Interview de Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État chargée des anciens combattants et de la mémoire, à France Info le 10 mai 2023, sur la mort d'un journaliste de l'AFP en Ukraine et le plan d'accompagnement des militaires blessés et victimes de séquelles psychologiques.

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Média : France Info

Texte intégral

AURELIEN ACCART
Bonjour Patricia MIRALLES.

PATRICIA MIRALLES
Bonjour.

AURELIEN ACCART
Secrétaire d'Etat auprès du ministre des Armées, chargée des Anciens combattants et de la Mémoire. Avant de revenir au plan d'accompagnement des militaires blessés et victimes de séquelles psychologiques, que vous nous dévoilez ce matin sur France Info, un journaliste de l'AFP, Arman SOLDIN, a été tué hier dans l'est de l'Ukraine, près de la ville assiégée de Bakhmout, lors d'une attaque de roquettes russes, il avait 32 ans, c'est le troisième journaliste français à trouver la mort en couvrant ce conflit, sa mort qui vient nous rappeler à tous que l'extrême brutalité de cette guerre ?

PATRICIA MIRALLES
Oui, j’ai évidemment une pensée pour sa famille, c'est toujours des moments difficiles, mais ça nous rappelle que la guerre existe et que la paix est difficile aujourd'hui, donc il faut continuer évidemment à être au plus près de nos concitoyens et faire en sorte que nous puissions maintenir la paix que nous avons connue pendant 60 ans, même 70 en France.

AURELIEN ACCART
Arman SOLDIN qui était coordinateur vidéo en Ukraine de l'Agence France Presse et qui avait couvert notamment les premiers jours de l'invasion russe, découvrant à ce moment-là l'extrême dureté de la guerre de haute intensité à laquelle nul n'est jamais vraiment préparé, ni même d'ailleurs les militaires. On en vient Patricia MIRALLES au plan que vous nous dévoilez ce matin sur France Info, puisqu'il s'agit justement de mieux prendre en compte les blessures psychologiques de la guerre chez les militaires français. Combien sont-ils, d'ailleurs, ces militaires, ou anciens militaires, à souffrir de ce qu'on appelle le symptôme post-traumatique ?

PATRICIA MIRALLES
Aujourd'hui on a 2600 blessés qui sont moins identifiés, pour les autres nous ne le savons pas, peut-être il y en a plus, mais nous avons 2600 blessés qui sont, je vais dire dans nos scops, voilà.

AURELIEN ACCART
Qu’est-ce que vous proposez donc pour améliorer aujourd'hui leur prise en charge ?

PATRICIA MIRALLES
Un nouveau " Plan blessé ", qui va aller sur la période 2023-2030, rappeler peut-être pourquoi un nouveau « Plan blessé » et quelle est son ambition, le président de la République s'était exprimé le 13 juillet dernier, devant les armées à Brienne, et il nous avait donc demandé de pouvoir mettre en place un nouveau " Plan blessé ", de travailler pour nos militaires et leurs familles, donc ce plan est initié par le ministre des Armées, Sébastien LECORNU, qui n'a confié la charge de ce pilotage, donc la philosophie de ce plan c'est de faire en sorte que le blessé n'ait qu'une seule préoccupation, c'est celle de se soigner. Donc il y a deux grands axes dans ce plan, il y a l'axe de la simplification, et l'axe de la reconstruction. Alors, la simplification globale de l'accès au droit, car je dirais que le parcours administratif ne doit pas être, comme dit le ministre des Armées, le combat de trop pour le soldat…

AURELIEN ACCART
Donc c’est simplifier les démarches en quelque sorte.

PATRICIA MIRALLES
Alors, simplifier les démarches, c’est retirer des démarches inutiles, nous mettons en place par exemple le renouvellement automatique de la pension militaire d'invalidité, parce que, si on caricature, une jambe ou un bras ça ne repousse pas, donc plus largement ça ne sera plus à eux de prouver qu'ils sont blessés, c'est l'inversion de la charge de la preuve pour le blessé, c'est le " dites-le nous une fois ", c'est la présomption de bonne foi. Et puis il y a la mise en place de ce qu'on appelle " la Maison numérique du blessé ", donc tous les documents des militaires seront conservés à travers ce coffre, à travers « la Maison du blessé », où il y aura un coffre-fort, le but c'est que, à part les documents, comme une pièce d'identité, qu’ils sont les seuls à posséder, eh bien tous les autres, puisqu'ils sont fournis par l'administration, seront désormais fournis par l’administration, ce n'est plus à eux de nous les fournir, et cette " Maison du numérique " finalement, à terme, ça sera un lieu unique pour effectuer toutes les démarches nécessaires, c'est un peu, si je puis dire, le France Connect du blessé militaire, que nous construisons.

AURELIEN ACCART
Donc simplifier, et vous disiez aussi, accompagner.

PATRICIA MIRALLES
Oui, simplifier, peut-être revenir aussi, dans la simplification, sur la réparation intégrale, parce que ça va permettre de couvrir l'ensemble des préjudices subis par les militaires en Opex, ou dans les entraînements les plus durs, sans qu'ils aient à rechercher la faute de l'Etat, c'est s'assurer qu'ils aient bien tous leurs droits parce que c'est toujours difficile pour un militaire blessé, d'autant plus quand ce sont des blessures psychiques, d'aller vers tous les droits, et donc ensuite il y a la reconstruction.

AURELIEN ACCART
Vous allez aussi ouvrir la reconstruction avec ces maisons Athos, on en parlait tout à l'heure dans le journal de 6h avec un reportage à Bordeaux, il y en a aujourd'hui quatre en France, des lieux de vie non médicalisés où on propose en fait aux soldats des activités sportives, manuelles, artistiques, vous allez en ouvrir d'autres ?

PATRICIA MIRALLES
Oui, alors dire que la blessure psychique ce n'est pas la blessure de la honte, il faut qu'ils parlent, il faut qu'ils oralisent, c'est très important, et donc les maisons Athos c'est une expérimentation de l'armée de Terre qui fonctionne très bien. Aujourd'hui, vous l'avez rappelé, il y a quatre maisons Athos, nous allons en ouvrir 10, dont une ou deux en Outre-mer, parce qu’il faut aussi qu'on puisse aller au plus proche de chez eux, pour qu'ils puissent se soigner, des fois les trajets sont difficiles pour un blessé psy, donc nous voulons faire… enfin, mieux prévenir, mieux détecter, mieux soulager, et puis il y a aussi le pôle de réhabilitation de l'Institut national des Invalides, qui a ouvert il y a très peu de temps, et qui permet d'apprendre à vivre avec la blessure, ils accueillent des blessés après leur hospitalisation, et je l'inaugurerai prochainement. Peut-être parler aussi, pour les familles, d'avoir une meilleure prévention du syndrome post-traumatique, parce que finalement les familles et l'entourage c'est eux qui sont en première ligne de ces symptômes qui apparaissent.

AURELIEN ACCART
Donc mieux accompagner les soldats et notamment leurs familles, merci beaucoup Patricia MIRALLES, on doit s'arrêter là malheureusement, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Armées chargée des Anciens combattants et de la Mémoire, et ce plan, donc que vous présentez aujourd'hui, ce plan de meilleure prise en charge des blessés, vous étiez l'invitée ce matin du 5-7 de France Info.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 23 mai 2023