Texte intégral
SONIA MABROUK
Bonjour Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Sonia MABROUK.
SONIA MABROUK
Ils ne s’en sortent pas, des boulangers ont de nouveau manifesté hier jusque sous vos fenêtres, à Bercy, face à des factures d’énergie aux montants exorbitants. Ils dénoncent des aides qui arrivent trop tard, un système trop complexe et demandent, Bruno LE MAIRE, un bouclier tarifaire pour tous. Que leur répondez-vous ce matin ?
BRUNO LE MAIRE
Moi, je leur réponds deux choses, d’abord, que je les comprends, je sais que c’est très dur pour beaucoup de boulangers, beaucoup d’artisans, beaucoup de commerçants, que cette explosion des factures a pris tout le monde de court. Et je leur réponds ensuite qu’ils ont droit à un bouclier tarifaire, et qu’à la demande du président de la République, nous avons mis en place, pour toute l’année 2023, un bouclier tarifaire qui leur garantit que les prix ne dépasseront pas 280 euros en moyenne sur l’année 2023, alors que certains avaient des factures à 350, 400, 500 euros. Alors, oui, la mise en place est compliquée, je le reconnais bien volontiers, mais ce qui est compliqué, ce n’est pas le dispositif du gouvernement, c’est les factures qui sont compliquées. Il se trouve que je passe beaucoup de temps à regarder les factures de ces artisans, je vois comment sont libellées ces factures, il y a l’horaire du matin, l’horaire de l’après-midi, il y a le tarif d’hiver, il y a le tarif d’été, tout ça est extrêmement compliqué. J’ai reçu hier avec Olivia GREGOIRE, Roland LESCURE et la ministre de l’Energie, Agnès PANNIER-RUNACHER, tous les fournisseurs d’énergie, nous travaillons à une simplification, et je veux que tous ceux qui nous écoutent ce matin, tous les artisans, sachent qu’ils auront des factures à 280 euros en moyenne sur l’année 2023, donc un vrai bouclier tarifaire.
SONIA MABROUK
Mais pourquoi ne sont-ils pas, j’allais dire, confiants aujourd’hui, ils dénoncent toujours des aides qui arrivent trop tard, malgré ce que vous dites, Monsieur le Ministre, qui arriveront au printemps, alors qu’ils doivent payer maintenant des factures aux montants délirants ; comment faire quand on n’a pas la trésorerie suffisante ?
BRUNO LE MAIRE
Elles vont arriver maintenant, mais c’est vrai que les factures de janvier, ils ne les ont pas encore, donc c’est pour ça que je comprends l’inquiétude, on est le 24 janvier, ils vont avoir leur facture d’électricité vers le 15, 20 février, donc ils se disent : mais qu’est-ce qu’on va recevoir comme facture, nous y travaillons, le gouvernement y travaille. Et si certains sont inquiets, qu’ils viennent me voir. Qu’ils viennent discuter. Si certains ont des difficultés particulières…
SONIA MABROUK
Ils l’ont fait hier, ils étaient sous vos fenêtres…
BRUNO LE MAIRE
Oui, mais c’est très bien, c’est normal, c’est parfaitement légitime…
SONIA MABROUK
Mais c’est quoi la simplification ?
BRUNO LE MAIRE
La simplification, c’est qu’ils reçoivent une facture sur laquelle il y a marqué non pas tarif d’hiver, tarif d’été, tarif du matin tarif de 10h, tarif de 18h, parce que, honnêtement, c’est illisible, ces factures. Je le reconnais bien volontiers, nous travaillons à une simplification drastique des factures sur lesquelles doit figurer ces 280 euros dès le mois de février, dès la facture de février, et ce sera comme ça sur toute l'année 2023.
SONIA MABROUK
Vous recevez aussi, et vous avez aussi reçu, Bruno LE MAIRE, les énergéticiens, ils étaient hier à Bercy, est-ce qu'ils font les efforts nécessaires, TotalEnergies annoncé ce matin un rabais de 100 euros par mégattheure pour leurs clients TPE, est-ce suffisant ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, je pense qu'ils jouent le jeu, il a fallu les rappeler à l'ordre, ça a été fait par le président de la République, je pense que c'était utile de montrer que tout le monde devait être solidaire, aujourd'hui, les fournisseurs d'énergie jouent le jeu, ils étaient, comme vous l'avez mentionné, hier à Bercy, on a passé plus de 2h à travailler sur ce sujet, je les reverrai la semaine prochaine, parce que je le dis, le dispositif de tarification est compliqué, le dispositif de facturation est compliqué, et que simplifier, on le sait tous, c’est toujours ce qu’il y a de plus difficile, donc on y travaille. Mais les fournisseurs d’énergie jouent le jeu, et je leur en suis reconnaissant.
