Interview de M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, à France Info le 20 mars 2024, sur les exemptions de droits de douane pour les denrées alimentaires venant d'Ukraine, les importations de céréales russes, les mesures gouvernementales face à la crise agricole, les pesticides, la rémunération des agriculteurs et l'accord de libre-échange avec le Canada.

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Média : France Info

Texte intégral

SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Marc FESNEAU.

MARC FESNEAU
Bonjour.

JEROME CHAPUIS
Bonjour.

SALHIA BRAKHLIA
C'est l'information de la nuit, l'Union européenne est parvenue à un accord de principe de prolongation d'un an des exemptions de droits de douane pour les denrées alimentaires venant d'Ukraine, c'est une marque de solidarité pour un pays en guerre ?

MARC FESNEAU
Oui, alors on avait des mesures qui prennent leur terme au mois de juin, donc oui il y a une marque de solidarité, mais il y a une limite qu'il fallait fixer, et donc dans l'accord qui est parvenu hier soir, ou dans la nuit, dans le cadre du trilogue, comme on dit, entre la Commission, le Parlement et les gouvernements, et le Conseil, il y a un certain nombre de mesures et de dispositions qui sont faites pour mettre en place des freins sur un certain nombre d'importations qui sont trop nombreuses, je pense aux volailles, au lait, euh, volailles, au sucre…

SALHIA BRAKHLIA
Les oeufs, le sucre.

MARC FESNEAU
Et aux oeufs, y ont été intégrées un certain nombre de productions végétales, je pense à l'avoine et au maïs. Pour nous l'accord n'est pas encore comme celui que nous souhaitions, la France défend la position suivante, c'est, un, qu'on ait une période de référence pour fixer une limite aux importations, qui était 21-23 et pas seulement 22-23, vous voyez bien que sinon…

JEROME CHAPUIS
Vous parlez des années.

MARC FESNEAU
On parle des années de référence, et puis deuxième élément, on souhaite inclure plus de céréales, parce que si on inclut le maïs c'est sans doute qu'il y a un sujet sur les céréales, et il y a un sujet sur le blé en particulier. Donc le travail va se poursuivre, puisqu'il y a encore des votes dans les commissions et au Parlement…

SALHIA BRAKHLIA
Donc ce n'est pas l'accord final ?

MARC FESNEAU
Non, non, on n'est pas du tout au final, il y a un accord de trilogue, les accords de trilogue c'est le point d'équilibre qui a été trouvé, ce n'est pas la position que défendait la France. Alors, il y a un certain nombre d'avancées, mais elles ne sont pas suffisantes. Pourquoi ? parce qu'on a un marché des céréales qui est très désorganisé, ce n'est pas d'ailleurs la faite des Ukrainiens, c'est l'agression russe a désorganisé les marchés, les Russes sont allés sur des marchés sur lesquels étaient les Ukrainiens, de ce fait les Ukrainiens viennent sur le marché européen, et tout ça pèse sur les cours, globalement en Europe, beaucoup à la frontière, on sait très bien les manifestations, y compris d'agriculteurs, aujourd'hui en Pologne, et donc on doit donner un frein, c'est-à-dire la solidarité, pas au prix non plus d'une déstabilisation trop forte du marché, parce que ce serait contre…

SALHIA BRAKHLIA
Mais alors quels freins par exemple ? vous entendez ce qu'ont dit les agriculteurs qui sont en crise, qui sont en colère contre ces importations…

MARC FESNEAU
Eh bien à partir d'un certain seuil, sur un certain nombre de productions, 270 000 tonnes équivalent carcasses, pour rentrer dans le détail, sur la volaille par exemple, les droits de douane sont rétablis.

JEROME CHAPUIS
Ils sont clairs ces seuils, parce que ce matin, justement, le secrétaire général des Jeunes agriculteurs sur France Info nous disait " on attend encore d'avoir des précisions, vous les avez ces seuils ?

MARC FESNEAU
Non, c'est les seuils de démarrage, si on fait l'année de référence 22-23 sur la volaille, ça correspond à ça.

SALHIA BRAKHLIA
Oui, mais il y a des volumes déjà très élevés, c'est ce que disaient les agriculteurs.

MARC FESNEAU
Laissez-moi juste finir ma phrase sur le sujet ; c'est pour ça qu'on pense qu'il faut qu'on ait des années de référence qui soient d'une nature différente pour qu'on ait des seuils qui soient un peu plus abaissés, pour qu'on puisse faire en sorte que ne viennent pas, sur les marchés, perturber un certain nombre de denrées qui viennent perturber globalement les marchés, je pense au sucre, à la volaille, aux oeufs, et je répète, aux céréales, donc on a besoin de solidarité, mais pas au prix d'une déstabilisation parce que ça se retournerait contre les Ukrainiens, et c'est bien la position française, c'est la solidarité. Il faut trouver le bon équilibre entre la solidarité qui est nécessaire et en même temps la nécessité que les marchés soient stabilisés au niveau européen.

