Texte intégral
ALIX BOUILHAGUET
Franck RIESTER, bonjour.
FRANCK RIESTER
Bonjour.
ALIX BOUILHAGUET
Je vous remercie beaucoup d'être avec nous ce matin, c'est un peu votre journée, comme prévu le 49.3 a été actionné hier pour faire passer la première partie du projet de loi de finances 2023, à quoi ça a servi de faire travailler les oppositions pendant six jours pour un scénario écrit d'avance ?
FRANCK RIESTER
Non, le scénario n'était pas écrit d'avance, ce qui était écrit d’avance c’était que les oppositions allaient voter contre le texte et pour autant on a voulu qu’il y ait du débat, que chacun puisse s'exprimer, qu'il puisse y avoir des amendements proposés, votés, et ensuite il faut bien donner au pays un budget, et donc il faut bien voter la partie recettes, vous l'avez évoqué, qui est la première partie de ce budget, donc le gouvernement, la Première ministre, a pris ses responsabilités après une semaine, sept jours, presque huit, de débats, très riches, 55 heures de débats, il n’y en avait eu que 37 l’an dernier pour la même partie du budget, le gouvernement a déposé, enfin a voté d'une certaine façon, par le 49.3, a utilisé cet outil prévu, par la Constitution, pour permettre d'adopter un texte faute de vote majoritaire à l'Assemblée nationale.
ALIX BOUILHAGUET
On vous entend, vous vous l'avez dit il y a des amendements qui ont été déposés, il y en a en tout 3400, à l’arrivée seuls 117 vont être intégrés au texte final, j’ai fait le décompte, il y a un amendement écolo, un communiste, trois socialistes, trois Républicains, ça fait huit amendements seulement sur 117, pour l’opposition, ce n’est pas lourd quand même pour l’opposition.
FRANCK RIESTER
Oui, enfin c’est… d’abord le pourcentage d’amendements n’est pas vraiment un indicateur, après c’est quel type d’amendement. Quand on voit par exemple l’amendement qui permet d’intégrer la demi-part des veuves, d’un point de vue fiscal, d’anciens combattants…
ALIX BOUILHAGUET
Ça c’est les communistes qui l’ont proposé.
FRANCK RIESTER
Oui, alors les communistes l’ont soutenu, mais ce sont les LR qui l’ont proposé, l’augmentation par exemple du prix du « Ticket Restaurant », proposé aussi par…
ALIX BOUILHAGUET
J’ai vu aussi la baisse de la TVA sur les masques, la légalisation de l’huile de friture comme carburant…
FRANCK RIESTER
Ce sont les socialistes qui ont proposé le maintien…
ALIX BOUILHAGUET
Ça c’est les écologistes.
FRANCK RIESTER
Oui, eh bien nous avons repris ces amendements-là.
ALIX BOUILHAGUET
Mais est-ce que ce n’est pas un petit peu, effectivement ce n’est pas négligeable, mais est-ce que ce n’est pas un peu anecdotique par rapport à l’ensemble du projet quand même ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez, ils sont dans l’opposition, nous sommes la majorité, relative, mais nous sommes la majorité, et c’est normal que nous prenions davantage d’amendements qui viennent des rangs de la majorité, mais ce qu’il faut voir c’est le budget dans son ensemble, c’est un budget important, c’est un budget qui protège les Français, notamment face à l’explosion du coût de l’énergie avec ce bouclier tarifaire, c’est un texte qui prépare l’avenir, sur la santé, sur l’éducation, avec l’augmentation des fonctionnaires dans l’Education nationale, et les enseignants notamment, nous voyons bien que c’est un texte important, et nous avons pris le temps du débat, que les oppositions s’expriment, et on a pris en compte une partie de ce travail-là, de ces propositions-là…
ALIX BOUILHAGUET
Une partie, je le répète, huit amendements…
FRANCK RIESTER
Oui, mais ils sont dans l’opposition…
ALIX BOUILHAGUET
Pour l’opposition.
FRANCK RIESTER
Et nous sommes la majorité, et donc nous avons…
ALIX BOUILHAGUET
Et en revanche…
FRANCK RIESTER
Et ce qui est important de dire c’est que, moi je crois beaucoup en notre travail parlementaire, je suis député depuis 2007, je sais l’importance du travail parlementaire, et le travail parlementaire ce n’est pas simplement des amendements, c’est aussi la façon dont on s’exprime, dont on critique les textes, dont on porte, peut-être, des alternances à ce qu’on propose. Le hic, là dans ce qui se passe au Parlement, c’est qu’il n’y a pas de majorité alternative, c’est finalement la coalition des oppositions et des contraires, alors ils se rassemblent parfois pour nous faire faire battre, pour s’opposer, mais jamais pour proposer, et c’est la raison pour laquelle, à un moment donné, avec ce blocage de l’absence de vote, parce que même avec les amendements repris ils nous avaient dit qu’ils voteraient contre le texte, eh bien nous avons assumé nos responsabilité, nous avons donné la possibilité à la France d’avoir un budget.
