Interview de Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, à France Info le 5 avril 2023, sur la baisse en France des émissions de CO2, la sobriété énergétique, les prix de l'énergie, la pénurie de carburant dans les stations-service, le programme de maintenance des centrales nucléaires, le plan eau, les trottinettes électriques en libre-service et le stationnement des yachts.

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Média : France Info

Texte intégral

MARC FAUVELLE
Bonjour Agnès PANNIER-RUNACHER.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour Marc FAUVELLE.

MARC FAUVELLE
Alors qu’elles avaient bondi en 2021, les émissions de CO2 sont reparties à la baisse en France l’an dernier - 2,5%. C’est grâce à l’action du gouvernement ou grâce à une météo plutôt clémente cet hiver ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Quand vous regardez la baisse du 4e trimestre, on voit bien que le plan sobriété, que nous avons lancé avec la Première ministre, la baisse elle est de - 8,5%, elle est même de - 15% dans le secteur tertiaire et résidentiel, eh bien ça c'est l’effet du Plan sobriété. Ce qui montre que quand on agit, ça fonctionne, ça marche, et je veux vraiment remercier tous ceux qui se sont mobilisés, les entreprises, les administrations, les collectivités locales, mais surtout tous les Français, qui ont permis cette baisse des émissions de gaz à effet de serre.

MARC FAUVELLE
Même avec ces chiffres, le Haut conseil pour le climat nous dit que l’on n’a fait que la moitié du chemin, l’an dernier, il faudrait baisser chaque année nos émissions de 4,7%. Est-ce que vous êtes sûre que la France tiendra ses objectifs ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, déjà, ces objectifs, ce sont ceux de 2018. 2023 nous tenons nos objectifs, c’est-à-dire que dans le budget carbone dont nous disposons aujourd’hui, nous sommes, nous respectons nos objectifs…

MARC FAUVELLE
Parce qu’il y a eu le Covid au milieu.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, pas parce qu’il y a eu le Covid, mais parce que nous avons vraiment baissé, là, à 408 tonnes, 408 millions de tonnes, évidemment, nous avons vraiment baissé et tenu nos objectifs. Ce qui s’est passé, c’est que nous avons réhaussé nos objectifs, d'un point de vue européen, et nous allons devoir revoir à la hausse nos efforts de baisse des émissions de CO2 pour 2024…

MARC FAUVELLE
Donc il faudra amplifier les efforts faits l'hiver dernier.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement. A partir de 2024 il va falloir continuer. C'est pour ça que je poursuis sur l'ensemble de la politique énergétique. Vous savez, baisser les consommations et notamment la sobriété, mais également l'efficacité énergétique, changer les lumières, rénover thermiquement, faire baisser les émissions dans l'industrie, c'est bien parti. Et de l'autre côté, produire plus d'énergie décarbonée en France, et à la fois l'accélération sur les énergies renouvelables, que je porte, et nous venons de voter une loi qui a été promulguée sur ce sujet-là, et la relance de la filière nucléaire.

SALHIA BRAKHLIA
Pardon, Agnès PANNIER-RUNACHER, vous dites : ça a marché, parce qu'on a appelé tout le monde à la sobriété. Il y a eu aussi les prix de l'énergie qui étaient très importants, et donc ça a forcé les entreprises à moins produire, à avoir moins d’activité, il y a ça aussi derrière cette baisse de consommation.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, pas tout à fait, parce que comme je vous l’ai indiqué, la baisse elle a été particulièrement forte dans des secteurs qui payaient le même prix de l'énergie en début et en fin d'année. Et on voit qu'en fin d'année, sur ce 4e trimestre, au mouvement où nous sommes…

SALHIA BRAKHLIA
Donc il y a eu des efforts…

AGNES PANNIER-RUNACHER
… dans le plan sobriété il y a une vraie diminution, une diminution très forte, notamment sur la consommation de gaz. Mais vous avez raison de souligner que dans le secteur industriel, en revanche, le prix de l'énergie a eu un impact. Et tout le travail que nous menons avec le plan sobriété, c'est de faire en sorte que notre consommation d'énergie baisse, sans impacter l'activité. C'est un enjeu majeur aujourd'hui et encore une fois je veux remercier les entreprises qui sont mobilisées aussi dans ce sens.