JEROME CHAPUIS
Vous avez un élément de calendrier ?

MARC FESNEAU
C'est des mesures qui doivent se mettre en place au mois de juin, au début du mois de juin, puisque la réglementation court jusqu'au mois de juin, et il faut qu'on puisse activer, alors c'est une des bonnes nouvelles de la nuit… alors, il faut regarder les accords de trilogue parce que tout ça est fait dans la nuit, ça a été fait à 3 ou 4h du matin, donc on a besoin d'expertiser, mais la bonne nouvelle c'est qu'on pourra activer, en particulier sur les céréales, un frein d'urgence, normalement c'est 20 ou 30 jours, et là on pourra l'activer au bout de 14 jours.

SALHIA BRAKHLIA
En parlant des céréales, donc il y a les denrées ukrainiennes, mais il y a aussi les importations de céréales en provenance de Russie et de Biélorussie, l'Union européenne se prépare à y imposer des droits de douane, déjà ça veut dire que malgré la guerre, on commerce avec la Russie ?

MARC FESNEAU
Mais pardon, il a été toujours mis sur la table que nous ne procédions pas à des mesures de rétorsion sur les denrées alimentaires, c'est de notoriété publique, pardon, ce n'est pas une découverte pour vous. Pardon, ça amène un deuxième…

SALHIA BRAKHLIA
Non mais, vous entendez quand même ceux qui nous écoutent et qui nous regardent, qui doivent se dire mais attendez, on a interdit le gaz, ça a provoqué une inflation dingue…

MARC FESNEAU
Je vous vous dire pourquoi madame, parce que… c'est donc une question de souveraineté européenne, et c'est pour ça qu'il y a besoin de renforcer la souveraineté européenne. Cette année, en 2023, pas cette année, mais en 2023, l'Europe aura eu besoin d'importer, pas la France, la France est exportatrice, mais l'Europe aura eu besoin d'importer 40 millions de tonnes de céréales, vous m'entendez bien, 40 millions de tonnes de céréales, et des pays qui sont capables de fournir, il n'y en a pas des dizaines ou des dizaines de milliers, il y a la Russie, la Biélorussie, l'Ukraine et l'espace…

SALHIA BRAKHLIA
Donc on commerce encore avec la Russie.

MARC FESNEAU
Mais pourquoi ? parce que si nous n'avions pas fait ça nous aurions déstabilisé nous aussi les marchés, et qu'il y a un certain nombre de pays, pas la France je le répète, qui ont besoin de céréales, et c'est pour ça qu'on a besoin de renforcer la souveraineté européenne, parce que si jamais on n'augmente pas notre souveraineté, on est dans la main de Monsieur POUTINE.

SALHIA BRAKHLIA
Mais il y a le Polonais Donald TUSK qui dit lui, il faut carrément interdire les importations de céréales russes. Vous dites quoi, vous Français ?

MARC FESNEAU
Mais je pense aussi aux Espagnols et aux Italiens qui ont besoin de céréales, donc j'essaye de trouver un point d'équilibre, alors Donald TUSK a raison parce qu'on a un sujet de distorsion avec les Russes, mais il faut être dans la réalité des choses. Cette année, en 2023, l'année qui vient de se passer, compte tenu de la sécheresse et d'un certain nombre d'inondations, et/ou de sécheresse en Italie, ces pays n'ont pas pu fournir, alors ils sont structurellement plutôt déficitaires, et donc il y a besoin de céréales, mais c'est pour ça qu'il faut interroger l'Europe sur la capacité qu'elle a à se nourrir elle-même.

SALHIA BRAKHLIA
Non, mais il y a les droits de douane, Marc FESNEAU, pardon, mais on commerce avec la Russie, vous avez expliqué là pourquoi, mais il n'y avait pas de droits de douane depuis deux ans de guerre avec la Russie.

MARC FESNEAU
Il n'y a pas de droits de douane sur les céréales depuis 2019, c'est un vieil accord, avant l'invasion en Ukraine.

JEROME CHAPUIS
Ces accords avaient été…

MARC FESNEAU
Mais vous voyez bien que c'est pour ça qu'on a besoin de trouver un point d'équilibre, je le répète, mais on a surtout besoin, dans le moyen terme, de faire en sorte que nous ne soyons pas dépendants, nous étions dans la même dépendance sur le gaz, sur l'énergie, et c'est ça dont il faut sortir au niveau européen.

JEROME CHAPUIS
Marc FESNEAU, on pensait naïvement que la crise agricole était terminée, on en est loin, loin, d'en avoir fini, les syndicats, une nouvelle fois, ont été reçus à Matignon hier, ils font part de leur agacement, est-ce qu'ils vous mettent juste un coup de pression, parce qu'après les annonces ça ne va pas assez vite sur le terrain ?

