Texte intégral
Merci Monsieur le Ministre, merci cher Eli d'être venu m'accueillir à mon arrivée à Tel-Aviv. Tel-Aviv, où je m'étais rendue déjà le 15 octobre, une semaine après cette tragédie qu'a vécue Israël et le peuple israélien. Je l'avais fait pour marquer la solidarité de la France avec le peuple israélien et je reviens aujourd'hui pour la réitérer et rappeler le droit d'Israël à se défendre dans le cadre du droit international humanitaire, dont nous demandons le plein respect. Le terrorisme est une menace bien au-delà d'Israël : nous concerne tous et nous devons collectivement rechercher les moyens de lutter efficacement contre lui. Nous avons réuni récemment une première conférence à Paris au niveau des experts, pour regarder comment être plus efficace dans la lutte contre son financement, contre un certain nombre de trafics et aussi contre la désinformation et la propagande qui souvent l'accompagne.
Mon pays n'oublie pas les 1 200 personnes assassinées le 7 octobre, assassinées avec une cruauté absolue, dont je le redis, 41 compatriotes. La France, après Israël, est le pays je crois qui a le plus souffert des attaques du Hamas le 7 octobre. Comme tous, nous avons accueilli et salué avec une immense joie, un immense soulagement, la libération des premiers groupes d'otages lors de la trêve, dont quatre Français. Nous avons appris hélas avec la plus grande tristesse, le 15 décembre, le décès tragique d'un de nos compatriotes, Elia Toledano, otage depuis le 7 octobre et dont la dépouille a été retrouvée à Gaza. Au moment où je vous parle, 3 Français sont retenus, disparus ou otages dans la bande de Gaza. Je veux dire à nos compatriotes, mais Israël aussi, que la France ne ménagera aucun effort pour que nous retrouvions les nôtres, pour que ceux qui sont disparus, reviennent dans leur famille et d'une façon générale, pour que tous les otages soient libérés le plus rapidement possible et sans condition. Bien sûr Eli, permets-moi d'avoir une pensée pour les trois otages israéliens qui ont été malheureusement, tragiquement tués avant-hier.
Dans un instant, je rencontrerai à nouveau nos compatriotes qui ont perdu des proches : qu'ils aient été tués ou qu'ils aient disparu. Comme je l'avais fait le 15 octobre, je leur redirai que la France est à leur côté, qu'elle ne les oublie pas et qu'elle fera tout pour leur rendre les leurs.
Je suis également venue témoigner la solidarité de la France avec le peuple israélien. Parmi le flot de récits épouvantables de ces exactions barbares commises le 7 octobre, les récits des violences sexuelles et sexistes infligées par les terroristes sont glaçants. Ils le sont par leur caractère systématique et peut-être même systémique. Par leur volonté d'atteindre la dignité des victimes et cela a touché principalement des femmes, nous le savons. Mais ce qui est frappant aussi et également glaçant c'est l'énergie que mettent certains à nier ces faits, à nier cette réalité. Comme souvent, nous le savons, dans les conflits, les femmes sont les premières cibles de ces crimes. Je me rendrai tout à l'heure à Shura pour entendre les associations témoigner mais aussi pour dire ce que nous pensons de tels crimes. Inutile de préciser que la France croit la parole de ces victimes, croit celles et ceux qui ont eu à constater ces viols, ces mutilations ces profanations. Bien sûr, la parole des femmes israéliennes ne vaut pas moins que celle de toutes autres victimes.
Au cours de la journée, je m'entretiendrai, outre l'entretien que nous avons eu avec Eli Cohen, avec d'autres membres du cabinet de guerre israélien. Je le dis ici comme je l'ai dit tout à l'heure au ministre : ce qui se passe à Gaza préoccupe au plus haut point la France. Trop de civils sont tués. Nous le voyons, nous le savons, nous le disons depuis plusieurs semaines. Je rappelle que la première trêve qui a eu lieu a permis de libérer des otages, d'acheminer davantage d'aide humanitaire, de la faire distribuer, d'évacuer aussi des blessés. On sait que ce n'est pas suffisant. Je suis venue également ici rappeler l'importance d'une nouvelle trêve humanitaire. Il faut revenir à une trêve durable et une trêve qui doit nous permettre d'oeuvrer dès maintenant à un cessez-le-feu, d'aller vers un cessez-le-feu humanitaire. C'est le message de la France, tu le sais Eli, depuis quelques temps, c'est évidemment aussi un message que je porterai aux autorités palestiniennes lorsque je verrai les responsables palestiniens cet après-midi.
