Interview de Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques, à France 2 le 3 janvier 2024, sur l'organisation des Jeux Olympiques 2024 et l'accueil des athlètes russes à ces futurs JO.

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Média : France 2

Texte intégral

GUILLAUME DARET
Bienvenue dans les « 4V » Amélie OUDEA-CASTERA. Alors, on l'a vu ces dernières heures, l'Ukraine a été à nouveau touchée par des tirs de missiles, Vladimir POUTINE promet d'intensifier les frappes sur l'Ukraine, est-ce que dans ces conditions il est encore tenable d'accueillir des athlètes Russes et Biélorusses, quand même bien ce sera sous bannière neutre a décidé le CIO, est-ce que c'est encore tenable de les accueillir lors des J.O de Paris dans quelques mois ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Vous savez, le Rapporteur spécial de la commission des droits de l'homme des Nations Unies disait que plus le contexte international se tend, plus il est important au contraire de protéger nos valeurs, et quand on dit qu'il y a, dans le droit international, un principe de non-discrimination qui doit permettre d'accueillir des athlètes, Russes ou Biélorusses, qui n'ont rien fait, dès lors qu'ils n'ont pas soutenu la guerre, qu'ils n'ont pas de liens avec les agences gouvernementales…

GUILLAUME DARET
Ça, ça sera regardé de très près ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Ça fait partie des critères posés par le CIO, on sera très vigilant quant à leur respect.

GUILLAUME DARET
Ce qu'on voit aussi c'est que Vladimir POUTINE considère que même les faire venir sous bannière neutre, « ce serait enterrer », dit-il, « l'esprit de l'olympisme », qu'est-ce que vous lui répondez ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
On se moque de ce qu'il pense, il y a des règles qui sont posées par le CIO, c'est le CIO qui a l'autorité pour décider qui participe ou qui ne participe pas, le CIO, ainsi que l'IPC, côté paralympiques, ont posé des critères qui sont objectifs, qui permettent d'intégrer, son drapeau sans les couleurs du pays, sans hymne des ressortissants Russes et Biélorusses, dès lors qu'ils respectent la charte olympique, à partir de là il faut poser ce cadre, faire en sorte qu'il soit respecté jusqu'au bout et tout faire pour que précisément le pouvoir russe n'instrumentalise pas le sport pour sa propre gloire. On voit bien qu'aujourd'hui, avec des initiatives comme les Jeux du futur, avec les Jeux des BRICS, ce qu'essaye de faire Vladimir POUTINE c'est d'utiliser le sport pour la gloire russe, la gloire de son pays, donc il faut absolument se tenir à distance de ce type de mécaniques, c'est des messages provocateurs, on l'a aussi entendu parler de discrimination ethnique, tout ça est du grand n'importe quoi…

GUILLAUME DARET
Mais qu'est-ce qui se passe si à l'issue d'une compétition…

AMELIE OUDEA-CASTERA
Ce qui est important c'est de poser nos règles et de nous y tenir.

GUILLAUME DARET
Un athlète russe qui a obtenu une médaille brandit un drapeau de son pays, il se passe quoi dans ce cas ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Il ne le fera pas, il ne le fera pas, ça ne sera pas possible qu'il arrive sur ce qu'on appelle « le field of play », le terrain de jeu, avec un drapeau, non. Il n'y aura ni hymne, ni drapeau, ni couleurs de ces pays dans les tribunes.

GUILLAUME DARET
Alors, j'ai regardé ce matin en arrivant à France Télévisions, comme on est diffuseur officiel, le compteur officiel, on est à -205 jours de l'ouverture des Jeux olympiques, on a beaucoup parlé des transports, désormais ce sont les policiers qui s'inquiètent de leurs conditions de travail. Nos confrères du « Figaro » racontent ce matin que cette mobilisation à 100 %, évidemment, qu'on leur demande pendant cette période, pas de congés pendant la période des JO, ça les inquiète, ils estiment que les primes ne sont pas à la hauteur, il y a un bloc de 14 syndicats qui appellent à une journée noire de mobilisation mi-janvier, vous leur répondez quoi ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Le ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, a engagé le dialogue social, il a posé un certain nombre de premiers éléments de discussion, et notamment en faisant valeur qu'au contraire, dans la période du 15 juin au 15 septembre les forces de sécurité intérieure auraient la capacité à avoir deux semaines de congés, il y a juste une période entre le 24 juillet et la mi-août, au plein coeur des compétitions, où là il ne sera pas possible de prendre de congés. Il a évoqué également la rémunération des heures supplémentaires, bien entendu, des dispositifs, aussi, qui permettront d'organiser le report de congés, et des éléments aussi, sociaux, pour l'accompagnement, l'accueil de la petite enfance, et aussi faire en sorte qu'il y ait des séjours proposés aux enfants, des policiers, des gendarmes, de toutes les familles qui vont être mobilisées ou impactées à l'occasion de ces Jeux olympiques et paralympiques. Egalement des primes, importantes, trois niveau de primes qui pourront aller jusqu'à 1500 euros en fonction des suggestions effectives auxquelles seront soumis les différentes équipes, ce dialogue va se poursuivre. Moi je voudrais évidemment saluer l'action des forces de l'ordre, qui nous ont encore protégés, là, pendant les fêtes, qui vont être en effet mises à rude épreuves pendant…

GUILLAUME DARET
Forte contribution.