MARC FESNEAU
Il y a un certain nombre de choses qui sont sur le terrain et déjà déployées, je pense à tous les fonds d'urgence sur la maladie hémorragique épisodique, sur la crise viticole, sur les tempêtes…

JEROME CHAPUIS
Mais il est dû à quoi ce coup de pression ?

MARC FESNEAU
Alors attendez, j'essaie de répondre ; donc, il y a un certain nombre de choses concrètes qui ont pu se déployer, notamment des moyens d'urgence. Deuxième élément, il y a un certain nombre de choses concrètes qui ont été obtenues au niveau européen, qui étaient portées par la voix de la France, un certain nombre de modifications de la PAC dans un registre qui était plutôt ubuesque, je pense à la question des jachères, je pense à la question des prairies permanentes., on y reviendra peut être, et ça c'est dès la campagne 2024, les agriculteurs vont voir des changements concrets, puisque des obligations qui leurs étaient faites sur les campagnes précédentes n'existeront plus, pour certaines elles dataient d'ailleurs de très lointaines campagnes de la politique agricole commune, donc ça ils vont le voir concrètement. Troisième élément, c'est sur les questions de simplification, faire de la simplification, quand c'est en plus la sédimentation de 25 ans de simplification, ça prend du temps. Pourquoi ? Parce qu'il faut faire des décrets. Un décret, il faut le préparer, il faut le publier, le mettre en consultation, il faut l'envoyer au Conseil d'Etat, lequel Conseil d'Etat donne son avis, ça prend quelques semaines. Deuxième élément, il y a des objets de simplification qui nécessitent… pour simplifier on a besoin de modifier la loi, je pense aux délais de recours sur un certain nombre de bâtiments d'élevage ou sur un certain nombre d'ouvrages sur l'eau, je pense au quantum des peines pour faire en sorte qu'on ne soit pas menacé de prison pour quelque chose qui ne relève pas manifestement de ce registre-là, ça, ça sera dans la loi d'orientation agricole que nous allons présenter le 29 mars prochain, eh bien il faut que la loi elle puisse être délibérée par…

JEROME CHAPUIS
L'idée c'est d'être ajusté au congrès de la FNSEA ?

MARC FESNEAU
Non, ce n'est pas d'être ajusté puisque c'est après le congrès de toute façon…

JEROME CHAPUIS
Pendant.

MARC FESNEAU
Oui, c'est après le congrès, puisque c'est le vendredi et le congrès se termine le jeudi.

JEROME CHAPUIS
On se dit qu'il y a toujours un coup de fièvre au moment du Salon de l'agriculture, au moment du congrès de la FNSEA…

MARC FESNEAU
Pardon, non, le congrès de la FNSEA est tout à fait identifié, mais le texte de loi il a été prévu pour faire en sorte qu'on puisse, dans les délais, rajouter ce qu'on avait à rajouter sur les objectifs de simplification, et par ailleurs qu'on puisse avoir des délibérations à l'Assemblée, au Sénat, avant l'été, pour qu'on puisse avoir un texte conclusif, si possible, avant l'été, pour qu'on puisse accélérer, donc je comprends parfaitement les impatiences. Et puis il y a d'autres sujets sur lesquels on a besoin d'avancer plus vite, le sujet des phytosanitaires sur un certain nombre de points…

SALHIA BRAKHLIA
On va rentrer dans le détail.

MARC FESNEAU
Le sujet de l'eau, évidemment, et puis le sujet de la compétitivité, où là c'est plutôt le champ fiscal qui s'ouvre.

JEROME CHAPUIS
Et on va prendre le temps de parler de tout ça juste après le Fil info, avec vous Marc FESNEAU.

(…)

JEROME CHAPUIS
Avec le ministre de l'Agriculture Marc FESNEAU, on parlait des irritants, de ce qui irrite le monde agricole juste avant le fil info ; on essaie de comprendre pourquoi. Il y a notamment la question des aides de la PAC, la politique agricole commune, qui devaient être versées le 15 mars et qui ne l'ont pas toutes été. Vous l'expliquez comment ?

MARC FESNEAU
Alors on va reclarifier les choses. On avait pris un engagement, il y avait un retard. Dans une nouvelle PAC, il y a parfois du retard. Je rappelle la PAC de 2015 où les gens étaient payés deux ans après, donc on avait un retard sur un certain nombre d'aides. Les mécanismes étaient complexes, la PAC avait été modifiée. On avait pris l'engagement, pour dire les choses très clairement, que tous les dossiers qui nécessitent une avance au mois d'octobre puissent être soldés le plus rapidement possible, c'est-à-dire avant le 15 mars. À la date où je vous parle, la quasi-totalité de ce travail a été fait. En revanche, il y a des aides qui ne sont jamais payées avant mars, avril, mais parfois juin : c'est les aides agriculture biologique et les aides des mesures agri environnementales. Ç'a toujours été ça. Je prends à témoin qui veut pour montrer que ces aides-là sont toujours payées avec un an…

JEROME CHAPUIS
Elles le seront quand celles-ci ?

