Interview de M. Olivier Véran, ministre délégué, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement, à CNews le 28 septembre 2022, sur la participation de députés du Rassemblement national à un match caritatif, la réforme des retraites, la sobriété énergétique, les violences faites aux femmes et l'évolution éventuelle de la législation sur la fin de vie.

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Média : CNews

Texte intégral

LAURENCE FERRARI
Bonjour Olivier VÉRAN, bienvenue sur La Matinale de Cnews.

OLIVIER VÉRAN
Bonjour Laurence FERRARI.

LAURENCE FERRARI
On va parler avec vous dans un instant de la réforme des retraites, du budget, du Covid évidemment, et de votre livre "Par-delà les vagues", le récit que vous publiez chez Robert LAFFONT. Mais d'abord, une question à propos d'un match de football, qui doit avoir lieu ce soir à Paris. La patronne des députés Renaissance, Aurore BERGE, demande aux députés de ne pas participer à ce match caritatif, parce que tout simplement, il y a des députés Rassemblement national qui vont jouer face à une sélection d'anciens sportifs et d'humoristes. Elle dit : nous ne jouons pas dans la même équipe, ni extrême droite ni extrême gauche, est-ce que vous auriez joué ce match, Olivier VÉRAN ?

OLIVIER VÉRAN
J'ai joué avec l'Équipe de France des députés à une certaine époque, d'ailleurs, on prenait des grosses tannées contre le Variétés Football Club de France…

LAURENCE FERRARI
Il y avait des députés Rassemblement national ?

OLIVIER VÉRAN
Non, il n'y en avait pas. Et je pense que si j'étais membre de l'équipe, pour être tout à fait franc avec vous, cette année, je n'irais pas jouer ce soir, pourquoi, parce que c'est un événement festif, sportif, caritatif…

LAURENCE FERRARI
Justement…

OLIVIER VÉRAN
Il ne faut pas qu'il y ait des histoires autour de ça. Et puis, je comprends la volonté de clarifier une ligne, c'est-à-dire que quand on dit qu'on ne peut pas travailler avec certaines forces politiques, c'est compliqué une fois qu'on a quitté le costume et qu'on enfile la tenue de footballeur d'aller faire comme si on était capable de tout faire ensemble. Je sais que c'est du sport, et je sais que…

LAURENCE FERRARI
Mais et que c'est pour un événement caritatif…

OLIVIER VÉRAN
J'ai conscience de ça…

LAURENCE FERRARI
L'association e-Enfance, au profit de harcèlement en ligne…

OLIVIER VÉRAN
Je vous donne mon opinion personnelle, je ne demande à personne de faire le même choix que moi, et de la même manière que j'avais refusé l'invitation de la LFI de participer à leur université d'été, parce que je trouvais que ce n'était pas conforme aux discours que je portais par ailleurs, de la même manière, je ne serais pas allé jouer ce soir. Mais je n'en veux à personne si des gens vont y jouer.

LAURENCE FERRARI
Mais, c'est un parti qui a accédé à plusieurs reprises au second tour d'élections présidentielles, qui a 89 députés à l'Assemblée nationale, et on continue à les traiter comme des pestiférés.

OLIVIER VÉRAN
Ils ont vocation à siéger à l'Assemblée nationale, ils ont d'ailleurs des postes à responsabilité, et le fonctionnement des institutions est respecté, et le fonctionnement des règles démocratique est évidemment respecté, et il le sera en toute occasion. Ça ne veut pas dire qu'on est copain. Et ça ne veut pas dire qu'on a des points de convergence. Et ça ne veut pas dire qu'on doit leur servir d'une manière ou d'une autre de marchepied, et ça ne veut pas dire qu'on doit participer à leur volonté de se normaliser. L'extrême droite, ça reste l'extrême droite dans notre pays, et elle peut accéder au pouvoir, on le voit en Italie, on le voit en Suède, et, moi je ne veux porter, ni d'une manière ni d'une autre, une forme de responsabilité dans la normalisation des députés du RN.