ALIX BOUILHAGUET
Un mot encore sur ces amendements, il n’y a aucun qui provienne de la France insoumise ou du Rassemblement national, il n’y avait vraiment rien à reprendre chez eux…
FRANCK RIESTER
Il y a des amendements qu’ils ont votés…
ALIX BOUILHAGUET
Ou est-ce que c’est politique, ou est-ce que, comme l’a dit Emmanuel MACRON, ni le Rassemblement national, ni la France insoumise, ne sont dans l’arc républicain ?
FRANCK RIESTER
Oui, nous avons très clairement dit que nous respections les députés de la France insoumise et du Rassemblement national, parce que c’est respecter leurs électeurs, et moi je discute avec bien évidemment les présidents de groupe, avec les députés, pour l’organisation des travaux, mais qu’il n’y aurait pas d’accords politiques avec eux d’une façon très claire, en revanche…
ALIX BOUILHAGUET
Donc même s’il y avait eu des amendements intelligents, ou qui allaient dans votre sens, par principe vous ne prendrez jamais des amendements provenant de la France insoumise ou du Rassemblement national ?
FRANCK RIESTER
S’il y a des amendements qui vont dans notre sens souvent c’est déposé aussi par d’autres groupes, et c’est ce que je voulais vous dire, c’est qu’il y a des amendements qui ont été repris, qui ont été proposés par d’autres groupes, et qui ont parfois été soutenus, ou votés, par les LR, le Rassemblement, ou la France Insoumise, et donc – ou le Rassemblement national et la France insoumise, pardon – et donc vous voyez bien qu’à un moment donné on ne regarde pas tous les votes, ce qu’on ne veut pas c’est faire des accords politiques avec le Rassemblement national et la France insoumise, par contre on peut reprendre des amendements proposés par des groupes d’opposition et votés par la France insoumise ou le Rassemblement national.
ALIX BOUILHAGUET
En revanche la taxation des super-dividendes des entreprises, elle n’a pas été conservée. Alors c'est vrai que cet amendement il avait été déposé par votre allié le MoDem, pourquoi ne pas l'avoir retenu parce que c'est vrai que ça aurait été un signal fort. On voit justement que cet amendement, il a été voté par le RN, la Nupes et 19 députés Renaissance dont le propre suppléant d'Elisabeth BORNE.
FRANCK RIESTER
Vous savez les choix finaux qu’ont fait notamment Bruno LE MAIRE, Gabriel ATTAL en lien avec la Première ministre et les groupes, ça ne s’est pas fait au doigt mouillé, ça s'est fait en fonction d'un certain nombre de principes. Et notamment deux principes essentiels, un, pas d'augmentation de la fiscalité voire baisse de la fiscalité. Je rappelle que dans ce texte on baisse la fiscalité des entreprises et on baisse la fiscalité les particuliers avec l'indexation du barème sur l'impôt sur le revenu. Et puis deuxièmement, l'équilibre financier, on veut préserver nos équilibres financiers et donc on ne veut pas de dépenses folles qui nous feraient dériver notre déficit. Et donc en l'occurrence cette proposition de taxer les supers dividendes ne rentre pas du tout dans la ligne que nous tenons depuis 2017, voulue par le président de la République, de baisser la fiscalité dans ce pays, pourquoi ?
ALIX BOUILHAGUET
Bruno LE MAIRE, il en avait fait un casus belli.
FRANCK RIESTER
Oui parce que…
ALIX BOUILHAGUET
C’était lui ou sa démission.
FRANCK RIESTER
Il faut comprendre que c'est le coeur de notre stratégie économique en terme d'économies, en termes de travail, en termes d'emplois, c'est ce qui fait les résultats de l'économie française, c'est de faire en sorte d'améliorer la compétitivité du pays et des entreprises et pour ça il faut continuer de baisser la fiscalité des entreprises, il ne faut pas en rajouter.
ALIX BOUILHAGUET
Mais est-ce que ça montre que, est-ce que les troupes sont tenues au sein de la majorité puisque chacun y compris le suppléant d’Elisabeth BORNE peut aller à l'encontre de ce que souhaite la Première ministre, c'est quand même assez cocasse ?
FRANCK RIESTER
Oui mais vous savez on nous a critiqué parfois en disant les députés de la majorité sont des Playmobil, vous vous rappelez les fameux députés Playmobil. Et puis quand il y a une diversité qui vit, on nous dit, c’est le bordel dans la majorité. Non ce n'est pas le bordel, il y a des propositions, il y en a qui in fine retenues, d'autres pas. Nous avons une stratégie économique qui paye, je le redis. On a la croissance de la zone euro la plus forte. On a l'inflation la plus faible, on a un emploi qui se porte bien avec un chômage qui est le plus faible depuis des années en France, continuons cette stratégie économique qui paye. Et c'est ce que nous faisons avec notamment cet arbitrage.