MARC FESNEAU
Et donc sur celles-là, on va tâcher de faire en sorte d'accélérer. Il y a de premiers paiements qui sont intervenus sur les mesures agri environnementales. Je ne rentre pas dans le détail mais il y a un certain nombre de premiers paiements qui sont intervenus. En plus, on est dans une crise du bio donc on peut comprendre qu'il y ait des impatiences. Mais nous sommes bien au rendez-vous de l'engagement qui avait été pris du 15 mars sur celles qui étaient en retard.

JEROME CHAPUIS
Toutes les aides ont été versées.

MARC FESNEAU
À quelques dossiers prêts. Alors après, on a des sujets. On a voulu mettre la notion d'agriculteurs actifs, ç'a complexifié le système. C'est-à-dire qu'il y a des gens qui, dans leur GAEC, ont des gens qui ont plus de 67 ans. Est-ce qu'ils peuvent toucher l'aide et ce qu'ils ne peuvent pas ? Et ça, ça complexifie d'un point de vue mais c'était une demande de la profession, cette question de l'agriculteur actif. Mais globalement, on a quasiment tout payé de ce qu'était l'engagement du gouvernement à la date du 15 mars. Il y a un besoin d'accélération sur les autres mesures. Je peux le comprendre pour des raisons de trésorerie, mais de bonne foi, on ne peut pas dire qu'on n'ait pas fait l'effort nécessaire.

SALHIA BRAKHLIA
Toujours dans le cadre de la PAC. Face aux manifestations agricoles dans toute l'Europe, la Commission européenne propose de suspendre nombreuses normes pourtant présentées comme essentielles pour lutter contre le changement climatique. Vous en avez parlé. La mise en jachère obligatoire, c'est fini. Autre changement majeur, la Commission propose d'exempter de contrôles et de pénalités liés aux conditions environnementales les exploitations de moins de dix hectares. Il y a d'autres changements qui sont prévus. Les ONG environnementales, elles, elles dénoncent un démantèlement électoraliste, 'est le mot utilisé, de l'architecture verte de la PAC juste avant les européennes. Qu'est-ce que vous leur répondez ?

MARC FESNEAU
Je leur réponds qu'il faut d'abord écouter, entendre un peu et voir ce que disent les agriculteurs européens. Quand vous avez une crise de cette nature-là, ce n'est pas qu'une crise française, c'est une crise de sens. On a une réglementation qui est beaucoup trop compliquée. On a parlé tout à l'heure, vous m'avez presque fait le reproche - pas pour la France, mais pour l'Europe – qu'on soit en nécessité d'importation de céréales venant de pays tiers. Il n'y a pas 36 solutions, il faut produire plus en Europe. Et donc si on veut produire plus en Europe, il faut arrêter cette logique.

SALHIA BRAKHLIA
(propos inaudibles)

MARC FESNEAU
Attendez, je vais vous expliquer sur la jachère. Pour produire plus en Europe, il faut qu'on ait l'ensemble des surfaces qui puissent être mobilisées. Et donc la jachère, en fait, qui avait un sous-jacent de décroissance, n'était pas un bon objectif.

SALHIA BRAKHLIA
Mais c'est ce que vous avez voté.

MARC FESNEAU
En revanche, ce qu'on a décidé comme assouplissement, ce n'est pas tout à fait… On pourra, on devra avoir des cultures intermédiaires qui fixent l'azote. Ce n'est pas mauvais pour la planète et ça permet de réduire d'ailleurs la dépendance en fertilisant azotés minéraux. Deuxième élément, on pourra produire des légumineuses, non pas des céréales, là, sans produits phytosanitaires. Donc on peut trouver une trajectoire qui permette de continuer à produire et de respecter un certain nombre de normes environnementales. Je vais vous donner un deuxième exemple, parce que qu'on comprenne bien. Il y avait une obligation de maintenir les prairies permanentes quelle que soit la structure de l'élevage. On est plutôt dans les années qui viennent de se passer, il y a eu l'artificialisation des sols, il y a des surfaces qui sont sorties de la PAC et il y a des agriculteurs qui ont été obligés ou qui, dans à cessation d'activité, l'activité de l'élevage n'a pas été reprise. On garde les prairies pour quel motif ? Quel est l'intérêt de faire ça ? Qui paye ça ? Et donc, c'est simplement du bon sens qu'on met dans la PAC. Et pardon, la trajectoire carbone, les trajectoires de réduction de produits phytosanitaires, la trajectoire qui vise à développer l'agroécologie, elle est toujours dans la PAC.

