Texte intégral
PATRICK ROGER
Bonjour Sylvie RETAILLEAU.
SYLVIE RETAILLEAU
Bonjour Patrick ROGER.
PATRICK ROGER
La semaine sous tensions pour la réforme des retraites, est-ce qu'il y aura une mobilisation jusque dans les facs, la semaine aussi de Parcoursup, l'inquiétude ou pas face à l'intelligence artificielle et le robot ultra-performant ChatGPT, ce sont les questions qu'on va voir. Ce sera une journée test donc jeudi pour le gouvernement sur la réforme des retraites, les organisations étudiantes essaient de mobiliser aussi, qu'est-ce que vous pouvez dire ce matin aux jeunes et aux étudiants qui pour certains peuvent être inquiets avec cette réforme ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, ce que l'on veut dire aux étudiants, par rapport à cette réforme des retraites, quand on écoute aussi certains jeunes, les étudiants, c'est qu'une des premières peurs c'est de ne pas avoir droit à cette retraite, de pouvoir, je dirais aller dans le monde du travail, cotiser en tant qu'actifs toute leur vie, et au final, après 40 ans, 43 ans de carrière, finalement ne plus avoir droit. Ce n'est pas quelque chose de nouveau, déjà à on époque on disait "oui, de toute façon la retraite on n'y aura pas droit", et je pense qu'il faut leur dire que cette réforme des retraites c'est justement pour qu'ils puissent avoir droit et préparer l'avenir.
PATRICK ROGER
Mais il peut y avoir une forme d'angoisse, parce qu'aujourd'hui on multiplie les études supérieures, on fait une formation trois, quatre ans à un endroit, après on dit qu'on n'est pas suffisamment opérationnel, on refait une réforme quelque part, ce qui veut dire que ça va repousser l'âge de départ à la retraite pour ces jeunes quoi !
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, je pense que c'est, vous l'avez dit, le fait que l'on ait de plus en plus de jeunes qui font des études, et c'est une bonne jeune chose, parce qu'on a besoin de monter en compétences, le fait que le nombre d'années en études, et donc dans leur entrée de la vie active, est plus long, à un moment donné on voit bien aussi que ça correspond à cette nécessité et que ce que le Conseil d'Orientation des retraites a envisagé, enfin le fait qu'il y a ce déficit qui se creuse et qui augmente, est lié à ça, c'est-à-dire qu'on vit plus tard, ça aussi c'est une bonne chose, et on rentre plus tard dans la vie active, les jeunes ont accès à l'enseignement supérieur plus, et donc on voit bien…
PATRICK ROGER
On se forme, mais aussi c'est qu'on a un problème d'orientation également aussi aujourd'hui, non ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors je pense que l'orientation, aujourd'hui, c'est aussi le droit de se tromper, c'est-à-dire qu'il est bon qu'un jeune puisse avoir cette possibilité de réorientation, et nous à l'Enseignement supérieur on accompagne aussi parce que ces points d'orientation, comme ces points de reconversion, quand on est dans la vie active, eh bien on va l'accompagner en développant la formation tout au long de la vie, c'est-à-dire que c'est un projet cohérent et on a besoin de continuer à se former, même en sortant des études, justement pour trouver du boulot après 55 ans, après 58 ans, et là on a un rôle à jouer.
PATRICK ROGER
Et est-ce qu'il y a un possible, pour revenir ma question, possible blocage des facs jeudi et puis dans les semaines qui vont suivre ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors nous on est aujourd'hui à regarder effectivement l'inquiétude, vous en avez parlé, des jeunes, de pouvoir continuer à discuter avec eux, de leur expliquer aussi le sens de cette réforme, je pense que c'est important de pouvoir continuer à échanger, et puis exprimer effectivement comment nous intervenons pour participer finalement à cette réforme des retraites, qui est en particulier aussi fait pour eux.
PATRICK ROGER
Donc difficile pour vous de dire s'il y aura blocage ou pas, mais est-ce que vous pensez qu'il peut y avoir une instrumentalisation de certains syndicats étudiants ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors je pense que, à nous d'échanger avec les étudiants pour que les étudiants puissent avoir toutes les données, tous les échos, de tout le monde en fait, les pour, les contre, mais surtout le pourquoi on fait ça, quels sont les chiffres qui démontrent le déficit, quels sont les chiffres qui montrent qu'aujourd'hui, finalement hier on avait deux actifs en 2000, par rapport à un retraité, aujourd'hui on en a 1,7 actif par rapport à un retraité, demain on en aura 1,5, et je pense que nos jeunes, et nos étudiants, c'est des choses qui vont leur parler et pour lesquelles ils vont pouvoir comprendre l'évolution et le besoin de cette réforme des retraites.
