Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Apolline de MALHERBE.
APOLLINE DE MALHERBE
On va évidemment parler inflation, on va parler des grands industriels, c'est ce que nous avions prévu lorsque je vous ai invité, depuis il y a eu bien sûr l'effroi, l'effroi à Annecy, d'ailleurs on l'apprend ce matin, le président se rend sur place auprès des victimes, comment vous avez vécu cette journée d'hier ?
BRUNO LE MAIRE
Avec énormément d'émotion comme, je pense, tous nos compatriotes, je pense d'abord aux victimes, aux enfants qui sont à l'hôpital en train de lutter entre la vie et la mort, je pense qu'il n'y a rien de plus barbare, rien de plus insensé, rien qui heurte davantage que de s'attaquer à des enfants, des enfants de 18 mois, de 2 ans, tout ça dépasse totalement l'entendement, et je crois que la meilleure réaction qu'on puisse avoir c'est celle qu'a eu ce héros, Henri, avec d'autres qui sont encore anonymes, c'est-à-dire pour ceux qui…
APOLLINE DE MALHERBE
Henri c'est celui qu'on appelle "le héros sac-à-dos".
BRUNO LE MAIRE
Celui qui s'est opposé avec son sac-à-dos…
APOLLINE DE MALHERBE
C'est celui qu'on voit sur les images.
BRUNO LE MAIRE
Je pense que la plus belle parole qui ait été prononcée c'est lui qui l'a prononcée sur son compte Facebook en disant "voilà, il faut prier pour les victimes, pour ceux qui ne croient pas, pensez aux victimes", je pense que c'est ce qu'il y a à faire aujourd'hui.
APOLLINE DE MALHERBE
"Moi je vais bien, mais priez pour les enfants", voilà exactement les mots qu'il a eus, il était en pèlerinage lui-même à Annecy. Bruno LE MAIRE, les réactions politiques ont été immédiates, certaines sobres et dignes, d'autres cherchant immédiatement une raison politique, quand vous voyez quelqu'un comme Éric CIOTTI, de votre ancienne famille politique, qui a d'abord réagi, qui a d'ailleurs annoncé qu'il allait tenir une conférence de presse dans l'après-midi, et il a annulé, semble-t-il, en tout cas de manière concomitante, au moment où on a appris que l'assaillant se disait chrétien, comment vous réagissez aussi à ça ?
BRUNO LE MAIRE
Moi je pense que dans les heures qui suivent un tel drame, qui, je le redis, touche des enfants, et pour tous nos compatriotes, pour ceux qui ont des familles, ceux qui ont des enfants, ceux qui voient leurs propres enfants troublés, perturbés, par ce qui s'est passé à Annecy, il y a un temps de décence et de silence. Aujourd'hui ce n'est pas le moment de la politique, c'est le moment de la Nation. La politique, par définition, elle divise, il y a des convictions qui s'affrontent, ça fait partie de la vie politique et de la vie démocratique, mais aujourd'hui ce n'est pas le temps de la politique, c'est le temps de la Nation, on se rassemble, on pense aux victimes, on pense aux familles des victimes, on pense à toutes les forces de l'ordre, les policiers, les policiers municipaux, les pompiers, tous ceux qui se sont interposés, on se rassemble, on se rassemble, on fait bloc pour tenir, on tiendra si nous sommes rassemblés, et on s'affaiblira si nous sommes divisés. Donc, laissons la politique de côté un instant, et pensons à la Nation.
APOLLINE DE MALHERBE
La question quand même du lien avec les filières d'immigration, c'est comme ça qu'on pose la question du côté du RN, je recevais ce matin la porte-parole du RN sur RMC, qui disait "oui, mais enfin, il n'avait rien à faire là", disait-elle, "qu'il soit de quelle que nationalité que ce soit, de quelle que revendication que ce soit", elle disait "malgré tout il n'avait rien à faire ici, il aurait dû rester en Suède, ou ailleurs", qu'est-ce que vous répondez à ça ?
BRUNO LE MAIRE
Je dis qu'il y a des questions qui se posent et qu'il faudra y apporter des réponses plus tard, et qu'il vaut mieux apporter des réponses quand on sait quelque chose, on ne joue pas avec un drame pareil.