SALHIA BRAKHLIA
On a l'impression que vous découvrez ça aujourd'hui. La PAC, elle a été votée en 2019, pas hier.

MARC FESNEAU
Comment ça, je découvre aujourd'hui ?

SALHIA BRAKHLIA
Non mais je veux dire, ce constat-là. Qu'il y a les prairies qu'il fallait…

MARC FESNEAU
Alors les prairies, le ratio avait été déterminé il y a une dizaine d'années. Donc, on bout du compte, on se rend compte…

JEROME CHAPUIS
Non mais vous comprenez le sens de la question. À chaque fois, on a l'impression qu'on prend des engagements écologiques et que face à la réalité, notamment la réalité du marché, on recule.

MARC FESNEAU
Pourquoi on veut maintenir les prairies permanentes ? On veut maintenir les prairies permanentes parce que ça stocke du carbone. Les mêmes qui vous disent " il faut maintenir les prairies ", vous disent " il faut moins d'élevage ". Il faut qu'ils m'expliquent très clairement et très concrètement comment on maintient des prairies quand il n'y a plus d'élevage. C'est aussi simple que ça. Donc il faut maintenir l'élevage parce que ça permet de maintenir les prairies ; pour stocker du carbone, il y a les pratiques culturales. L'agroécologie, ça permet de stocker du carbone, Le développement des haies, ça permet de stocker du carbone. Donc on peut essayer de trouver des équilibres qui soient plus compréhensibles pour les agriculteurs et qui ne soient pas en permanence la punition où on rigidifie le paysage agricole français en disant " cette prairie, elle a été là depuis plus de cinq ans et donc elle ne bougera plus jamais ".

SALHIA BRAKHLIA
Marc FESNEAU, puisqu'on en est à effectuer des allégements dans le registre de l'écologie, au sujet des pesticides…

MARC FESNEAU
Non, ce n'est pas des allègements dans le registre de l'écologie, c'est des allègements dans le registre du bon sens, pardon.

SALHIA BRAKHLIA
Allons-y. Au sujet des pesticides, peut-on s'attendre à des dérogations en France pour des produits utilisés ailleurs en Europe ? Je vous donne un exemple, les néonicotinoïdes qui sont utilisés par les betteraviers en Allemagne interdits pour nos betteraviers dans le nord de la France. Vous dites quoi là-dessus ?

MARC FESNEAU
D'abord que ça ne relève pas d'une dérogation puisque ça relève d'une loi qui a été votée en 2016.

SALHIA BRAKHLIA
En France.

MARC FESNEAU
En France, seulement en France. C'est une surtransposition, il ne pas dire le contraire, qui met en risque la filière betteravière qui est une filière très importante. Parce qu'on ne peut pas dire il faut faire des mesures de droits de douane pour les Ukrainiens parce qu'on rentrerait trop de sucre et ne pas donner la capacité à nos producteurs de betteraves. Attendez, on a donné un certain nombre de dérogations l'an dernier sur des produits qui sont autorisés en France pour faire en sorte qu'on puisse lutter contre la jaunisse de la betterave. On est en train d'expertiser ce qui est le risque cette année mais l'idée, ce n'est pas de faire de la marche arrière permanente, mais il faut qu'on trouve des solutions de dérogation. Par ailleurs, Agnès PANNIER-RUNACHER a lancé un travail que je trouve très utile, que je lui ai demandé de lancer sur un certain nombre de productions qui sont orphelines de produits, et pour lequel il n'y a pas eu des demandes d'extension d'une dérogation mais c'est des produits qui sont autorisés. Et donc il faut regarder filière par filière, produit par produit, ce que font les partenaires européens et s'il y a lieu ou pas d'avoir des dérogations. Mais on est bien dans des produits qui sont autorisés.

SALHIA BRAKHLIA
Alors du coup, la question c'est est-ce qu'on pourrait réintroduire des néonicotinoïdes interdits en 2016 ?

MARC FESNEAU
Il n'y a pas que les néonicotinoïdes dans la vie, pardon. Arrêtez avec cet exemple.

SALHIA BRAKHLIA
Les Allemands, ils peuvent eux les utiliser mais pas nous.

MARC FESNEAU
Oui, ils peuvent les utiliser, pas nous. Je l'ai dit tout à l'heure, ça ne relève pas d'une dérogation puisque ça relève d'une loi, donc il faudrait une loi pour défaire ce que vous êtes en train de décrire. L'objectif que nous avons, ce n'est pas d'aller dans cette direction-là en tant que telle. Après, il faut qu'on puisse répondre quand même à l'interrogation légitime des producteurs de betteraves, c'est : si j'ai une attaque de jaunisse, je fais quoi ? Et donc il faut regarder dans la panoplie des produits qui sont autorisés ceux qui peuvent être mis sur la table pour voir si avec ça, on peut faire face à un épisode de jaunisse qui pourrait être dramatique pour la filière.