MARC FAUVELLE
Vous en avez réuni une soixantaine d'entreprises en début de semaine, justement pour leur parler de sobriété. L'objectif c'est de réduire de 40% notre consommation d'énergie d'ici 2050. Qu'est-ce qui va changer dans le travail des Français, dans les entreprises dans les mois qui viennent ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, première chose, faire le bilan de ce qu'elles ont fait ces entreprises, en matière d'économies de chauffage, d'éclairage, d'organisation du travail dans les bâtiments. Si vous organisez autrement les bâtiments, si par exemple des zones qui ne sont pas utilisées sont fermées, ne sont pas chauffées, vous gagnez très vite, vous baissez très vite votre consommation d'énergie. Ensuite nous avons présenté à ces entreprises une étude sur le télétravail. Cette étude elle montre que lorsqu'on organise bien le télétravail, ça peut être un vrai levier de diminution de la consommation énergétique, collective, c'est-ce que…

MARC FAUVELLE
Mais est-ce que la facture elle ne se reporte pas sur ceux qui sont à la maison, c’est-à-dire sur les ménages ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Précisément, c'est ce que nous voulions mesurer. C'est-à-dire que nous l'avons fait sur tous les bâtiments qui dépendent du ministère de la transition énergétique, avec l'ADEME, donc à Paris, en banlieue et en province, pour regarder, avec des agents publics étaient volontaires et qui nous ont communiqué leur consommation lorsqu'ils étaient en télétravail, pour voir s’il y avait un effet rebond.

MARC FAUVELLE
Et donc on est sûr que le télétravail c'est, pardon du raccourci, mais bon pour la planète et bon pour la sobriété, qu'il n’y a pas un report sur les domiciles des personnes qui sont à la maison ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
En fait, ce que montre l'étude, c'est que lorsqu'on organise bien le télétravail, l'effet rebond chez les salariés est minime, là où les économies faites dans le site professionnel sont très importantes. Et donc ça devient un objet de dialogue social, c'est-à-dire que l’on peut mettre les choses sur la table et dire : ces économies que nous faisons collectivement, comment on fait pour organiser le télétravail, comment on fait aussi pour diminuer les temps domicile – travail, ce qui peut avoir un intérêt pour les salariés, pour les agents publics, et comment on compense éventuellement l'effet rebond chez les salariés.

SALHIA BRAKHLIA
Mais ce que dit l'agence aussi, l'Agence pour l'environnement, ce qu'elle dit aussi c'est que le télétravail n'a qu'un impact très faible sur la consommation d'énergie lorsqu'une partie des salariés seulement est absente, mais il permet des économies effectivement beaucoup plus globales si tous les salariés sont en télétravail.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Tout à fait, c'est une organisation…

SALHIA BRAKHLIA
Combien d'entreprise peuvent se permettre ça ? Combien d'entreprises peuvent se permettre de fermer le bâtiment et de dire, ok, tout le monde à la maison.

MARC FAUVELLE
Tout le monde à la maison le vendredi ou le lundi.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien je crois que l’on a pu montrer pendant la période Covid qu'on était capable d'organiser beaucoup d'entreprises avec du télétravail.

SALHIA BRAKHLIA
Oui, mais on avait interdiction de sortir.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Après, ce n’est pas, et c'est là où vous avez raison de le souligner, ça ne va pas être une mesure qui va être imposée. On voit bien que chaque entreprise a son mode de fonctionnement particulier, que des entreprises nécessitent du présentiel et que du coup elle doit aménager le télétravail d'une manière différente, c'est-à-dire isoler ceux qui doivent être présents de ceux qui peuvent se passer d'une présence, et ce n’est pas nécessairement toutes les semaines. Donc c'est un travail qui doit être fait au plus près des entreprises. Moi ce que je souhaite, c'est que sur le télétravail comme sur les autres sujets, sur la sobriété, ça parte du terrain, ça parte de la réalité de l’activité…

SALHIA BRAKHLIA
Mais sans obligation.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Sans obligation parce que cette méthode elle a fonctionné. Regardez les 19° dans les bureaux. Cette réglementation elle existe depuis 1978. Vous n'étiez probablement pas née, et moi j'étais encore en babygros. Elle n'a jamais été appliquée. En 2022 elle est appliquée, parce que nous faisons son le choix de faire confiance aux Français, aux entreprises, aux administrations. Parce que nous suivons aussi…

