Interview de Mme Nicole Belloubet, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse à France Bleu le 29 avril 2024, sur l'agression d'un professeur au collège Bellevue de Toulouse, la recherche de stage pour les élèves de seconde et le meeting de campagne de Valérie Hayer à Toulouse.

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Média : France Bleu

Texte intégral

CLEMENCE FULLEDA
Bonjour Nicole BELLOUBET.

NICOLE BELLOUBET
Bonjour.

CLEMENCE FULLEDA
Je pense que vous serez ravie d'échanger avec les auditeurs toulousains.

NICOLE BELLOUBET
Bien sûr, très volontiers.

CLEMENCE FULLEDA
Qu'on comprenne bien, d'abord, votre déplacement à Toulouse ; vous venez soutenir ce soir la candidate macroniste aux européennes Valérie HAYER qui fait une réunion publique à la gare Matabiau. Et avant ça, vous étiez à une école et un lycée. Est-ce que c'est d'abord et avant tout un déplacement politique ?

NICOLE BELLOUBET
Les deux c'est-à-dire que me déplaçant pour soutenir la candidate Valérie HAYER et soutenir évidemment l'Europe et tout ce que cela signifie, je profite évidemment de ma venue à Toulouse pour aller dans une école très... qui a un projet pédagogique très innovant et au lycée Gallieni qui a été touché par AZF ; nous nous en souvenons tous et pour lequel j'ai vraiment une mémoire affective très forte, mais là, je viens surtout sur la question des internats.

CLEMENCE FULLEDA
Alors, parlons d'abord, donc Education ; il y a une semaine exactement à Toulouse, vous en avez forcément entendu parler, un professeur de technologie du collège Bellevue a été giflé par un élève dans sa classe. Est-ce que vous avez rencontré cet enseignant ?

NICOLE BELLOUBET
Je ne l'ai pas rencontré mais en tout cas, je compte avoir un contact avec lui et avec le principal du collège, comme je le fais à chaque fois qu'il y a une agression particulièrement marquante. Je considère en effet que ce sont des évènements qui sont totalement inacceptables, totalement intolérables. Et évidemment, je me dois d'être aux côtés de nos professeurs, parce l'Education nationale, c'est une famille. Et quand l'un d'entre nous est touché, c'est l'ensemble de la famille qui est touché. Je le dis très profondément et très sincèrement.

CLEMENCE FULLEDA
Vous allez l'appeler aujourd'hui cet enseignant ?

NICOLE BELLOUBET
Oui, je vais l'appeler. Oui, bien sûr, je vais profiter de ma venue à Toulouse ; évidemment, je vais les joindre aujourd'hui. Ce que je voudrais dire aussi, c'est que pour enrayer cette violence que l'on voit apparaître ici et là dans certains de nos établissements, on a mis en place toute une série de dispositifs, à la fois de sécurisation des établissements, sécurisation physique, et puis également des dispositifs de soutien juridique, psychologique auprès de nos enseignants.

CLEMENCE FULLEDA
L'élève doit suivre des mesures éducatives dans l'attente de son jugement. Le rectorat a annoncé qu'il était suspendu à titre conservatoire. Est-ce que vous pourriez imaginer, Nicole BELLOUBET, qu'il réintègre un jour son collège ?

NICOLE BELLOUBET
Je suis... Enfin, je ne veux pas préjuger la décision du conseil de discipline, mais évidemment, il fera l'objet d'une exclusion parce qu'on ne peut pas avoir accompli un tel acte sans avoir les conséquences. Au fond, je crois que ce qui est important dans le système éducatif, comme dans tout système, c'est de bien comprendre qu'il y a des règles ; qu'on doit respecter ces règles, sinon on ne peut pas vivre et que si on ne les respecte pas, il y a des sanctions qui s'imposent.

CLEMENCE FULLEDA
Mais que fait-on d'un élève qui a été violent envers un professeur ? On le déplace dans un autre établissement ?