JEROME CHAPUIS
Il faut qu'on parle, Marc FESNEAU, de la meilleure rémunération parce que ça fait partie des priorités des revendications des agriculteurs. Vous commencez tout juste les discussions pour la révision des lois EGalim qui régissent les relations entre producteurs et distributeurs. On en est à la loi Egalim 4. À quoi servent ces lois si, au bout du compte, 40% des transactions sont faites via des centrales d'achat qui sont implantées à l'étranger et donc qui ne sont pas sujettes à ces lois ?

MARC FESNEAU
Alors d'abord, l'affaire des centrales d'achat tierces, en dehors des frontières françaises, elle s'est développée ces quelques mois ou quelques années. Au début, il n'y avait pas ces centrales d'achat.

JEROME CHAPUIS
C'est un effet pervers des lois précédentes ?

MARC FESNEAU
Non, ce n'est pas les lois qui ont été perverses, pardon. N'inversez pas les rôles, c'est ceux qui veulent dévoyer la loi…

JEROME CHAPUIS
Voilà. En général, une loi peut produire ces contournements. C'est le cas, c'était le sens de ma question.

MARC FESNEAU
Oui, il y a un contournement qui a été effectué. J'étais hier devant le congrès de la Fédération nationale des producteurs de lait. Aucun d'entre eux ne me demande de revenir sur EGalim, ils me demandent d'aller plus loin sur EGALIM. C'est bien l'objet de la mission qui a été confiée aux deux députés, Anne-Laure BABAULT et Alexis IZARD pour faire en sorte de regarder. Puisqu'il y a des gens qui se glissent dans des interstices pour éviter d'avoir à respecter la loi, pour faire en sorte que la loi soit respectée, c'est plusieurs choses. C'est est-ce qu'on part bien des bons coûts de production ? 2/ Est-ce qu'il y a des filières qui devraient rentrer dans EGalim ? Parce que vous dites 40% sont des centrales d'achat, mais il y a un certain nombre de filières qui ne sont pas dans EGalim. Les fruits et légumes ne sont pas dans Egalim mais c'est eux qui l'ont demandé. Ils avaient peut-être de bonnes raisons mais réinterrogeons la question. Les grandes cultures pour une grande part ne sont pas dans EGalim. On manque de contractualisation sur la filière viande bovine. Deuxième élément d'interrogation : est-ce qu'il ne faut pas pousser à faire rentrer plus de monde dans EGalim ? Et puis, troisième élément sur lequel il faut travailler, c'est toute la consommation, il ne faut pas charger uniquement la grande distribution si je peux dire. Il faut répartir la charge. Une grande partie de la consommation de produits alimentaires, c'est restauration hors domicile. Donc c'est la restauration collective privée et publique et donc là, on va mobiliser au début du mois d'avril les collectivités publiques pour dire : est-ce qu'il n'y a pas les uns et les autres un effort à faire pour faire en sorte qu'on puisse intégrer dans la restauration publique des produits français qui soient de qualité sous signe de qualité ?

JEROME CHAPUIS
Marc FESNEAU, on vous retrouve juste après le fil info.

(…)

SALHIA BRAKHLIA
Toujours, avec le ministre de l'Agriculture, Marc FESNEAU. Autre dossier qui fait désormais partie des thèmes de préoccupation : la retraite agricole des exploitants. Les syndicats vous demandent qu'elle soit calculée sur les 25 meilleures années d'activité et non pas sur l'intégralité de la carrière, comme c'est le cas aujourd'hui. Ils ont raison, c'est une injustice ?

MARC FESNEAU
Ils ont raison, c'est une injustice. C'est un élément d'attractivité du métier. C'est bien que celui qui va entrer dans la carrière agricole, puisse savoir ce à quoi va ressembler sa retraite, et Dieu sait si les retraites agricoles étaient faibles. Alors, d'abord, on ne part pas de rien, puisque depuis 2017, c'était une initiative parlementaire, il faut rendre à César ce qui est à César, si vous me permettez cette expression, du président CHASSAIGNE. Il y a eu deux lois qui ont permis…

SALHIA BRAKHLIA
Communiste.

