Interview de M. Gabriel Attal, ministre chargé des comptes publics, à RTL le 25 avril 2023, sur les déplacements des membres du gouvernement après la promulgation de la loi relative aux retraites, les impôts et l'inflation.

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Média : RTL

Texte intégral

AMANDINE BEGOT
Gabriel ATTAL, bonjour.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

AMANDINE BEGOT
Et bienvenu sur RTL. RTL qui le révèle ce matin : Emmanuel MACRON a envoyé une lettre à ses soutiens, aux militants du parti Renaissance, il les appelle à occuper le terrain. Il y a urgence Monsieur le Ministre ?

GABRIEL ATTAL
Eh bien c'est important d'aller au contact, effectivement. Il y a des doutes, de l'inquiétude, de la colère, et il faut qu'on soit au contact des Français.

AMANDINE BEGOT
Gabriel ATTAL, vous avez sans doute vu comme nous ces images hier, Pap NDIAYE, le ministre de l’Education nationale, bloqué dans un train gare de Lyon, il a fallu l'exfiltrer pour échapper aux manifestants. Il y a eu aussi ces concerts de casseroles. Chaque déplacement de ministre est compliqué. C'est compliqué d'être ministre aujourd'hui ?

GABRIEL ATTAL
Il faut aller sur le terrain. On fait face effectivement à des manifestations parfois, ça ne veut pas dire qu'il faut arrêter d'aller sur le terrain…

AMANDINE BEGOT
" Parfois ", c'est tout le temps en ce moment.

GABRIEL ATTAL
Oui, et puis il faut faire la part des choses. Il est 07h43, je pense qu'il y a des personnes qui nous écoutent qui sont en train d'aller travailler ou qui s'occupent de leurs enfants avant de les amener à l'école. Il y en a probablement qui sont inquiètes ou qui sont en colère. Je ne suis pas sûr que ce sont des personnes qui peuvent se permettre d'aller de 14h00 à 18h00 en pleine semaine attendre un ministre. Voilà. Moi, ce qui m'intéresse, c'est de répondre aux inquiétudes, aux angoisses, à la colère des Français qui travaillent, qui ont du mal à boucler leurs fins de mois et qui attendent de nous qu'on agisse pour qu’il y ait des militants syndicaux, politiques, d’ultragauche, qui nous attendent quand on vient se déplacer, qui passent 4 heures devant un lieu où on se déplace, en pleine journée, en pleine semaine, écoutez, on n’a pas…

AMANDINE BEGOT
Vous dites quoi ? Ce n’est pas la vraie France, pas celle qui travaille ?

GABRIEL ATTAL
Mais non. On n’a pas attendu d’entendre des casseroles pour écouter les Français et pour entendre les Français, voilà. Et moi ce qui m’intéresse c'est les Français qui se lèvent le matin, qui vont travailler ou qui télétravaillent, mais en tout cas qui attendent de nous que l’on agisse pour eux. Ensuite, vous avez des militants politiques, qui font des mouvements, des manifestations quand on se déplace, et l’important c'est que l’on continue à se déplacer, et qu’on aille au contact des Français.

AMANDINE BEGOT
Hier, face aux lecteurs du Parisien, Emmanuel MACRON a reconnu qu’il ne s’était sans doute " pas assez mouillé " ce sont ses mots, dans cette réforme des retraites. Ceste aussi votre sentiment ?

GABRIEL ATTAL
Le président de la République a dit la manière dont il avait ressenti les choses et dont il les ressentait. Je pense que c'est toujours important aussi, quand on sort d’une séquence comme celle des retraites, de dire ce qui a fonctionné, ce qui n’a pas fonctionné. Voilà. Maintenant, l’important c'est que l’on aille de l'avant. Et d'ailleurs dans l'interview du président dans le " Face aux lecteurs ", avec les lecteurs du Parisien, il aborde beaucoup de chantiers sur lesquels on est attendu, que les Français attendent.

AMANDINE BEGOT
Et il faut qu’il soit plus sur le terrain, plus au contact des Français, c'est ce qui vous a manqué ces derniers mois, ces dernières semaines ?

GABRIEL ATTAL
C’est ce qu’il a dit, et il se déplace régulièrement sur le terrain, il sera encore aujourd'hui sur le terrain, au contact des Français. Voilà.