AMELIE OUDEA-CASTERA
Bien sûr ; et qui ont déjà aussi travaillé beaucoup pour accompagner la Coupe du monde de rugby, l'accueil du roi Charles, faire en sorte qu'on ait, avec la messe papale, un succès là aussi dans l'accueil de tous ces évènements. Cette dimension de sécurité, elle est absolument essentielle pour les Français.

GUILLAUME DARET
Est-ce que vous êtes certaine, ce matin, est-ce que vous pouvez nous dire que la cérémonie d'ouverture aura bien lieu sur la Seine, ou est-ce qu'il y a un plan B ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
C'est le projet, cette cérémonie sur la Seine, c'est le coeur de notre ambition de jeux iconiques, donc c'est là-dessus que nous travaillons. Il y a un certain nombre de variables d'ajustement autour de ce concept-là. Après, bien sûr…

GUILLAUME DARET
C'est une folie sur le plan sécuritaire, disent certains.

AMELIE OUDEA-CASTERA
Non, ce n'est absolument pas une folie, quand on voit la manière dont c'est préparé, par les équipes, sous la houlette du ministre de l'Intérieur, avec le préfet de police, qui est à la manoeuvre sur la préparation de tout ça, ainsi qu'avec le préfet de la région Ile-de-France. Mais ce qui est évident, c'est que s'il devait y avoir un durcissement du contexte sécuritaire, avec une multiplication des attaques sur notre sol, etc., évidemment que le président de la République, et d'ailleurs les Français attendent de nous qu'on ait une capacité d'alternative.

GUILLAUME DARET
Sur le plan sportif, des jeux réussis pour la France, ce serait quoi ? Tokyo 2021, 33 médailles, 10 d'or, 12 d'argent, 11 de bronze.

AMELIE OUDEA-CASTERA
Top 5 des Nations les plus médaillées côté olympique, ça veut dire passer d'à peu près 10 médailles d'or à 16, 17. On sait qu'on peut le faire. Il y a en plus, cette capacité qu'on a à être poussé quand on est un athlète tricolore par le contexte du pays hôte. Et puis je pense que côté paralympique, l'objectif c'est de doubler le nombre de titres. On en avait eu 11 la dernière fois à Tokyo, d'arriver à en avoir 22, 23, 24, rentrer dans le top 8, pour ensuite rentrer là aussi durablement dans le top 5. C'est ça notre mission.

GUILLAUME DARET
Alors, cette année, l'activité physique est grande cause nationale en 2024.

AMELIE OUDEA-CASTERA
Absolument.

GUILLAUME DARET
A la rentrée 2022, le président de la République avait promis 30 minutes d'activité physique quotidienne dans les écoles. Concrètement, aujourd'hui, combien d'écoles appliquent cette préconisation et cette mesure du chef de l'Etat ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Entre 75 et 80 %. Et avec Gabriel ATTAL, on veut évidemment avoir une généralisation effective à 100 %. C'est l'un des messages que nous passerons la semaine prochaine aux recteurs, continuer à accélérer dans cette généralisation, en lien avec les professeurs des écoles. Mais le président de la République, il avait aussi dit en 2017, qu'il voulait 3 millions de pratiquants supplémentaires réguliers. On les a. Aujourd'hui, on est au rendez-vous. Et ce qu'on voudrait maintenant, après avoir mis 6 ans à gagner ces 3 millions de pratiquants supplémentaires, c'est dans les 4 années, là, aller en chercher à nouveau 3 millions. Et c'est l'une des, l'un des objectifs que nous poursuivons à travers la grande cause, qui va aussi nous permettre de mettre ces 30 minutes d'activité physique quotidienne au coeur du quotidien des Français. Ça fait un bien fou. Chacun à son rythme, selon ses possibilités, son contexte, marche, footing, vélo, s'inscrire dans un club, dans une salle de gym. Voilà, c'est tout ça pour lutter mieux contre la sédentarité, qui est un vrai fléau sanitaire.