MARC FESNEAU
Oui, le président du groupe communiste à l'Assemblée nationale, qui se bat là-dessus depuis longtemps, avec d'autres parlementaires. On a fait voter ces deux lois, qui permettent de revaloriser les retraites et puis de prendre en compte en particulier les conjoints, qui sont des conjointes, en l'occurrence, souvent, qui ne bénéficient pas d'un système de retraite. Donc on a avancé sur ce sujet, c'est 100, 200, 300 € parfois, de plus, pour un certain nombre de retraités agricoles. On a un sujet, c'est que le système de retraite agricole était à part des autres. Oui, l'objectif c'est bien d'arriver sur les 25 meilleures années. On a un sujet de mise en oeuvre, et c'est pour ça qu'on débat encore. Est-ce qu'on ne le fait par un système de points ? Je ne veux pas rentrer dans les détails, sur les systèmes de revenus ? Tout le monde s'accorde à dire que le plus avantageux, c'est un système de revenus. On a juste besoin de vérifier deux choses, c'est : la faisabilité en temporalité, est-ce qu'on peut le faire en 2026 ou pas ? Et deuxième…

SALHIA BRAKHLIA
Est ce qu'il faut aller très vite ?

MARC FESNEAU
Et deuxième élément, oui, mais la MSA ne peut pas restructurer la carrière au-delà de 2016. Donc faire 25 ans, quand on ne peut faire que 10 ans, il va bien falloir qu'on trouve des mécanismes d'ajustement.

SALHIA BRAKHLIA
C'est ça, on manque d'informations.

MARC FESNEAU
Mais, oui oui, donc c'est un sujet technique…

SALHIA BRAKHLIA
Et c'est pour ça qu'on ne peut pas le faire.

MARC FESNEAU
...mais ce n'est pas la faute de la MSA, je ne mets personne…

JEROME CHAPUIS
Vous allez y arriver.

MARC FESNEAU
On va y arriver, il y a des sujets techniques à régler, et deux, de regarder comment on fait en sorte qu'il n'y ait pas de perdants à la fin de ce régime.

JEROME CHAPUIS
Parce qu'il y en a qui pourraient y perdre.

MARC FESNEAU
Voilà, c'est ça l'objectif.

JEROME CHAPUIS
Il y a une autre question, très technique…

MARC FESNEAU
Donc, on partage l'objectif et je suis sûr que dans les jours qui viennent, on trouvera la voie et les moyens. Au fond, il faut donner droit aussi à une demande qui avait été faite et votée à l'Assemblée nationale, c'était la PPL de monsieur DIVE, qui n'est pas non plus membre de la majorité et qui donne droit à l'idée d'une retraite plutôt basée sur les 25 meilleures années de revenus.

JEROME CHAPUIS
Il y a une autre question très technique, mais très importante, sans rentrer dans les détails, une position de principe du gouvernement : les agriculteurs réclament de relever de 20% à 50% l'abattement dont ils bénéficient sur la taxe sur le foncier non bâti. Quelle est votre position ?

MARC FESNEAU
Alors, j'entends qu'il y ait un besoin de travail sur la compétitivité. C'est une demande globale. Il y a plusieurs outils en même temps. On a quand même le budget du ministère de l'Agriculture, il a été augmenté de près d'un milliard cette année. Personne ne le dit…

JEROME CHAPUIS
Vous êtes en train de nous dire…

MARC FESNEAU
Attendez…

JEROME CHAPUIS
Vous n'aurez pas les moyens ?

MARC FESNEAU
Deuxième élément, on a mis 500 millions quasiment sur les fonds d'urgence divers, que j'ai évoqués tout à l'heure. Il y a une question budgétaire à un moment qui se pose et qui s'impose à nous tous. Alors, après qu'on essaie…

SALHIA BRAKHLIA
Ça va couter combien cet abattement ?

MARC FESNEAU
Eh bien on me dit 150 millions ou 200 millions, ce n'est pas complètement rien dans un budget, il faut qu'aussi on puisse regarder en raison. Moi Je pense qu'on a besoin de faire un travail sur la fiscalité agricole, globalement. C'est une fiscalité qui est extrêmement complexe, qui est venue se rajouter des dispositifs fiscaux de nature diverse. Qu'on ait besoin de travailler sur une fiscalité qui incite à la compétitivité, qui favorise la compétitivité des exploitations, oui, mais je peux pas m'abstraire comme ministre de la question budgétaire, parce que si c'est à crédit qu'on paie la compétitivité de l'agriculture française, à la fin, c'est l'agriculture française qui paiera le crédit aussi.

JEROME CHAPUIS
Marc FESNEAU, il y a une question très importante qui va être examinée demain au Sénat, l'accord de libre-échange entre le Canada et le CETA, il a été conclu il y a une dizaine d'années, en vigueur provisoirement depuis à peu près 6 ans, ratifié en 2019 par les députés, mais jamais, jamais par les sénateurs. Vote demain au Sénat à l'initiative des communistes. Est-ce que vous êtes confiant ?

MARC FESNEAU
Ce n'est pas la question la confiance. Je voudrais juste rappeler qu'on avait beaucoup vilipendé cet accord et que les faits sont têtus, comme disait l'autre, et que les faits prouvent que cet accord, il est favorable globalement aux exportations françaises et européennes, et particulièrement pour l'agriculture, dans un certain nombre de volets.

