Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur l'attaque terroriste du Hamas, la réponse israélienne, l'aide humanitaire aux Palestiniens de Gaza et les perspectives de paix, à l'Assemblée nationale le 23 octobre 2023.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Déclaration du Gouvernement sur la situation au Proche-Orient, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution, à l'Assemblée nationale

Texte intégral

Permettez-moi à mon tour d'apporter mon soutien à la présidente de votre assemblée, visée par des propos indignes, abjects, irresponsables et aux relents antisémites - disons le mot.

Le 7 octobre, Israël a été frappé par une attaque terroriste massive, menée par le Hamas, un groupe terroriste dont le projet est de détruire Israël - ce n'est pas nous qui le disons, c'est le Hamas lui-même et je remercie le président Bourlanges de l'avoir rappelé, avec d'autres ; détruire Israël mais aussi semer la haine et le chaos. Un groupe qui ne se soucie aucunement de répondre aux aspirations légitimes des Palestiniens mais les tient, au contraire, en otages.

Le Hamas a été aidé par d'autres groupes, également terroristes, qui ont revendiqué des actions de soutien : le Jihad islamique et le FPLP - Front populaire de libération de la Palestine. Face à ces attaques terroristes, la France a fait part de sa solidarité avec le peuple israélien, meurtri.

Ceux qui refusent de qualifier le Hamas de terroriste se fourvoient. Aux Nations unies, le Brésil, la Chine, la France et neuf autres Etats ont voté un texte qui lui reconnaît ce caractère. Ils l'ont fait parce que c'est une évidence : le Hamas est un mouvement terroriste qui commet des actes terroristes. Qui peut en douter ?

Madame la députée Panot, vos diatribes et vos excès vous desservent. Surtout, on aimerait vous entendre prononcer les mots qu'il faut. Il est troublant que vous ne parveniez pas à prononcer un mot. Ce mot, c'est celui de "terroriste". Pourquoi n'y arrivez-vous pas quand vous parlez du Hamas ou du Jihad islamique ? Ne voyez-vous pas leurs crimes ou le terme de "terroriste" vous serait-il inconnu ? C'est honteux.

L'ampleur des massacres et des atrocités commises ne laisse que peu de doutes sur le fait que l'attaque du 7 octobre a été préparée, orchestrée et planifiée de longue date.

La France, elle aussi, a été touchée. Elle aussi est victime de ce terrorisme. La Première ministre l'a rappelé : à ce jour, trente de nos compatriotes y ont perdu la vie et sept autres sont portés disparus ou retenus en otage. Nous demandons leur libération immédiate, sans conditions, sans délai, et nous faisons tout notre possible pour y parvenir.

Rien ne peut justifier le terrorisme - jamais. Face à lui, Israël a le droit de se défendre pour que de tels événements ne se reproduisent jamais. Personne ne peut lui dénier ce droit - c'est le droit de tout Etat.

Pour être forte, sa réponse doit être juste. Pour être juste, elle doit être conforme au droit international car ce droit s'applique à tous et - en particulier le droit international humanitaire - en toutes circonstances. Les principes politiques, moraux et éthiques qui nous animent doivent être respectés. C'est un impératif qui s'impose à tous et nous le rappelons aux Israéliens - nous le faisons à tous les niveaux.

Les populations civiles n'ont pas à payer le prix des crimes commis par des groupes terroristes. Dans sa réponse légitime à l'attaque terroriste dont elle a été victime, Israël doit donc protéger ces populations civiles, en application du droit humanitaire. La position de la France est claire : le droit international doit être respecté, toujours, partout. Pour que les accès humanitaires soient garantis, pour que l'eau, les médicaments, la nourriture arrivent, des trêves humanitaires sont nécessaires. Ces trêves doivent ensuite pouvoir mener à un cessez-le-feu. C'est ce que prévoyait le projet brésilien de résolution, que nous avons voté la semaine dernière.

Il faut également être clair sur un autre point : les terroristes du Hamas ne représentent en aucun cas le peuple palestinien, ni la cause palestinienne. En réalité, le rejet le plus ferme des actions du Hamas est le moyen le plus sûr de faire entendre la voix des Palestiniens.

