Interview de M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Sud Radio le 9 mars 2023, sur la réforme des retraites, la sécheresse, les risques d'incendie, les vols en jets privés en France, les zones à faible émission et la voiture électrique.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : Sud Radio

Texte intégral

PATRICK ROGER
Bonjour Christophe BECHU.

CHRISTOPHE BECHU
Bonjour Patrick ROGER.

PATRICK ROGER
On va parler avec vous des préoccupations de tous aujourd'hui parce qu’il y a les factures de l'énergie, donc comment faire face à cela et comment faire face aussi avec l'inquiétude sur la sécheresse, la grogne des automobilistes contre les ZFE qui vont en empêcher de rouler pour certains, les doutes sur le tout électrique aussi avec la décision de l'Allemagne en en ce moment, le blocage sur le moteur thermique, et puis bien sûr les questions politiques du moment avec la réforme des retraites notamment. Commençons donc par l'article 7, le report de l'âge de départ à la retraite cette nuit voté au Sénat. Si la mobilisation et les grèves continuent, est-ce que le gouvernement devra entendre quand même la contestation d'une manière ou d'une autre, Christophe BECHU ?

CHRISTOPHE BECHU
Cette réforme des retraites, on ne la fait pas pour faire plaisir, on ne la fait pas pour être populaire, on la fait parce qu’on a une espérance de vie qui s'allonge, on a un système de retraite par répartition qui est une chance pour ce pays et qui est une expression concrète de solidarité mais qui nécessite, à partir du moment où on a moins de cotisants pour plus de retraités, qu'on travaille davantage pour garantir cette solidarité. Tous les pays européens autour de nous l'ont fait. Conduire cette réforme, c'est nécessaire. Le vote de cette nuit marque une étape supplémentaire dans le fait de tenir de surcroît cet engagement que le président de la République a pris devant les Français, et si nous respectons et les oppositions et ceux qui manifestent, dans le même temps on respecte aussi les engagements qui ont été pris.

PATRICK ROGER
Mais alors il faut quand même du dialogue ou pas ? Parce que si cette mobilisation continuait, on ne peut pas être insensible, que ce soit à l'Elysée et à Matignon.

CHRISTOPHE BECHU
Ce dialogue, je me permets de vous le dire, il a existé. Le débat, il est aujourd'hui sur les modalités de mise en oeuvre. A l'origine il y avait la perspective des 65 ans, il y avait sur les carrières longues des décisions qui ont été prises tout au long de la discussion grâce au dialogue. Le dialogue il se poursuit. Il y a d'autres articles qui vont faire l'objet de ces discussions, il y aura ensuite une commission mixte paritaire qui aura à se pencher sur la position de l'Assemblée et du Sénat. Toute la phase parlementaire, elle est dans le dialogue. Il y a eu des mois de concertation préalable avec les organisations syndicales, et d'ores et déjà le projet qui a été voté cette nuit, ça n'est pas celui qui existait il y a 6 mois. Il a tenu compte de ces phases de dialogue et, pour une part, de ces contestations.

PATRICK ROGER
Et il peut encore changer avec la commission mixte paritaire quand ça arrivera entre sénateurs et députés et on suivra tout ça.

CHRISTOPHE BECHU
Bien entendu le dialogue parlementaire sert à ça et je veux saluer un Sénat qui, plutôt que d'avoir l'obsession de l'obstruction, a eu l'obsession au contraire du dialogue pour arriver aux articles.

PATRICK ROGER
Vous saluez vos anciens amis LR.

CHRISTOPHE BECHU
Je salue une assemblée…

PATRICK ROGER
Ce sont des alliés.

CHRISTOPHE BECHU
Qui est parfois moins spectaculaire que l'Assemblée nationale mais qui fait preuve de davantage de sagesse.

PATRICK ROGER
Venons-en aussi à l'un des gros sujets du moment et inquiétude, c'est la sécheresse. Alors vous avez annoncé des arrêtés sécheresse dans une douzaine de départements. Est-ce qu'il va y avoir un plan national de restrictions ?

