Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur le conflit en Ukraine, à New York le 20 septembre 2023.

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Circonstance : Intervention devant le Conseil de sécurité de l'ONU

Texte intégral

Merci Monsieur le Président.

Je remercie le Secrétaire général de ces propos.

Permettez-moi de commencer par saluer l'intervention du Président de la République d'Ukraine, Volodymyr Zelensky. Depuis 18 mois, il incarne et porte la nation ukrainienne, donne une voix et un visage aux millions d'Ukrainiennes et d'Ukrainiens qui se battent pour leur liberté, avec un courage qui force notre admiration. Devant ce Conseil, dont le mandat porte sur la paix et la sécurité du monde, son appel nous oblige.

Le 24 février 2022, la Russie a choisi de s'engager dans une guerre d'agression contre un État souverain, en violation de tous ses engagements internationaux et des principes qui, depuis huit décennies, président aux rapports entre les nations. Une guerre qui n'a d'autre motivation que la volonté russe de renouer avec un passé impérial fantasmé, bien qu'il ait été condamné par l'Histoire.

Cette guerre, c'est évidemment l'Ukraine qui en est la première victime. C'est l'Ukraine et sa population qui subissent au quotidien les exactions, les crimes, les bombardements, les tortures. Ce sont des enfants ukrainiens qui ont, par milliers, été enlevés de force à leurs familles et transférés vers la Russie, une abomination. Ce sont des femmes, des hommes, des enfants ukrainiens qui ont subi des viols de masse, utilisés comme arme de guerre, autre crime.

Oui, cette guerre est une guerre contre l'Ukraine, contre les Ukrainiennes et les Ukrainiens. Mais c'est aussi une guerre contre les règles de la vie internationale.

Car c'est une guerre contre les principes les plus fondamentaux de notre Charte commune : en premier lieu ceux du respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale des États. C'est une guerre contre l'idée même des Nations unies.

C'est une guerre contre les fondements de notre sécurité collective, alors que la Russie utilise la sûreté des installations nucléaires civiles ukrainiennes comme levier au service de son agression.

C'est une guerre contre les biens communs de l'humanité, qu'il s'agisse du patrimoine culturel que la Russie prend pour cible à Odessa et ailleurs, ou de la sécurité alimentaire mondiale, avec la fin brutale et cynique de l'initiative céréalière en Mer Noire et plus de 270.000 tonnes de céréales détruites de manière systématique par les bombardements russes au cours du seul mois d'août. Qu'un membre de ce Conseil fasse de la faim une arme constitue une transgression de plus, après tant d'autres, du cadre moral dans lequel notre action devrait s'inscrire.

C'est bien une guerre qui nous concerne tous. C'est la raison pour laquelle nous ne faiblissons pas.

Face à cette agression et aux déstabilisations qu'elle provoque partout dans le monde, seule une poignée d'États, et quels États, soutient les choix catastrophiques de la Russie. L'Assemblée générale comme notre Conseil sont largement unis autour de nos principes communs. Chacun comprend que renvoyer dos à dos l'agressé et l'agresseur n'apporte ni paix, ni justice, ni stabilité. Si nous permettions que l'agression russe soit récompensée aujourd'hui, ne nous leurrons pas, nous devrons à nouveau réunir ce Conseil, car d'autres agressions se produiront ici ou ailleurs, et car nul ne sera en sécurité.

Monsieur le Président,

La quasi-totalité des pays présents autour de cette table ont, dans leur passé plus ou moins récent, vécu le traumatisme de la guerre. Ils ont fait l'expérience, dans leur chair, du lot de destructions et de drames qu'elle charrie. Ils savent que la guerre n'est jamais une solution.

Alors que nous célébrerons demain, comme tous les 21 septembre, la journée mondiale de la paix, nous avons tous ici une responsabilité autant qu'un devoir moral d'agir pour mettre un terme à cette agression de la Russie, comme l'Assemblée générale le lui a expressément demandé.

Le 21 septembre, comme chaque jour depuis le début de cette guerre, la France se mobilisera pour que cette agression échoue dans notre intérêt à tous. La France continuera d'agir selon nos principes communs :

- Le principe de légitime défense reconnu par notre Charte : nous continuerons à poursuivre le soutien militaire et civil que nous apportons à l'Ukraine pour qu'elle résiste et se défende ;

- Le principe de justice et de dignité : nous continuerons de soutenir les juridictions ukrainiennes et internationales pour assurer qu'il n'y aura pas d'impunité pour les crimes commis par la Russie ;

- Le principe de solidarité : nous continuerons à poursuivre et à accroître notre soutien concret aux pays les plus durement frappés par la crise alimentaire mondiale provoquée par la Russie. Et nous accroîtrons notre aide humanitaire au bénéfice des populations dans le besoin partout dans le monde.

Monsieur le Président,

La primauté du droit sur la force, la solidarité internationale, et le soutien aux plus démunis sont des principes qui figurent au cœur de la vision pour la paix développée par le président Zelensky. C'est la raison pour laquelle, chaque jour, nous sommes plus nombreux à la soutenir. J'appelle tous les États qui ne l'ont pas encore fait à y travailler.

Je vous remercie.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 septembre 2023