Déclaration de M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué, chargé de l'Europe, en réponse à deux questions sur le conflit en Ukraine, au Sénat le 28 février 2024.

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Circonstance : Questions d'actualité au Gouvernement, en séance publique, au Sénat

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Madame la sénatrice Vanina Paoli-Gagin,


Depuis deux ans, le régime de Vladimir Poutine fait pleuvoir le fer et le feu sur le peuple ukrainien qui résiste avec une bravoure qui fait l'admiration du monde entier.

Depuis quelques mois, la posture de ce régime s'est durcie ; durcie sur la ligne de front ainsi que sur le territoire ukrainien, durcie en Russie, avec l'assassinat politique d'Alexeï Navalny qui aura donné sa vie pour la liberté et dont nous saluons la mémoire, durcie également en Europe et en France qui sont désormais la cible de vastes campagnes de manipulation et de désinformation, orchestrées par des intérêts ou des courroies de transmission russes qui veulent porter atteinte à notre débat public.

L'intention qui est celle de Vladimir Poutine, elle est double : d'abord affaiblir le soutien dans l'opinion publique, à l'Ukraine, et puis, d'autre part, porter atteinte à la clé de voûte de nos démocraties libérales, le débat public et les campagnes électorales. On l'a vu récemment, lorsque l'élection nationale en Slovaquie a été perturbée par la diffusion d'un hypertrucage, d'une deepfake, impliquant l'un des candidats, et avec donc un trouble sur le résultat du scrutin.

Le 12 février dernier, Stéphane Séjourné, avec ses homologues allemand et polonais, ont révélé l'existence de 193 sites dormants destinés à perturber le débat public et les futures élections, grâce au travail remarquable du service VIGINUM, créé en 2021 par la volonté du Président de la République et placé sous l'autorité du Premier ministre.

Ce lundi 26 février, le Président de la République a convoqué un sommet international à Paris qui a rassemblé 27 chefs d'Etat et de gouvernement ou leurs représentants directs, - les manoeuvres informationnelles étaient à l'agenda de cette réunion -, et fera l'objet d'une réunion de suivi par le ministre des Armées et le ministre des Affaires étrangères.

J'ai pour ma part, appelé la Commission européenne à se saisir des pouvoirs qui sont les siens aux termes du règlement sur les services numériques pour obtenir de la part des grandes plateformes un engagement ferme, celui de faire respecter le silence électoral autour des élections européennes du 6 au 9 juin prochain.


Monsieur le président Loïc Hervé,

Le combat des Ukrainiens, c'est aussi le nôtre, parce qu'en se battant depuis deux ans pour l'intégrité de leur territoire, ils se battent aussi pour la sécurité de l'Union européenne et de la France. Pourquoi ? Parce que chacun sait que les dictateurs ne prennent pas de vacances, et que si l'Ukraine devait tomber, ce que nous ferons tout pour éviter, la ligne de front se déplacerait inévitablement vers l'ouest.

Quand la maison du voisin brûle et que l'incendie menace de se propager, on ne reste pas les bras ballants, on se lève et on agit. Je rappelle les mots de Raymond Aron en 1939 : nous croyons dans " la victoire finale des démocraties, mais à une condition, c'est qu'elles le veuillent". Et c'est la raison pour laquelle le Président de la République a convoqué, lundi 26 février, un sommet international auquel vingt-sept chefs d'Etat et de gouvernement ou leurs représentants directs se sont rendus, où ils se sont entendus pour poursuivre notre soutien à l'Ukraine, pour faire plus, pour faire mieux, et pour faire différemment. À cette occasion, le Président de la République a déclaré que nous ne pouvons rien exclure, que nous devons explorer tout le champ des possibles, sans rien exclure, tout en accroissant notre soutien à l'Ukraine. Ce serait une faute grave et une menace pour notre sécurité de refuser de débattre de toutes les options qui se présentent à nous, aujourd'hui et demain.

Alors, vous avez raison, Monsieur le président Loïc Hervé, il faut que les Français soient pleinement associés et éclairés dans ces décisions. C'est la raison pour laquelle le Président a également annoncé qu'un débat se tiendrait devant le Parlement, au titre de l'article 50-1 de notre Constitution. Ce sera l'occasion, pour le Parlement, de se saisir pleinement de ces sujets.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 4 mars 2024