Texte intégral
Mon général, monsieur le chef d’état-major des Armées,
Monsieur le secrétaire général de la défense et la sécurité nationale,
Monsieur le délégué général à l’armement,
Monsieur le secrétaire général pour l’administration,
Messieurs les chefs d’état-major d’armées,
Monsieur le directeur général de la gendarmerie nationale
Officiers généraux,
Officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins et aviateurs d’active et de réserve, personnels civils de la défense,
Mesdames, Messieurs les employeurs,
Mesdames, Messieurs,
Servir son pays est sans nul doute le plus bel engagement qui soit. Vous qui formez les rangs dans cette cour des Invalides, êtes tous engagés pour devenir les serviteurs d’une cause qui vous dépasse, qui est exclusive de votre ambition et s’inscrit bien au-delà de l’horizon de votre propre réussite : servir la France.
Sous l’uniforme, un militaire est un militaire, chacun sert avec la même ardeur, la même rigueur, et – je n’en doute pas – la même passion. Sous l’uniforme, que vous soyez d’active ou de réserve opérationnelle : vous risquez votre vie pour défendre la Patrie.
Là où l’uniforme ne distingue pas, là où l’engagement ne varie pas ; il n’y a donc pas lieu de distinguer.
C’est tout l’enjeu que nous aurons à relever au cours des mois qui arrivent pour mobiliser dans les rangs de nos armées, les citoyens qui – comme vous – souhaitent apporter leur énergie, leur temps et leur talent à l’oeuvre collective qu’est la défense de la Nation, dans la réserve opérationnelle mais aussi citoyenne.
[Mobiliser les forces morales de la Nation]
Soldats, marins et aviateurs qui formez les rangs dans cette cour mythique des Invalides,
Les défis qui attendent la Nation sont immenses. La France devra faire face aux menaces d’un monde sans cesse plus dangereux, marqué par le retour d’une compétition plus dure entre les grandes puissances, sur fond de prolifération nucléaire. Notre nation devra continuer de se défendre face à la permanence d’un risque terroriste qui n’a pas disparu ; mais aussi face à l’émergence de nouveaux espaces de conflictualité, qui découlent – ou qui sont le reflet – de sauts technologiques, rapides et brutaux, et amènent inévitablement une militarisation du cyber, de l’espace ou bien encore des fonds marins.
Ces menaces sont hybrides, elles mettent simultanément à l’épreuve nos intérêts politiques, sociaux, économiques, technologiques et énergétiques.
Pour y faire face, nos armées ont besoin de s’appuyer sur les forces morales qui animent la Nation. Parmi elles, le choix de rejoindre la réserve représente sans doute le soutien le plus puissant qu’un citoyen puisse apporter à son armée.
Vous qui formez les rangs aujourd’hui, devant ce drapeau du 12ème régiment de cuirassiers, vous représentez fièrement les 40 000 réservistes opérationnels qui servent actuellement au sein de nos armées, directions et services. Je veux vous dire très simplement que le rôle que vous aurez à jouer au cours des prochaines années sera décisif pour le succès de nos armes.
Il nous faudra pour cela répondre à au moins deux objectifs :
* La montée en puissance numérique de notre réserve opérationnelle tout d’abord, pour qu’à terme nos armées comptent un réserviste pour deux militaires d’active, avec 80 000 réservistes en 2030 et 100 000 en 2035. Nos armées comprendront alors, schématiquement, 300 000 militaires, dont 100 000 réservistes.
* Le deuxième est l’intégration parfaite de nos militaires de réserve opérationnelle dans les rangs des armées, en leur confiant les mêmes missions – y compris en opération extérieure –, en leur demandant les mêmes exigences qu’à leurs camarades militaires d’active, lorsqu’ils sont appelés sous l’uniforme. C’est sans doute là le défi le plus important pour nos armées, qui devront adapter leur organisation – unité par unité – pour assurer l’assimilation parfaite des militaires réservistes, tout grade confondu, parmi les militaires d’actives pour chacune des missions qu’elles remplissent. C’est un défi majeur, mais indispensable pour garantir les victoires de demain.