NICOLE BELLOUBET
Il est pris en charge. Là, la situation est un petit peu différente puisqu'il a été présenté à un juge des enfants. Et donc il va y avoir une sanction ou en tout cas une décision judiciaire. Et donc c'est une situation un petit peu particulière. Sinon, évidemment, l'exclusion est l'une des solutions, mais ce n'est pas la seule solution. Il y a tout un palier évidemment de réponse suivant la gravité des faits. Ce que je veux dire ici, c'est qu'aucun fait ne peut rester sans être pris en compte et sans être, le cas échéant, sanctionné.

CLEMENCE FULLEDA
Nicole BELLOUBET sur France Bleu Occitanie, ce matin. Je crois que vous avez écouté notre Matinale. J'ai vu l'application France Bleu sur votre téléphone et on est très fiers.

NICOLE BELLOUBET
Parce que vous avez fouillé dans mon téléphone...

CLEMENCE FULLEDA
Non, j'étais à côté de vous et j'ai vu que vous aviez fermé l'application.

NICOLE BELLOUBET
C'est exact.

CLEMENCE FULLEDA
On parle des élèves de seconde qui ont beaucoup, beaucoup de mal à trouver un stage pour le mois de juin. C'est obligatoire pour la première fois cette année. Je vous fais écouter, madame la ministre, la réaction du président de la FCPE en Haute-Garonne, qui s'appelle Éric PINOT, qui ne comprend pas cette mise en place si rapide.

ÉRIC PINOT, PRESIDENT DE LA FCPE EN HAUTE-GARONNE
C'est l'enfer pavé de bons sentiments. C'est-à-dire qu'on veut que les élèves se confrontent un peu aux secteurs professionnels. Et ça, ce pourrait être une bonne idée. Mais comme d'habitude, c'est construit dans l'approximation totale. Face aux inégalités sociales de ce pays, il va y avoir une inégalité aussi sur la recherche et sur l'obtention de ces stages. En fonction de l'évolution du capital social et du réseau des parents, que les stages sont plus ou moins intéressants ; une fois de plus, on va stratifier les choses et les parcours des étudiants. Et une fois de plus, la réponse ultime du Gouvernement qui est vraiment inadmissible, c'est que ceux qui n'auront pas de stage à ce moment-là vont se retrouver obligés à faire le SNU. Ça me rappelle un peu les années 60, quand aux Etats-Unis, on envoyait des pauvres à l'armée.

CLEMENCE FULLEDA
Le SNU, c'est le Service National Universel. Nicole BELLOUBET, ça vous met en colère d'entendre ça ?

NICOLE BELLOUBET
En colère, non. Mais ce que dit le président de la FCPE n'est pas exact. Nous avons décidé de mettre en place des stages de seconde qui auront lieu du 17 au 28 juin. D'une part, parce que nous pensons que cela aide dans le parcours d'orientation des élèves et d'autre part, parce que ça leur permet de connaître le milieu de l'entreprise ou de l'administration.

CLEMENCE FULLEDA
On comprend le principe mais c'est très difficile à trouver visiblement.

NICOLE BELLOUBET
Il y a une plateforme nationale qui s'appelle « Un jeune, une solution » qui offre aujourd'hui près de 85 000 stages. Alors je ne sais pas tout le monde...

CLEMENCE FULLEDA
Mais combien sont pourvus ? Parce que j'ai regardé, effectivement, j'ai vu des offres de stage à Toulouse, par exemple…

NICOLE BELLOUBET
Effectivement, il y a des offres de stage.

CLEMENCE FULLEDA
Mais combien d'élèves candidatent sur chaque stage ?