APOLLINE DE MALHERBE
Il y a quelques informations que l'on a, notamment sur le fait que l'asile lui a été refusé il y a quatre jours…
BRUNO LE MAIRE
Oui, mais ces informations elles sont très parcellaires, elles sont très partielles, elles seront données au fur et à mesure…
APOLLINE DE MALHERBE
Parce qu'il l'avait déjà d'ailleurs en Suède.
BRUNO LE MAIRE
La justice doit apporter des éclaircissements, la police va apporter des éclaircissements, et je vais vous dire très sincèrement, je n'en sais pas plus que vous. Je suis membre du gouvernement, responsable de l'économie et des finances, je n'en sais pas plus que vous, et je pense qu'ajouter toujours du commentaire au commentaire, du bruit au bruit, au moment où, je le redis, des enfants se battent entre la vie et la mort, il y a une forme d'indécence, parfois le silence est la seule chose décente, surtout en politique.
APOLLINE DE MALHERBE
Fermons donc cette page d'émotion, Bruno LE MAIRE, sur ce mot de silence et ouvrons celle de votre portefeuille, l'économie, les prix, vous avez rencontré hier après-midi, parce qu'en effet la politique continue pendant ce temps-là, vous avez rencontré à Bercy hier après-midi les grands industriels, ceux que depuis un mois vous invitez à revenir à la table des négociations, et ça n'a pas marché.
BRUNO LE MAIRE
Si, ça a marché, je pense que nous avons bien progressé hier, progressé surtout de manière très concrète pour les Français, avec un objectif, qui sera vérifié, que les prix de certains produits alimentaires baissent dès le mois de juillet, c'est-à-dire tous les prix dont les prix sur les marchés de gros baissent, dans les rayons ils doivent baisser aussi, je ne dis pas que l'inflation ralentit, je dis que ces prix doivent baisser, je pense aux pâtes, le prix du blé baisse, le prix des pâtes doit baisser, je pense aux huiles, je pense à la volaille, je pense aux céréales, je pense à l'alimentation animale, sur un certain nombre de produits, dont la liste me sera transmise la semaine prochaine, les prix baisseront cet été, c'est ce à quoi se sont engagés les industriels.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc, les industriels, c'est très important ce que vous me dites ce matin, les industriels que vous avez réunis hier à Bercy, se sont engagés auprès de vous à vous faire parvenir d'ici la semaine prochaine une liste de produits sur lesquels les prix vont baisser.
BRUNO LE MAIRE
Tout à fait, ils ont été très concrets sur l'engagement, entrons un tout petit peu dans la technique.
APOLLINE DE MALHERBE
Allez-y, rentrons même dans les rayons si vous voulez.
BRUNO LE MAIRE
Ils ont pris trois engagements. Le premier engagement c'est une indexation anticipée de la baisse des prix, quand les prix de gros baissent, les prix du blé baissent, il faut parfois 3 mois, 4 mois, 5 mois, avant que le prix des produits concernés, le prix des pâtes, baisse également, là ils ont accepté une indexation anticipée pour que le prix de ces produits, je pense en particulier aux pâtes, baisse dès le mois de juillet, alors que sinon, s'il n'y avait pas eu d'indexation anticipée ça aurait été vers septembre, octobre, voire un peu plus tard.
APOLLINE DE MALHERBE
Quand vous dites "ils ont pris cet engagement" ?
BRUNO LE MAIRE
C'est les 75 plus gros industriels de l'agroalimentaire.
APOLLINE DE MALHERBE
Les 75 ont pris cet engagement ?
BRUNO LE MAIRE
Les 75 ont pris cet engagement.
APOLLINE DE MALHERBE
Quand vous parlez des pâtes vous nous dites que les Lustucru, les Buitoni, les Barilla…
BRUNO LE MAIRE
Ça va être Barilla, ça va être Panzani, ça va être Lustucru…
APOLLINE DE MALHERBE
Elles vont toutes baissées ?
BRUNO LE MAIRE
Je ne veux pas citer les noms, mais ce sont des engagements, vous pouvez le faire plus facilement que moi…
APOLLINE DE MALHERBE
Moi je le fais sans aucun problème, est-ce que ces pâtes-là, est-ce que les Barilla, est-ce que les Lustucru…
BRUNO LE MAIRE
C'est l'engagement qui a été pris, donc ces prix doivent baisser dès cet été et le mois de juillet, c'est l'engagement qui a été pris…
APOLLINE DE MALHERBE
Leurs patrons, les yeux dans les yeux, vous ont dit "oui, oui, on s'engage, la semaine prochaine vous aurez la liste" ?