SONIA MABROUK
En attendant, la branche Energie de la CGT, Marseille, par exemple, veut aider les boulangers en essayant de les placer en tarif réduit, concrètement, ils vont jouer sur le compteur pour que ces boulangers aient ce tarif de 50 % gratuit. Qu’est-ce que vous pensez de ces méthodes qui sont soutenues par exemple par Jean-Luc MELENCHON, est-ce illégal ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, ça ne me surprend pas qu’elles soient soutenues, mais elles sont inacceptables, enfin, ce n'est pas la CGT qui décide en France, ce n'est pas la CGT qui décide des tarifs, ce n'est pas la CGT qui décide qui doit payer quoi, c'est l'Etat, c'est l'intérêt général, c'est le peuple français, à travers ses représentants, et ça ne doit pas être autre chose.
SONIA MABROUK
La CGT reconnaît que c'est illégal, mais affirme que c'est moral, quand on a des factures qui sont multipliées et par 2, 3, 4, qu'il faut aider tout de suite les boulangers…
BRUNO LE MAIRE
Non, mais en quoi est-ce que la CGT connaît les factures à l'euro près de telle personne ou telle personne, en quoi est-ce qu'elle connaît leurs comptes d'exploitation, en quoi elle sait si telle entreprise est en difficulté ou pas, et puis, après, ce sera les ménages, où on va payer pour les uns et pas payer pour les autres, ce n'est pas à la CGT de faire la loi en France, c'est aux parlementaires, c'est aux représentants du peuple français, c'est comme ça que ça doit exister en démocratie, il n’y a aucune raison que cela change.
SONIA MABROUK
Beaucoup de regards se tournent, Bruno LE MAIRE, vers le marché européen de l'électricité, et de nombreux opposants de droite, comme de gauche, vous reprochent de n'avoir rien entrepris pour en sortir, même temporairement.
BRUNO LE MAIRE
Alors, rien entrepris, je pense qu'on peut tout dire sauf cela, ça fait des mois que nous nous battons avec le président de la République, avec Agnès PANNIER-RUNACHER, pour obtenir des modifications du marché européen de l’énergie, c’était encore au coeur des débats…
SONIA MABROUK
Quel résultat ?
BRUNO LE MAIRE
Que nous avons eus avec le chancelier allemand pendant toute la journée de dimanche, donc, vous voyez qu'on ne peut pas dire que nous ne ménageons pas notre peine avec Emmanuel MACRON pour faire bouger les choses sur le marché européen de l'énergie, et je le redis, nous voulons que, dans des délais qui se chiffrent en mois, pas en années, nous puissions en France payer l'énergie, l'électricité au coût de production de l'énergie, et qu'on arrête d'aligner une énergie décarbonée, du prix d’une énergie décarbonée qui est l'énergie nucléaire, sur le prix d'une énergie fossile, qui est le gaz, c'est aberrant d'un point de vue écologique…
SONIA MABROUK
Oui, mais ça ne change pas…
BRUNO LE MAIRE
Et c’est injuste du point de vue économique…
SONIA MABROUK
Monsieur LE MAIRE, vous haussez le ton ce matin, j'ai retrouvé un article du Figaro…
BRUNO LE MAIRE
Mais je hausse le ton, parce qu’il n’y a que comme ça qu'on obtient des résultats, c'est comme ça que nous avons obtenu un certain nombre de résultats européens…
SONIA MABROUK
Oui, mais est-ce que vous le haussez face à l’Allemagne ?
BRUNO LE MAIRE
Avec le président de la République.