NICOLE BELLOUBET
Non, mais il n'y a... Je dis, il y a la plateforme « Un jeune, une solution » et puis, il y a aussi des réseaux d'entreprises qui offrent des stages qui ne sont pas nécessairement sur cette plateforme. Donc je pense... Et il ne faut pas oublier les stages de l'administration. J'aurai moi-même d'ailleurs le plaisir d'accueillir Fantine et Nathan. Nathan qui sera, je crois, un jeune Toulousain qui viendront...

CLEMENCE FULLEDA
Ce n'est pas vrai…

NICOLE BELLOUBET
Oui, qui viendront chez moi, au ministère, accomplir un stage. Je ne les connais pas, ce n'est pas le réseau...

CLEMENCE FULLEDA
Il a été pistonné ?

NICOLE BELLOUBET
Non, pas du tout, pas du tout. Je ne les connais pas, mais je suis ravie de les accueillir. Donc, si vous voulez, je crois qu'il y a ces plateformes, il y a les réseaux d'entreprises. Et je pense que nous avons là, la possibilité d'offrir vraiment des stages à tous les enfants. Par ailleurs, si ces jeunes, par hasard, ne trouvaient pas de stage ; dans les établissements scolaires évidemment, il y a des possibilités de les prendre en charge, en leur faisant des parcours... un travail sur l'orientation et d'autres éléments.

CLEMENCE FULLEDA
Mais pourquoi les dates sont les mêmes pour tous les élèves ?

NICOLE BELLOUBET
Eh bien, parce que…

CLEMENCE FULLEDA
Pourquoi ne pas avoir, comme en troisième, laissé un peu de marge de manoeuvre aux élèves ?

NICOLE BELLOUBET
Parce qu'on a considéré qu'en classe de seconde, c'était la deuxième quinzaine de juin qui était la plus libre puisque les autres classes passent des examens ; c'est le bac, ce sont les examens. Et donc pour les élèves de seconde qui ne sont pas encore en vacances, c'est une manière à la fois de leur faire découvrir d'autres lieux et de travailler sur leur parcours d'orientation.

CLEMENCE FULLEDA
Mais le patron du MEDEF en Haute-Garonne dit ce matin, sur France Bleu, qu'à peine 30% de ses adhérents seront en mesure de prendre un…

NICOLE BELLOUBET
Nous sommes à deux mois du début de ces stages. Les offres se multiplient, nous le voyons et je suis persuadée que tout le monde trouvera une offre de stages, ou en tout cas le plus grand nombre.

CLEMENCE FULLEDA
Un mot quand même, madame la ministre, sur les groupes de niveau que vous préférez appeler « groupes de besoin. »

NICOLE BELLOUBET
Non, je ne préfère pas ; ce sont des groupes de besoin.

CLEMENCE FULLEDA
Groupe de besoins à la rentrée prochaine, en sixième et en cinquième. Si l'élève, cas concret, n'arrive pas à progresser - et ça arrive parfois - il restera, toute l'année, dans le groupe des plus faibles ?

NICOLE BELLOUBET
Madame, j'ai un objectif, vraiment, c'est de faire progresser tous les élèves ; je dis bien tous les élèves, de ne laisser personne au bord du chemin. Et c'est la raison pour laquelle nous avons privilégié ce qu'on appelle la pédagogie différenciée, donc le travail en groupe. Et ensuite, le troisième point, n'est-ce pas, faire progresser tous les élèves, avoir une pédagogie différenciée. Et le troisième point, c'est de refuser le tri social. Cela veut dire évidemment que nous donnons la possibilité aux établissements de faire bouger les élèves d'un groupe à l'autre en fonction des compétences qu'ils auront à acquérir. Et ça, je crois que c'est capital. Disons que nous laissons de la souplesse aux établissements. Je le redis, c'est très important. Les établissements auront de la souplesse en fonction de leurs caractéristiques pour mettre en place ces groupes, ces groupes de besoin.

CLEMENCE FULLEDA
Mais il vous faut 2 300 enseignants pour dédoubler ces classes et vous ne les avez pas encore.