CHRISTOPHE BECHU
D'abord on est dans une situation qui est compliquée. Je sais qu'il pleut sur une large partie du pays et je m'en réjouis. On a malheureusement des inquiétudes qui se concentrent à la fois sur le pourtour méditerranéen et sur tout le couloir rhodanien parce qu'on n'a pas de pluies abondantes prévues dans les prochains jours, mais je veux dire qu'on est dans une situation qui est pire que l'année dernière à la même date. On avait avant le début des pluies de ce début de semaine en gros deux mois de retard sur le remplissage des nappes phréatiques, pas sur la moyenne : sur l'avant été 2022 dont on a vu ce qu'il a donné. A cause de la sécheresse, on a commencé l'automne en retard, on a eu moins de pluie pendant l'hiver qu'on en a eu l'hiver dernier, donc on est dans une situation de crise où tous les voyants sont au rouge. Si on a eu des pluies abondantes qui durent, on pourra passer à côté des difficultés. Mais gouverner c'est prévoir, prendre des mesures dès aujourd'hui c'est éviter des décisions compliquées. Il y a donc deux choses : à la fois les arrêtés pour lesquels j'ai dit au préfet de ne pas avoir la main qui tremble et un plan national qui sera présenté dans le courant de ce mois de mars, dans quelques jours maintenant, et qui va se pencher avec une cinquantaine de mesures sur tous les sujets. Comment on lutte contre le gaspillage, comment on va chercher les eaux usées pour avoir des alternatives.

PATRICK ROGER
On pourra utiliser les eaux usées notamment, oui.

CHRISTOPHE BECHU
La réutilisation des eaux usées, la question autour de l'eau de pluie, la question autour de la lutte contre les fuites, la sensibilisation de de tout un chacun sur son niveau de consommation d'eau potable. Dans ce studio, chacun d’entre nous c'est en moyenne 149 litres d'eau potable par jour et par personne que nous consommons en France.

PATRICK ROGER
On consomme trop alors ? Est-ce qu'il faut arrêter de prendre des douches tous les jours alors ? Non mais ça peut être une des questions bien sûr, ce qu’on ne faisait pas auparavant.

CHRISTOPHE BECHU
Une douche ce n'est pas 150 litres d’eau, c’est la somme de nos comportements évidemment qui aboutit à ça. Ce que je veux dire c'est qu’on a vécu avec quasiment une illusion d'abondance en pensant qu'on ne manquerait jamais d’eau, la réalité du dérèglement climatique c'est que nous aurons moins d'eau disponible et que comme l’eau c’est la vie, qu'on en a besoin pour l'agriculture, qu’on en a besoin pour boire, pour se nourrir, pour se laver, il faut qu'on soit attentif à ne pas la gaspiller. C'est ça le sujet. Et donc aussi bien aller chercher des sources d'eau complémentaires que de ne pas gaspiller celles dont on dispose et enfin de veiller à la qualité de cette eau qui ne doit pas être un sujet tabou, parce qu'on a à la fois un sujet de quantité et dans beaucoup d'endroits un sujet de qualité.

PATRICK ROGER
Et est-ce que ça passera par une augmentation aussi du prix de l'eau ?

CHRISTOPHE BECHU
On a un prix de l'eau qui, en France, tourne aux alentours de 4 euros du mètre cube, ce qui n’est pas énorme mais avec d'énormes variations dans ce pays et donc il n’y a pas de raison qu'on ait une hausse généralisée. Il y a des endroits où on a un prix trop bas parce qu'il n’y a pas eu de travaux, en particulier il y a trop de fuites. Dans ces endroits-là, évidemment qu'il y aura vocation à ce qu'il y ait des travaux qui soient conduit pour arrêter de perdre 50, 60, 70% de l'eau potable et ça passera par des travaux qui nécessiteront des augmentations. Dans d'autres, il y a des endroits où la gestion est satisfaisante. On est sur une gestion déconcentrée et décentralisée de ces sujets.

PATRICK ROGER
Oui, il pourra y avoir des aides éventuellement aussi pour les particuliers pour s'équiper, pour faire des économies tel que vous le disiez ?

CHRISTOPHE BECHU
Vous verrez ça dans quelques jours. La récupération des eaux de pluies, le fait d'accompagner les collectivités qui peuvent avoir des difficultés, la partie financement elle fait évidemment partie du plan.

PATRICK ROGER
Oui. Je voudrais bien qu'on vienne un instant aussi sur l’achat de Canadair. Julien BAYOU à ce micro a dit que vous n'avez pas anticiper avec ce qui s'est passé l'année dernière et puis la sécheresse et les risques d'incendie. Est-ce que vous avez acheté de nouveaux Canadair ?