SONIA MABROUK
La question, ce que vous reprochent certains, c’est de ne pas engager le bras de fer avec l'Allemagne, de ne pas oser le faire, et finalement, que ça reste un voeu pieux justement de tordre le bras à ce marché européen…
BRUNO LE MAIRE
Mais depuis près de 6 ans que nous travaillons avec le président de la République, sur ces questions européennes, nous avons obtenu des avancées majeures, en engageant des bras-de-fer ou des discussions fermes avec l'Allemagne, je rappelle que la dette commune, c'est un des grands résultats qui a été obtenu par le président de la République dans un bras de fer avec Angela MERKEL. Je rappelle que ce que nous avons obtenu sur la fiscalité internationale, la taxation des géants du numérique, nous l'avons obtenue en engageant un bras de fer avec l'Allemagne, et je rappelle également que sur la politique industrielle, là, je n'emploierai pas le mot de bras de fer, mais l'Allemagne a toujours été opposée à l'idée d'une politique industrielle européenne, avec mon homologue précédent, Peter ALTMAIER, avec mon homologue actuel, Robert HABECK, nous portons l'idée d'une politique industrielle européenne, qui puisse faire face à la politique industrielle américaine portée par IRA. Donc vous voyez que, oui, les relations entre la France et l'Allemagne sont parfois dures, sont parfois fermes, demandent parfois de passer par le bras de fer, mais nous obtenons, avec Emmanuel MACRON, des résultats qui sont spectaculaires, et je pèse mes termes, parce que l'émission de dette en commun, je rappelle que ça fait des décennies que l'Allemagne dit niet, jamais, on ne le fera pas, eh bien, on l’a obtenue.
SONIA MABROUK
Mais pourquoi je vous ai parlé d'un voeu pieux, en tous les cas, d'un défi à long terme, j'ai retrouvé un article du Figaro de novembre 2021 titré : Bruno LE MAIRE pousse sa réforme du marché européen de l'électricité, 2021.
SONIA MABROUK
Oui, mais la dette en commun, j’en ai parlé à Berlin en 2017, et nous l'avons obtenue à la faveur de la crise du Covid en 2020, il a fallu attendre 3 ans, parce que c'est des changements structurels, ça prend du temps, mais au bout du compte, et c'est d'ailleurs ce qui s'est passé dimanche, dans la rencontre entre Olaf SCHOLZ et le président la République, nous trouvons des compromis qui sont d'autant plus solides que d'oppositions qui étaient différentes au départ.
SONIA MABROUK
Alors sur le pouvoir d'achat, et c’est lié, Bruno LE MAIRE, les prix du carburant frôlent les 2 euros, combien de millions de Français ont fait la demande peut-être à date aujourd'hui, pour obtenir l'indemnité carburant ?
BRUNO LE MAIRE
Alors, plus de 3 millions, alors, je dirais plus de 3 millions seulement parce qu'il y a 10 millions de nos compatriotes qui sont éligibles, donc j'ai demandé à la DGFIP d'aller chercher nos compatriotes qui ont le droit à cette aide, et je profite de votre antenne pour le dire, tous ceux qui utilisent leur voiture pour aller travailler, qui ont un niveau de revenus qui ne leur permet pas de supporter l'augmentation des prix du carburant, mais il faut qu'ils aillent demander cette aide, 3 millions, c'est un beau résultat, mais, ce n'est pas beaucoup par rapport aux 10 qui y ont droit.
SONIA MABROUK
C’est-à-dire, 7 millions encore peuvent encore la…
BRUNO LE MAIRE
7 millions peuvent encore, là, demander…
SONIA MABROUK
Mais est-ce que le système est trop compliqué encore une fois ?
BRUNO LE MAIRE
Non, non, alors, pour le coup, il est extrêmement simple, et je n'ai eu aucun retour négatif de ceux qui sont allés s’inscrire sur le site de la Direction générale des finances publiques. Mais voilà, il y a des personnes qui ne viennent pas solliciter cette aide, je leur dis : allez solliciter cette aide, c'est un soutien au pouvoir d'achat et un soutien au travail.
SONIA MABROUK
Sur l'inflation, est-ce que vous diriez, Bruno LE MAIRE, que le pic est face à nous ?
BRUNO LE MAIRE
Je dirais qu’on est aujourd’hui face à des prix qui ont beaucoup augmenté, sur l'alimentation en particulier, je sais que pour tous les ménages, tous ceux qui ont les familles nombreuses, c'est particulièrement difficile, je redis que nous sommes confiants sur le reflux de l'inflation à partir de la mi 2023, on a des indicateurs sur les prix de gros, sur les prix du transport, sur le prix du fret maritime qui montrent que de l'inflation devrait effectivement refluer à partir de la mi-2023, enfin, en attendant, on continue à garder les protections dont tous nos compatriotes ont impérativement besoin.
