Résumé
Bonsoir à toutes et à tous. Merci de votre présence.
Un premier mot, parce que vous avez devant vous la ministre de l'Europe et des affaires étrangères mais aussi l'ancienne ambassadrice de France en Italie, pour vous dire que je voudrais, devant vous, avoir une pensée émue pour le président Napolitano, qui nous a quittés vendredi, et qui a marqué de son empreinte, de sa personnalité forte, la vie politique italienne et européenne. Car c'était un grand Italien, un grand Européen, un homme d'État, un signore.
Pour passer à des choses plus agréables, je vous dis d'emblée que je suis très heureuse d'accueillir mon collègue, Antonio Tajani à Paris, après qu'il m'ait reçue à Rome au moins deux fois. Et donc voilà, il fallait que nous le recevions ici. Nos échanges sont réguliers, nous étions ensemble, plusieurs jours la semaine dernière, à New York, pour l'Assemblée générale des Nations unies. Nous ne sommes vus dans des réunions européennes, nous ne sommes vus au G7 aussi, qui s'est tenu à New York. Nos échanges sont réguliers, toujours amicaux et, je l'espère, productifs. Nous allons les poursuivre ce soir, avec nos équipes, et je voudrais remercier celles-ci, parce que si les ministres se parlent souvent et se voient souvent, l'essentiel du travail repose bien sûr sur nos administrations respectives, celles qui sont ici représentées et toutes celles des ministères qui travaillent également aux relations franco-italiennes, d'une façon ou d'une autre.
Votre présence, Monsieur le Ministre, et l'entretien suivi d'un dîner, sont l'une des manifestations du dialogue constant et riche que la France entretient avec l'Italie. Et je situe bien sûr tout ceci dans le cadre exceptionnel des relations que nous avons maintenant grâce au traité du Quirinal. Je remercie à ce titre, là aussi, celles et ceux qui contribuent à le mettre en œuvre. Nous allons bientôt fêter les deux ans, je crois, du traité ; c'est une belle chose. Nous allons parler de notre coopération bilatérale, faire le point sur la mise en œuvre de ce traité. Nos gouvernements sont en contact fréquent à ce sujet et nous avons tenus tout récemment le premier conseil franco-italien sur la jeunesse. Je crois me souvenir, Monsieur le Ministre, que c'était à Rome, et que ma collègue, la secrétaire d'État qui était chargée de cela, a pu ainsi se rendre chez vous pour donner vie, au service civique commun, qui est l'une des innovations du traité du Quirinal. Nous allons lancer bientôt le premier comité transfrontalier, qui est un autre engagement du traité. Voilà un premier sujet que nous allons poursuivre lors de notre entretien : la coopération bilatérale, comment la prolonger, comment l'appliquer à un certain nombre de situations.
Le deuxième grand sujet est que nous allons poursuivre notre concertation sur les questions internationales, je voudrais en citer quelques-unes, mais elles seraient nombreuses : l'Ukraine, bien sûr, il faut rappeler que les Européens sont unis, il faut rappeler que leur engagement aux côtés de l'Ukraine pour que, non seulement elle se défende, elle résiste, mais qu'elle puisse recouvrer son intégrité territoriale et sa pleine souveraineté, est constant, résolu, il s'inscrit dans le temps long, on le sait, il est économique, militaire, humanitaire, diplomatique évidemment, mais nous aurons l'occasion d'en parler et de réaffirmer clairement l'importance de ce soutien constant et résolu.
Nous parlerons très certainement de la situation dans le Caucase, l'actualité nous oblige à le faire, après l'opération qui a eu lieu à l'initiative de l'Azerbaïdjan, il y a quelques jours. Nous avons, l'un et l'autre, condamné avec force cette opération militaire, appelé à une solution pacifique, négociée, respectant le droit des habitants du Haut-Karabakh de vivre en sécurité, en paix et dans le respect de leurs traditions, de leur histoire, de leur culture. Le Président de la République a de plus rappelé hier soir le soutien constant que la France apporte à l'Arménie. Nous avons travaillé sur ce sujet aussi à New York ; nous avons pu tenir une réunion du Conseil de sécurité ; j'ai pu m'entretenir avec mes deux collègues arménien et azerbaïdjanais, et nous poursuivrons la recherche d'une solution qui permette que la paix revienne.