AMANDINE BEGOT
Pour parler santé.

GABRIEL ATTAL
Oui.

AMANDINE BEGOT
Vous venez, vous, nous nous parler ce matin de l'opération " En avoir pour mes impôts ". Ça commence aujourd'hui, ce sera disponible dès 16h00 cet après-midi, opération d'information pour savoir où va notre argent. Il y a aussi un volet participatif. On va rentrer dans le détail, mais d'abord Gabriel ATTAL, c'est quoi l'objectif ? Dire aux Français : oui vous payez des impôts, beaucoup d'impôts, on rappelle qu'on est le pays dans la zone euro où les prélèvements obligatoires sont les plus élevés, 47% du PIB, mais regardez à quoi sert votre argent, c'est ça ?

GABRIEL ATTAL
Moi je me déplace beaucoup sur le terrain, et c'est vrai que régulièrement des Français me disent : on veut voir exactement comment et où vont nos impôts. C’est une grande opération de transparence, ce site " enavoirpourmesimpôts.gouv.fr ", qui ouvrira vous l'avez dit, en fin d'après-midi. Qui permettra au niveau national, de dire de manière très concrète à quoi sert l'argent public. Voilà, tout le monde ne sait pas qu’un enfant, une année dans une école primaire c’est 8 000 € d'argent public. Pour une année au lycée c'est 11 000 €. Un accouchement c'est 2 600 € d'argent public. L'entretien d'un kilomètre de voirie ses 110 000 €. Voilà. Donner ces exemples là très concrets, dire où vont les impôts et où va l'argent public, au niveau national et au niveau local. Et le deuxième volet c'est aussi une consultation. Moi je veux que les Français et notamment ceux qui paient l'impôt sur le revenu, les contribuables, puissent donner leur avis sur les politiques publiques prioritaire, sur les politiques publiques qu'ils jugent moins prioritaires, sur des exemples de gabegies qu'ils identifient, qui pourraient nous permettre de faire des économies, et donc il y aura à la fois un questionnaire qui permettra de répondre à ces questions-là, des réunions publiques qui seront organisées dans les Centre des impôts d’ici cet été…

AMANDINE BEGOT
Mais vous allez vraiment tenir compte de ces avis-là ?

GABRIEL ATTAL
Oui.

AMANDINE BEGOT
Ce n’est pas un peu démago, juste pour dire : bon, eh bien on vous écoute, mais…

GABRIEL ATTAL
Moi je pense que c'est toujours utile de donner la parole par tous les moyens possibles. On le fait…

AMANDINE BEGOT
Mais concrètement, vous allez vous en servir comment ? Ça va agir sur le prochain budget par exemple ?

GABRIEL ATTAL
Oui, on va regarder les résultats qui sont apportés, et puis évidemment on en tiendra compte pour le prochain budget qu'on présentera. Vous savez, moi ce qui m'intéresse, ce qui me préoccupe particulièrement, c'est notamment les classes moyennes, les classes moyennes françaises. Agir pour elles, continuer à le faire, on a pris beaucoup de mesures depuis 5 ans. Je rappelle, on a supprimé la taxe d'habitation, supprimé la redevance télé, baissé l'impôt sur le revenu de 5 milliards d'euros, défiscalisé les heures supplémentaires. Cette année on a pris des mesures supplémentaires, je vous donne un exemple, parce que tout le monde ne le sait pas, pour les gens qui travaillent, qui font garder leurs enfants dans une crèche, chez une assistante maternelle, ça coûte de l'argent. Il y a un crédit d'impôt qui est plafonné, qui était plafonné à 2 300 € par an et par enfant, on le passe à 3 500 € par an et par enfant, on l'augmente de 50%. Ça c'est une mesure pour les classes moyennes qui bossent, et on…

AMANDINE BEGOT
Sauf que les classes moyennes qui bossent, ce sont aussi celles qui sont victimes directement de l'inflation, qui font leurs courses et qui s'aperçoivent qu'aujourd'hui hier elles avaient un chariot, je ne sais pas, de 150 €, aujourd'hui ce même chariot il est à 200, 250 €, pour la semaine ou pour 15 jours, et pourtant ces classes moyennes elles n’ont pas eu droit aux aides, pas au Chèque énergie, c'est celles-ci qui se sentent aussi un peu délaissées. Il n’y aura pas de nouvelles aides pour ces classes moyennes ?