SONIA MABROUK
Les distributeurs ont une autre boussole ou je ne sais pas un autre cap, dans le JDD, j'ai lu, ce dimanche, Michel-Edouard LECLERC qui voit l'inflation continuer à augmenter, atteindre des sommets pour les mois d'avril et juin…
BRUNO LE MAIRE
Oui, je pense et j'ai eu l'occasion de le dire à Michel-Edouard LECLERC, je comprends très bien que les distributeurs aient des difficultés sur certains tarifs, je pense qu'il ne faut jamais jouer avec les peurs des Français, il y a suffisamment d'angoisses, légitimes, face à l'augmentation des prix, l'augmentation des prix alimentaires, l'augmentation des carburants, l'augmentation des prix de l'électricité et du gaz sur lesquelles nous protégeons nos compatriotes, c'est l'indemnité carburant transport, c'est le chèque sur l'énergie, gaz-électricité, c'est les soutiens avec le bouclier tarifaire, mais il y a suffisamment d'angoisses profondes, légitimes pour ne pas jouer avec les peurs des Français, je pense que…
SONIA MABROUK
C’est important, donc vous l’appelez au sang-froid…
BRUNO LE MAIRE
Mais oui, oui, j’appelle…
SONIA MABROUK
Vous appelez Michel-Edouard LECLERC et d’autres au sang-froid…
BRUNO LE MAIRE
Oui, j’appelle tout le monde au sang-froid, et surtout, on veut des perspectives, c’est-à-dire que, enfin, mettez-vous à la place de nos compatriotes, ils se lèvent chaque jour, ils vont faire leurs courses, ils se disent : mais quand est-ce que ça va cesser, la responsabilité d'un dirigeant économique ou d'un dirigeant politique, c'est d'ouvrir des perspectives, de dire : oui, c'est dur, nous vous aidons, mais d'ici quelques mois, nous prenons l'engagement, en tout cas, c’est notre évaluation, que les choses vont aller mieux, c'est ça être un dirigeant, ce n'est pas jouer avec les peurs des Français, c'est anticiper sur ce qui va se passer, et essayer d'ouvrir des perspectives.
SONIA MABROUK
C’est dans ce contexte social, Bruno LE MAIRE, que la réforme des retraites est engagée, Emmanuel MACRON a conclu hier le Conseil des ministres en vous exhortant tous à être sur le pont. Parlons du cap, est-ce que vous dites ce matin que quelles que soient les voix dissonantes dans la majorité, quoi qu'il arrive, quelle que soit l'ampleur de la prochaine mobilisation, et malgré les menaces de blocage, il n'y aura aucune concession sur l'âge de départ à 64 ans ?
BRUNO LE MAIRE
Je dis qu’il y a des ouvertures qui sont possibles, et je dis qu'il est essentiel de tenir, et essentiel que la majorité fasse bloc, parce qu'il en va de son identité politique, un des éléments de l'identité politique de cette majorité, un des éléments fondamentaux, c'est le travail, la valorisation du travail, la juste rémunération du travail, cette réforme des retraites, elle est une garantie que le système de répartition, le système par solidarité entre les générations, entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent plus, sera préservé, c’est en ça qu’à mes yeux, elle est fondamentalement juste, c'est qu'elle protège les plus modestes, ceux qui n’ont pas de quoi se payer une retraite par capitalisation, ceux qui n’ont pas de quoi mettre beaucoup d'argent de côté pendant qu'ils travaillent. Donc je souhaite que la majorité fasse bloc derrière une réforme qui préserve la solidarité entre générations, qui améliore les pensions des petits retraités, qui améliore la condition de beaucoup de ceux qui ont des travaux pénibles tout au long de la vie, et qu’il y ait peu ou pas de voix dissonantes.