SALHIA BRAKHLIA
Parce qu’il y a risques de coupures d’électricité, aussi, Madame la Ministre. Là par exemple, en ce qui concerne la climatisation, vous dites : il faut, il faudra déclencher la climatisation qu'à partir de 26°. Donc cet été, si dans les magasins, la clim est déclenchée, les portes sont ouvertes, vous faites quoi ? Il y aura des contrôles ? S'il n’y a pas d'obligation, il n’y a pas de contrôle ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, d'abord il y a un texte sur le cas particulier des magasins, prévoit des amendes s'il n'est pas respecté, c'est-à-dire si on climatise portes ouvertes, et ça il appartiendra aux collectivités locales de l'appliquer, aux maires, aux particuliers…

MARC FAUVELLE
Aucun commerce ne devra garder sa porte ouverte si la clim est allumée ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça c'est ce que prévoit la loi aujourd'hui. Mais au-delà de ça…

MARC FAUVELLE
Vous faites vos courses, enfin…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais Marc FAUVELLE, au-delà de ça, le sujet nous avons aujourd'hui, c'est de changer de comportement, c'est pour ça que nous jouons la carte de l'accompagnement, de l'incitation, du fait d'avoir une mobilisation générale. Ce qu'a montré cet hiver, c'est qu'on en était capable. Ce que montrent les trois premiers mois, janvier, février, mars, de consommation énergétique, c'est que nous continuons à baisser nos consommations, et pourtant le risque de délestage s'est éloigné…

MARC FAUVELLE
Parce que les Français se prennent la vague de l'inflation aussi, parce que beaucoup c'est une sobriété qui est imposée, de fait par les factures aussi.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Pas tout à fait, parce que dans les entreprises, encore une fois, leur contrat d'énergie il est négocié aujourd'hui, et avec un prix qui est plat…

MARC FAUVELLE
Les particuliers, ils ont eu 15% de hausse là.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les particuliers ont eu effectivement un prêt en augmentation, mais qui est encore très largement déconnecté de la réalité des prix du marché.

MARC FAUVELLE
On va parler si vous le voulez bien dans quelques minutes, des prix de l'énergie, puisqu'ils baissent assez fortement même depuis un an sur les marchés, mais ça ne se répercute pas pour l'instant sur les factures, vous êtes nous dire si c'est normal.

SALHIA BRAKHLIA
Avec la ministre de la Transition énergétique Agnès PANNIER-RUNACHER, en un an le prix de l’électricité sur les marchés a été divisé par trois, quand est-ce que les Français le verront sur leur facture ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors je veux d’abord dire que les Français en fait paient aujourd’hui un prix de l’électricité qui est parmi les plus bas d’Europe. Et donc ils ne sont pas évidement soumis à la volatilité des prix sur les marchés.

SALHIA BRAKHLIA
Mais ils ont subi l’augmentation aussi.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ils n’ont pas payé quand le prix a augmenté et effectivement aujourd’hui ils ne sont pas impactés quand le prix diminue, encore faut-il que ce prix converge vers le prix que paient aujourd’hui les Français sur leur facture, les Français, je le redis ont été les plus protégés en Europe s’agissant de leur facture d’électricité, c’est important que ça se sache, les Allemands paient un prix largement supérieur.

MARC FAUVELLE
Mais il n’y a pas de baisse du tarif réglementé à l’horizon dans les mois qui viennent ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Le tarif réglementé, il faut que le prix de l’électricité se maintienne à un niveau qui soit cohérent avec le prix du tarif réglementé, aujourd’hui ce n’est pas le cas.

MARC FAUVELLE
Il est toujours inférieur, aujourd’hui on continue à payer notre électricité moins chère qu’elle ne se vend sur les marchés ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
On est aujourd’hui dans les eaux qui sont assez similaires, mais elle a baissé en février, le prix a remonté à nouveau en mars, vous voyez bien que ce prix ne cesse d’évoluer à la hausse et à la baisse et nous ce que nous avons fait, c’est de faire en sorte de plafonner le prix que payaient les Français à un niveau bien plus faible que grosso modo la moyenne du prix de l’électricité sur les marchés.