GUILLAUME DARET
Amélie OUDEA-CASTERA, est-ce que vous êtes certaine que vous serez encore ministre lors des Jeux olympiques ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Non, personne n'est sûr de rien. Mais en tout cas, je suis rivée sur ma tâche, vraiment à 100 %. Journée, week-end…

GUILLAUME DARET
Je vous dis ça, parce qu'évidemment, il y a cette idée de remaniement qui plane en cette rentrée 2024. Vous souhaitez qu'Elisabeth BORNE reste à Matignon ? C'est une bonne Première ministre ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Ecoutez, moi, j'ai de très bonnes relations avec Elisabeth BORNE, elle est un grand soutien des politiques sportives, et voilà, je suis dans une logique aujourd'hui à être concentrée sur la mission qui m'est confiée. Il y a beaucoup, beaucoup de travail. On a, vous l'avez dit, encore 205 jours pour être impeccablement prêts et essayer de faire de cet événement quelque chose dont les Français se souviendront longtemps. Ces jeux, c'est leurs jeux, moi je voudrais qu'on se dise que, voilà, ça aura été grand, qu'on l'a fait, qu'on a réussi tous ensemble, pour faire rayonner notre pays, pour accélérer un certain nombre de nos transformations, et parce que c'est un privilège exceptionnel d'accueillir le premier événement sportif planétaire.

GUILLAUME DARET
Dans les dossiers importants, vous allez encore gérer dans les semaines et dans les mois à venir, si vous êtes toujours ministre des Sports, il y a cette question du Stade de France. C'est aujourd'hui que les candidats, soit à la poursuite d'un consortium, soit à l'achat de ce stade, s'il est vendu, vont déposer leur dossier. Est-ce que vous avez une préférence ? Est-ce qu'il faut vendre le Stade de France ou est-ce qu'il faut continuer sur une logique de consortium ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Alors, les offres vont être déposées jusqu'à midi. Secret des affaires, je n'en dis pas plus là-dessus. On va continuer de regarder concessions et cessions. Regardez les mérites des différents dossiers qui ont été déposés, mérites économiques, mérites techniques, l'insertion aussi dans le territoire, la qualité du projet pour la Seine-Saint-Denis, pour la ville de Saint-Denis. Et à la lumière de tout ça, on va se donner l'année 2024 pour affiner les choix, le modèle et prendre jusqu'au bout les bonnes décisions entre concession et cession. Le but, c'est d'avoir le meilleur projet pour le Stade de France.

GUILLAUME DARET
Ça ne serait pas vendre une part du patrimoine français ? Pour beaucoup de Français, le Stade de France, c'est la victoire des Bleus en 98. Ça fait partie du patrimoine français.

AMELIE OUDEA-CASTERA
Oui, mais ça, personne ne nous l'enlèvera. Ça, personne ne nous l'enlèvera.

GUILLAUME DARET
On disait il y a quelques instants que les ministres ne savent pas s'ils vont rester en place. Il y en a un autre dont on ne sait pas s'il va rester en France, c'est Kylian MBAPPE. Il est libre à partir du 1er janvier de contacter d'autres clubs pour sa signature l'an prochain. S'il devait quitter le PSG, ce serait un problème, ce serait embêtant pour la France ? Comment vous voyez ça, vous ?

AMELIE OUDEA-CASTERA
Ecoutez, en tout cas, moi, je me réjouis de le voir sur le terrain ce soir. Je serai au Trophée des Champions. Ce sera une très belle soirée de foot pour ce début d'année 2024, où le sport va être mis à l'honneur. On a de très belles échéances. Il y a l'équipe de foot aux J.O qui va se dessiner sous la houlette de Thierry HENRY. On aura cet Euro en juillet aussi en Allemagne qui va être un moment formidable. Donc Kylian fera partie de ces grands rendez-vous. Pour le reste, voilà, ce sont des décisions qui appartiennent à d'autres.

GUILLAUME DARET
Merci beaucoup Amélie OUDEA-CASTERA. C'est à vous Samuel. Donc on verra dans quelques semaines si les ministres sont toujours en place et si Kylian MBAPPE est toujours au PSG.

SAMUEL OLLIVIER
On suivra cela avec attention en effet. Merci Guillaume, merci à Sophie BERGER pour la langue des signes. Amélie OUDEA-CASTERA, invitée des « 4V », ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques, qui est revenue notamment sur le sujet brûlant de la participation des athlètes russes et biélorusses sous bannière neutre. Le coeur de notre ambition, c'est évidemment la cérémonie d'ouverture, mais c'est aussi que le gouvernement russe n'instrumentalise pas le sport pour sa propre gloire. Un athlète russe ne brandira pas un drapeau russe en cas de victoire, il n'y aura ni hymne ni drapeau. Voilà ce qu'il fallait retenir.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 3 janvier 2024