LAURENCE FERRARI
Marine LE PEN parle d'un concours de ridicules, en réalité, dit-elle, c'est la haine tout le temps, ils n'admettent pas que nous ayons des députés…

OLIVIER VÉRAN
Mais ça l'arrange. Non, mais le problème, c'est que ça l'arrange…

LAURENCE FERRARI
Pourquoi ça l'arrange ?

OLIVIER VÉRAN
C'est toute l'ambivalence, en vous disant que je n'irai pas jouer, je fais monter..., j'ai bien conscience que je participe au phénomène qui consiste à faire monter le sentiment qu'ils sont ostracisés, qu'ils sont victimes du système, etc., j'ai bien conscience de ça, c'est pour ça que je vous réponds vraiment en mon âme et conscience, ça ne m'intéresse pas d'aller checker des députés du Rassemblement national avec les idées qui sont les leurs et qu'ils portent. Mais c'est mon opinion personnelle, et surtout, je ne veux pas en faire tout un foin.

LAURENCE FERRARI
Est-ce que les députés Renaissance vont faire peut-être un don à l'association caritative pour laquelle ils ne feront pas ce match ?

OLIVIER VÉRAN
Oui, et puis, il y a d'autres événements liés au football…

LAURENCE FERRARI
Mais ils le feront, ils feront un don ? Vous leur demandez ?

OLIVIER VÉRAN
Je ne sais pas s'ils le feront, je leur poserai la question.

LAURENCE FERRARI
Bon, très bien. La réforme des retraites…

OLIVIER VÉRAN
Je ne suis pas leur porte-parole…

LAURENCE FERRARI
Bien entendu. Mais vous êtes quand même le porte-parole du gouvernement. La réforme des retraites, ira, ira pas, le gouvernement attend la décision du président de la République, quand est-ce que la fumée blanche va sortir de l'Élysée ?

OLIVIER VÉRAN
Eh bien, j'ai envie de vous dire, on parle beaucoup de la forme, mais quelle que soit la forme, le fond restera le même, qu'on fasse la réforme dans 1 mois, qu'on la fasse dans 3 mois ou qu'on la fasse dans 6 mois, 1°) : vous connaissez notre volonté, elle a été rappelée par le président de la République pendant la campagne présidentielle, il n'a pas caché les choses, application été 2023, on augmente l'âge, pourquoi, parce que notre système est déséquilibré, ce n'est pas une paille, 17 milliards de déficit avant la fin de la décennie, ça veut dire que vous avez trois options, ou vous augmentez les impôts, ou vous augmentez la dette ou vous augmentez la durée de cotisation, nous, on veut augmenter la durée de cotisations, et nos opposants, ils ont le droit, mais nos opposants politiques, qui veulent ou augmenter les impôts ou augmenter la dette, ils ne changeront pas d'avis ni dans 1 mois ni dans 3 mois. Donc moi, ce qui m'intéresse, c'est le fond.

LAURENCE FERRARI
Donc dans 1 mois, dans 3 mois, ça veut dire que vous vous apprêtez à reculer, et attendre le mois de janvier, on est d'accord ?

OLIVIER VÉRAN
Ah, pas forcément, moi, je vous dis, je suis très à l'aise avec le fait qu'on aborde ce débat-là, parce que les choses sont sur la table, on veut augmenter la retraite minimale à 1.100 euros, on veut supprimer des régimes spéciaux pour plus de justice, on veut simplifier notre système, et on veut faire en sorte de commencer à se rapprocher, commencer à se rapprocher de la moyenne européenne, la France fait partie des trois pays où l'âge de la retraite est à 62 ans, mais tous nos voisins sont à 65, 66, 67 ans, nous n'irons même pas jusque-là…

LAURENCE FERRARI
Mais pourquoi attendre dans ces cas-là, pourquoi attendre, le président, soi-disant, est aujourd'hui prêt au compromis, donc attendre encore, ça fait des années qu'on consulte sur les retraites, monsieur DELEVOYE, je crois, était un peu chargé de ça, ça fait des années qu'on consulte sur les retraites…

OLIVIER VÉRAN
Mais j'ai parfaitement conscience que…

LAURENCE FERRARI
Est-ce qu'il n'est pas temps d'agir ?

