Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Roland LESCURE, bonjour.
ROLAND LESCURE
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes le ministre de l’Industrie, ministre délégué chargé de l’Industrie pour être plus précis. Ce grand paradoxe, et on sent bien que la France est tiraillée aujourd'hui, entre la nécessaire réindustrialisation, le fait de booster notre industrie, de dire qu’on va retrouver une forme de souveraineté industrielle, et puis les difficultés, les contraintes, et notamment l’injonction à ne pas polluer. Combien d’entreprises sont en difficulté aujourd'hui en raison à la fois des prix de l’énergie et du fait qu’on doive réduire notre utilisation d’énergie ?
ROLAND LESCURE
Alors la partie visible de l’iceberg, c'est-à-dire celle qui nous alerte, qui monte jusqu’à Bercy pour dire " j’ai des problèmes ", c’est à peu près 400 entreprises, 402 pour être précis, il y en a d’autres évidemment qui ne nous alertent pas, qui font face à des factures en forte hausse, mais qui, je dirais ne souffrent pas encore pour aller aux urgences, ça ne les empêche pas d’aller chez les médecins. Donc aujourd'hui nous on accompagne l’ensemble du secteur industriel face, vous avez raison, face à cette contradiction, historique, qu’on doit transformer en opportunité historique, on fait face à une vraie révolution industrielle. Il faut décarboner l’industrie, traditionnelle, et pour ça il faut inventer l’industrie de la décarbonation en France. On a réuni les 50 plus gros sites émetteurs à l’Elysée sous la…
APOLLINE DE MALHERBE
Les usines les plus polluantes dont les représentants ont été reçus par Emmanuel MACRON, mais un peu pour leur tirer les bretelles quand même !
ROLAND LESCURE
Non, non, mais 50 usines, 50 usines, c’est 58% des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie française, donc si on dépollue ces 50 usines…
APOLLINE DE MALHERBE
Si on fait un effort sur ces 50 là…
ROLAND LESCURE
On aurait fait 58% du boulot dans l’industrie, et l’industrie elle-même c’est à peu près 20% du total, donc c’est énorme. Donc non, ce n’est pas pour leur tirer les bretelles, c’est un peu pour leur faire un deal, donnant-donnant, vous dépolluez, on va vous accompagner, parce que ça va demander beaucoup d’argent, et en échange de ça évidemment non seulement vous allez rester en France, vous allez produire en France, vous allez vous développer en France, et on va devenir un des champions mondiaux de la décarbonation. La France c’était un champion industriel dans les années 60-70, tout ça c’est descendu quasiment aux oubliettes, ça a été divisé par deux dans les années 90 et 2000, ça fait cinq ans qu’on a commencé à redémarrer, il faut qu’on accélère.
APOLLINE DE MALHERBE
Mais on sent bien, Roland LESCURE, que sur cette question-là c’est comme l’histoire des factures d’électricité des entreprises, moi je me souviens avoir reçu Bruno LE MAIRE il y a un mois et demi, qui disait on va aider, on va aider les petites entreprises, on découvrait à quel point il était difficile pour les entreprises de renégocier leur contrat d’électricité et que le bouclier tarifaire, qui s’applique aux particuliers, ne s’appliquait pas aux entreprises, et ils ont mis un mois et demi, enfin vous avez mis un mois et demi, pour trouver un système qui bon an, mal an, fonctionne, que de temps perdu et que d’inquiétude pour les chefs d’entreprise. Aujourd'hui une aide devait être disponible pour les plus gros consommateurs d’énergie et sa mise en place a à nouveau été repoussée, pourquoi ?
ROLAND LESCURE
Non, c’est vraiment une question de jours, on est en train de finaliser le site Internet, on voulait que ce soit extrêmement simple, mais malheureusement, quand la vitrine est simple, derrière le back-office est parfois un peu compliqué, donc c’est vrai qu’on a voulu simplifier l’aide, l'amplifier pour qu'elle soit plus importante, et la prolonger en 2023.
APOLLINE DE MALHERBE
Ça va fonctionner comment ?
ROLAND LESCURE
Ça va fonctionner de manière très simple. Vous allez, si votre facture augmentait de plus de 150 %, ce qui n’est pas énorme, malheureusement, vu les hausses de factures qu'on a, c’est quatre fois, cinq fois, dix fois plus, donc on est sur des hausses de factures extrêmement importantes, vous allez déclarer ça sur un site Internet très simple, vous allez montrer que votre facture énergétique représente plus d'un certain pourcentage de votre chiffre d'affaires actuellement, et vous allez recevoir une aide, et on va même mettre en place des avances…
APOLLINE DE MALHERBE
Et une aide rapide ?