ALIX BOUILHAGUET
Deux motions de censure vont être déposées, celle de la France insoumise l’est déjà, on attend celle du RN, ce n’est pas assez pour renverser le gouvernement. Est-ce qu'on tient tout un quinquennat comme ça à coup de 49.3 ?
FRANCK RIESTER
Mais vous voyez à coups de 49.3, certains disent en passage en force.
ALIX BOUILHAGUET
Il y en aura au moins sept cet automne sur le projet de loi de finance de la Sécurité sociale, sur la deuxième partie du volet projet loi de finance.
FRANCK RIESTER
Certains nous disent c'est un passage en force. D’abord un c’est prévu par la Constitution et ça a été utilisé par de nombreux gouvernements.
ALIX BOUILHAGUET
Oui mais, moi je ne parle pas de passage en force, je dis est-ce qu’on tient tout un quinquennat comme ça ?
FRANCK RIESTER
Écoutez-moi.
ALIX BOUILHAGUET
D’autant qu’il y a des règles pour l’utiliser, que vous n’allez pas pouvoir l’utiliser autant que vous souhaitez.
FRANCK RIESTER
C’est ça mais donc quand on peut l'utiliser, on l'utilisera si nécessaire, on n'a pas envie de n'utiliser quand on peut trouver des majorités. Regardez sur le texte sur l'assurance chômage on a trouvé la majorité pour le faire, sur le texte pouvoir d'achat dès cet été, on a trouvé une majorité pour le faire. Là les oppositions ont dit avant même de discuter, on ne votera pas et quand il s'est agi de voter avec les amendements, ils ont dit, on ne votera pas quand même. Donc à un moment donné on prend nos responsabilités, on ne veut pas que le pays se retrouve sans budget comme c'est le cas par exemple aux Etats Unis. Pour autant on voit pour répondre précisément à votre question que, il n'y a pas d'alternative puisque vraisemblablement la motion de censure ne sera pas votée et ça démontre bien que finalement ce sont des parfois des coalitions d'opposition, mais pas des coalitions pour proposer une alternative et une somme d'amendements que vous avez évoquée n’a jamais fait un budget dans son ensemble. Le budget c'est nous qui le portons et c’est nous qui le votons aujourd'hui, en responsabilité, en ayant tenu compte du débat d'une semaine important encore une fois en démocratie.
ALIX BOUILHAGUET
Revenons un instant sur le meurtre de la jeune Lola, plusieurs personnalités de droite et du RN pointent la responsabilité du gouvernement, c'est le profil de la suspecte qui est de nationalité algérienne qui était certes inconnue des services de police mais sous le coup d'une obligation de quitter le territoire, est-ce que ce n’est pas quand même un élément à prendre en compte ?
FRANCK RIESTER
Ecoutez d'abord il y a le temps du silence comme disait Bruno LE MAIRE hier, je crois que c'est important d'être digne, d'être descend, de respecter le deuil de la famille. C’est un crime terrible, horrible, beaucoup de parents sont solidaires et il y a au-delà des parents ce que vit cette famille, ce que vivent les parents de la jeune Lola. Et ensuite il faut laisser le temps du travail de la police et de la Justice. Vous disiez qu'elle était sous le coup d'une OQTF, obligation de quitter le territoire.
ALIX BOUILHAGUET
Il y en a 120000 par an et seules 10 % sont effectives.
FRANCK RIESTER
Elle n’était pas connue des services, écoutez-moi…
ALIX BOUILHAGUET
Et 100 %, Emmanuel MACRON a utilisé comme 100 % l'objectif. Donc il y a un petit dysfonctionnement quand même.
FRANCK RIESTER
Oui mais elle n’était pas connu des services de police, vous l’avez rappelé, donc elle était ce qu’on appelle sous le coup d’une OQTF volontaire, c'était le 21 août, elle avait 30 jours pour quitter le territoire. Elle ne l’a pas fait elle-même, donc si elle avait été arrêtée à un moment ou un autre, elle aurait été à ce moment-là envoyée dans un centre de rétention administrative pour être ensuite renvoyée dans son pays. Mais on a des règles, on doit les respecter, on est dans un Etat de droit mais en même temps je comprends l'émotion, je la partage face à ce crime horrible. Laissons malgré tout le temps à la justice de faire son travail, de voir dans quelles conditions ça s'est passé, quels sont les raisons, est-ce qu'il y a des complicités et ensuite bien évidemment il faudra tirer les conséquences de ce drame.
ALIX BOUILHAGUET
Franck RIESTER, merci beaucoup, bonne journée à vous.
FRANCK RIESTER
Je vous remercie.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 21 octobre 2022