OLIVIER VÉRAN
J'ai parfaitement conscience que nos opposants politiques qui aujourd'hui préfèrent augmenter les impôts préféreront toujours augmenter les impôts dans 1 an ou dans 3 mois. Et quand on veut tuer son chien…

LAURENCE FERRARI
Je vous parle du gouvernement…

OLIVIER VÉRAN
On dit qu'il a la rage. Non, mais…

LAURENCE FERRARI
Je vous parle du gouvernement, quand est-ce que vous y allez ?

OLIVIER VÉRAN
Mais je vous dis que les choses ne sont pas arbitrées, donc vous le savez, il y aura une réunion ce soir avec le président de la République...

LAURENCE FERRARI
Ça fait des mois que ce n'est pas arbitré…

OLIVIER VÉRAN
D'ici la fin de la semaine, il y aura peut-être des informations supplémentaires. Ce que je veux vous dire, c'est que la forme n'impactera pas le fond, et que on y aille dans 1 mois ou dans 3 mois, cette réforme, elle est nécessaire, et encore une fois, nous l'avons portée pendant la campagne.

LAURENCE FERRARI
Vous irez comment, parce que la forme, ça a quand même une importance, un amendement au projet de loi de finances de Sécurité sociale ?

OLIVIER VÉRAN
J'étais rapporteur du projet de loi de financement de la Sécurité sociale comme député pendant plusieurs années, j'en étais le rapporteur général, et j'étais rapporteur... ministre en charge du PLFSS et ministre en charge de la réforme des retraites dans le précédent quinquennat, c'est pareil, voilà, la forme est pareil, que vous mettiez par amendement dans le PLFSS ou par un projet de loi ad hoc, vous aurez la même rédaction du même texte…

LAURENCE FERRARI
Oui, mais enfin, il y a une forme qui ne convient pas à François BAYROU, l'amendement…

OLIVIER VÉRAN
Devant le même Parlement qui donnera lieu aux mêmes débats. Il faut vraiment que chacun ait conscience de cela…

LAURENCE FERRARI
D'accord, mais ça ne correspond pas à votre allié, François BAYROU, l'amendement.

OLIVIER VÉRAN
Mais François BAYROU…

LAURENCE FERRARI
On est d'accord, il a dit : je ne voterai pas…

OLIVIER VÉRAN
Il souhaite avoir du temps, et etc. Moi, je dis juste, si on me démontrait qu'en gagnant du temps et en prenant 2 mois de plus, le Parti socialiste qui vous dit aujourd'hui, alors qu'ils avaient voté la réforme Touraine, vu que c'est eux qui l'ont portée…

LAURENCE FERRARI
Oui, ils ne voteront pas…

OLIVIER VÉRAN
Qui vous dit aujourd'hui, eh bien, non, il faut baisser l'âge de la retraite et il faut l'amener vers 60 ans, dans le cadre de la Nupes, ils ne changeront pas d'avis. Laurence FERRARI, est-ce qu'il y a une chance qu'il change d'avis ?

LAURENCE FERRARI
Non.

OLIVIER VÉRAN
Bon, donc, voilà…

LAURENCE FERRARI
Donc pourquoi attendre ?

OLIVIER VÉRAN
Mais je ne vous dis pas qu'on va attendre…

LAURENCE FERRARI
Je reviens à ma question de base, pourquoi attendre…

OLIVIER VÉRAN
Je vous dis qu'on est en train de vérifier que les conditions d'un débat apaisé sont posées. La Première ministre a pris le temps de consulter chaque groupe politique, chaque responsable syndical dans ce pays. Élisabeth BORNE rend compte de cela au président de la République, les discussions sont en cours, et on verra.