À nouveau merci de ton accueil, merci du travail que nous faisons ensemble dans des circonstances si difficiles pour Israël, pour les Palestiniens aussi, dans la région et pour la communauté internationale. Nous devons progresser vers une solution, la France est à vos côtés pour cela, aux côtés de tous ceux qui souffrent. Nous le disons souvent mais je veux le redire ici. Il est possible d'être tout à la fois solidaire du peuple israélien, solidaire du peuple palestinien et de chercher les voies et moyens de répondre à leurs aspirations légitimes. Un état pour les Palestiniens et la sécurité pour Israël. Nous continuerons à travailler en ce sens. Merci beaucoup.
Q - Vous n'avez pas beaucoup évoqué la partie sur le Liban, la frontière nord. Comment la France envisage de participer à aider, à faire en sorte qu'il n'y ait pas d'escalade à la frontière au nord d'Israël ?
R - Je me rendrai demain à Beyrouth, sans doute le savez-vous. La France, comme ses partenaires, appellent les responsables politiques libanais à tout faire pour éviter un engrenage dont le Liban serait la première victime. J'étais déjà allée à Beyrouth porter ce message. Nos partenaires je crois très clairement portent le même. J'ajoute que les messages les plus clairs sont également passés au Hezbollah pour que la sécurité d'Israël et celle du Liban dois-je ajouter, ne soit pas menacée davantage.
Q - Vous avez appelé à une trêve le plus vite possible. Demandez-vous à Israël de stopper ses opérations dans la bande de Gaza ? En particulier après ce qu'il s'est produit ce week-end, à savoir la mort de trois otages israéliens, tués par l'armée israélienne.
R - Ce que nous pensons et ce que nous disons c'est qu'une trêve immédiate est nécessaire, permettant d'avancer vers un cessez-le-feu, pour obtenir la libération des otages, pour permettre l'accès et la livraison de davantage d'aide humanitaire aux populations civiles de Gaza qui souffrent et pour progresser vers un cessez-le-feu humanitaire et le début d'une solution politique. Il faut dès maintenant penser à ce qui suivra, aux jours d'après et au retour d'un horizon politique pour traiter ce conflit.
(...)
Q - Que demandez-vous à Israël après la mort de ce Gazaoui qui travaillait pour la France ?
R - Nous avons appris avec beaucoup de tristesse, le décès d'un agent palestinien de l'Institut français de Gaza, qui avait été blessé suite à un bombardement israélien. Nous avons demandé à Israël de faire toute la lumière sur les circonstances de ce bombardement, les raisons pour lesquelles la maison où il demeurait avait été ciblée. J'ai demandé à Eli Cohen, le ministre des Affaires étrangères, de me répondre rapidement sur ce point. Il en a pris note. Donc nous attendons qu'il y ait des éclaircissements.
Q - Est-ce qu'il y a une info précise, spécifique que vous souhaitez avoir ?
R - Les circonstances de ce bombardement, la raison pour lesquelles il a pu avoir lieu. C'est la première fois qu'un agent français est tué donc c'est une circonstance particulièrement grave pour nous. J'ai exprimé bien sûr mes condoléances au Consulat général de France à Jérusalem dont il dépendait et à toute notre famille diplomatique qui est en deuil.
Q - Juste une précision : un agent palestinien ? Vous avez dit français.
R - Un agent palestinien pardon, un agent de la France.
Q - La CMA-CGM a décidé de prendre des mesures de sécurité pour ses navires en mer Rouge. Je crois que vous avez vu ça d'assez près depuis le détroit de Bab el-Mandeb, quelle est votre analyse de la situation et au-delà des pressions diplomatiques, quelles solutions peuvent être apportées pour éviter cet embrasement dans cette région-là ?
R - Depuis quelques temps, les Houthis du Yémen procèdent à des attaques contre des navires, entravent la liberté de circulation, lancent des missiles ou des drones. Donc nous avons condamné de telles attaques mais j'ajoute que la multiplication de ces entraves à la liberté de circulation et de ces attaques, ne peut rester sans réponse. Donc nous étudions plusieurs options.
Q - Y compris militaires ?
R - Nous étudions plusieurs options avec nos partenaires.
Q - Peut-être une force multinationale en mer Rouge ?
R - Je n'irais pas jusque-là mais je crois que vous vous souvenez qu'il est arrivé précédemment que nous contrions certaines de ces attaques, certaines de ces tentatives. Donc il faut aussi être prêts à agir de cette façon.
Q - Un rôle purement défensif ou proactif ?
R - Défensif, de façon à éviter que cela recommence.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 décembre 2023