Nous parlerons certainement de la situation au Sahel. Je ne serai pas longue, puisque sur ce sujet aussi le Président de la République a donné des informations importantes hier soir. Je précise, s'il le fallait, que la décision qui a été annoncée hier soir ne remet évidemment pas en cause la position de la France au soutien du président Bazoum et en faveur du retour à l'ordre constitutionnel au Niger, en plein appui des efforts de la CEDEAO à cette fin. Je crois que, comme nous avons commencé de le faire à New York lors de notre réunion européenne, nous serons appelés aussi à réfléchir un peu au-delà de ce qui se passe dans ce pays, à la multiplication des coups d'État au Sahel, à l'extension de la menace terroriste, au recul d'une façon générale de la démocratie... autant de sujets de préoccupation communs, et nous allons les aborder ensemble.
Enfin, nous parlerons bien sûr des questions européennes. Elles sont nombreuses, elles concernent nos deux pays. Je mettrais peut-être au premier rang de celles-ci ce soir la question des migrations, même si nos collègues ministres de l'intérieur sont en contact et si le Conseil JAI [Justice et affaires intérieures] se réunira le 28. Je le redis ce soir, le Président de la République s'est exprimé également à ce sujet, je l'avais fait, il y a quelques jours : nous sommes pleinement solidaires de l'Italie face à l'afflux de migrants. Et je crois que nous sommes d'accord aussi pour dire que ce phénomène appelle une réponse européenne ; la solution passera très largement par une coopération européenne renforcée, et nous avons pour objectif, bien sûr, grâce à celle-ci, d'avoir une plus grande coopération de la part des pays d'origine, de la part des pays de transit, qui doivent prendre des engagements, qu'ils doivent tenir, avec notre aide. Il faut bien sûr - c'est un second axe sur lequel il faut insister parce que nous devons être plus fermes et plus résolus - lutter contre les réseaux de passeurs, et lutter de façon déterminée, résolue. Il est affreux, abominable, que prospèrent des activités criminelles qui exploitent la misère humaine. Il s'agit de trafics d'êtres humains. Et bien sûr, en tant qu'Européens, nous souhaitons faire aboutir rapidement, le plus rapidement possible, le pacte asile-migration en lien avec le Parlement européen, et de grands pas ont été faits sous présidence française de l'Union européenne, récemment avec l'accord qui avait été trouvé et reste à finaliser. Et les dispositifs nouveaux contenus dans ce pacte asile-migration nous permettront également de répondre aux phénomènes face auxquels nous nous trouvons.
Nous parlerons aussi bien sûr des autres grands sujets européens : l'élargissement est à l'ordre du jour de nombre de réflexions d'ici la fin de l'année, la gouvernance économique, le renforcement de la souveraineté européenne et de nos industries, les investissements dans des secteurs clés... Voilà quelques-uns des thèmes sur lesquels vous pouvez imaginer que nous allons nous entretenir. Cela n'épuise pas, certainement, l'ordre du jour, il peut y en avoir d'autres ; mais je voulais, au moins sur ces trois grandes têtes de chapitre, vous dire que nous coopérons de près avec l'Italie. Nous avons des défis communs, et le plus souvent des réponses communes. Donc, cher Antonio, je te remercie de ce bon travail que nous faisons ensemble, et je te remercie encore plus de ta présence à Paris, ce soir.
(...)
Q - Bonsoir, j'ai une question pour les deux ministres. Après le discours de M. Macron d'hier soir, qui a marqué une main tendue... Comme la Première ministre italienne l'a dit, il ne faut pas laisser seuls les Italiens. Paris travaille avec Rome pour trouver une solution. Nous avons l'impression que les déclarations de M. Darmanin qui dit "nous n'accepterons pas les migrants qui arrivent de Lampedusa" sont à l'encontre de ce qui a été dit par M. Macron hier soir. Je voudrais savoir ce que vous en pensez.
R - Je vais répondre la première, pour faire très, très vite. Il faut se référer, Madame, je pense d'abord et avant tout aux propos tenus par le Président de la République. Le Président s'est exprimé hier, y compris sur ce sujet, sur la nécessité d'une coopération plus forte et plus efficace entre Européens, et cela veut dire l'approbation du pacte sur la migration et l'asile le plus tôt possible. Il s'est exprimé également sur la solidarité qui est la nôtre avec l'Italie. Il a également indiqué que la France a toujours pris sa part de l'effort, lorsqu'il le fallait, sachant que nous devons tous évidemment faire une distinction entre les personnes qui relèvent du droit d'asile, qui sont persécutées au sens de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés, et celles qui n'en relèvent point. Voilà la ligne de la France. Je ne m'étais pas exprimée autrement, et je crois que le ministre de l'Intérieur français s'est exprimé exactement sur les mêmes lignes, y compris sur le dernier point.
Merci.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 septembre 2023