PATRICK ROGER
Donc pas de craintes de blocages ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors on a, vous savez on surveille, on regarde, on écoute, on discute, et puis on va voir un petit peu les évolutions.
PATRICK ROGER
Autre sujet dans l'actualité aujourd'hui, le coût de la vie pour les étudiants, alors est-ce que ceux qui sont éligibles ont bien reçu la prime inflation de 100 euros et est-ce qu'il y aura d'autres aides ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors oui, ceux qui sont éligibles, c'est-à-dire les boursiers, mais aussi tous les étudiants qui ont eu l'APL, donc à peu près la moitié des étudiants, ont reçu ce chèque de 100 euros, à disposition, et puis il y a eu toutes les mesures, dont j'avais parlé déjà la dernière fois, pour la rentrée. Aujourd'hui nous aidons aussi, nous avons débloqué avec Jean-Christophe COMBE, le ministre des Solidarités, 10 millions d'euros pour les associations, en complément de ce qu'on a fait, des mesures du CROUS, du repas à 1 euro pour tous les étudiants précaires et pour pouvoir, je dirais diversifier les aides, on aide les associations qui jouent un rôle aussi important, de 10 millions d'euros, et puis on discute avec elles pour pérenniser cette aide, pour travailler avec elles. Nous avons aussi, avec les sénateurs et les députés, fait passer un amendement pour pouvoir rendre accessible la restauration partout en France, même là où le CROUS n'est pas présent, et donc pour pouvoir faciliter l'accès à la restauration à 3,30 euros, ce qui est le, je dirais, le coût du CROUS, pour tous les étudiants, voire à 1 euro pour les étudiants précaires.
PATRICK ROGER
Là il y a le chèque carburant et les aides pour les personnes qui sont en situation difficile, les plus modestes, est-ce que des étudiants peuvent être concernés ?
SYLVIE RETAILLEAU
Les étudiants de la même façon, le critère est vrai pour tout le monde, donc par rapport à ce chèque.
PATRICK ROGER
Dans le même temps il y a l'ouverture aussi cette semaine de Parcoursup, c'était une période de stress pour les lycéens, les parents, est-ce que vous vous engagez à plus de transparence, parce qu'il y a évidemment beaucoup de flou autour des critères d'admission ?
SYLVIE RETAILLEAU
Oui. Alors, cette année Parcoursup va rouvrir, enfin à ouvert le 20 décembre, et ils vont pouvoir l'utiliser là, le 18 janvier, commencer à rentrer leurs choix, donc je voudrais dire d'abord que, évidemment, cette anxiété, ce stress, cette transparence, parce que la question "qu'est-ce que tu veux faire plus tard", il n'y a pas une question plus difficile, et donc nous écoutons, nous entendons, et aujourd'hui nous avons fait évoluer Parcoursup de façon claire, pour avoir une information plus riche, plus claire, et effectivement plus transparente. Donc plus riche, nous avons un accès plus facile à des informations de base, est-ce que c'est une formation privée, publique, les frais d'inscription, etc.., plus claire, parce qu'il est important pour nous aussi de dire est-ce que le profil d'étudiants est adapté à cette formation, quels sont les profils d'étudiants qui ont été classés l'année dernière, quels sont les taux d'insertion des formations, quelles sont les taux de réussite, tout ça est affiché pour chacune des formations cette année, et plus transparente puisque nous avons affiché cette année, pour chaque formation, les critères d'examen des candidatures de chacune des formations, et ça je pense que c'est important, et puis une objectivation des dossiers puisque nous allons rentrer la note de baccalauréat, des épreuves de spécialités, qui va avoir lieu en mars, et ça ça va donner un volet plus homogène aux dossiers des étudiants et une meilleure…
PATRICK ROGER
Alors, est-ce que ce sont toujours les algorithmes qui font tout ou est-ce qu'il y a l'intervention humaine ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors déjà merci de la question parce que, non, ce n'est pas les algorithmes qui font tout, Parcoursup est une plateforme d'aide pour les dépôts de candidatures, le traitement des candidatures, mais il y a un algorithme qui est à l'aide à la décision, qui est plus ou moins d'ailleurs utilisé par les enseignants-chercheurs du supérieur, et ce sont bien des commissions, ce sont bien de l'humain, et des enseignants-chercheurs, du supérieur, des enseignants, qui décident, qui examinent les candidatures.