LAURENCE FERRARI
Il y a une première manifestation qui aura lieu jeudi à propos des retraites et des salaires, est-ce que les prévisions du renseignement territorial, entre 68.000 et 75.000 manifestants prévus, ça vous rassure, du coup, vous vous dites : on peut y aller un peu plus vite que prévu ?

OLIVIER VÉRAN
Non, je ne pense pas que ça impacte les choses, d'abord, parce que, en général, quand il y a une réaction à un texte de loi, c'est quand le texte de loi commence à être examiné, et que les choses arrivent, là, on est dans... il y a une volonté d'anticiper une espèce de rentrée sociale forte, mais je crois que les Français, au fond, ils sont aujourd'hui très préoccupés par d'autres paramètres, en fait, c'est-à-dire qu'on parle beaucoup nous-mêmes de la retraite, mais que les Français, ils parlent, je pense, peut-être que je me trompe, je ne veux pas parler en leur nom, mais ils sont plutôt dans l'insécurité énergétique, ils sont plutôt inquiets de ce qui se passe avec la Russie…

LAURENCE FERRARI
Dans l'insécurité tout court…

OLIVIER VÉRAN
Effectivement, il y a ces faits divers marquants dans les communes de France dont ils parlent également, il y a le pouvoir d'achat qui compte énormément pour eux, donc, voilà, je crois que nous-mêmes avons tendance à beaucoup focaliser sur une réforme, mais je vous le dis, parce que je vais beaucoup... j'irai dans la Sarthe en sortant de votre plateau, j'irai rencontrer des Français, des salariés, j'irai parler de l'emploi des seniors, peut-être qu'on me parlera de la réforme des retraites, mais je ne serai pas surpris que ça ne soit pas le cas…

LAURENCE FERRARI
Mais peut-être pas, peut-être plus de la facture d'électricité.

OLIVIER VÉRAN
Peut-être plus.

LAURENCE FERRARI
Tiens d'ailleurs, en passant par-là, l'État doit se montrer plus vertueux, pas de clim à fond, pas de moteur qui tourne à vide pour vos voitures. Pas de chauffage trop fort…

OLIVIER VÉRAN
La clim à fond, c'est…

LAURENCE FERRARI
Oui, ce n'est plus le moment. Mais Bruno LE MAIRE a annoncé qu'il mettrait plus de cols roulés, est-ce que vous avez prévu les pantalons fourrés ?

OLIVIER VÉRAN
Bon, d'abord, quand on dit qu'il faut faire un effort de sobriété énergétique, ça ne veut pas dire que la France n'a plus d'énergie, et ça ne veut pas dire qu'on doit vivre dans des igloos ou considérer qu'on aurait fait un bond en arrière de 50 ans, d'accord, ce n'est pas du tout ça, ce qu'on demande aux Français, et d'ailleurs, on leur donnera, c'est la Première ministre qui est en charge de cela, cette feuille de route, une liste de petits gestes qu'ils peuvent, s'ils le souhaitent, et ce serait bien, ils pourraient faire attention, qui réduiraient de l'ordre de 10 % leur facture d'énergie déjà et qui réduiraient la consommation énergétique, ce qui est bon pour l'hiver, et ce qui est surtout bon pour la planète à long terme, vous verrez, ce n'est pas les choses qui font que... on ne va pas vous demander de vivre dans le froid…

LAURENCE FERRARI
Donc c'est un gadget, les cols roulés de Bruno LE MAIRE ?