BRUNO LE MAIRE
Ils ont dit "nous ferons de l'indexation anticipée pour que les prix baissent dans les rayons", je pense que c'est suffisamment clair. Le deuxième engagement qu'ils ont pris, qui est très important, c'est faire ce qu'on appelle des remises en fond de rayon, ce n'est pas des promotions, des remises en fond de rayon ça veut dire que très directement, sur les rayons d'un certain nombre de produits où les prix de gros ont baissé, là aussi les prix devront baisser de 2, 3, 5, peut être jusqu'à 10 % sur certains produits…
APOLLINE DE MALHERBE
Jusqu'à 10 % ?
BRUNO LE MAIRE
Ça pourrait être jusqu'à 10 % sur certains produits lorsque…
APOLLINE DE MALHERBE
Quels produits vous avez en tête ?
APOLLINE DE MALHERBE
Je pense que les pâtes sont le bon exemple de prix qui doivent significativement baisser au cours des semaines qui viennent, c'est le deuxième engagement qu'ils ont pris, et ils me fourniront là aussi la liste intégrale des centaines de produits qui seront concernés par ce qu'on appelle ces remises en fond de rayon, la liste ne sera fournie la semaine prochaine par ces 75 grands industriels, ce qui me permettra de vérifier, avec la Direction générale de la consommation et de la répression des fraudes, que l'engagement des industriels est tenu, la confiance c'est bien, le contrôle c'est encore mieux. Et la troisième chose à laquelle ils se sont engagés, c'est de rouvrir les négociations commerciales quand ils remplissent les critères que nous avions fixés la semaine dernière. Les négociations commerciales c'est important, le défaut des négociations commerciales c'est que ça prend du temps et que ça ne peut pas nécessairement conduire dans tous les cas de figure à une baisse des prix, donc la réunion d'hier elle était très importante, et positive, parce qu'elle a permis de conduire à des engagements concrets de baisse des prix sur des produits, dans des marques précises, dont la liste me sera fournie la semaine prochaine.
APOLLINE DE MALHERBE
Maintenant j'ai deux conséquences à vous demander, la première c'est qu'est-ce que vous ferez de cette liste, alors vous avez dit que vous alliez vérifier avec la Répression des fraudes, mais est-ce que vous ne pourriez pas vous engager à publier cette liste, est-ce que nous les Français, qui allons faire nos courses, on n'aurait pas intérêt à avoir la liste et savoir que Buitoni va faire baisser, mais pas Lustucru par exemple ?
BRUNO LE MAIRE
J'essaye de faire les choses sérieusement, et évidemment dans un cadre légal, je ne peux pas rendre cette liste publique parce que je dévoilerai des secrets commerciaux, je peux simplement dire que ça concernera plusieurs centaines de produits, de consommation courante, parmi les produits que j'ai cités, avec à chaque fois des différences. La volaille elle doit abaisser, parce que les prix de production ont baissé, sur le porc, sur le bœuf c'est différent, parce que les coûts de production restaient élevés, sur le lait il n'y aura pas de baisse des prix parce que sinon c'est les producteurs qui trinqueraient, en revanche sur ces produits que j'ai cités, les pâtes, l'huile, l'huile de tournesol, la volaille, l'alimentation animale, là les prix doivent baisser dès juillet. J'aurai la liste très précise des marques et des produits, je vérifierai, grâce à la DGCCRF, et les sanctions possibles restent sur la table, les choses sont très claires entre les industriels et moi.
APOLLINE DE MALHERBE
On va revenir sur les sanctions et sur la manière dont vous le feriez ou non, mais précisément vous aviez dit la semaine dernière "s'ils ne jouent pas le jeu je n'hésiterai pas à faire du name and shame", mais à l'inverse, ce qui m'étonne, c'est que quand il s'agit au contraire de dire il y en a qui ont joué le jeu et c'est positif, là, quand vous vous renseignez, on vous dit "vous ne pouvez pas le faire", ça veut dire que vous n'auriez pas pu faire l'inverse.
BRUNO LE MAIRE
Si, j'aurais très bien donner les noms…
APOLLINE DE MALHERBE
Vous n'auriez pas non plus pu dire "eux ils ne jouent pas le jeu."