Face à cette crise humanitaire qu'endure une population civile qui souffre à Gaza, la France a annoncé 20 millions d'euros supplémentaires, qui passeront par les agences des Nations unies - UNRWA et Programme alimentaire mondial (PAM) -, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et les ONG. Nous sommes prêts à accroître cet effort si nécessaire.

Certaines voix s'élèvent pour couper l'aide aux populations ; elles se trompent. Comme l'indiquait la Première ministre, cette aide est concentrée sur les populations civiles palestiniennes dans les domaines de l'eau, de la santé, de l'éducation et de l'agriculture. Elle bénéficie directement à la population et obéit à des procédures rigoureuses afin d'éviter tout détournement. Enfin, elle est contrôlée par l'administration israélienne.

L'aide apportée permettra de fournir des biens de première nécessité - eau, nourriture, médicaments - aux populations civiles. Elles en ont besoin à Gaza ; la situation humanitaire y est terrible.

Les premiers convois sont passés ; il doit y en avoir d'autres car il faut pouvoir répondre de manière durable aux besoins. La France y travaille, en liaison avec ses partenaires. La distribution de l'aide suppose une trêve humanitaire, je le répéterai demain aux Nations unies.

Enfin, les personnes qui souhaitent quitter Gaza doivent pouvoir le faire, et cela sans en être empêchées. Je vais le demander, en particulier pour nos agents, nos compatriotes et leurs familles, que j'ai eus à deux reprises au téléphone ces derniers jours afin de leur témoigner notre soutien. Nous y travaillons, croyez-le.

Au-delà de l'urgence humanitaire, vous avez été nombreux à le souligner, il faut s'atteler à mieux répondre aux aspirations légitimes des Palestiniens. C'est une évidence, qui tient en un mot : Etat. Les Palestiniens doivent avoir un Etat pour vivre libres et en sécurité, comme Israël doit pouvoir vivre libre et en sécurité.

Les Palestiniens veulent vivre dans la dignité, loin des atrocités des terroristes du Hamas. Ils veulent pouvoir vivre en paix avec les Israéliens, côte à côte et non face à face. N'en déplaise à certains - ou à certaines -, la position de la France est constante et nous la réaffirmons avec force : il faut de la sécurité pour Israël et un Etat pour les Palestiniens. Les deux forment un tout indissociable, la Première ministre l'a rappelé et je l'ai aussi répété samedi dernier lors du Sommet pour la paix au Caire. Je le rappellerai demain au Conseil de sécurité des Nations unies.

La position de la France est donc claire : la seule solution viable est une solution à deux Etats, vivant en paix et en sécurité, côte à côte.

Pour pouvoir envisager ainsi l'avenir, et une solution politique, il y a une autre urgence, qui est diplomatique et que nous traitons de front, en même temps que l'urgence humanitaire. Je l'affirme avec gravité : il s'agit d'éviter un embrasement de la région. Il est possible : le risque existe au Sud Liban, en Irak, au Yémen, et partout où certaines puissances soufflent sur les braises. Nous passons tous les messages utiles, à tous les acteurs concernés, car aucun groupe ne doit estimer qu'il pourrait tirer parti de la situation actuelle.

Voici en quelques mots la position de la France, et un résumé de son action depuis le 7 octobre : condamnation sans équivoque des attaques terroristes du Hamas ; réponse à l'urgence humanitaire pour venir en aide aux populations civiles, de manière durable ; action diplomatique pour éviter un embrasement de la région ; enfin, restauration de perspectives de paix autour de la solution à deux Etats.

J'y insiste : la seule solution viable est la solution à deux Etats, la situation nous l'a cruellement rappelé. Collectivement - Etats de la région et Etats européens, réunis -, nous devons avoir le courage de retrouver le chemin de la paix.

Je remercie notamment les députés Vallaud, Marcangeli et tant d'autres après le président Bourlanges, d'avoir rappelé que la paix est un devoir.

Le moment exige de la dignité, de la maîtrise, de la responsabilité. Puissions-nous nous unir autour de ce devoir de paix.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 octobre 2023