ROLAND LESCURE
On va mettre en place des avances, parce qu'on a bien conscience que parfois l'administration n'a pas tout à fait le même temps que l'entreprise. L’entreprise française aujourd'hui elle est en train de prévoir son budget pour 2023, elle a besoin de savoir si elle va produire, parce que certaines aujourd'hui sont en train d'arrêter leur production, et combien elle va produire.
APOLLINE DE MALHERBE
Quand on voit ce qui se passe avec DURALEX, est-ce que ce qui se passe avec DURALEX ce n’est pas le haut de l’iceberg comme vous dites, c'est-à-dire que derrière il y a beaucoup de petites entreprises moins connues, plus anonymes que DURALEX, et qui se retrouvent dans la même situation, c'est-à-dire la grande difficulté à faire face à toutes les dépenses d'énergie ?
ROLAND LESCURE
Il y a une très grande disparité. Il y a des entreprises aujourd'hui qui vont bien, pourquoi ? Parce qu'elles peuvent augmenter leurs prix, le secteur de l'aéronautique va bien, le secteur de l'électronique va bien, hier j'étais à Nevers, je pense que vous recevez le maire de Nevers tout à l'heure…
APOLLINE DE MALHERBE
Exactement.
ROLAND LESCURE
Ensemble on a visité…
APOLLINE DE MALHERBE
Pour des raisons de déserts médicaux, donc pas tout à fait la même question, mais…
ROLAND LESCURE
Justement, c’est important, il y a des déserts médicaux à Nevers, mais on industrialise, il y a des entreprises qui s'installent, donc on était chez TCT, une entreprise qui fait du magnétisme, qui fait des objets extrêmement modernes, pour des trains et des avions, et ça ça marche, ils recrutent, ils augmentent leur production, donc il y a aujourd'hui des entreprises qui vont bien. Il y a des entreprises qui souffrent, il y a des entreprises qui vont très mal, DURALEX en fait partie. Faire du verre ça prend énormément d'énergie, beaucoup plus que de faire des composants magnétiques, donc c’est vrai que DURALEX aujourd'hui…
APOLLINE DE MALHERBE
Parce qu’il faut ultra chauffer quoi !
ROLAND LESCURE
Exactement ; moi j’y étais il y a quelques semaines, ils vont interrompre leur production pendant quelques mois, ils ont des stocks, donc ils vont continuer à vendre, ils vont faire du chômage partiel, et nous on les accompagne de manière à ce que dès que ça ira mieux DURALEX puisse se remettre à produire.
APOLLINE DE MALHERBE
Roland LESCURE on a reçu les chiffres du taux de chômage à l'instant, ça stagne, 7,3%, alors c’est -0,1, mais ça veut dire que le chômage ne baisse plus.
ROLAND LESCURE
Alors le chômage continue à baisser, vous avez raison, moins vite que c’était le cas, je veux dire on va quand même se féliciter encore une minute qu’on soit au plus bas historique, ça fait plus de 15 ans qu’on n’est pas sur ces niveaux-là, les jeunes sont employés plus que jamais, les taux d'emploi sont au niveau historique, tout ça c'est, j'allais dire le verre aux trois quarts plein. Ce qui est vrai c'est qu'on est fait face à des vents de face, importants, qu’on est là pour passer cet hiver difficile, notamment en aidant les entreprises, mais soyons un peu optimistes, aujourd'hui la France a énormément d'atouts, on a un gouvernement qui est au travail, on a des entrepreneurs qui sont au travail, notamment pour relocaliser en France, moi j'en suis extrêmement fier, donc je pense que oui, l'économie va ralentir, mais aujourd'hui…
APOLLINE DE MALHERBE
Ça ne vous inquiète pas les prévisions de l’Union européenne qui disent qu’on pourrait basculer en récession au début de l'année ?
ROLAND LESCURE
Si, et face aux inquiétudes qu'est-ce qu'on fait ? On se resserre les coudes, on se retrousse les manches, et on travaille pour accompagner l'industrie française dans ce moment difficile. Aujourd'hui les organisations internationales elles prévoient une récession en Allemagne, elles prévoient une croissance en France, pas très forte, mais une croissance quand même, ça veut dire que la France aujourd'hui résiste mieux, et en grande partie, quand même, par les mesures qu'on a prises pour protéger notamment les ménages.
APOLLINE DE MALHERBE
Vis-à-vis des entreprises et vis-à-vis de l’industrie. Roland LESCURE, on va tout se raconter, là pendant la pub, dans le couloir à l'entrée de ce studio, il y avait les deux mascottes…
ROLAND LESCURE
Les deux " Phryges. "
APOLLINE DE MALHERBE
Les nouvelles mascottes, qui s’appellent les " Phryges ", qui sont les deux mascottes rouges qui représenteront donc, enfin qui seront, qui accompagneront les Jeux olympiques 2024. Ecoutez ce que disait ce matin, chez Charles MAGNIEN, Yves JEGO, le fondateur du label Origine France Garantie.