BRUNO LE MAIRE
Si, je peux très bien donner le nom, et d'ailleurs la possibilité reste sur la table, s'il y a un de ces 75 industriels de l'agroalimentaire, de ces grandes multinationales, qui a des marges qui continuent de progresser et qui ne joue pas le jeu, ça veut dire qu'il ne joue pas le jeu de la lutte contre l'inflation, donc son nom sera révélé au public, et les choses sont très claires avec les industriels…
APOLLINE DE MALHERBE
Quand ?
BRUNO LE MAIRE
Je leur fais confiance, d'ici la fin du mois de juin, si je vois que les engagements ne sont pas tenus nous donnerons les noms des industriels, mais je pars du principe qu'à partir du moment où ils ont pris l'engagement devant moi, que les choses sont très claires, qu'il y avait Olivia GRÉGOIRE, ministre des PME, Roland LESCURE, ministre de l'Industrie, qui étaient présents, leur parole vaut engagement, et cet engagement sera respecté.
APOLLINE DE MALHERBE
Il n'y en a pas un seul qui, c'est-à-dire que NESTLÉ, COCA, ils ont tous dit "on joue le jeu" ?
BRUNO LE MAIRE
Ils ont tous dit "on joue le jeu", donc à partir…
APOLLINE DE MALHERBE
Il n'y en a pas qui est resté derrière la main ?
BRUNO LE MAIRE
Ils ont tous dit "je joue le jeu", ce qui veut dire que sur les produits dont ils me donneront la liste, l'engagement de baisse des prix, de 2, 5, 10%, devra être respecté, que ceux qui remplissent les critères de négociations commerciales devront revenir à la table de négociations, aujourd'hui il n'y en a que deux ou trois, il y en au moins une quinzaine qui remplissent ces critères de réouverture des négociations commerciales, donc il faut que ces 15 reviennent à la table de négociations. Et, je le redis avec beaucoup de fermeté…
APOLLINE DE MALHERBE
Attendez, je voudrais comprendre, parce qu'il y en a 75 qui sont les gros groupes, il y en a deux ou trois qui avaient déjà joué le jeu…
BRUNO LE MAIRE
Exactement.
APOLLINE DE MALHERBE
Et vous me parlez là de 15, ça veut dire qu'en fait sur les 75 il n'y en a que 15 qui vont vraiment baisser les prix, parce qu'il n'y en a que 15 qui sont en situation de baisser les prix ?
BRUNO LE MAIRE
Pas du tout, ça veut dire simplement que vous avez des gammes de produits, et que vous avez un industriel agroalimentaire qui peut faire du porc, de la volaille et du bœuf, il va pouvoir baisser sur la volaille parce que la volaille elle a des coûts de production plus faibles…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais il ne baissera pas sur le bœuf et le porc parce que les coûts de production n'ont pas baissé.
BRUNO LE MAIRE
Mais il ne baissera pas sur le bœuf et sur le porc, et donc comme on est rentré, on a mis du temps hier, on a passé deux heures à regarder produit par produit, on s'est dit "qu'est-ce qui est le plus efficace pour le consommateur ?", c'est ça que je me suis demandé, moi je me paye pas de mots, je n'ai pas du tout envie de pouvoir dire aux Français "ne vous inquiétez pas, les négociations commerciales sont rouvertes", si au bout du compte dans les rayons les prix sont toujours aussi élevés ça ne m'intéresse pas, donc j'ai préféré rentrer, avec Olivia GRÉGOIRE et Roland LESCURE, dans le détail, pour regarder effectivement où les marges progressent, où il est aberrant qu'il y ait encore des prix qui augmentent, les pâtes sont le meilleur exemple, le blé baisse, les pâtes doivent baisser, en revanche, je le redis, sur le lait, sur le porc, sur la viande bovine, là c'est plus difficile parce que les coûts de production restent élevés.
APOLLINE DE MALHERBE
Il n'y aura pas de baisse parce que mécaniquement la production reste très élevée. Vous avez dit il faut que cet engagement il soit clair, net, écrit, avant fin juin, la conséquence dans les rayons c'est pour quand ?
BRUNO LE MAIRE
C'est pour juillet, les prix…
APOLLINE DE MALHERBE
Donc juin l'engagement, juillet les conséquences dans les rayons.
BRUNO LE MAIRE
Juin l'engagement, juillet les prix qui baissent dans les rayons sur les centaines de produits, de références comme on dit, qui me seront transmises, et après j'ai deux possibilités, la première c'est de nommer les entreprises qui n'auraient pas joué le jeu, et la deuxième, que je conserve, c'est la possibilité de mettre en place une taxe sur les marges excessives qu'auraient faites les entreprises de l'agroalimentaire…
APOLLINE DE MALHERBE
Une taxe de combien, vous avez commencé à dessiner un peu les concours de cette taxe exceptionnelle ?
