Texte intégral
YVES CALVI
Bienvenue Monsieur le Ministre de l’Education nationale.
PAP NDIAYE
Bonjour.
YVES CALVI
Bonjour Pap NDIAYE. Nous allons revenir dans quelques instants sur les résultats du bac puisque vous les aurez en exclusivité sur l’antenne de RTL, mais je voudrais revenir tout d’abord avec vous sur les épouvantables difficultés qu’ont connues nos établissements. Est-ce que vous avez un bilan clair au moment où nous nous parlons sur les déprédations qu’a connues notre pays ?
PAP NDIAYE
En ce qui concerne les écoles et les établissements, nous en comptons 243 qui ont subi des dégradations, parmi lesquels une soixantaine ont subi des dégâts importants, relativement importants avec par exemple des débuts d'incendie. Et sur ces 60 établissements, une dizaine ont été détruits ou partiellement détruits, ce qui évidemment compromet l'accueil des élèves pour cette semaine et pose des questions pour la rentrée scolaire.
YVES CALVI
Donc 10 établissements ont été partiellement ou complètement détruits, je vous ai bien compris ?
PAP NDIAYE
Oui, c'est cela. Par exemple, deux écoles à La Verrière qui devront être complètement reconstruites.
YVES CALVI
Nous y étions hier, dans les Yvelines, nous y étions hier avec nos reporters. La France a-t-elle perdu d'une certaine façon une richesse ?
PAP NDIAYE
Avec les écoles, vous voulez dire ?
YVES CALVI
Oui.
PAP NDIAYE
Bien sûr. Lorsque l'on s'attaque aux écoles, on s'attaque au symbole le plus vivant de la République et donc il y a évidemment quelque chose, là, qui est profondément déplorable et profondément condamnable. Vous avez d'ailleurs vu d'une part la mobilisation des forces de l'ordre et des sapeurs-pompiers, qui ont limité les dégâts si je puis dire. Par exemple à Bezons, un début d'incendie qui a été bloqué alors que l'école aurait pu flamber entièrement, et puis aussi la mobilisation des habitants. On a pu voir des mères de famille essayant de protéger l'école. L'école, c'est le trésor de ceux qui n'en ont pas. Et de ce point de vue-là, il faut aussi voir l'attachement.
YVES CALVI
Il va falloir leur réexpliquer, l'école c'est le trésor de ceux qui n'en ont pas. Visiblement, ce n’est pas ce qui concernait les jeunes gens qui ont attaqué nos établissements, non ? Qu'est-ce que vous avez envie de leur dire ce matin sur RTL ?
PAP NDIAYE
Ce que j'ai envie de leur dire, c'est que la seule possibilité de s'en sortir c'est l'école, ce sont les études. Mais il faut reconnaître aussi que dans les quartiers en question, on a des difficultés spécifiques. On a des phénomènes de discrimination, des phénomènes de relégation. Le taux de chômage a baissé ces dernières années mais il est encore de 18 %. Donc on a cette question de l'accès à l'emploi, la question de la formation professionnelle également, et puis bien sûr la question des relations difficiles avec la police.
YVES CALVI
Alors à propos de trésor, quelle est la facture ?
PAP NDIAYE
La facture, elle est celle bien sûr que les collectivités, avec l'aide de l'Etat, vont devoir assumer. La Première ministre s'est exprimée en ce sens. Les collectivités sont en charge…
YVES CALVI
On parle de combien ? Parce qu'on a quand même besoin de chiffrer ces choses-là même si c’est une approximation au moment où nous parlons.
PAP NDIAYE
On parle de dizaines de millions d'euros en ce qui concerne les écoles. Le bâti scolaire, comme vous le savez, est à la charge des collectivités mais l'Etat va bien entendu contribuer à apporter son soutien. D'une part pour qu’à la rentrée il y ait des solutions pour les élèves qui ont perdu leur école. Ils vont être répartis dans d'autres écoles, d'autres établissements. Et puis d'autre part…
YVES CALVI
Mais là, vous nous parlez des 10 établissements qui sont totalement détruits.
PAP NDIAYE
Voilà. La dizaine d'établissements qui sont détruits et la reconstruction va prendre du temps. Et pour les autres, il va falloir faire des réparations de manière à ce qu’à la rentrée, les élèves puissent être accueillis dans des conditions satisfaites.
YVES CALVI
Donc nous serons en travaux dans un certain nombre de nos établissements pendant l'été, nous nous sommes bien compris.
PAP NDIAYE
Exactement.
YVES CALVI
Combien d'établissements ? Est-ce que vous avez une évaluation ?
PAP NDIAYE
Une centaine d’établissements touchés de manière un peu plus lourde. Il va falloir faire un décompte exact. Il y a des bris de vitres par exemple, ça c'est facile à remplacer, mais le travail l'été lorsque les entreprises de travaux publics sont elles-mêmes en vacances partielles, évidemment ça prend plus de temps.
YVES CALVI
Vos services ont-ils chiffré le nombre d'élèves qui pourraient être impactés par cette rentrée difficile ?
PAP NDIAYE
Non, nous sommes en train de faire une évaluation et puis de nous assurer, en effet, de cette priorité absolue : c'est que tous les élèves seront accueillis à la rentrée. Il est hors de question que des élèves ne puissent pas trouver de solution scolaire à la rentrée, que ce soit du côté des écoles ou bien des collèges et des lycées.
YVES CALVI
Alors des élèves, il faut parler aussi de leurs parents. On s'interroge beaucoup en ce moment sur la capacité qu'ont ces parents à les tenir si je puis dire d'une certaine façon. Qu'est-ce que ça vous inspire comme commentaire ?