NICOLE BELLOUBET
Alors il nous faut des emplois, des supports d'emplois ; nous en avons 2 300 et il nous faut des personnes. Nous sommes en train de les recruter ; sans compter bien entendu, nos titulaires qui forgeront l'armature de ces groupes.

CLEMENCE FULLEDA
Un mot bien sûr politique, Nicole BELLOUBET. Ce soir, je le disais, vous venez soutenir votre candidate Valérie HAYER, qui tient une réunion publique à la gare Matabiau de Toulouse, candidate aux européennes. Elle a encore chuté dans les sondages, loin derrière Jordan BARDELLA du RN et de plus en plus proche du candidat place publique Raphaël GLUCKSMANN. Pourquoi avoir choisi une candidate inconnue du grand public ?

NICOLE BELLOUBET
Parce que nous travaillons sur son expérience, sur son sérieux, sur son engagement au service de l'Union européenne. Elle est députée européenne, présidente du groupe Renew et elle a vraiment un rôle important dans tout le travail qui a été accompli au sein du Parlement européen.

CLEMENCE FULLEDA
Mais une personnalité, ça booste. Vous auriez pu y aller, vous, aux élections européennes, Nicole BELLOUBET.

NICOLE BELLOUBET
Ce n'est pas le choix qui a été fait et je suis certaine que Valérie HAYER est une excellente candidate. Et moi, je le redis ici, il faut, un, que nos concitoyens aillent voter le 9 juin. Parce qu'au fond, l'Europe, c'est vraiment notre vie et notre vie quotidienne. Je crois que les gens ne se rendent pas suffisamment compte. Regardez...

CLEMENCE FULLEDA
Un exemple pour convaincre les gens ?

NICOLE BELLOUBET
Erasmus. Lequel de nos élèves n'est pas parti à l'étranger ? Il y en a bien sûr. 700 000 élèves sont partis à l'étranger depuis quelques années grâce à Erasmus. C'est un formidable vecteur de connaissance de l'autre, de connaissance de notre histoire commune. C'est un exemple tout simple. Et je crois que c'est très, très important que nous prenions conscience que l'Europe, c'est notre quotidien et que c'est aussi une ambition pour la paix, pour notre continent.

CLEMENCE FULLEDA
Vous arrivez à croire que les jeunes vont y aller, le 9 juin prochain ?

NICOLE BELLOUBET
Ecoutez, moi, je ne désespère pas que les jeunes y aillent parce que je pense que si on leur dit vraiment ce que signifie l'Europe, ils prendront conscience de cela et ils prennent conscience de cela.

CLEMENCE FULLEDA
Une dernière question sur votre parcours, Nicole BELLOUBET, vous avez été rectrice de l'académie de Toulouse. On vous présente souvent en disant la Toulousaine Nicole BELLOUBET. Ça vous fait tiquer ou pas ?

NICOLE BELLOUBET
Non, ça ne me fait pas du tout tiquer. C'est un honneur que d'être présentée ainsi.

CLEMENCE FULLEDA
On peut continuer à dire ça ?

NICOLE BELLOUBET
Vous pouvez continuer à dire ça. Je suis aveyronnaise d'origine donc ce n'est pas si loin de Toulouse que ça. Mon père a fait ses études à Toulouse. J'ai été élue à Toulouse. Je suis infiniment liée à cette ville.

CLEMENCE FULLEDA
Et ce week-end, vous étiez chez vous, en Aveyron ?

NICOLE BELLOUBET
J'ai été chez moi, dans l'Aveyron, en train de réparer les dégâts de la tempête de samedi.

CLEMENCE FULLEDA
Il a eu quelques dégâts, mais rien de trop grave…

NICOLE BELLOUBET
Non, rien de grave ?

CLEMENCE FULLEDA
...me semble-t-il. Merci beaucoup Nicole BELLOUBET.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 mai 2024