BRUNO LE MAIRE
Je peux juste vous dire que l'instrument juridique est prêt, que l'instrument juridique été validé par la direction des affaires juridiques de mon ministère, qu'elle a été présentée aux industriels de l'agroalimentaire, donc ils savent parfaitement à quoi s'attendre. Moi je ne peux pas me retrouver…
APOLLINE DE MALHERBE
Ce serait une taxe, je veux bien comprendre, c'est une taxe, on évoque 5 %…
BRUNO LE MAIRE
Mais le taux, vous savez, il est décidé par les parlementaires, moi je propose le mécanisme et le taux ensuite il est décidé par les parlementaires, mais nous n'en sommes pas là.
APOLLINE DE MALHERBE
Alors imaginons que c'est 5 %…
BRUNO LE MAIRE
J'ose espérer que je n'aurai pas à dégainer cette arme fiscale.
APOLLINE DE MALHERBE
Moi ce que je voudrais savoir c'est est-ce que ces 5 % ils s'appliqueraient uniquement à la partie marge exceptionnelle, ou est-ce que ces 5 % ils tomberaient sur l'ensemble de la marge du groupe ?
BRUNO LE MAIRE
Les 5 %, ou 3 %, ou 2 %, aujourd'hui il n'y a pas de taux qui a été fixé, s'appliqueront à la marge de l'entreprise. Si nous nous apercevons…
APOLLINE DE MALHERBE
Pas uniquement à la surmarge, si je peux me permettre, parce que c'est important de le comprendre ?
BRUNO LE MAIRE
Non, non, c'est la marge de l'entreprise, si nous nous apercevons…
APOLLINE DE MALHERBE
Voilà, ce serait une sanction conséquente dans ce cas.
BRUNO LE MAIRE
Nous travaillons, j'espère que chacun entend cela, nous travaillons, au ministre de l'Économie et des Finances, sérieusement et rigoureusement, donc nous avons les chiffres de l'INSEE, et nous avons les chiffres la DGCCRF, qui montrent une chose très simple, le taux de marge des entreprises de l'agroalimentaire a fortement progressé au cours des premiers mois de l'année 2023, et ils ont plus que rattrapé les pertes qu'ils avaient faites dans les deux années passées, tant mieux pour eux, la seule chose que je leur demande c'est de dire "vous pouvez garder une partie des marges pour vous, c'est normal il faut que vous investissiez, mais il y a une partie des marges que vous devez rendre au consommateur", et c'est ça que je vérifierai, "vous le faites, tant mieux", et je pense que ce sera le cas, "vous ne le faites pas, eh bien nous le récupérerons par la voie fiscale."
APOLLINE DE MALHERBE
Et du côté des distributeurs, tout va bien, ils vont jouer le jeu, ils vont baisser… ?
BRUNO LE MAIRE
Les distributeurs se sont engagés à poursuivre le trimestre anti-inflation jusqu'à la fin de l'année, du 15 juin jusqu'à la fin de l'année, là aussi ils jouent le jeu…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais je veux dire, sur ces produits-là, dont vous parlez, vous le savez, vous en avez parlé j'imagine avec eux, ils ont dit "oui, oui, on change les étiquettes dès le début du mois de juillet" ?
BRUNO LE MAIRE
Bien sûr, mais nous vérifierons, là aussi je cherche simplement à jouer le rôle qui est le mien, c'est-à-dire faire baisser les prix pour les consommateurs en rassemblant les acteurs, le ministre de l'Économie n'a pas une réglette entre ses mains grâce à laquelle il pourrait faire monter ou faire baisser les prix…
APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça veut dire que vous pouvez dire…
BRUNO LE MAIRE
En revanche il a un pouvoir d'injonction vis-à-vis des distributeurs et des industriels pour leur dire "vous vous rassemblez, vous trouvez des accords et vous faites baisser les prix", c'est ce à quoi nous sommes arrivés hier, nous avons réglé le problème des distributeurs d'abord avec Olivia GREGOIRE, réglé hier le problème de l'industrie agroalimentaire avec Roland LESCURE, et maintenant j'attends que ça se voit dans les rayons.