YVES JEGO, FONDATEUR DE LA CERTIFICATION ORIGINE FRANCE GARANTIE
Cette annonce ça a été une douche froide pour tous ceux qui espéraient que ces Jeux olympiques soient « Made in France », le bonnet phrygien symbole de la République, moi je ne sais pas comment on dit Marianne en chinois, on nous a vendu un bonnet phrygien chinois, c'est en plus très symbolique, enfin si les Jeux olympiques sont partis sur l'idée de ne pas être " Made in France " on aura raté l'effet d'image, on aura raté l’effet retentissement des savoir-faire français. Moi je pense qu'il faut que le Comité olympique se réveille pour pouvoir faire que les Jeux soient " Made in France " et pas " Made in China. "
APOLLINE DE MALHERBE
Est-il encore temps de faire une mascotte " Made in France ", c'est une entreprise française, c’est une PME française qui va les fabriquer, mais 80% de sa production c'est en Chine, et la PME qui, je parle sous votre contrôle Charles puisque c'est vous qui avait interrogé Yves JEGO ce matin, mais cette PME qui dit je n’ai pas les moyens de le faire en France, donc Ok je vais faire une usine en Bretagne, mais je n’ai pas les moyens de le faire en France.
ROLAND LESCURE
Moi j’ai réuni, la semaine dernière à Bercy, cinq, plus que cinq d’ailleurs, une vingtaine d'entreprises qui relocalisent cinq objets du quotidien, des montres, des vélos et des jouets, et il y avait notamment Doudou et Compagnie qui était là…
APOLLINE DE MALHERBE
Doudou et Compagnie qui est donc la PME qui a été sélectionnée, qui a obtenu cet appel d’offres et qui fabriquera les mascottes des Jeux olympiques.
ROLAND LESCURE
Exactement, dont 20%, ce n’est pas assez mais c'est quand même mieux que rien, vont être fabriqués en France, et pour ce faire ils vont accroître la taille de leur usine en Bretagne, ils vont recruter des salariés, donc c'est un début…
CHARLES MAGNIEN
Oui, mais au-delà de ce symbole, les JO ce n’est pas l’occasion de mettre la pression et de dire il fait que dans ces JO tout ce qu’on va produire soit en partie produit en France, ça sera une occasion ?
ROLAND LESCURE
Et vous vendez un doudou à 50 euros et les gens vous disent " moi je ne peux pas me payer la Phryge ", c’est un… non, mais gouverner c’est choisir, ce n’est pas simple, mais aujourd'hui moi mon combat c'est de relocaliser, notamment des objets du quotidien.
APOLLINE DE MALHERBE
En fait soit on avait un doudou ultra cher, enfin une mascotte ultra chère, mais " Made in France ", soit…
ROLAND LESCURE
On a coupé un peu la poire en deux. Moi je n’étais pas dans le jury qui a donné ce contrat, mais je comprends qu’avoir aujourd'hui une entreprise française qui relocalise une partie de sa production… tout à l'heure à Bercy on va avoir les états généraux du vélo, avec Clément BEAUNE, le vélo c'est un des sports qui est en plein boom, aujourd'hui on vend 2,8 millions vélos en France, il n’y en a que 800.000 qui sont faits en France, notre objectif c'est d'en faire 1 million, je préférerais en faire 2,8 millions, mais déjà commençons par 1 million, les mascottes on va en faire 20 % en France, je préférerais, comme Yves JEGO, en faire 100 %, c'est déjà un bon début, il faut continuer, il faut que, pas seulement pour les prochains JO parce que ça ça sera peut-être dans 100 ans…
APOLLINE DE MALHERBE
Oui, peut-être pas demain à Paris.
ROLAND LESCURE
Mais peut-être pour la prochaine compétition sportive on ait des mascottes qui soient pleinement « Made in France. »
APOLLINE DE MALHERBE
On soit capable d’un vrai " Made in France. " Roland LESCURE merci d’être venu…
ROLAND LESCURE
Merci à vous.
APOLLINE DE MALHERBE
Dans ce studio, ministre délégué chargé de l’Industrie, et ce qu’on retient c’est que vous nous dites qu'il y a 402 entreprises qui sont en difficulté aujourd'hui, mais qu'un dispositif d'aide sur la question de l'énergie et des prix de l'énergie sera bien mis en place dans les jours qui viennent.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 17 novembre 2022