PAP NDIAYE
Je pense qu'il est légitime de demander aux parents de s'occuper des enfants, tout en tenant compte évidemment des difficultés spécifiques de certains parents, des familles monoparentales, des familles qui travaillent la nuit. C'est le cas souvent dans ces quartiers. Il ne s'agit donc pas d'accabler les parents mais il y a quand même des exigences minimales, qui sont d'ailleurs garanties par la loi. Des exigences…
YVES CALVI
Lesquelles ?
PAP NDIAYE
Des exigences en matière de santé, de sécurité et puis de scolarisation des enfants. Ça c'est tout à fait important et les parents s'exposent à des sanctions si ça n'est pas le cas.
YVES CALVI
Je voudrais vous faire réagir à la prise de parole d’Hugues MOUTOUH qui est le préfet de l'Hérault.
HUGUES MOUTOUH, PREFET DE L’HERAULT
Quand on a des enfants, on s'en occupe dès la naissance. Si effectivement ces enfants sont élevés comme des herbes folles, il ne faut pas s'étonner qu'à 12, 13 ans on les voit caillasser des véhicules de police. Si demain vous attrapez votre gamin qui descend dans la rue pour brûler des véhicules de police ou piller des magasins, la méthode c'est quoi ? C'est deux claques et au lit.
YVES CALVI
C'est le préfet de l'Hérault qui prend la parole chez nos confrères de France Bleu Hérault. Quelle est votre réaction et que pensez-vous de ce qu'il vient de nous dire ?
PAP NDIAYE
Alors je partage le fait qu'il faille responsabiliser les parents. Les parents ont une responsabilité, moi-même j'en ai parlé par exemple à propos du cyber-harcèlement. Vous savez que les parents ne s'occupent pas de ce que font les enfants sur les réseaux sociaux, par exemple le soir ; ça n'est pas à l'école de le faire.
YVES CALVI
"Deux claques et au lit", qu’est-ce que ça vous inspire comme commentaire ?
PAP NDIAYE
C'est une formule un peu rapide sans doute et, encore une fois, il faut tenir compte des difficultés spécifiques de certaines familles. Lorsqu'une mère travaille la nuit par exemple, c'est quand même plus compliqué pour les enfants. Mais ce que je pense aussi, c'est que toutes les mères, tous les pères aiment leurs enfants, qu'ils ont tous et toutes des difficultés et c'est vrai, par exemple, en ce qui concerne les réseaux sociaux dans toutes les couches sociales de notre pays. Mais nous avons aussi un appel à la responsabilisation. La responsabilisation, ça ne veut pas dire punir les familles, ça veut dire les aider pour faire de telle sorte qu'elles puissent s'occuper de leurs enfants. Et nous-mêmes du côté de l'Education nationale nous allons faire des efforts dès la rentrée en matière de parentalité, c'est-à-dire d'accompagnement des parents pour suivre ce que font leurs enfants, à la fois d'un point de vue scolaire, à la fois sur les réseaux sociaux et puis au-delà.
YVES CALVI
C'est-à-dire ? Parce que j'ai l'impression que c'est une annonce importante que vous êtes en train de nous faire : comment l'Education nationale peut-elle aujourd'hui accompagner les parents ? C'est intéressant comme démarche.
PAP NDIAYE
Alors nous pouvons le faire et je me suis exprimé là-dessus, notamment à propos de cyber-harcèlement, d'une part avec les fédérations de parents d'élèves. Lorsque des parents parlent à d’autres parents, il y a une horizontalité qui est…
YVES CALVI
Les parents parlent aux parents.
PAP NDIAYE
Voilà. Donc les cafés-parents, il faut réactiver aussi tous ces réseaux de parents qui sont très utiles, et puis aussi à partir de la rentrée recevoir les parents. Nous le faisons déjà, mais avec à la fois un discours qui est un discours d’accompagnement mais qui peut être aussi un discours de fermeté. Il faut rappeler les parents aussi à un certain nombre de devoirs parce que quand on est parent d'élève, on peut être parent d'élève harcelé mais on peut aussi être parent d'élève harceleur.
YVES CALVI
À propos de parents, il y en a qui doivent se ronger les ongles au moment où nous parlons puisqu'on attend les résultats du bac. Avez-vous les chiffres, Monsieur le ministre ?
PAP NDIAYE
Oui, ce sont des chiffres que nous avons calculés et qui sont tout frais puisqu'ils ont environ un quart d'heure. Ils seront affinés d'ici à leur publication officielle à 10 heures. Je peux vous dire d'ores et déjà…
YVES CALVI
Vous êtes le roi du suspense là ! Alors, ça donne quoi ?
PAP NDIAYE
On est à 84,9 % d’admis au bac toutes séries confondues contre 86,1 l'année dernière. C'est donc un léger tassement. Les épreuves de rattrapage vont évidemment hausser ce pourcentage.
YVES CALVI
C’est inédit ?
PAP NDIAYE
L'année dernière, on avait déjà un petit tassement, ce qui indique quelque chose.
YVES CALVI
Ça veut dire quoi ?
PAP NDIAYE
Alors ça veut dire que la sélectivité du bac - vous savez, on dit » on donne le bac à tout le monde - ça n'est pas si vrai que cela. Le bac retrouve finalement une sélectivité qu'il avait pu perdre ces dernières années.
YVES CALVI
"Le bac retrouve une sélectivité" nous dites-vous, donc vous défendez ce diplôme. Chiffres définitifs quand ?
PAP NDIAYE
À 10 heures ce matin.
YVES CALVI
Merci infiniment Monsieur le Ministre d'avoir pris la parole ce matin sur RTL.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 11 juillet 2023