JEROME CHAPUIS
Mais en attendant, demain, parce que LR et les Communistes…

MARC FESNEAU
Alors, je vois bien qu'on est dans un moment, personne n'est dupe, du moment agricole et du moment européen, où on essaie d'envoyer des messages ou de faire un peu de la politique politicienne, comme on dit. Mais moi je regrette qu'on instrumentalise comme ça, parce qu'on a besoin, pardon, on a besoin d'échanges commerciaux. Parce que si l'échange commercial c'est : j'exporte, et jamais celui qui est, avec qui je dialogue, ne peut importer, ne peut exporter chez moi, alors à ce moment-là, ça ne s'appelle pas des échanges commerciaux, ça s'appelle de l'échange unilatéral.

JEROME CHAPUIS
Mais alors, il y a une grande question…

MARC FESNEAU
Et donc…

JEROME CHAPUIS
Il y a une question, quand même…

MARC FESNEAU
Je finis. On a besoin de pouvoir exporter, parce que la ferme France, elle est puissante, parce qu'elle peut exporter, le lait, les céréales, les vins et spiritueux évidemment. Il ne faut pas se priver de ça, parce que moi, il faudra qu'on m'explique ce qu'on fait de 50% des céréales qui sortent de nos frontières. On a évoqué les difficultés qu'on a sur ces filières, si jamais on ne peut en plus pas les exporter. Parce qu'après les Canadiens, de bon droit, pourraient dire : " Moi, je ne fais pas d'accord avec des pays qui ne veulent pas faire de commerce ".

JEROME CHAPUIS
Oui, mais il y a quand même une question, parce qu'on découvre à cette occasion que ça fait bientôt 5 ans que l'accord s'applique, alors qu'il n'a pas été, de fait, adopté par l'ensemble de la représentation nationale. Le Sénat ne l'a pas voté. Ça ne pose pas un gros problème démocratique ?

MARC FESNEAU
Alors, c'était prévu. Tout le monde savait que tant que les délibérations ne sont pas faites, l'accord court. Heureusement, on l'a fait, parce que c'est quand même 200 millions d'euros de plus, par an, pour la ferme France. Donc on n'a pas perdu notre temps dans cet exercice-là. Deuxième élément, je pense qu'on a un sujet global, mais pas sur l'accord du CETA, de rapport au commerce. Il faut que le commerce soit plus équitable, il faut qu'on y inclut plus de clause miroir, mais ça ne peut pas donner le sentiment que ça bypass au fond des processus démocratiques. Et souvent, parfois, vous regardez un certain nombre d'accords. On a donné un mandat de négociation, à l'Union européenne, ça part en sous-marin, si vous me permettez l'expression. Puis quinze ans plus tard, on dit : tiens, au fait, on a trouvé un accord. Il faut qu'il y ait quelque chose qui soit, mais ça, c'est dans les process européens, et ça fera partie, à mon avis, des débats des élections européennes, il faut qu'on ait des process qui soient plus transparents, pour montrer aux gens ce qu'on gagne, ce que parfois on perd ou ce sur quoi on n'est plus en défensif, mais en quoi il y a quelque chose qui est plutôt vertueux. Quand vous regardez, partout où il y a eu des accords actés de libre-échange, ils ont été, en termes d'export nets, plutôt plus favorables que quand il n'y en avait pas. Parce que, ce n'est pas parce qu'il n'y a pas d'accord qu'il n'y a pas d'échanges.

SALHIA BRAKHLIA
Non, ça on sait, oui.

MARC FESNEAU
Et donc…

SALHIA BRAKHLIA
C'est du commerce.

MARC FESNEAU
C'est du commerce, parce qu'il y a quand même besoin de commerce. Et donc les accords, ils ont été plutôt protecteurs de nos intérêts économiques français et européens, que pas protecteurs. Et donc, qu'on ait besoin d'améliorer les processus démocratiques, oui, mais pour le coup, c'était tout à fait transparent que l'accord courait. Il n'y a pas de découverte aujourd'hui, pardon.

JEROME CHAPUIS
Mais il peut se passer quelque chose demain. Qu'est ce qui se passe si…

MARC FESNEAU
Mais après, vous savez, c'est un texte, c'est un projet de loi, donc il y a des navettes, et voilà. Mais je trouve vraiment regrettable qu'on instrumente. Personne n'a intérêt à ce que la ferme France ne puisse pas exporter. Et donc je trouve que l'instrumentalisation, dans un moment qui est un moment éruptif, est très toxique.

JEROME CHAPUIS
Merci beaucoup Marc FESNEAU, ministre de l'Agriculture, vous étiez invité du 8.30 France Info.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 21 mars 2024