SONIA MABROUK
D’accord, donc vous lancez un appel clairement à votre majorité…
BRUNO LE MAIRE
Oui, mais clairement, mais écoutez…
SONIA MABROUK
Et il en va de l’identité, donc de la cohésion d’une majorité…
BRUNO LE MAIRE
Mais qu’est-ce que nous avons fait depuis près de 6 ans…
SONIA MABROUK
Majorité faite aussi d’une aile gauche, Bruno LE MAIRE…
BRUNO LE MAIRE
Nous avons créé... mais l’aile gauche, elle doit se retrouver, d’abord, moi, je n’aime pas trop ce côté aile gauche, aile droite, je pense qu'il y a un seul cap, et une majorité qui doit être unique et qui doit dépasser justement la gauche et la droite…
SONIA MABROUK
Il y a des sensibilités qui estiment que c’est trop dur les 64 ans, une marche trop importante…
BRUNO LE MAIRE
Mais le travail est au coeur de notre identité, nous avons créé du travail, nous avons créé des emplois, nous avons créé plus de 1,2 million d'emplois au cours du quinquennat passé, nous pouvons atteindre le plein emploi, nous nous sommes battus pour la revalorisation du travail, nous avons mis en place des dispositifs d'intéressement, de participation, de primes défiscalisées, d'actionnariat salarié, mais on doit précisément, au nom de cette valeur travail, se battre pour cette réforme des retraites qui garantit la valorisation du travail et qui garantit la solidarité entre les générations.
SONIA MABROUK
Et qui garantit le système, est-ce que vous nous dites ce matin que cette réforme garantit le système, l'équilibre, et que ce sera la dernière réforme ?
BRUNO LE MAIRE
Mais ça, ce sera au peuple français d’en juger, là, il y a une réforme à faire passer, c'est difficile, parce que c'est toujours difficile de dire aux gens qu'il faut travailler plus longtemps, c'est plus simple de faire la politique de l'autruche, met la tête dans le sable, et de dire : ne vous inquiétez pas, dormez bien, bonnes gens, tout ira bien, sauf qu'on se retrouvera avec des déficits qui seront insurmontables, un régime fragilisé, et une répartition qui, du coup, ne saura plus garantir ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent plus…
SONIA MABROUK
Mais on ne peut pas dire que c’est la dernière réforme ?
BRUNO LE MAIRE
On peut dire qu’en 2030, et c’est ma responsabilité de ministre des Finances, le régime des retraites sera à l'équilibre, alors que dès l'année prochaine, il ne l'est plus.
SONIA MABROUK
La bataille au Parlement va être aussi âpre, et si les LR font défection, il y a aujourd'hui aussi des voix dissonantes auprès de parlementaires et de députés LR, est-ce que vous faites le même appel à la raison ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, vous savez, c'est comme en musique, il y a une basse continue, et ça compte la basse continue, et je me réjouis de voir que la basse continue des Républicains, du parti Les Républicains, c'est une basse continue responsable, et que, derrière Eric CIOTTI, derrière Bruno RETAILLEAU, une grande majorité des parlementaires, sénateurs ou députés, disent : il faut une réforme des retraites, et ce n'est pas : il faut, parce qu'il faut, parce que ce serait une obligation, mais parce que nous croyons à la solidarité, et qu'il n'y a pas de solidarité dans les déficits, il n'y a de solidarité que dans un régime financier équilibré, eh bien, je me réjouis, une fois encore, que Les Républicains se reconnaissent dans ce discours et dans ce projet de réforme.
SONIA MABROUK
Quel impact, Bruno LE MAIRE, auront ces grèves, ces blocages sur l'économie du pays, vous avez dit au Forum de Davos que le mouvement ne devrait pas beaucoup toucher notre économie. Vous savez déjà qu’il ne va pas durer longtemps ?
BRUNO LE MAIRE
Non, je ne lis pas dans la boule de cristal, je dis simplement qu’il ne faut pas exagérer l'impact des mouvements sociaux sur la croissance et l'activité économique du pays, et par ailleurs, les mouvements sociaux, les oppositions, les défilés, surtout quand ils sont calmes comme ils l’ont été la semaine dernière, sont légitimes, enfin, on est une démocratie, c'est à nous d'avancer des arguments pour montrer que cette réforme des retraites, elle est juste pour les raisons que j'ai indiquées, elle est juste aussi parce qu’elle ne touche pas aux retraités, je tiens quand même à le dire, il y a beaucoup qui vous disent : mais dans le fond, la meilleure solution serait d'aller piocher dans les économies des retraités et toucher aux pensions des retraités, mais ils oublient une chose, c'est que les pensions des retraités, de tous les retraités, qui nous écoutent, elles sont indexées sur l'inflation et pas sur les salaires, et qu’il se trouve que dans le temps long, pas aujourd'hui où l'inflation est très forte, mais dans le temps long, eh bien, les salaires augmentent plus rapidement que l'inflation…
SONIA MABROUK
Donc c’est inacceptable pour vous d’y toucher ?