OLIVIER VÉRAN
Non, non, ce n'est pas du tout ce que je dis, moi, j'ai même porté un col roulé…

LAURENCE FERRARI
Si, c'est ce que vous dites…

OLIVIER VÉRAN
Non, non, j'ai porté un col roulé toute la journée hier, parce que je suis dans un vieux bâtiment ministériel qui n'était pas encore chauffé, et donc il faisait 16, et ce que j'ai dit, c'est qu'on n'a pas vocation à vivre dans une pièce à 16 degrés, je veux dire, quand on dit 19, ce n'est pas... bref, peu importe, ce que je veux vous dire, c'est qu'il ne faut pas... il faut vraiment que chacun intègre qu'on n'est pas dans un retour en arrière, qu'on va pouvoir se chauffer, qu'on va pouvoir vivre le plus normalement possible, et qu'il y a des petits gestes qui suffisent pour qu'on arrive à vivre mieux et être économe pour la planète.

LAURENCE FERRARI
Alors un mot du Covid, on l'a appris, 4.300 lits supprimés en 2021 à l'hôpital, selon le ministère de la Santé, notamment en raison d'un manque de personnels…

OLIVIER VÉRAN
Ce n'est pas des lits supprimés…

LAURENCE FERRARI
En tout cas, il y en a 2.700 qui sont créés en hospitalisation partielle, mais il y en a quand même 4.300 supprimés, c'est ce que dit…

OLIVIER VÉRAN
Voilà, il y a 2.700 lits d'hôpitaux de jour et d'hôpitaux de semaine…

LAURENCE FERRARI
Créés…

OLIVIER VÉRAN
Je vous donne un exemple, quand j'étais neurologue à l'hôpital de Grenoble, j'ai fermé 18 lits pour ouvrir un hôpital de jour, qui a permis de prendre soin de beaucoup plus de malades et sur des périodes plus courtes, je veux dire, un patient qui avait une sclérose en plaques, qui venait parce qu'il était en poussée de sa maladie, on allait le garder 3 jours, 3 nuits à l'hôpital pour lui faire une perfusion, aujourd'hui, il peut venir trois fois une heure, et il peut retourner chez lui. Donc ça, c'est une première transformation, et ensuite, ce n'est pas des lits supprimés, il n'y a pas de volonté budgétaire de fermer des lits…

LAURENCE FERRARI
C'est comme ça que le dit le ministère de la santé…

OLIVIER VÉRAN
Oui, mais en fait, je vous explique ce que c'est, mais, vous voyez bien ce que c'est, c'est que parfois, vous manquez de personnels, parce qu'il y a la fatigue, l'usure liées au Covid, vous n'avez plus suffisamment d'infirmières ou de médecins, et donc, ce sont des fermetures temporaires qui peuvent arriver, et ensuite, ces lits sont rouverts, vraiment, il faut faire la part des choses, parce que le budget des hôpitaux, et dans le budget de la Sécurité sociale, qui est présenté au Parlement dans quelques jours, vous avez une augmentation massive du budget des hôpitaux, plus de 4 % d'augmentation, c'est-à-dire qu'on met vraiment l'accent sur les dépenses de santé, la lutte contre les déserts médicaux, et pour l'hôpital, on met aussi beaucoup sur la sécurité, je vais quand même vous faire un peu l'article sur le budget, la sécurité, la justice, l'armée…

LAURENCE FERRARI
Évidemment, l'embauche de fonctionnaires pour la police…

OLIVIER VÉRAN
3.000 policiers en plus en 2023, cherchez dans vos archives, ça n'arrive pas souvent.

LAURENCE FERRARI
Le Covid, on est face à une nouvelle vague qui va arriver dans les prochaines semaines ou qui est déjà là ?

OLIVIER VÉRAN
Oui…

LAURENCE FERRARI
On y est, on y est déjà ?

OLIVIER VÉRAN
Oui, on a pris l'habitude de cela, on sait faire. Quand on sait que le Covid augmente, qu'il circule davantage, on fait attention, on évite... on essaie d'avoir un peu de distanciation physique, on fait surtout gaffe quand on est malade, on n'hésite pas à se tester, les tests sont toujours pris en charge, et quand on est malade, on prévient les autres, on s'isole. Et quand on est fragile, on n'hésite pas à se vacciner, il y a, à partir du 3 octobre, une vaccination des plus fragiles qui peut être proposée.

