression sur la sécurité alimentaire mondiale, sur la situation humanitaire ou sur les prix de l'énergie et sur l'inflation qui en découlent. Nous combinons nos efforts pour que cette guerre cesse, pour que la Russie retire ses forces et engage un dialogue qui seul peut ramener la paix. J'ai, dans ce cas, bien évidemment, félicité le ministre et salué la Turquie pour le rôle qu'elle a joué dans la conclusion de l'accord sur les céréales et des grains au mois de juillet dernier. Un accord dont nous voyons qu'il fonctionne, le ministre l'a rappelé, il me l'a indiqué tout à l'heure, lors de notre entretien. Cela a permis l'exportation par ce moyen de deux millions de tonnes qui viennent en complément des 10 millions de tonnes qui ont déjà pu être exportées par les voies terrestres, ferroviaires, fluviales, via les corridors de solidarité de l'Union européenne. Nous devons améliorer ces voies pour terminer cette opération d'exportation des céréales ukrainiennes avant que la prochaine récolte. Nous sommes actifs, l'un et l'autre, pour qu'une réponse rapide et solidaire et aussi multilatérale que possible soit apportée à la sécurité alimentaire. Le président de la République avait proposé l'initiative FARM reprise par l'Union européenne, reprise par le G7 qui traite le sujet autour de trois piliers : le commerce, la solidarité et l'agriculture résiliente pour une production locale plus résiliente et qui réponde aux problèmes plus structurels de la sécurité alimentaire à travers le monde, à travers les organisations internationales que sont effectivement l'OMC, le PAM et le FIDA. La Turquie est sensible à cette problématique et travaille également comme nous avec le secteur privé parce qu'il faut également s'appuyer sur les forces du privé pour relever ensemble ce défi stratégique.
Nous avons parlé aussi des questions stratégiques. Le ministre a fait un compte rendu très complet. J'ai bien sûr interrogé mon homologue sur les dernières tensions apparues en Méditerranée orientale et en mer Egée et sur quelques déclarations qui nous inquiètent parce que je ne cacherai pas que la France est préoccupée des récentes évolutions dans la région. Nous souhaitons que les différents pays concernés s'entendent. Nous avons des liens particuliers bien sûr, en tant qu'État membre de l'Union européenne avec cet autre État de l'Union européenne qu'est la Grèce, mais nous souhaitons surtout qu'entre deux voisins et deux alliés comme la Turquie et la Grèce le sont, d'éventuels différends, s'il en existe soient réglés évidemment par la voie du dialogue et par la négociation sur la base des normes du droit international. Et donc il serait plus que souhaitable, comme je l'ai dit à Mevlüt, que toute escalade verbale et toute provocation soit évitée de façon à ce que l'apaisement vienne et que le dialogue puisse reprendre.
Nous nous sommes entretenus de la Syrie qui est un pays qui continue hélas à avoir des perspectives politiques et humanitaires préoccupantes. Nous devons continuer à approfondir nos échanges à ce sujet et nous le ferons dans le dîner de travail qui suit. Je me suis permise, comme je le fais à chaque fois, de rappeler l'importance d'éviter toute initiative qui serait déstabilisante. Nous comprenons les préoccupations de sécurité de la Turquie mais une action qui serait excessive rendrait plus difficile encore la stabilisation du pays ce qui sera dans l'intérêt de personne. Nous nous sommes également entretenus et nous continuerons de le faire de quelques situations régionales. Le ministre a cité le Caucase et j'ai salué positivement les gestes, le nouveau climat que nous voyons dans la région et, en particulier, la reprise du dialogue en cours, d'une certaine normalisation des relations entre la Turquie et l'Arménie, c'est une bonne chose.
Nous avons brièvement évoqué les relations entre la Turquie et l'Union européenne, qui sont liées aux droits de l'Homme, à l'État de droit.
L'Irak, nous en reparlerons.
Nous poursuivrons également nos échanges sur la ratification du protocole d'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN. J'ai informé le Ministre que pour sa part la France avait achevé ce processus avant la pause estivale, comme on dit, et j'ai souligné que ces adhésions renforceraient l'alliance. Elles sont évidemment de notre intérêt.
Nous avons également parlé du développement de nos relations bilatérales. Il y a beaucoup de terrains d'entente et nous souhaitons les développer. Je redis ma disponibilité à travailler pour que nos points d'accord augmentent. Et le ministre me trouvera toujours à ses côtés pour cela. Nous aurons prochainement une session du dialogue économique de haut niveau. Nos relations économiques sont fortes comme le ministre le disait. On peut encore certainement progresser et je suis convaincue du potentiel d'excellence de nos relations dans le domaine économique et commercial. Enfin, j'ai remis au ministre une lettre du Président de la République qui traite non pas de tous ces sujets mais très largement de nombre d'entre eux et qui ouvre des perspectives pour nos relations bilatérales dont nous avons parlé.
Voilà je termine ici, à nouveau pour remercier le Ministre de son accueil et de la qualité du dialogue que nous avons toujours très direct, amical et qui nous a permis jusqu'ici d'avoir, je crois, de très bonnes relations personnelles, ce dont je me réjouis.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 septembre 2022