MARC FAUVELLE
Mais c’est un plafonnement à la hausse, aujourd’hui il y a un bouclier…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Et donc c’est un bouclier incomparable.

MARC FAUVELLE
Mais si le prix baisse, vous n’empêcherez pas les prix de baisser, le bouclier ne vaudra pas pour faire baisser les prix…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Bien entendu, c'est-à-dire que si demain vous Marc FAUVELLE dans votre entreprise où vous renouvelez votre contrat d'électricité à un prix qui est inférieur à celui de de votre TPE du marché, vous paierez ce prix qui est inférieur à celui du bouclier, mais je crois qu'aujourd'hui on n’est pas encore complètement arrivé à ce niveau-là.

MARC FAUVELLE
10 % des stations-service en rupture totale ou partielle de carburants ces derniers jours, jusqu'à la moitié d'entre elles dans certains départements que faites-vous pour résoudre la situation ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors. je veux rappeler les mesures que nous avons prises depuis le début de la mobilisation dans les raffineries, vous savez nous suivons…

MARC FAUVELLE
Je précise pour ceux qui nous suivent uniquement à la radio que vous sortez vos fiches, vous allez lire ce que vous allez faire.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, non je ne lis pas ce que je vais faire, je vous dis ce qu'on a fait. Nous suivons heure par heure la situation, nous avons débloqué des stocks stratégiques depuis début mars, nous débloquerons les dépôts qui font l'objet de blocage, donc là il ne s’agit pas de grève, il s'agit de blocages qui empêchent la sortie du carburant de ces dépôts et nous réquisitionnons de manière très mesurée pour permettre de soulager les situations de manque de carburant.

MARC FAUVELLE
Est-ce que tout ça vous fait dire que la situation va s'améliorer à la pompe dans les jours qui viennent ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous avez pu constater que la situation s'était améliorée dans le Sud.

MARC FAUVELLE
Ça dépend des régions en fait.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Justement j'y viens. Elle s'est améliorée dans le sud en région PACA, elle s'est améliorée dans les Pays de Loire, les tensions subsistent en Centre-Val de Loire et en Ile-de-France effectivement les tensions sont importantes aujourd'hui avec la rupture d'un carburant dans à peu près une station sur 3, donc c'est beaucoup d'attente, je reconnais que c'est absolument pénible et agaçant de faire l'attente, d'attendre pour faire son plein dans les stations-service au moment où on doit aller travailler et je pense notamment à tous les infirmiers qui doivent visiter leurs clients et qui ont besoin de leur voiture, enfin tous ces métiers qui utilisent de manière indispensable leur voiture, on est vraiment à leurs côtés. Mais on va dans un sens d'amélioration, vous avez pu constater qu’ESSO annonçait le redémarrage de leurs raffineries avec là aussi l'injection de carburant pour soulager notamment Centre-Val de Loire et l'Ile-de-France.

SALHIA BRAKHLIA
EDF a une nouvelle fois arrêté 18 réacteurs pour révision à cause de problèmes de fissures ou de corrosion, combien de temps ça va prendre pour qu'ils reprennent ces réacteurs ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors nous rentrons dans le programme de maintenance de printemps et d'été, donc en fait ces arrêts ne sont pas tous liés aux fissures comme vous semblez le dire, c'est tout simplement un programme de maintenance.

SALHIA BRAKHLIA
Il y a eu des nouvelles fissures qui ont été détectées au début de l'année.

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est un programme de maintenance annuelle et à la faveur de ces maintenances annuelles un certain nombre de contrôles vont être réalisés sur des point précis de tuyauterie où on a un doute sur la possibilité d'avoir des fissures qu'il faudra réparer.

MARC FAUVELLE
Il y a des centaines de contrôler aujourd’hui.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui c'est ça tout à fait.