PATRICK ROGER
Et alors, dans ce cadre-là, est-ce qu'il y a toujours une forme de sélection en fonction des lycées d'où l'on vient ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, ce côté en fonction des lycées d'où l'on vient, cette année, le fait de prendre en compte cette note de bac, des épreuves spécialisées, va permettre justement de minimiser cet impact qui officiellement n'y est pas, sur les dossiers n'y est pas, après c'est une information qui est dans le dossier, et donc nous avons cherché à rendre beaucoup plus homogène, d'avoir une objectivation plus forte des dossiers, et cette note du baccalauréat, des épreuves spécialisées, va y parvenir.
PATRICK ROGER
Oui, parce qu'on disait que les notes et les moyennes ne sont pas forcément équivalentes, évidemment, en fonction des établissements, certains sur-notent et puis d'autres sont beaucoup plus sévères.
SYLVIE RETAILLEAU
C'est pour ça que c'était important de redonner un petit peu la place du baccalauréat dans le dossier Parcoursup, dès le début des examens des candidatures, ce que nous avons fait cette année avec le ministre de l'Éducation nationale, avec Pap NDIAYE, c'est pour ça que c'est important de rentrer beaucoup plus de clarté sur les critères d'examen des candidatures, de transparence, pour que chaque formation puisse exprimer vraiment comment ils regardent les dossiers, quels sont les profils d'étudiants qui ont plus de chance de réussite dans cette formation, et tout ça a été vraiment amélioré cette année sur Parcoursup.
PATRICK ROGER
Vous avez lancé aussi un autre Parcoursup, celui du master, il y a les mêmes craintes également ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, sur le master c'est une plateforme aujourd'hui qui permet de déposer toutes les candidatures à toutes les offres de… avec une candidature unique, donc ça évite les étudiants d'envoyer les dossiers par la Poste, de déposer plusieurs dossiers, il y a un calendrier unique, qui permet aux étudiants de savoir quand ils auront leur réponse, et donc quand eux aussi devront répondre, et il n'y a aucun algorithme, ni d'aide à la décision, aucun algorithme n'est associé à cette plateforme "Mon master", les procédures d'examen des candidatures restent exactement les mêmes qu'avant.
PATRICK ROGER
D'accord. A propos d'algorithmes, il y a ce qui agite un petit peu le monde étudiant, et pas seulement, et des enseignants, c'est ce nouveau robot, ultra-performant, qui s'appelle ChatGPT. On dit qu'il pourrait y avoir de la triche de certains étudiants et élèves, etc., parce qu'il peut rédiger à votre place et il est ultra-performant. Quels moyens ont les professeurs éventuellement de rétablir les choses ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors ce ChatGPT effectivement, qui assez performant, n'est pas quelque chose de nouveau, je pense que quand il y a eu l'apparition d'Internet, des moteurs de recherche, de Google le pas été beaucoup plus fort, de l'accès à l'information et de cette gestion, et vous savez aujourd'hui effectivement il y a… d'abord les outils évoluent en parallèle, au niveau de détection des fraudes, vient de sortir l'outil parallèle pour la détection de ChatGPT qui est GPT Zéro, pour aider à cette détection, et puis je crois que rien ne vaut l'humain, finalement nous en tant qu'enseignants on connaît nos étudiants, et quelque part quand une copie a un décalage trop fort par rapport à la copie habituelle, eh bien aucun outil ne remplace la connaissance que l'enseignant a des étudiants.
PATRICK ROGER
Donc vous n'avez pas spécialement d'inquiétude face à ça ?
SYLVIE RETAILLEAU
Je n'ai pas spécialement d'inquiétude, c'est un pas supplémentaire, je pense que ça va donner un souci supplémentaire, enfin une vigilance supplémentaire pour les enseignants, mais je sais qu'ils sauront gérer.
PATRICK ROGER
Notamment sur les devoirs à la maison quoi !
SYLVIE RETAILLEAU
Sur les devoirs à la maison, vous savez, quand c'était à la maison rien n'empêchait de faire rédiger par quelqu'un d'autre ou de se faire aider, et donc les enseignants…
PATRICK ROGER
Surtout certains qui ont des parents qui sont profs, par exemple.
SYLVIE RETAILLEAU
Par exemple, et donc les enseignants savent gérer, je crois qu'on forme aussi des citoyens, on les forme aussi à long terme, à savoir gérer, et puis la France, au niveau de l'IA a une politique très forte de développement de l'intelligence artificielle, on a eu deux plans d'intelligence artificielle, de 1,5 milliard d'euros chacun, pour développer, donc on est positionné aussi sur cette recherche et sur ce développement, fortement.