APOLLINE DE MALHERBE
Un dernier mot parce que je voudrais aussi qu'on puisse parler électricité et logement. Ça veut dire que vous pouvez quand même dire aux Français ce matin que leur caddy, le mois prochain, leur coûtera moins cher ?
BRUNO LE MAIRE
Je dis aux Français que, dès le mois de juillet, sur un certain nombre de références et de produits, les prix baisseront en juillet et nous le vérifierons et nous sanctionnerons ceux qui ne jouent pas le jeu.
APOLLINE DE MALHERBE
EDF est 100% nationale aujourd'hui même, Bruno LE MAIRE, ça y est, c'est effectif, quelles conséquences dans un moment où le paradoxe, semble-t-il enfin en tout cas moi ça m'est apparu comme ça mais vous allez peut-être me dire que je suis naïve, c'est que RTE qui s'occupe de distribuer l'électricité a alerté la semaine dernière en disant, en fait, on va avoir parce qu'on va vers plus d'écologie, on va avoir besoin de plus d'électricité, ça paraît un peu contre-intuitif ?!
BRUNO LE MAIRE
Non parce que l'électricité, elle est décarbonée, donc plus d'électricité et moins d'énergies fossiles. Le meilleur exemple, c'est nos voitures, nous avons vécu pendant plusieurs décennies avec des voitures qui fonctionnaient avec du diésel ou de l'essence, de l'énergie fossile ; nous allons basculer et à mon avis beaucoup plus rapidement qu'on ne s'y attendait vers un parc automobile électrique. Me problème c'est que ces voitures électriques, il faut alimenter les batteries et que ça consomme beaucoup d'électricité, que pour produire ces batteries parce que nous avons fait le choix avec le président de la République de la réindustrialisation, que nous recréons pour la première fois depuis 40 ans des emplois industriels et des usines dans notre pays. Les usines, il faut les faire tourner.
APOLLINE DE MALHERBE
Là-dessus, j'avoue qu'il y a un truc que je ne comprends pas, pardon, je fais une petite parenthèse …
BRUNO LE MAIRE
Allez-y, allez-y, je suis là pour essayer d'apporter tous les réponses possibles !
APOLLINE DE MALHERBE
Bruno LE MAIRE, on vous a entendu tous vous réjouir - et vous aviez bien raison - de ces ouvertures d'usines, de la vallée de la batterie et en fait dans le même temps, la Zoé est à l'arrêt, la ligne de production de la Zoé à Flins est à l'arrêt pour 3 semaines, 3 semaines sans une seule Zoé, qui va sortir de l'usine. Donc on a des batteries, enfin on va avoir des batteries mais on n'aura plus de voitures électriques.
BRUNO LE MAIRE
Non parce que ce qui manque en l'espèce, ce n'est pas les batteries, c'est les semi-conducteurs
APOLLINE DE MALHERBE
C'est les semi-conducteurs, c'est-à-dire ce composant électronique …
BRUNO LE MAIRE
Mais 1), nous allons avoir de la production de batteries électriques dans notre pays. J'ai ouvert il y a quelques jours l'usine ACC de STELLANTIS mais c'est formidable de voir dans le dunkerquois, dans une région …
APOLLINE DE MALHERBE
Mais là vous êtes bien d'accord, qu'il y a des ouvriers à Flins qui sont à l'arrêt …
BRUNO LE MAIRE
Dans une région où il y a eu de la destruction d'emplois, de la destruction d'emploi ouvrier des usines qui ouvrent, des chaînes de montage, des chaînes de production et des milliers de postes d'ouvriers. "Ouvrier" doit redevenir un mot attractif, un mot noble dans l'emploi français et nous allons continuer à créer des dizaines de milliers d'emplois d'ouvriers, d'ingénieurs, de techniciens dans notre pays et c'est une excellente nouvelle et nous allons être plus indépendants. Le véhicule électrique veut dire batterie, veut dire aussi semi-conducteurs ; si la Zoé est à l'arrêt, c'est que nous manquons de semi-conducteurs, nous avons obtenu l'extension de l'usine de Crolles à Grenoble pour avoir plus de semi-conducteurs et je rappelle qu'une part de la production doit être réservée pour les pouvoirs publics, justement pour que lorsqu'il y a une pénurie comme sur la Zoé, nous puissions demain fournir les semi-conducteurs à l'industrie automobile.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc ça n'arrivera plus cette chaîne de production tout d'un coup à l'arrêt ?
