Déclaration de M. Jean-Louis Thiériot, ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants, sur l'exposition, "Libérer les villes", Blois le 11 octobre 2024.

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  • Jean-Louis Thiériot - Ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants

Circonstance : Rendez-vous de l'histoire de Blois

Texte intégral

Monsieur le préfet,
Mesdames et messieurs les parlementaires,
Monsieur le président du conseil départemental,
Monsieur le maire de Blois,
Mesdames et messieurs les élus,
Mon colonel,
Mesdames et messieurs,


Recevoir pour célébrer, célébrer pour transmettre, c'est l'une des missions de tous ceux qui portent la mémoire de la défense et donc de l'ECPAD [Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense] en ce 80e anniversaire de la Libération de la France.

Le thème de cette magnifique exposition, " Libérer les villes ", marque la contribution du ministère des Armées et des Anciens combattants à ces 27e Rendez-vous de l'histoire, ici à Blois.

Grâce au courage de nombreux photographes et reporters de guerre, souvent au plus près du feu, notre imagier de la Libération est particulièrement riche.

Sous l'objectif du hongrois Robert Capa ou de l'américaine Margaret Bourke-White, la dureté des combats qui dévastèrent nos villes apparaît dans toute sa violence.

Au milieu des bâtiments éventrés, ces photographes parviennent à capter la fatigue du soldat, la tension qui précède l'assaut, la peur des populations civiles aux joues creusées.

Mais, au fur et à mesure que progresse la délivrance, mort et vie continuent de défiler sous nos yeux.

Ces émotions d'hier sont universelles. L'actualité montre combien destruction et libération se mêlent. Le talent et l'art particulier du photographe, est de les capter et de les préserver pour les générations futures.

Les grands noms de la photographie que je viens de citer ne furent pas les seuls à immortaliser ces instants bouleversants : entre 1943, date de la libération de la Corse, et la capitulation du 8 mai 1945, les opérateurs du service cinématographique de l'armée ont réalisé plus de 17 000 clichés.

C'est de ce fonds iconographique exceptionnel que sont issus « Les regards de l'armée française » dans les villes libérées. Le grand public va pouvoir en découvrir une partie aujourd'hui.


Libérations, destructions, célébrations.

Les photographies présentées, prises de Bastia à Strasbourg en passant par Paris ou Dijon, éclairent d'une lumière kaléidoscopique ces heures décisives.

Les tranchées servant d'obstacles antichars à Nice ou Lorient en ruines illustrent la violence dans le quotidien des Français.

Ces photographies témoignent de la rage de l'occupant, qui n'hésita pas à détruire, incendier et saboter derrière lui dans les affres de la retraite. Elles nous rappellent le déchaînement des passions lors de l'épuration. Ces images disent le désir de justice, mais aussi les passions tristes et les noirceurs de l'âme humaine.

Les photographies que vous pourrez voir témoignent aussi de la vie et de la joie qui refleurit après les années de malheur. Avec la Libération, l'espérance supplante la malédiction.

Les drapeaux tricolores et des croix de Lorraine fleuries et pavoisées disent ces trop rares instants de communion, où une nation se retrouve dans la ferveur de l'unité retrouvée.


Cette exposition est aussi nécessaire parce qu'elle rend hommage aux opérateurs militaires qui, sous l'impulsion de la France libre, ont porté témoignage de ce moment d'Histoire.

Un vrai tour de force quand on imagine les risques, l'absence de protections physiques et les contraintes matérielles.

Ces hommes et femmes de trempe ont fourni un travail précieux qui témoigne de la résilience du peuple français, ils attestent de la geste de nos parents, grands-parents, arrière-grands-parents pour la reconquête du territoire et la restauration de la souveraineté nationale.

Leurs photos, diffusées dans les villes sous la forme d'expositions, dans les vitrines de commerçants, dans les magazines, ont permis au pays d'illustrer notre récit national.

Elles immortalisent ce moment où la France, tournant définitivement le dos à la défaite de 1940, au régime de Vichy et à la Collaboration, pouvait enfin se tourner à nouveau vers " sa destinée éminente et exceptionnelle. " (Citation de Charles de Gaulle, Mémoires de guerre, tome 1)


Cette exposition est enfin nécessaire pour les réflexions qui ne manqueront pas de naître chez ses visiteurs.

La géographie, d'abord, toujours riche de sens et qui commande si souvent aux évènements et donc à l'Histoire.

Qu'est-ce que la ville, si ce n'est le concentré même de la civilisation ? Là se rassemblent les hommes.

La destruction d'un hôtel de ville, l'incendie d'une église ou le sabotage d'un pont, comme celui du pont Jacques-Gabriel ici à Blois, sont autant d'actes qui laissent ouvertes les plaies de nos mémoires collectives. Et que dire d'Oradour-sur-Glane, la ville fantôme, la ville martyre, témoin à jamais de la folie des hommes.

L'effroi qui nous saisit, la compassion qui nous étreint, nous rappellent pour reprendre le mot de Saint-Exupéry " que la guerre n'est pas une aventure, que c'est une maladie " mais que pourtant parfois il faut la faire et la gagner.


À l'heure où la France se divise contre elle-même, au point de ressembler de plus en plus à un agrégat divers d'archipels épars, cette exposition nous conjure de garder la France unie, de ne pas céder aux divisions et de faire nation pour demeurer un pays libre et fort pour que nos villes ne connaissent plus la douleur et les larmes des après-guerres.


Je tiens donc à remercier très sincèrement les organisateurs des Rendez-vous de l'histoire de Blois d'offrir à l'ECPAD cette tribune pour mettre en lumière nos archives si riches et si porteuses de sens.

Je tiens également à remercier le conseil départemental de Loir-et-Cher qui, en partenariat avec la ville de Brest, a bâti l'exposition " De Brest au Loir-et-Cher : un refuge en temps de guerre ".

Ces documents et photographies permettent de découvrir une histoire de solidarité nationale méconnue : celle de l'accueil, à partir de 1943, de plus de 3 600 habitants de la ville portuaire bombardée.

C'est d'autant plus symbolique que le conseil départemental est parrain du SNLE Le Terrible, preuve que les territoires au cœur de la France savent combien leur sécurité se gagne aussi sur les mers.

Monsieur le président du conseil départemental, pour moi qui ai été président de département, cet engagement de votre collectivité au service de l'histoire et de la mémoire me fait chaud au cœur.

Décidément ce salon de Blois est d'une infinie richesse.

Il illustre les propos du Maréchal Foch,  les peuples sans mémoire sont les peuples sans avenir, car la mémoire c'est la vie".

Grâce à vous tous, nous nous sentons vivant, ensemble !


Je vous remercie de votre attention et vous souhaite une belle exposition.


Source https://www.defense.gouv.fr, le 17 octobre 2024