LAURENCE FERRARI
Dans votre livre "Par-delà les vagues", c'est un récit, donc chez Robert LAFFONT, vous dites que nous nous sommes trompés, tout bonnement, notamment sur les masques, vous présentez des excuses aux Français, vraiment, vous présentez des excuses aux Français sur les masques…

OLIVIER VÉRAN
Non, mais, je dis, je me suis beaucoup exprimé là-dessus, mais je dis que de fait, on a suivi les recommandations scientifiques, nationales, internationales, elles n'étaient pas bonnes, et donc gouverner, c'est choisir, et donc quand on choisit de suivre des recommandations, et qu'elles ne sont pas bonnes, eh bien, on explique qu'on s'est trompé, et ça me paraît être un exercice démocratique assez sain. J'ai reçu beaucoup, beaucoup, beaucoup de messages de gens qui l'ont lu et qui m'ont dit qu'ils étaient surpris par la nature de l'exercice…

LAURENCE FERRARI
Oui, parce que c'est une introspection, est-ce que c'est le bon moment pour une introspection en plein cœur de toutes les crises en fait ?

OLIVIER VÉRAN
Eh bien, en fait, ça n'a pas vocation à remplacer la préoccupation des Français, je vous rassure, je suis quand même conscient que ce n'est pas le fait divers le plus marquant de la planète, mais, je suis ministre du Renouveau démocratique, je crois à la transparence et je me désole un peu qu'un certain nombre de nos compatriotes, dès qu'on enfile une écharpe tricolore ou un costume de ministre, considèrent qu'on ne serait plus les mêmes, en fait, moi, je suis un père de famille, médecin hospitalier, qui suis très content de servir mon pays, de différentes manières, et donc je partage avec ceux que ça intéresse la façon dont les choses se déroulent, j'ouvre l'accès aux coulisses pour que chacun puisse comprendre aussi des décisions qui ont été impactantes pour eux pendant deux ans.

LAURENCE FERRARI
Et vous êtes un père de famille attentif aux violences faites aux femmes, je l'imagine, après les affaires QUATENNENS et BAYOU, Eric DUPOND-MORETTI a poussé un coup de gueule, disant et dénonçant une justice de droit privé, c'est-à-dire qu'on ne passe plus par la justice, on n'attend même pas que la justice soit saisie, pour livrer comme ça des noms en pâture, celui de Julien BAYOU en l'occurrence, celui d'Adrien QUATENNENS, c'est différent, parce qu'il y avait une main courante. Vous aussi, vous trouvez que ces comités internes, qui existent chez les Verts, à La France Insoumise, c'est une façon de détourner les plaignantes de la justice ?

OLIVIER VÉRAN
Eh bien, quand j'étais médecin hospitalier, et que je faisais des gardes aux urgences, j'accompagnais des femmes victimes de violences vers un dispositif de plaintes, il ne me serait pas venu à l'idée de les accompagner vers un dispositif de signalement interne à leur entreprise ou à leur parti politique. Donc moi, je crois aux dispositifs de droit commun, je crois qu'il est fondamental que la parole des femmes continue de se libérer davantage encore, il y a encore... vous savez, on parle des femmes qui portent plainte et qui font état de violences, mais il ne faut pas qu'on oublie toutes celles qui n'osent pas le faire ou qui ne peuvent pas le faire, et moi, je suis très heureux quand j'étais à la santé d'avoir multiplié le financement des centres de prise en charge des violences faites aux femmes, il y aura un centre à Grenoble qui sera inauguré au mois de novembre, il en faut davantage, il faut que cette parole se libère, et je n'ai aucune forme de sympathie pour des gens qui avouent avoir violenté leur femme, je ne pense pas du tout que ce soit un acte héroïque, j'ai été très choqué par la réaction de Jean-Luc MÉLENCHON, mais vraiment très choqué, parce que le message qui est envoyé…