SALHIA BRAKHLIA
Mais alors ces nouvelles fissures parce qu'il y en a et elles ont été détectées en début d'année, est-ce qu'elles vont, est-ce qu'elles imposent à EDF de revoir ses prévisions de production pour l'année 2023 ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous avez pu constater qu'EDF avait pour le moment maintenu ses dispositions, enfin ses déclarations sur la production, donc c'est EDF qui …

SALHIA BRAKHLIA
Ça ne va pas bouger ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Qui au plus près donne ses perspectives de production, ce que je veux dire et je pense que c'est important que chacun le comprenne une centrale nucléaire fait l'objet de maintenance régulière, elle fait l'objet de maintenance pour recharger le combustible, elle fait l'objet de maintenance tous les ans, tous les 2 ans, tous les 3 ans, ça c'est courant, ce sont des maintenances courtes et elles font l'objet de de maintenance pour passer les 40 ans, c'est la visite décennale et cette visite pour nos centrales nucléaires elle est particulièrement longue, ; elle prend 6 mois. Pourquoi elle est particulièrement longue, parce que nous avons fait le choix en France de prendre toutes les recommandations de sûreté nucléaire, qui sont tous les enseignements de l'incident Fukushima.

MARC FAUVELLE
Heureusement.

AGNES PANNIER-RUNACHER
De manière à ce que nos réacteurs nucléaires confrontés à un incident similaire continuent à fonctionner en sûreté. C'est pour ça que c'est un peu plus long que ça peut être dans d'autres pays et c'est pour ça que ce programme démarre en fin d'hiver de façon à ce qu'on ait le temps de redémarrer ensuite en début d'hiver prochain les réacteurs nucléaires.

MARC FAUVELLE
Agnès PANNIER-RUNACHER, la semaine dernière Emmanuel MACRON a présenté le Plan eau du gouvernement pour faire face aux sécheresses à répétition, 53 mesures annoncées, mais aucune ne parle du nucléaire et du risque que pourrait faire courir la baisse du niveau des fleuves, par exemple sur la production électrique. Est-ce que c'est un oubli de sa part ou est-ce que ça va être corrigé dans les mois qui viennent ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, deux choses. D'abord, dans son discours il mentionne cette question du nucléaire, si vous l'avez bien écouté, donc c'est un sujet qui est évidemment suivi, et en fait c'est un sujet qui est suivi de depuis plusieurs années maintenant…

SALHIA BRAKHLIA
Mais ça ne fait pas partie du plan.

AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est-à-dire que dans le…

MARC FAUVELLE
E n’était pas dans les 50 annonces.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce n’est pas les 53 annonces, mais je vous renvoie à son discours qui mentionne des actions sur le secteur du nucléaire. Juste très simplement, une centrale nucléaire en bord de mer, qui est une grosse partie de nos centrales, réchauffement climatique, refroidissement, ça ne pose pas de problème. Des réacteurs ou des centrales nucléaires en bord de fleuve, le sujet c'est la diminution du débit de ces fleuves, puisque la centrale va aller pomper de l'eau, refroidir le réacteur, puis rejeter l'eau dans la rivière, dans le fleuve. Sur ça nous avons des analyses qui ont été, qui sont publiques aujourd’hui…

MARC FAUVELLE
Mais qu'est-ce qu'on peut faire, comment continuer à faire fonctionner les centrales, si l’eau baisse ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vais aller jusqu’au bout, si vous le permettez.

MARC FAUVELLE
Oui.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Nous avons des analystes qui montrent qu'en fait la perte de production est très limitée. Elle est très limitée, elle se passe en été…

MARC FAUVELLE
Oui, quand les fleuves sont les plus bas…

AGNES PANNIER-RUNACHER
… et elle est très limitée, par rapport, sur les scénarios du GIEC, ce n’est pas des scénarios improvisés par EDF, sur les scénarios du GIEC, y compris des scénarios qui vont au-delà de 1,5°, nous avons des pertes sur l'année, très limitées. Ponctuellement nous pouvons avoir des pertes plus importantes. Et derrière ça…

SALHIA BRAKHLIA
Donc il y a une baisse des capacités de production, mais est-ce qu'il y a des problèmes de sécurité qui peuvent s'imposer ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, il n’y a pas de problèmes de sécurité, et ça je vais être très très très clair, en fait baisse l'utilisation, la production du réacteur nucléaire si on voit qu'on a moins d'eau à aller pomper dans la rivière et à rejeter derrière. Et ponctuellement je peux être amenée à signer des dérogations. L'hiver, l'été dernier qui a été un été très sec, j'ai signé des dérogations qui ont été utilisées, quelques jours, et on contrôle la température en sortie des réacteurs nucléaires. Ensuite, ce que nous faisons, c'est que nous travaillons sur la possibilité de mettre en place des mécanismes, qui soient plus, moins consommateurs, enfin moins dépendants du débit dans les rivières, ce sont les tours aéroréfrigérées. Historiquement tous nos réacteurs n'ont pas de tours aéroréfrigérées…

SALHIA BRAKHLIA
Sauf que donc ça s'appelle un circuit fermé…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Exactement.