BRUNO LE MAIRE
Eh bien, c’est profondément injuste…
SONIA MABROUK
Et c’est votre électorat en passant…
BRUNO LE MAIRE
Mais Sonia MABROUK, ce qui est très intéressant, c'est que tous ceux qui nous disent : mais votre réforme, elle est dure, elle est brutale, elle est injuste, proposent des choses mille fois plus dures et mille fois plus injustes quand ils disent : il faut aller chercher l'argent chez les retraités, mais allez expliquer à un retraité, qui a travaillé toute sa vie, qui a mérité sa pension, qui est une pension indexée, une fois encore, sur l'inflation et pas sur les salaires, et qui donc, année, année, par rapport à un salarié, perd du pouvoir d'achat relativement, allez lui dire qu'on va lui augmenter les prélèvements sur ses pensions, allez lui dire qu'on va lui baisser sa pension, ça, ce serait profondément injuste.
SONIA MABROUK
On va conclure, Bruno LE MAIRE, sur un autre sujet, les influenceurs, qui sont dans le viseur, votre viseur, mais pas seulement, mieux encadrer la promotion de produits, de services, qui passent aujourd'hui par des enquêtes sur leurs pratiques commerciales qui sont menées, ces enquêtes, et vont continuer à l'être, ça concerne combien d'influenceurs tout cela ?
BRUNO LE MAIRE
Eh bien, ça concerne plus de 130.000 influenceurs, qui sont directement concernés, nous, nous avons lancé des enquêtes avec la DGCCRF sur ces influenceurs. Nous avons vu que 60 % ne respectaient pas les règles, eh bien, c'est quelque chose qui n'est pas acceptable. Nous avons lancé une consultation pour modifier ces règles et les renforcer, on a déjà 12.000 participants sur cette consultation, les règles sont les mêmes pour tous, les influenceurs aujourd'hui, ils ont beaucoup de poids, eh bien, donc, ils ont beaucoup de responsabilités…
SONIA MABROUK
Et c’est une jungle aujourd’hui, ce n’est pas encadré, ce n’est pas suffisamment contrôlé ?
BRUNO LE MAIRE
Il y a des règles, elles ne sont pas suffisamment respectées, elles doivent être renforcées, nous allons le faire, il y a des propositions d'ailleurs de parlementaires qui sont les bienvenues, on va essayer d’arriver à un texte unique sur ce sujet-là, mais on ne peut pas accepter que des pratiques illégales se répandent sur Internet, que des gens placent des produits sans dire qu'ils sont payés pour placer ces produits, qu’il y ait des pratiques commerciales qui soient frauduleuses, Internet, c'est comme le commerce physique, ça doit être le lieu du respect des règles et du respect des autres.
SONIA MABROUK
Et est-ce qu’on peut dire merci à un lanceur d’alerte, il se voit comme cela, à Booba ? Même combat, Bruno LE MAIRE, Booba, même combat ?
BRUNO LE MAIRE
Tous les lanceurs d’alerte sont…
SONIA MABROUK
Je ne pensais pas le dire un jour, mais pourquoi pas…
BRUNO LE MAIRE
Vous savez, parfois, les choses les plus surprenantes arrivent en politique, ce qui fait le charme de ce métier…
SONIA MABROUK
N’est-ce pas. Merci Bruno LE MAIRE d'avoir été notre invité ce matin. Bonne journée à vous, ainsi qu'à nos auditeurs.
DIMITRI PAVLENKO
Merci Bruno LE MAIRE. Merci Sonia. Je retiens ce chiffre, 3 millions de chèques carburants en 2 semaines, tiens, la bonne adresse, parce qu'il y a aussi des arnaques pour ce genre de choses « ict.impots.gouv.fr », c’est le seul endroit pour demander ce chèque carburant, c'est très important.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 25 janvier 2023