LAURENCE FERRARI
Soutenant Adrien QUATENNENS…

OLIVIER VÉRAN
Pardon, mais c'est une gifle symbolique que de soutenir une personne qui avoue, eh bien, oui, il a avoué, donc, il va rendre compte. D'ailleurs, je n'ai pas entendu dans le discours de QUATENNENS un appel à recevoir des fleurs ou des lauriers, il reconnaît avoir été auteur de violences, quel qu'en soit le contexte, il devra en rendre compte, voilà. Et je dirais c'est davantage du pénal et du légal que du sociétal ou du politique.

LAURENCE FERRARI
J'aimerais qu'on garde encore un instant pour parler de la fin de vie, le président de la République a rencontré hier les évêques, qui étaient inquiets quant à une possible l'évolution de la législation sur la fin de vie, on sait que le Comité consultatif national d'éthique a ouvert la voie à une légalisation de l'aide à mourir active, Emmanuel MACRON a lancé une grande convention citoyenne sur la fin de vie, on a l'impression que, pareil, on va prendre beaucoup de temps pour arriver à une décision qui, certes, est compliquée et relève de l'intime.

OLIVIER VÉRAN
Oui, il nous faut le courage de la nuance, je veux dire, personne ne détient la morale, aucun pays n'est en avance, et ce n'est pas une grande conquête sociale ou sociétale dont on est en train de parler, ça touche à l'intime, ça touche à la souffrance, à la douleur, à des solutions inextricables qui mettent les gens dans une profonde détresse. Et vous avez des gens qui se débattent dans les hôpitaux, des équipes de soins palliatifs, etc., et puis, vous avez aussi des Français qui veulent choisir le moment et les voies de l'accompagnement dans la mort, lorsqu'ils estiment qu'il n'y a plus d'alternative…

LAURENCE FERRARI
Et la loi Claeys-Léonetti ne suffit pas aux médecins ?

OLIVIER VÉRAN
Eh bien, la loi Claeys-Léonetti permet aujourd'hui une sédation profonde terminale, c'est-à-dire, vous mettez quelqu'un dans le coma profond, et jusqu'à ce que mort s'ensuive dans certaines situations…

LAURENCE FERRARI
Et ça, c'est sur les phases terminales…

OLIVIER VÉRAN
C'est une réponse. Certains Français estiment, il y a des Français qui estiment que dans cette situation, ils préféreraient bénéficier d'une aide active à mourir, moi, je me garde d'exprimer une opinion.

LAURENCE FERRARI
Vous y êtes favorable ?

OLIVIER VÉRAN
Mais je n'exprimerai pas d'opinion, parce que…

LAURENCE FERRARI
A titre personnel, Emmanuel MACRON y est favorable, à titre personnel…

OLIVIER VÉRAN
Mais je veux être le garant des conditions d'impartialité de la consultation citoyenne qui s'ouvre, et travailler avec des collègues ministres, je travaille aussi avec Agnès FIRMIN Le BODO, qui est ministre déléguée à la Santé, pour que nous puissions, je dirais, poser les termes d'un débat sociétal apaisé, et qui puisse aboutir probablement peut-être vers une loi…

LAURENCE FERRARI
En 2023…

OLIVIER VÉRAN
Qui s'étendrait à l'aide active à mourir. Et se donner honnêtement 6 mois pour une convention citoyenne, ce n'est pas du luxe, ça prend du temps, et c'est un bel exercice démocratique.

LAURENCE FERRARI
Merci beaucoup Olivier VÉRAN d'être venu ce matin dans La Matinale de CNews pour évoquer tous ces sujets d'actualité.

OLIVIER VÉRAN
Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 30 septembre 2022