CHRISTOPHE BECHU
Je sais que Julien BAYOU a été très occupé par beaucoup d'autres sujets que l'écologie au cours de ces derniers mois mais ce n'est pas une raison pour dire n'importe quoi. Le président de la République au mois d'octobre dernier à l'Elysée a expliqué que les leçons que nous tirions de cette sécheresse, uniquement sur l'aspect forestier et lutte contre les feux de forêt, allait prendre plusieurs formes. 50 millions d'euros débloqués par les SDIS, c’est fait, des locations de Canadair et d'hélicoptères parce que ce n'est pas en commandant en octobre que vous faites construire dans les usines et que vous faites livrer les nouveaux modèles. Donc les commandes elles ont été passées, elles prennent du temps pour obtenir les livraisons et nous aurons dès cet été des engins loués.

PATRICK ROGER
Mais vous n’avez pas acheté, c'est loué.

CHRISTOPHE BECHU
Si, si, les achats ont été déclenchés. Ce que je veux dire, c'est que la livraison elle n'interviendra pas mais on disposera bien d'appareils supplémentaires pour l'été en cours. La suite dans quelques jours ce sera la campagne sur les obligations légales de débroussaillement, parce que 95% des feux qu'on a connus ils sont d'origine humaine. Donc on a un sujet quand même sur le démarrage de ces feux, pas seulement sur le fait de les éteindre. Il y a donc le renforcement des pompiers, les campagnes de recrutement, les moyens supplémentaires mis à disposition des SDIS, les engins aériens avec des prépositionnements qui pourraient se faire plus seulement à partir d'une base unique d'un point de vue national parce qu'on a bien vu qu'on avait des départs de feu aujourd'hui au nord de la Loire, en Bretagne et ailleurs, et dans ce plan global je vous assure qu’il y a eu énormément de décisions qui ont été prises et qui sont d'ores et déjà mises en avant.

PATRICK ROGER
Oui. Autre question et là vous êtes interpellé aussi par les écologistes et toujours Julien BAYOU qui veulent, lors de la niche parlementaire dans quelques semaines à l'Assemblée nationale, proposer l’interdiction des vols en jets privés en France. Est-ce qu'il faut les réguler alors ?

CHRISTOPHE BECHU
Les réguler et faire en sorte qu’ils soient moins attractifs que d'autres types de mode de déplacement, ça n'est pas un sujet. Ce que je veux dire, c'est que quand les écologistes étaient au pouvoir le kérosène coûtait deux fois moins cher que l'essence. C'est ce gouvernement et cette majorité qui, à l'automne dernier, a mis fin à cette anomalie en augmentant de 70% les taxes qui pèsent sur le kérosène qui est mis dans les jets privés. En revanche, aller expliquer qu’il suffit d'interdire les jets privés de pour régler une partie du problème, c'est l'écologie du buzz et ça relève davantage de la lutte des classes que de la transition écologique.

PATRICK ROGER
Ils disent un jet privé entre Paris et Nice par exemple, c'est la consommation de votre carburant et en pollution aussi de ce que vous faites sur une année en voiture.

CHRISTOPHE BECHU
Les jets privés, c'est 0,1% des émissions nationales de notre pays. On émet en France 400 millions de tonnes, les jets privés c'est 400 000 tonnes. Donc qu'on se demande comment on diminue, pourquoi pas, qu'on explique que c'est en les interdisant qu’on va régler le problème, je vais vous dire un truc pour parler vrai. C'est bien plus efficace d'investir dans le nucléaire pour décarboner une partie de notre de nos émissions que de penser qu’en interdisant les jets privés on va régler le problème.

PATRICK ROGER
Autre sujet d'inquiétude pour les Français les plus modestes notamment. Si les ZFE, les zones à faible émission dans les grandes agglomérations, il y a un calendrier qui est prévu pour éliminer de ZFE les Crit’Air 3, les voitures Crit’Air 3, Crit’Air 4, Crit’Air 5. Il y a un calendrier. Devant la grogne, est-ce que vous allez revoir le calendrier ?

CHRISTOPHE BECHU
On dit beaucoup de choses, beaucoup de choses fausses sur sur tout ça.

PATRICK ROGER
Et des choses vraies aussi.

CHRISTOPHE BECHU
Des choses vraies aussi mais on va commencer par deux choses vraies simples. Il y a 14 pays en Europe où il y a des zones à faible émission, il y a 270 villes européennes dans lesquelles ça s'applique et dans ces villes, quand la qualité de l'air s'améliore il y a des endroits où ces ZFE sont supprimées. C'est le cas en Allemagne, c'est le cas en Hollande où à partir du moment où ils sont sortis des seuils, ils commencent à alléger les restrictions. Je précise que cette mesure, elle est prise pour des raisons de santé publique, 40 000 morts liés aux particules fines, 7 000 au dioxyde d'azote, et que la France a été condamnée par 3 fois par le Conseil d'Etat, par la Cour de justice de la Communauté européenne pour des dépassements de seuil.