PATRICK ROGER
Sylvie RETAILLEAU, vous êtes ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, est-ce que l'écriture inclusive, les pronoms tel que "iel", ont leur place à l'université ? Il y a eu un exemple encore récemment à Sciences-Po Lyon par exemple.
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, je voudrais dire deux choses. La première c'est que la notion d'écriture, l'utilisation de l'écriture inclusive, a été cadrée, dans une circulaire sous Édouard PHILIPPE en 2017, qui demande que dans des textes officiels, les textes publiés au Journal Officiel par exemple, il n'y ait pas d'utilisation de l'écriture inclusive, donc pour tout ce qui est statut officiel, etc., donc c'est cadré, on a une circulaire claire. De l'autre côté, moi je fais confiance aux établissements, il y a une autonomie des établissements pour gérer, que ce soit l'écriture inclusive, mais tous les axes de, je dirais développement égalité homme-femme, et ça c'est un point important, que nous soutenons dans leur globalité, avec l'attractivité des métiers, par exemple aux sciences pour les jeunes filles, c'est un point sur lequel nous travaillons énormément, je pense que les actions contre, la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, donc il y a énormément d'actions, très concrètes, que le ministère soutient, et dans l'autonomie des universités cette mise en œuvre de ces actions.
PATRICK ROGER
Vous soutenez ça, mais est-ce que vous êtes contre le wokisme qui gagne certaines universités ?
SYLVIE RETAILLEAU
Je pense que, premièrement… aujourd'hui il est l'heure de rendre les universités, je dirais à un environnement plus serein pour pouvoir faire travailler nos étudiants, pour pouvoir réaliser nos missions, et donc de ne pas relancer des polémiques, mais plutôt accompagner, dans la réalisation de leurs missions, nos établissements, nos universités, dans un cadre effectivement, dans lesquels les étudiants peuvent s'épanouir, tous les étudiants peuvent s'épanouir dans toutes les disciplines, et ça c'est important.
PATRICK ROGER
Il y a eu la semaine dernière une affaire de harcèlement qui a conduit au suicide d'un jeune - c'est un ado, donc évidemment on n'est pas dans l'Enseignement supérieur et la Recherche, mais tout de même – est-ce que vous avez des mesures à prendre, ou vous allez en prendre, sur les violences sexistes et sexuelles qui peuvent exister et le harcèlement d'une façon générale ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors d'abord je voudrais présenter toutes mes condoléances, non seulement à la famille bien sûr de Lucas, mais aussi aux camarades de Lucas, dans ce drame, donc ce drame, qui touche là le collège, mais effectivement qui peut se poursuivre dans l'Enseignement supérieur, et donc on ne doit jamais être insensible et prendre des mesures, donc effectivement contre les violences sexuelles et sexistes nous avons doublé le budget pour mieux encore accompagner les établissements qui ont mis des cellules de signalement en route, mais donc leur donner les moyens de déployer effectivement dans leurs établissements des mesures très concrètes pour lutter contre ces violences sexuelles et sexistes, et puis nous avons aujourd'hui 40 référents sur tout ce qui est égalité, ou inégalités plutôt, qui œuvrent dans les établissements, donc de nombreuses mesures pour lutter contre ces problématiques d'inégalités, d'harcèlement ou de violences, contre les violences sexuelles et sexistes.
PATRICK ROGER
Enfin dernière question, est-ce que vous êtes, vous, favorable à un uniforme à l'école, Sylvie RETAILLEAU ?
SYLVIE RETAILLEAU
Alors, sur l'uniforme à l'école c'est clairement une problématique de l'Éducation nationale et du secondaire puisqu'à l'université cette question-là ne se pose pas…
PATRICK ROGER
Se pose moins, oui.
SYLVIE RETAILLEAU
Ne se pose pas, nous avons des étudiants adultes…
PATRICK ROGER
Quoi qu'il y a des universités où il y a des uniformes, notamment à l'étranger, bien sûr.
SYLVIE RETAILLEAU
À l'étranger, dans certains parce que ça fait partie, mais aujourd'hui, au niveau français, ce n'est pas une question qui est à l'ordre du jour, ce n'est pas une question qui se pose au niveau de l'Enseignement supérieur.
PATRICK ROGER
Merci Sylvie RETAILLEAU, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, qui était l'invitée ce matin de Sud Radio.
SYLVIE RETAILLEAU
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 janvier 2023