Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
J'ai choisi de consacrer mon premier déplacement bilatéral au Liban, pays ami de la France ; pays déjà si fragile, pris dans une guerre qu'il n'a pas choisie.
Dans ces circonstances dramatiques, ma visite à un triple objectif :
D'abord, adresser un message de soutien et de solidarité aux Libanais, en apportant une aide humanitaire concrète.
Ensuite, adresser un message de soutien à nos ressortissants, qui forment la plus importante communauté française du Proche-Orient, et aux agents de notre ambassade, principal poste diplomatique de la région.
Enfin, poursuivre nos efforts en vue d'une cessation des hostilités et d'un règlement diplomatique.
Je vais donc revenir sur chacun de ces trois objectifs.
En premier lieu, je le disais, je suis venu apporter une aide aux victimes civiles - blessés, déplacés - de l'escalade des derniers jours. Je suis arrivé au Liban accompagné d'un avion militaire porteur de deux postes sanitaires mobiles permettant la prise en charge d'un millier de blessés graves, et d'une dizaine de tonnes de matériel médical. Cette aide a été immédiatement répartie dans des hôpitaux libanais, l'Hôpital Hariri, l'Hôtel-Dieu, ainsi qu'aux organisations non gouvernementales humanitaires.
J'ai également débloqué en urgence 10 millions d'euros pour appuyer ces organisations humanitaires, au premier ordre desquelles la Croix-Rouge libanaise. Ces fonds s'ajoutent aux 100 millions d'euros que nous avons déjà mobilisés cette année, et nous allons poursuivre et accentuer ces efforts en entraînant avec nous le secteur privé - certaines fondations se sont déjà manifestées auprès de moi -, l'Union Européenne - j'ai obtenu la convocation dans une demi-heure d'un Conseil des affaires étrangères des 27 qui discutera d'une aide exceptionnelle pour le Liban -, et les organisations internationales.
En deuxième lieu, je suis venu à la rencontre de nos compatriotes qui résident au Liban, avec une pensée particulière pour les familles des deux Français qui ont été victimes ces derniers jours des frappes. J'ai échangé avec plusieurs de leurs représentants. Ils m'ont fait part de leur inquiétude et de leurs besoins essentiels. Nous travaillons activement à leur apporter des réponses. Dans l'immédiat, notre ambassade, dont je salue l'engagement, a mis en place une cellule de réponse téléphonique active 7 jours sur 7, 24h sur 24, et nous avons fait venir de Paris des personnels et des moyens pour renforcer notre dispositif de soutien.
Je rappelle le numéro de cette cellule de réponse téléphonique : 01 420 292.
Je rappelle également le site de notre ambassade, ambafrance-lb.org et son compte twitter @ambafranceliba. C'est vers ces adresses que doivent se tourner nos ressortissants pour obtenir les informations les plus précises et les plus actualisées.
Je vais également oeuvrer afin que ceux qui souhaitent quitter le pays puissent trouver des vols disponibles. Et l'ambassade reviendra vers nos ressortissants et vers vous dans des délais brefs.
Je salue le courage et le dévouement des agents de l'ambassade et de nos réseaux culturels et éducatifs, qui font face avec sang-froid à une situation extrêmement difficile. Je les ai rencontrés et j'ai été très attentif aux préoccupations qui sont les leurs.
En troisième lieu, je suis venu poursuivre les efforts diplomatiques initiés depuis un an, qui se sont accéléré il y a quelques jours à New York, avec la proposition de cessez-le-feu mise sur la table par le Président de la République et le président Biden, que j'exhorte les parties à saisir dès maintenant. Cette initiative a été endossée par l'Union Européenne, l'Allemagne, l'Italie, le Royaume-Uni, l'Australie, le Canada, l'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis et le Qatar. Elle est toujours sur la table.
Il reste un espoir, mais il reste peu de temps.
J'exhorte Israël à s'abstenir de toute incursion terrestre et à cesser le feu. J'appelle le Hezbollah à faire de même, et à s'abstenir de toute action susceptible de mener à une déstabilisation régionale.
Je rappelle que la situation actuelle tient largement à la décision de ce mouvement d'entrer dans le conflit dès le 8 octobre 2023 et d'y entraîner le Liban, ce que nous avons toujours déploré.