SALHIA BRAKHLIA
Ça veut dire que l'eau s'évapore, le problème c'est que justement on perd de l’eau.

AGNES PANNIER-RUNACHER
On perd une consommation de 10% d’eau, effectivement, enfin je veux dire grosso modo les réacteurs nucléaires c’est 10% de notre consommation d'eau. Donc là aussi c'est quelque chose que l'on mesure et que l'on suit, mais je vais être très claire, ces sujets ont bien été projetés et sont incorporés dans notre Plan eau, à la fois pour faire fonctionner les réacteurs nucléaires, pour les réacteurs à venir, puisque nous allons prendre les technologies qui sont les moins consommatrices, dans leur design, et au regard plus largement des usages de l’eau, puisque vous avez d'autres, en matière énergétique, vous avez tout l'usage des barrages qui sont aussi une façon de mieux maîtriser nos consommations d'eau. Et ça aussi c'est sous l'égide de l'énergie.

MARC FAUVELLE
Toujours avec Agnès PANNIER-RUNACHER. Est-ce qu’il faut interdire partout en France les trottinettes électriques en libre-service ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, je pense que c'est un mode de transport doux, c'est un mode de transport qui qui va dans le sens là encore de la transition énergétique, de la baisse des émissions de CO2. Ce qu’il faut, c’est organiser l'utilisation de l'espace entre ceux qui utilisent des trottinettes, la sécurité de ceux qui utilisent des trottinettes et la sécurité des piétons, et le fait que les voitures ne soient pas… Enfin qu’il y ait une cohérence dans l'organisation de l’espace.

MARC FAUVELLE
C’est un mode de transport écologique ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Les trottinettes, oui. L'impact carbone des trottinettes est inférieur à celui d'une voiture.

MARC FAUVELLE
Oui, mais elles ont une durée de vie très limitée, on le sait, on les jette au bout de quelques semaines.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Marc FAUVELLE, là encore ça dépend de la manière dont on a les usages. Plus on prolonge l'utilisation des modes de transport, plus ils sont doux pour le climat, et typiquement nous venons de valider un règlement sur les batteries électriques qui vaut y compris pour les batteries des trottinettes et qui fixe des objectifs ambitieux en matière d'émissions de CO2.

MARC FAUVELLE
Mais quand on regarde les études, aujourd'hui plus de 90% des déplacements qui sont effectués sur ces trottinettes l'étaient auparavant à pied ou en transport en commun. Quel est le bénéfice du coup ?

MARC FAUVELLE
Si c'est un report modal dans ce sens-là, il n’y a pas de bénéfices ; si c'est un report modal de la voiture vers de la trottinette, il me semble qu'il y en a aussi. Vous savez que dans les zones densément peuplées, 40% des déplacements en voiture sont de moins de 5 kilomètres. Si vous basculez à pied, à vélo, en trottinette, vous éliminez 40% de ces modes de transport qui sont émissifs, enfin qui émettent des émissions de CO2. Donc oui c'est un des leviers et c'est pour ça que le ministre des Transports Clément BEAUNE travaille justement à faire en sorte que les gens soient transportés en sécurité. Je veux dire il y a eu des accidents de trottinette, il y a eu des moments assez violents de cette famille qui a perdu un enfant de 14 ans qui avait emprunté la trottinette de son père, et puis il y a la question du partage de la route. On l’a connue pour les vélos et il faut le mettre en place pour les trottinettes. Après entre celui qui peut s'acheter une trottinette et celui qui peut l’emprunter en libre-service, c'est pas forcément les mêmes moyens et donc il y a aussi un enjeu de justesse de la transition énergétique où on permet à ceux qui n'ont pas les moyens d'avoir accès à tout un registre de modes de transports : les transports en commun et d'autres transports doux, le plan vélo, ça vise aussi à permettre à des gens qui ont des moyens modestes à avoir accès à des vélos.