Les trente dernières années nous ont montré que la professionnalisation de nos armées était le bon choix et que nous n’avons pas besoin d’une armée de conscription. Notre modèle d’armée est le bon : celui d’une armée d’emploi.
Pour le consolider encore, la loi de programmation militaire apporte naturellement des réponses capacitaires avec des blindés, des bateaux et des avions. Mais si ces équipements et la courbe budgétaire sont importants, ne nous y trompons pas, le facteur humain est essentiel. A l’heure où certain pays se réarment mais n’ont ni notre histoire, ni notre modèle d’emploi, notre défi est donc double : Il nous faut le budget, les armes, les munitions, mais aussi le courage et la force d’âme des femmes et des hommes qui servent sous le drapeau.
Notre armée poursuit sa transformation pour acquérir des compétences face aux nouvelles menaces et montera en puissance en s’appuyant sur la réserve opérationnelle qui concourra à ses missions. Je salue en cela les travaux menés par nos trois armées.
Cette réserve devra être plus puissante : c’est-à-dire plus nombreuse, mieux formée, mieux équipée et mieux intégrée.
Pour permettre l’engagement du plus grand nombre, nous devons garantir que chacun puisse trouver sa place dans nos armées, en conciliant les contraintes civiles et militaires pour que nos concitoyens qui souhaitent s’engager puissent rejoindre simplement une unité. Chacun devra être utilisé pour ses compétences, sur les métiers les plus historiques, mais aussi sur les missions les plus récentes liées aux sauts technologiques du cyber, de l’intelligence artificielle, du quantique ou de la guerre informationnelle. Qui de mieux placé qu’un civil militarisé pour défendre la Nation face aux défis de l’hybridité, c’est-à-dire un enjeu civil militarisé ?
Je donnerai dans les prochains jours des instructions aux hautes autorités du ministère pour répondre à ces objectifs d’engagement et d’emploi des réservistes dans nos armées, en conformité avec ce que le Parlement décidera dans la loi de programmation militaire. La réserve devra être mobilisable rapidement et utilement le jour où un péril constaté, actuel – ou dorénavant – prévisible adviendrait pour notre Nation.
[La doctrine d’emploi]
Officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins et aviateurs,
Défendre son pays est un devoir, mais désormais, cela doit également devenir un droit. Pour y parvenir, il nous faut donc répondre au désir d’engagement de nos concitoyens. Cela devra passer par une simplification des conditions d’accès et de maintien dans la réserve. A la multitude de limites d’âge actuelles sera substituée une unique limite d’âge qui sera rehaussée. Les critères d’aptitude seront mis à jour de nos besoins réels et recentrés sur les seuls critères indispensables et adaptés à la mission concernée. Enfin, la communication et le parcours de recrutement feront l’objet d’une nouvelle approche plus moderne et plus territorialisée.
Il n’y aurait en effet rien de pire que de laisser un concitoyen désireux et apte à défendre la Nation, sans proposition à la mesure de ses compétences.
Qu’il soit étudiant, actif ou même retraité, qu’il vienne d’un village, d’un centre-ville ou d’une banlieue, des outre-mer ou de l’hexagone : chaque Français doit savoir qu’il peut être utile, qu’il est attendu et qu’il sera accueilli.
En entrant dans les armées demain, au sein d’une compagnie intégrée à un régiment et de plus en plus d’une section de réservistes intégrée à une compagnie d’active, les volontaires seront formés et équipés – au même titre et dans les mêmes conditions que les militaires d’actives – pour remplir avec eux la mission du régiment.
D’autres unités, à l’image du 24ème régiment d’infanterie ou des futures flottilles côtières de la marine nationale, seront entièrement composées de réservistes dans chacune de nos trois armées, afin de répondre aux missions essentielles qu’elles assurent prioritairement sur le territoire national. Dans l’hexagone comme dans les outre-mer.