PATRICK ROGER
Inaction climatique.

CHRISTOPHE BECHU
Non, pour de dépassements de seuil, dépassements de seuil de pollution atmosphérique en l’espèce. Les villes qui ne sont pas en dépassement de seuil n'ont aucune obligation, vous m'entendez bien, aucune obligation d'aller durcir, multiplier les règles. Elles peuvent se contenter d'éliminer les voitures qui ont plus de 25 ans, point. Et on a aujourd'hui une polémique qui est parfois alimentée par des maires qui jouent au pompier pyromane, qui ont dit : on va laver plus blanc que blanc ou plus vert que vert, on va aller encore plus loin que ce que dit la loi, on va prendre des mesures pour les artisans, pour les professionnels – ce n'est pas dans la loi - on va prendre des mesures pour les Crit’Air 2, ce n'est pas dans la loi, on va aller plus vite que ce que dit la loi, ce n'est pas dans la loi. Donc il y a un moment où il faut remettre les choses à leur place. Est-ce que les ZFE sont utiles pour la santé de nos concitoyens ? Oui. Qui en souffre ? Les plus modestes, les personnes âgées, les jeunes enfants. Est-ce qu'elles posent des difficultés d'application ? Oui parce qu'aujourd'hui, je n'ai pas les véhicules propres d'occasion disponibles pour être capable d'assurer dans des conditions sociales qui soient totalement acceptables partout cette transition. Est-ce que nous y remédions ? Oui. J'ai confié au maire de Toulouse et à des élus de Strasbourg le fait de proposer au mois de juin des mesures pour renforcer l'acceptabilité sociale de la mesure et les aides ou les harmonisations dont nous aurions besoin. Mais je veux sortir des fake news qui consisteraient à penser que c'est une mesure franco-française, faites pour emmerder les gens, liberticide, en oubliant de dire que c'est un impératif de santé publique, que ça existe ailleurs et qu’on est évidemment très ouvert au dialogue sur la manière de l’appliquer de manière intelligente.

PATRICK ROGER
Mais vous renvoyez la balle un peu aux maires en disant : c'est eux qui vont trop loin.

CHRISTOPHE BECHU
Pas tous les maires.

PATRICK ROGER
Est-ce que vous pouvez siffler la fin de la partie à un moment donné alors autour de ça ?

CHRISTOPHE BECHU
Au mois de juin, j'aurai l'occasion de faire des annonces sur le sujet. Ce que j'ai fait, c'est que j'ai lancé une concertation avec les maires des villes qui sont concernées pour avoir leur retour d'expérience, et vous avez d'ores et déjà aujourd'hui entre Toulouse et Lyon, entre Reims et Strasbourg, des différences dans la manière dont les élus s'en sont saisis et les appliquent.

PATRICK ROGER
Là, vous suspectez un peu les élus alors plus écolos. Je pense en fait à Lyon, à Grenoble par exemple qui vont trop loin.

CHRISTOPHE BECHU
Non. Ce qui m'énerve, c'est le double discours qui consiste à dire : c'est scandaleux, on n'a pas de radars pour aller verbaliser les automobilistes, et de l'autre : il faut faire attention à ce que pensent les gens. Il faut choisir à un moment. Ce que je veux dire, c'est que j'assume pleinement une position dans laquelle je dis : nous avons besoin des ZFE pour des raisons de santé publique mais mettre en place une ZFE, ce n’est pas une conception d'écologie punitive, c'est une mesure nécessaire en termes de santé publique. On a le droit d'être intelligent dans la manière dont on l’applique sans en faire un étendard politique.

PATRICK ROGER
Mais ça peut être considéré comme une mesure antisociale et vous craignez une sorte de mouvement de Gilets jaunes potentiellement ?

CHRISTOPHE BECHU
Ce que je dis, c'est que dans la façon dont elles sont présentées, on alimente la contestation là où, je le redis, dans 14 pays d'Europe, dans 270 villes elles existent et parfois depuis 10, 15, 20, 25 ans. Donc sur ce sujet, il faut qu'on soit calme, qu'on refasse de la pédagogie et qu'on ne cherche pas à en faire un étendard politique. C'est un enjeu de santé publique.

PATRICK ROGER
Il nous reste trois minutes Christophe BECHU. Vous êtes ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, et pour rester sur la voiture, il y a ce dossier sur le tout électrique et sur la fin du moteur thermique qui est prévue en 2035 par l'Europe. L'Allemagne a refusé de voter là au niveau européen, un peu à la surprise générale. Est-ce que ça veut dire que ce dossier et sur le calendrier va être remis en cause ?

