Texte intégral
Q - Nous sommes en direct de New York avec la ministre des affaires étrangères Catherine Colonna, bonsoir. Et son homologue ukrainien, bonsoir Dmytro Kuleba. Merci d'avoir accepté notre invitation. Vous êtes tous les deux aux Etats-Unis pour une réunion à l'ONU consacrée à l'Ukraine.
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Q - Madame la Ministre, est-ce que, aux yeux de la France, s'en prendre à une infrastructure civile, quitte à faire des victimes civiles, puisque selon les Russes il y a eu deux morts et une adolescente blessée, est-ce que cela constitue un objectif de guerre légitime pour l'Ukraine ?
R - Nous avons parlé ce matin avec le Ministre Kuleba de cette situation. Je note que cet incident n'a pas été revendiqué mais il faut aussi, en écho à ce qu'il a dit et ce qu'il m'avait expliqué tout à l'heure, relever que la Crimée fait partie du territoire internationalement reconnu de l'Ukraine et que, depuis cette zone qu'elle occupe, il est patent que la Russie mène des actions militaires. Voilà ce qu'il faut garder en tête avant tout.
Q - Autre question aujourd'hui, autre dossier, Madame Colonna, c'est le refus de la Russie de reconduire l'accord sur l'exportation de céréales depuis l'Ukraine. Cela fait craindre bien sûr une nouvelle fois la pénurie alimentaire, une explosion des prix, vous êtes inquiète ?
R - Oui évidemment. C'est un nouveau chantage insupportable qui s'exerce sur beaucoup de pays du monde qui ont besoin d'être dans une situation de sécurité alimentaire et que les actions de la Russie placent en insécurité alimentaire, alors même que leurs populations ont besoin d'être nourries. Ce n'est pas la première fois que nous regrettons ce type de chantage, mais il faut le faire aujourd'hui et même condamner la décision cynique qui semble avoir été prise par la Russie de mettre un terme à cet accord qui permettait l'exportation de beaucoup de produits agro-alimentaires. Ceci dit, nous avons d'autres voies d'exportation par ce qu'on appelle les "corridors de solidarité", donc par le continent, et si la Mer Noire devait continuer d'être bloquée du fait des décisions de la Russie et du fait de la guerre, tout simplement, que mène la Russie et du blocus qu'elle impose en Mer Noire, il y a d'autres voies de sortie. Néanmoins, c'est absolument regrettable de continuer comme ça à exercer un tel chantage sur le monde entier.
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Q - Madame la Ministre, on voit l'importance qu'attache votre homologue à cet "appel à la patience". Est-ce que vous voyez des signes d'une forme de fatigue ou de lassitude dans le soutien à l'Ukraine de la part de ses alliés ? Est-ce que vous le redoutez ? Et si c'est le cas, que peut-on faire pour l'éviter ?
R - Non, au contraire. Je crois que, vous vous en souvenez, les Alliés étaient réunis il y a quelques jours au sommet de l'OTAN à Vilnius. Ils ont clairement adressé un message de soutien à l'Ukraine et de soutien dans la durée, mais c'est aussi un message qu'ils ont voulu adresser à la Russie : que notre aide, aux côtés de l'Ukraine pour l'aider à se défendre, pour l'aider à résister, pour l'aider à recouvrer sa souveraineté et son intégrité territoriale, cette aide se poursuivra aussi longtemps que l'agression russe se poursuivra, parce qu'elle met en question les fondements mêmes de l'ordre et de la sécurité internationale, au-delà même du continent européen. Et donc ce message a été clairement adressé par les Alliés à la Russie. Il est nécessaire. Et ici, aux Nations unies, quelques jours après le sommet de l'OTAN, tout à l'heure au Conseil de sécurité, la France rappellera qu'il est nécessaire, une nouvelle fois, d'appeler la Russie au respect de ses obligations. Elle est membre permanent du Conseil de sécurité comme nous le sommes, elle a des responsabilités particulières, des obligations particulières, elle doit respecter les grands principes de la Charte : la non-agression, la souveraineté, l'intégrité territoriale. Il faut que la communauté internationale lui redise à nouveau qu'il faut qu'elle cesse son agression, que celle-ci est d'ores et déjà un échec stratégique, et qu'il faut qu'elle la cesse pour le bien de la sécurité et de la stabilité dans le monde, et bien au-delà même de l'Ukraine ou du continent européen. Donc nous avons adressé ce message clair et net il y a une semaine en tant qu'Allié ; nous le referons aujourd'hui en tant que France et en tant qu'Européen au Conseil de sécurité, tout à l'heure.
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R - Si je peux compléter ce que Dmytro Kuleba vient de dire - merci Dmytro de rappeler tout ça -, nous allons aussi travailler les uns (inaudible), au-delà de tous nos amis et partenaires pour faire progresser le plan de paix qui a été présenté par l'Ukraine. L'Ukraine qui est agressée, qui est attaquée, qui est occupée et qui cherche pourtant le dialogue, qui a prôné le dialogue, qui a proposé des solutions de paix. Nous utiliserons nos conversations d'aujourd'hui, les réunions officielles et puis les à-côtés informels pour rassembler autant de pays que possible autour des idées de paix qui ont été présentées par l'Ukraine.
Q - Merci, merci bien à tous les deux d' avoir été sur BFM TV depuis New York.
R - Merci beaucoup.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 juillet 2023