SALHIA BRAKHLIA
Agnès PANNIER-RUNACHER, en Corse deux grosses bouées pour les grands yachts vont être installées dans le golfe d'Ajaccio. Ce qui provoque la colère des associations écologistes locales, c'est que ces installations en fait elles ont été en grande partie financées par le Fonds vert de votre ministère. Comment vous l'expliquez ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors en l'occurrence, c'est le ministère de la Transition écologique. Le Fonds Vert, à quoi ça sert ? Ça sert à financer des projets qui permettent d'économiser des émissions de CO2, qui permettent aussi de préserver la biodiversité. En l'occurrence dans le cas d'espèce, c'est un projet qui permet de préserver la biodiversité des eaux corses. Et là encore si vous voulez, on peut être en permanence dans l'indignation mais nous ce que nous faisons, nous agissons. Nous agissons et chacun de nos projets a un impact écologique, énergétique mesurable.

SALHIA BRAKHLIA
C'est écologique de créer des grosses bouées pour les yachts de 24 mètres pour pouvoir…

AGNES PANNIER-RUNACHER
C’est écologique de faire en sorte de préserver les posidonies qui sont dans le golfe d’Ajaccio.

MARC FAUVELLE
Les algues.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Donc vous avez une situation, un port qui accueille un certain type de bateau et vous faites en sorte de préserver les fonds marins. C'est ça que fait ce projet mais comme tous les projets que nous faisons, c'est-à-dire que…

MARC FAUVELLE
J’essaye de comprendre l’intérêt. C'est qu'avant ces yachts restaient en mer, jetaient l'ancre en mer et abîmaient les fonds marins, c'est ça ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, avant ces yachts étaient dans le port et en fait c'est un projet qui a été proposé par la collectivité locale et qui a un impact sur la biodiversité qui est positif.

MARC FAUVELLE
Parce que ça permet quoi ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Tous ceux qui vous disent aujourd'hui, moi je le vois sur les projets d'énergies renouvelables et je veux revenir sur ce que je connais bien qui sont les projets d'énergies renouvelables, et qui s’émeuvent en disant : l’impact sur la biodiversité, l'impact sur ceci empêche en fait de mener des projets qui sont essentiels, essentiels pour lutter contre le réchauffement climatique et sont dans l'indignation permanente. Mais on ne peut pas rien faire, rien faire c'est en fait laisser toutes les énergies fossiles que nous avons et qui ont un impact majeur sur le climat, et c'est agir contre cet écocide.

MARC FAUVELLE
Mais je reviens sur le fond, sur Ajaccio. Le fait d'installer des bouées pour les yachts, en quoi ça sauvegarde les fonds marins ?

AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors on n’installe pas des bouées pour les yachts…

MARC FAUVELLE
Des bouées d'amarrage, pardon.

AGNES PANNIER-RUNACHER
On fait en sorte que dans un port qui accueille un certain type de bateau, les bouées d'amarrage qui sont installés préservent les fonds marins. Donc vous voyez, c'est un peu dans le sens inverse.

SALHIA BRAKHLIA
Accueillent les plus gros bateaux. Si c’est des bateaux de 24 mètres, c’est les plus gros bateaux.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Ecoutez, je vous le redis…

SALHIA BRAKHLIA
C’est ce qui scandalise les associations écologistes, c’est on leur permet de d'accoster dans le golfe d'Ajaccio alors qu'en fait ils sont trop gros, voilà.

MARC FAUVELLE
Bon, c’est l’autre ministère. On interrogera…

AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, parce que là vous m'interrogez sur…

MARC FAUVELLE
Un dossier qui n’est pas le vôtre.

AGNES PANNIER-RUNACHER
Un dossier que je ne connais pas dans le détail pour être très simple et dont je sais qu'il permet de préserver des fonds marins et il me semble que ce n'est pas un changement, c'est-à-dire on n’ouvre pas les vannes à accueillir plus de bateaux à ma connaissance, mais voilà, je le dis avec beaucoup d'humilité : ce n'est pas un dossier que je suis personnellement.

MARC FAUVELLE
Merci beaucoup Agnès PANNIER-RUNACHER, bonne journée à vous

AGNES PANNIER-RUNACHER
Merci.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 12 avril 2023