Soldats, marins et aviateurs,
Certaines compétences manquent parfois au sein de nos armées, ou manqueront en cas de haute intensité, des chauffeurs de bus aux cyber combattants, en passant par les mécaniciens et les soignants, les réservistes recevront chacun une mission essentielle. Ils seront utiles.
La même logique devra guider le renforcement des réserves de la direction générale de l’armement, mais aussi la création d’une réserve industrielle, au profit de notre industrie de défense. Dès lors, si un péril advenait, l’ensemble des forces industrielles du pays pourraient se mobiliser pour équiper nos soldats.
Enfin, la réserve citoyenne a également un rôle majeur à jouer. A la logique de reconnaissance et de rayonnement s’ajoutera une mission de réflexion, de pédagogie et d’influence. La réserve citoyenne va entrer dans une nouvelle étape de son histoire.
[L’engagement des employeurs]
Mesdames et Messieurs,
Dans cette cour des Invalides, où la Nation s’est rassemblée à chaque fois que les évènements appelaient à ce qu’elle s’unisse pour relever les défis de sa défense et de sa souveraineté, je veux avoir un mot pour les forces économiques du pays, qui sont présentes aujourd’hui.
Au même titre que chaque citoyen, que chaque institution qui fonde et anime notre République, les entreprises françaises ont une mission patriotique à poursuivre pour la Nation. C’est bien sûr de participer à la prospérité de la France pour assurer son modèle, ses valeurs et sa puissance ; mais c’est aussi de concourir à sa défense.
L’ensemble des entreprises du pays a la possibilité d’apporter sa pierre à l’oeuvre collective qu’est notre défense nationale. Beaucoup l’ont déjà fait, d’autres le feront prochainement en conventionnant avec le secrétariat général de la garde nationale, afin de faciliter l’engagement de leurs salariés au sein de la réserve opérationnelle. Cet effort, nous l’attendrons également de l’employeur public et le ministère des armées montrera l’exemple pour les 65 000 personnels civils de la défense.
Mesdames, Messieurs,
Il n’y a pas de prospérité dans un pays qui n’est pas sûr, bien défendu, et suffisamment puissant pour être respecté. C’est là la mission de nos armées, forgées dans une histoire millénaire faite de grandes victoires et de défaites qui l’ont amené à se transformer en permanence ; et des femmes et des hommes aguerris aux plus durs combats qui composent nos armées. Mais il serait naïf de penser que notre défense ne repose que sur nos soldats, chacun doit y contribuer. L’engagement des réservistes et donc le soutien de leurs employeurs est un levier essentiel pour nous renforcer. À ce titre, la loi de programmation militaire permettra au moins 10 jours d’engagement pour les salariés réservistes chaque année.
[L’appel aux citoyens]
Depuis cette cour des Invalides, je veux enfin adresser un appel à toutes les Françaises et à tous les Français qui recevront ce message :
La France a besoin de vous !
Aux passionnés de nouvelles technologies : devenez les cyber-combattants de la France !
Aux médecins, aux soignants : rejoignez le service de santé des armées !
Aux agents de maitrise, aux logisticiens : engagez-vous !
Aux pilotes d’avion et aux mécaniciens: rejoignez l’armée de l’armée de l’air et de l’espace !
Aux conducteurs d’engins, de bus ou de camion : vos compétences sont indispensables au bon fonctionnement des armées !
Aux étudiants, aux apprentis et aux jeunes professionnels : venez développer vos compétences dans les armées !
Aux ingénieurs : devenez officier de réserve à la direction générale de l’armement !
Aux jeunes retraités : venez partager votre expérience !
À tous les Français – et je me permets d’insister – à toutes les Françaises : rejoignez la réserve opérationnelle de nos armées pour construire un destin plus grand, plus beau et plus noble que votre propre personne : venez défendre le destin de la France !
Vive la réserve !
Vive la République !
Vive la France !
Source https://www.defense.gouv.fr, le 17 juillet 2023