Les paramètres d'un règlement diplomatique durable sont connus de longue date : il s'agit de mettre enfin pleinement en oeuvre la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies.
Cela passe par une cessation des hostilités de part et d'autre de la frontière, un déploiement massif des forces armées libanaises au sud du Litani, un retrait des acteurs armés non-étatiques de la proximité immédiate de la frontière, un renforcement de la capacité de la FINUL à mettre en oeuvre sans entrave son mandat, et un règlement du contentieux sur la frontière terrestre.
Rien de tout cela n'est impossible, pourvu que la volonté politique soit présente de part et d'autre.
Cette volonté politique, nous l'attendons aussi des dirigeants libanais : ils doivent remettre leurs institutions en ordre de marche, en élisant sans délai un président. Nous sommes prêts à les aider à s'accorder, au travers de la mission de bons offices de Jean-Yves Le Drian, mais cette responsabilité échoit d'abord aux chefs politiques libanais. Je l'ai dit au Premier ministre Mikati et au président Berri.
Que la guerre se poursuive ou que des négociations s'ouvrent, il est irresponsable de laisser aujourd'hui le pays sans chef de l'Etat qui puisse le rassembler et le représenter. C'est la condition de la préservation de l'unité et de la coexistence libanaise, à l'heure où la guerre, après des années de crise économique et de paralysie institutionnelle, est susceptible d'exacerber les tensions internes. Nous allons d'ailleurs renforcer notre appui à l'armée, garante de la sécurité intérieure et de l'unité du Liban, que tous doivent soutenir.
Mesdames et Messieurs,
Dans ces circonstances douloureuses, la France continue, comme elle l'a toujours fait, de se tenir aux côtés du Liban et des Libanais. Vous pouvez compter sur l'engagement du Président de la République, du Premier ministre et sur le mien.
Q - Avez-vous entendu une initiative libanaise en faveur d'un cessez-le-feu ? Et si oui, avez-vous l'intention de la présenter aux Israéliens ? Comment la France convaincra-t-elle Israël d'arrêter sa guerre contre le Liban ?
R - Les responsables politiques libanais que j'ai rencontrés aujourd'hui soutiennent la proposition franco-américaine présentée la semaine dernière par le Président de la République et par le président Biden. Je précise que cette proposition n'est pas un simple appel au cessez-le-feu. C'est une proposition qui a été discutée avec chacune des deux parties et qui apparaît aujourd'hui comme la seule susceptible de pouvoir garantir une trêve immédiate suivie d'une cessation durable des hostilités. Dans mes échanges avec les responsables politiques libanais, j'ai senti effectivement une détermination à soutenir cette initiative et à pousser dans ce sens.
Quant à Israël, nous avons des contacts quotidiens, que ce soit dans la région ou à Paris avec les autorités du pays pour les appeler à se saisir de cette proposition et de s'abstenir d'une incursion terrestre.
Q - Monsieur le Ministre, j'ai deux questions, l'une d'une consoeur qui voudrait savoir pourquoi la France parle de ressortissants français qui meurent dans des explosions et pas dans des bombardements ? Et ma propre question est : pourquoi la France ne condamne pas avec clarté la mort de civils dans les frappes aériennes ?
R - J'ai parlé de frappes et je n'ai pas de problème à parler de bombardements.
Q - Le secrétaire général adjoint du Hezbollah, Naim Qassem, a déclaré qu'ils étaient prêts à continuer la guerre et à une longue bataille. C'est une déclaration contradictoire avec celle du Premier ministre Mikati, qui a dit qu'il est prêt à déployer l'armée libanaise, et seule l'armée libanaise, au sud. À la lumière de tout cela, comment voyez-vous ces initiatives diplomatiques qui ont échoué antérieurement ? Qu'est-ce-qui va changer ? Et quel est votre message au Hezbollah précisément, après tout ce qu'il a subi ?
R - Je l'ai dit tout à l'heure, le Hezbollah porte une lourde responsabilité dans la situation actuelle, compte tenu de son choix d'entrer dans le conflit dès le 8 octobre de l'année dernière et d'y entraîner le Liban, ce que nous avons toujours déploré. Sa responsabilité aujourd'hui, dans son intérêt, dans l'intérêt du Liban, dans l'intérêt de la région, c'est de cesser le feu.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 octobre 2024