BRUNO LE MAIRE
Ça n'arrivera plus et nous sommes dans cette voie de la réindustrialisation, industrialisation verte qui va changer la face du pays ; notre pays s'est appauvri en fermant ses usines et en détruisant des emplois ; il va s'enrichir en se réindustrialisant et en recréant des emplois d'ouvriers et d'ingénieurs.
APOLLINE DE MALHERBE
Bruno LE MAIRE, la crise du logement est considérable, tous ceux qui travaillent dans ce domaine alertent depuis des mois et ont le sentiment quand même que le Gouvernement a accouché d'un plan de petite souris qui n'est pas à la hauteur de la crise. Il y a un point sur lequel pour le coup vous êtes aux manettes qui est la question aussi des taxes et des niches fiscales ou non sur location de courte durée ce qu'on appelle Airbnb ; est-ce que vous allez restreindre la possibilité de faire ces locations de courte durée ? Est-ce que vous allez vous y attaquer et permettre dans ce cas que ces logements reviennent dans le parc immobilier ?
BRUNO LE MAIRE
Alors sur Airbnb, on s'y est déjà attaqué, on a réduit la possibilité, la durée à 120 jours. Aujourd'hui moi ce qui m'interroge c'est que nous gardions une fiscalité favorable pour le Airbnb. Donc je suis ouvert à une réforme de la fiscalité sur les Airbnb pour qu'elle soit équivalente à celle d'autres logements. Nous allons travailler là-dessus, faire des propositions à la Première ministre et au président de la République mais je dois dire que j'ai du mal à comprendre la fiscalité très favorable qui s'applique aujourd'hui à Airbnb. Donc nous informerons cette fiscalité et je ferai des propositions. Ensuite vous avez effectivement …
APOLLINE DE MALHERBE
C'est vraiment un terrain que vous allez attaquer ?
BRUNO LE MAIRE
Oui, enfin, je ne vais pas "attaquer", ce n'est pas le bon mot mais la seule question c'est celle de la justice. A partir du moment où il y a des effets d'aubaine qui sont trop importants et une fiscalité qui est trop favorable, il n'y a pas de raison de garder cette fiscalité qui conduit à des excès. Je n'oublie jamais que chaque euro que je dépense est un euro du contribuable, d'une personne qui a travaillé dans notre pays. Donc je vais être sûr qu'il soit bien employé. Après vous avez un problème plus large de l'immobilier : vous avez connu une décennie entière de flambée immobilière pour une raison qui était très simple, l'argent était gratuit, donc vous pouviez emprunter à des taux d'intérêt très bas. Qu'est-ce qui change radicalement la donne ? La flambée des taux d'intérêt qui est liée à une politique monétaire qui nous permet de lutter contre l'inflation et contre la vie chère.
APOLLINE DE MALHERBE
Donc on se retrouve à faire une lutte vertueuse d'un côté mais qui a des conséquences également…
BRUNO LE MAIRE
Exactement qui a des conséquences de l'autre…
APOLLINE DE MALHERBE
… très dures sur le niveau…
BRUNO LE MAIRE
…à la fois sur le niveau d'activité, on le voit avec la récession ; en Europe aujourd'hui, il y a une récession dans beaucoup de pays européens, chez nos voisins allemands, la croissance française résiste mais ailleurs il y a une récession et on le voit sur l'immobilier où effectivement pour tous nos compatriotes c'est beaucoup plus difficile aujourd'hui d'emprunter parce que les taux d'intérêt ont augmenté. Je pense que l'erreur de politique économique serait de compenser cette difficulté par toujours plus d'argent public parce qu'on empêchera les prix de l'immobilier de baisser ; il faut qu'il y ait un ajustement et que les prix de l'immobilier baissent. Est-ce que pour autant, nous allons laisser tomber les promoteurs immobiliers, le monde du bâtiment, le monde des travaux publics ? Certainement pas mais nous devons apporter les bonnes réponses la bonne réponse, ce n'est pas dépenser toujours plus d'argent public, c'est d'avoir du foncier disponible, c'est de construire là où on manque de logements, construire dans les zones tendues, construire dans les zones où justement, on ouvre des usines et où il y a des besoins de logements immédiats.
APOLLINE DE MALHERBE
Et où il y aura des jobs. Bruno LE MAIRE, ministre de l'Économie, merci d'avoir répondu à nos questions.
BRUNO LE MAIRE
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 juin 2023