CHRISTOPHE BECHU
A l'intérieur de la coalition allemande, le plus petit des partenaires est en train aujourd'hui de remettre en cause la position allemande. Mais je me permets de dire que l'Allemagne, elle a validé ce calendrier il y a 6 mois, le Parlement européen l’a validé il y a quelques semaines et on est dans une crise politique interne à l’Allemagne. On a évoqué les jets privés, 400 000 tonnes d'émissions dans notre pays. Les véhicules thermiques, c'est 85 millions de tonnes, d'accord. La somme de toutes les voitures thermiques de ce pays, c'est plus que l'agriculture, c'est plus que toute l'industrie, c'est plus que tout le résidentiel. Décarboner notre parc de véhicules, c'est le seul moyen de lutter contre le réchauffement climatique. Si on ne fait pas ça…

PATRICK ROGER
Oui mais en Allemagne Christophe BECHU, on dit qu’il y a d'autres solutions, qu'il y a des carburants de synthèse, qu'on n’y arrivera pas, qu'on va dans le mur. TOYOTA, l'un des plus grands constructeurs, refuse d'aller vers le tout électrique. Qu'est-ce que vous répondez à ça ?

CHRISTOPHE BECHU
Je réponds que VOLKSWAGEN explique qu’il ne faut pas remettre en cause le calendrier de 2035. Que VALEO explique…

PATRICK ROGER
Oui mais VOLKWAGEN, vous le savez, recherche une virginité après ce qui s’est passé.

CHRISTOPHE BECHU
Que VALEO dit la même chose, que RENAULT a investi dans le pôle Electricity dans les Hauts-de-France pour pouvoir produire 500 000 véhicules électriques.

PATRICK ROGER
Après avoir eu des doutes.

CHRISTOPHE BECHU
Oui. Qu'on ait des doutes quand on est dans une transition, c'est une réalité. Les carburants de synthèse, c'est vrai, on en a besoin mais on en a besoin pour l'aérien mais pour le maritime, parce qu'on n'est pas prêt là d'aller électrifier les avions ou les bateaux pour faire des longues traversées. Les biocarburants c'est une impasse, on n'a pas assez de surface sur la planète pour produire des biocarburants qui remplaceraient le pétrole, et il vaut mieux utiliser les terres pour se nourrir. Donc électrifier le parc 1 : c'est donner à nos industriels un signal pour qu'on arrête aujourd'hui d'être dans une situation où on a une invasion chinoise de notre marché automobile parce qu'on ne se prépare pas cette transition. Et donc si on veut avoir une transition qui soit bonne pour notre industrie et pour l'emploi, il faut prendre les devants, il faut regarder le problème en face.

PATRICK ROGER
Mais qu’est-ce qu’on fait avec l'Allemagne là ? Il y a une crise qui est en cours, qui couve non ?

CHRISTOPHE BECHU
On a un sujet avec les Allemands, entre les centrales à charbon qu'ils ont réouvert, la position qu’ils sont en train de prendre. On a aujourd'hui sur les questions écologiques une Allemagne qui a arrêté de montrer le cap, et on voit. bien les limites de leur coalition aujourd'hui. A l'échelle des pays européens, il n'y a que quatre Etats aujourd'hui qui remettent en cause ce calendrier sur les moteurs thermiques, parce que si on le remet en cause c’est toute la stratégie de décarbonation européenne qui tombe.

PATRICK ROGER
Oui, merci Christophe BECHU.

CHRISTOPHE BECHU
Merci à vous.

PATRICK ROGER
D'un mot aussi parce que vous êtes un proche d'Edouard PHILIPPE. Ce matin dans le journal Le Parisien, il y a un article qui dit que le torchon brûle un peu entre Emmanuel MACRON et Edouard PHILIPPE, qu’en privé l'ancien Premier ministre dit qu’il ne comprend pas pourquoi il y a des attaques de la macronie. Vous, vous êtes finalement au centre de ça ; qu'est-ce que vous pouvez dire ?

CHRISTOPHE BECHU
Je peux vous dire que ceux qui parlent ne savent pas et que ceux qui savent ne parlent pas, et qu’on surjoue les difficultés dans un contexte où aujourd'hui la majorité, elle s'efforce de tenir bon et de voter les engagements pris par le président de la République.

PATRICK ROGER
Merci Christophe BECHU. Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires était l'invité ce matin de Sud Radio.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 10 mars 2023