GABRIEL ATTAL
Mais alors justement, vous savez, effectivement il y a une inflation sur les prix alimentaires, qui découle notamment de l'inflation sur les prix de l'énergie, qui a lieu depuis un an dans le monde entier. Aujourd'hui vous avez les prix de l'énergie qui baissent, vous avez des prix du blé par exemple qui baissent, vous avez les prix du fret maritime qui baissent, donc, et le président l'a dit dans son interview, on attend que à l'été ou à la fin de l'été, on commence à avoir une baisse sur les prix de l'alimentaire. Et on va…

AMANDINE BEGOT
Oui, ça risque d’être un tout petit peu plus long que ça, parce qu’il va falloir les renégociations.

GABRIEL ATTAL
Et on va suivre de très près les renégociations, mettre la pression sur les industriels, Bruno LE MAIRE l’a dit, pour qu’ils répercutent la baisse des coûts sur les prix. Ça c'est la première chose. Et la deuxième chose…

AMANDINE BEGOT
Sauf que ma boite de céréales, pardon, et je vous coupe un instant, ma boite de céréales, que j’ai achetée au mois de septembre 2,50 €, je cite tout le temps cet exemple, parce qu'il est flagrant, que j'achète aujourd'hui 3,70 € et dont je vois le prix augmenter chaque semaine, il ne reviendra pas à 2,50 € après l'été.

GABRIEL ATTAL
Mais ça va être notre responsabilité, Bruno LE MAIRE l’a dit, de mettre une pression maximale sur les industriels, pour qu'ils répercutent à la baisse les coûts. Quand les coûts baissent pour les industriels, ils doivent le répercuter à la baisse sur les prix, et on sera extrêmement extrêmement vigilant là-dessus. Mais pour répondre à votre question là-dessus, quand il y a eu cette inflation sur les prix de l'alimentaire, certains ont voulu nous pousser à mettre en place un chèque supplémentaire, qui aurait bénéficié avant tout aux Français qui ne travaillent pas, comme certains chèques qu'on a mis en place. On n'a pas voulu le faire. Et qu'est-ce qu'on a préféré faire ? Mettre la pression aux industriels pour qu'ils mettent en place le trimestre anti-inflation, une sélection de produits avec quasiment pas d'inflation répercutée sur les prix, parce que ça, ça bénéficie à tout le monde, voilà, y compris à des gens qui travaillent, qui n’ont jamais ou peu droit aux aides, qu’ils puissent aussi bénéficier de cette mesure-là.

AMANDINE BEGOT
Et baisser la TVA ?

GABRIEL ATTAL
Moi je préfère des mesures, qui bénéficient à tout le monde et notamment aux Français qui travaillent, ou des mesures qui bénéficient à certains.

AMANDINE BEGOT
Baisser la TVA, comme le propose Marine LE PEN, ça aurait bénéficié à tout le monde.

GABRIEL ATTAL
Mais je ne pense pas que ça aurait bénéficié au consommateur final. Vous savez j'ai un exemple, dans le quinquennat de François HOLLANDE il y avait eu une pression énorme pour baisser la TVA sur les protections menstruelles, pour les femmes. Le gouvernement avait fini par l'accepter, avait fait une TVA réduite. Toutes les études qui ont été faites, montrent qu'il n'y a pas eu d'impact sur les prix, donc il y a une baisse de TVA, donc moins d'argent pour l'Etat et pour les politiques publiques, mais qui va dans les marges des industriels ou de la distribution, et qui ne va pas ensuite sur le prix, parce que quand vous baisser la TVA, vous ne pouvez pas garantir que ça va être répercuté à la baisse sur les prix. On a d'autres exemples. Le secteur de la restauration, il y avait eu une baisse de la TVA, je ne crois pas, alors ça a permis de soutenir la restauration, l'emploi, j'espère peut-être, mais je ne crois pas que les Français se disent que ça a été répercuté dans les prix. Donc encore une fois, je pense que la politique qu'on suit, qui est de faire en sorte de limiter au maximum la hausse des prix de l'énergie et la hausse des prix des matières premières pour les industriels, la distribution, pour leur permettre de ne pas avoir une explosion des prix, comme on le constate dans certains pays. Et je rappelle qu'en France on a le niveau d'inflation le plus faible toujours de la zone euro, je pense que c'est la bonne politique à suivre, plutôt que de prendre des mesures qui appauvrissent les finances publiques, mais qui ne se répercutent pas ensuite sur le chariot des consommateurs.

AMANDINE BEGOT
Je reviens à l'opération " En avoir pour mes impôts ". Quand on voit l'état de certains de nos services publics, vous le reconnaîtrez, on peut se demander effectivement où va notre argent, je pense notamment à l'hôpital, ces services d'urgences qui sont obligés de fermer. Les Français ont l'impression qu'il y a de moins en moins de services publics ou du service public de moins en moins bonne qualité, et en même temps que l’on paie plus d'impôts. Il y a 10 ou 20 ans on payait sans doute moins d'impôts, et ça fonctionnait mieux.

GABRIEL ATTAL
D'abord, encore une fois on a baissé les impôts comme jamais, depuis 2017. D’ailleurs, on se fait reprocher par certains, de baisser trop les impôts. Dans l'actualité on a entendu ces derniers jours, notamment le gouverneur de la Banque de France, qui appelle le gouvernement…

AMANDINE BEGOT
Il sera notre invité tout à l'heure à 08h20…

GABRIEL ATTAL
Voilà, à arrêter de baisser les impôts, moi j'ai plutôt entendu, depuis que je suis en âge d'écouter la politique ou l'actualité, des gouvernements qui étaient critiqués parce qu'ils augmentaient les impôts. C'est assez rare d'entendre des gouvernements qu’on critique parce qu'ils les baissent. Je le vis plutôt comme un compliment. Voilà. Ensuite oui, on met de l'argent public. Sur l'hôpital public, 100 milliards d'euros de budget cette année, c'est du jamais vu dans l'histoire. Donc l’important, et vous avez raison de le dire, c'est que l'argent aille au bon endroit, que les Français voient la différence. Beaucoup, c'est beaucoup des questions d'organisation, d'ailleurs le président a fixé comme objectif qu'à la fin 2024 on ait désengorgé les services d'urgences. On met l'argent, on met les moyens, donc maintenant c'est l'organisation dans les établissements hospitaliers, dans chaque région, qui doit nous permettre que ce soit visible pour les Français.

AMANDINE BEGOT
Et le fait de dire aux Français ; un accouchement ça coûte 2 600 €, l’intervention d'une équipe de pompiers c'est 1 150 € en moyenne, c'est quoi l'objectif ? C'est de culpabiliser, de dire : regardez, ne dépensez pas cet argent inutilement, c'est aussi de dire, ok vous voulez payer moins d'impôts mais ça veut dire qu'il va falloir faire une croix sur ça un jour ?

GABRIEL ATTAL
C'est tout simplement faire de la transparence. Voilà. Régulièrement des Français me disent : ça serait intéressant de savoir combien ça coûte. Effectivement, quand on a un enfant au lycée, savoir que c'est 11 000 € l'année d'argent public, c'est intéressant pour les gens, voilà. Et ensuite effectivement ça permet de faire des choix. Il y a aussi un volet consultation, encore une fois moi je trouve que c'est utile et intéressant d'avoir plus de 20 millions de contribuables qui vont donner leur avis sur nos politiques publiques.

AMANDINE BEGOT
D'un mot, deux engagements ce matin sur RTL : un, vous tiendrez compte de ce questionnaire. C'est promis, vous reviendrez nous le dire…

GABRIEL ATTAL
Oui, je reviendrai avant la présentation du budget, vous présenter…

AMANDINE BEGOT
… nous présentez le budget. Deux, il n’y aura pas d'augmentation d'impôts ?

GABRIEL ATTAL
Il n’y aura pas d'augmentation d'impôts, on s’y est toujours engagé depuis qu'Emmanuel MACRON a été élu, et je pense qu'on peut nous reconnaître cette constance. Voilà. Vous avez des Français qui vous disent : oui mais ma taxe foncière a augmenté, c'est les collectivités locales qui le décident. Pour ce qui est de l'Etat, on a tenu notre engagement, non seulement on n'augmente pas les impôts des Français, mais quand on peut, on les baisse.

AMANDINE BEGOT
Merci beaucoup Gabriel ATTAL.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 26 avril 2023