Interview de M. Alexandre Portier, ministre délégué, chargé de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel, à Europe 1 le 25 octobre 2024, sur l'interdiction du téléphone portable à l'école, le niveau scolaire et la laïcité à l'école.

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Média : Europe 1

Texte intégral

ROMAIN DESARBRES
Bonjour Alexandre PORTIER.

ALEXANDRE PORTIER
Bonjour Romain DESARBRES.

ROMAIN DESARBRES
Merci beaucoup d'être avec nous, invité de "La grande interview" CNEWS/Europe1. Vous êtes ministre délégué à la Réussite scolaire et à l'Enseignement professionnel. Il y a énormément de sujets à voir avec vous. Et vous êtes venus ce matin, sur CNEWS et Europe1, pour faire une annonce et parler du téléphone à l'école. Parmi vos chantiers, il y a l'interdiction des téléphones à l'école. Ce combat est essentiel à vos yeux ?

ALEXANDRE PORTIER
Il faut vraiment que tout le monde comprenne de quoi il s'agit. Aujourd'hui, l'addiction aux téléphones portables chez nos jeunes est une catastrophe éducative et sanitaire. Educative parce qu'on a, aujourd'hui, un effondrement de l'attention chez nos jeunes marqués par une crise de la lecture, une crise du langage, une crise de la pensée et aussi une crise sanitaire. J'insiste là-dessus avec le développement des vrais problèmes de santé mentale chez nos jeunes. On a un jeune sur deux, dans ce pays, qui se dit anxieux quand il n'a pas son téléphone à côté de lui. Donc il faut qu'on ait le courage de dire les choses. Le portable est nocif pour nos jeunes et la responsabilité de l'école, c'est d'être un lieu de désintoxication numérique.

ROMAIN DESARBRES
Alors, dans la loi, cette interdiction est effective depuis 2018. Ça ne s'applique pas ?

ALEXANDRE PORTIER
Vous vous rendez compte de ce que vous venez de dire ? On a une loi qui est votée depuis six ans et qui n'est toujours pas mise en œuvre. On est dans un pays de fou.

ROMAIN DESARBRES
Pourquoi ?

ALEXANDRE PORTIER
Par manque de volonté politique. Je le dis parce qu'on a eu peur d'aller jusqu'au bout. Et il faut qu'on assume, aujourd'hui, d'avoir cet acte de protection et de préservation de nos jeunes. C'est absolument fondamental parce que ne pas protéger nos jeunes, c'est les laisser en proie face à des phénomènes de harcèlement scolaire, face à des logiques d'isolement, alors que l'école est censée être le lieu de l'ouverture, par définition, le lieu de la rencontre avec l'autre. Et puis, les laisser aussi dans une logique d'enfermement. Le téléphone portable crée des murs entre les élèves et les enseignants.

ROMAIN DESARBRES
Cela n'a pas été fait parce que peur de quoi ? Peur d'affronter qui ? Les professeurs ? Les élèves ? Les parents ?

ALEXANDRE PORTIER
On est avec le téléphone portable face à un défi éducatif qui est l'un des plus grands qu'on ait connu dans les dernières décennies. Et donc forcément, il y a beaucoup de questions qui se posent sur comment faire ? Jusqu'où on peut aller ? Est-ce qu'on aura un soutien des parents dans cette démarche ? Et ce que je vois dans les établissements qu'ils ont testés, c'est qu'on peut arriver à lever ces difficultés dès lors qu'il y a le soutien politique.

ROMAIN DESARBRES
Donc, concrètement, qu'est-ce qui va changer avec vous ? On vient de faire le constat, depuis 2018, c'est dans les textes et ce n'est pas appliqué. Qu'est ce qui va se passer ? Qu'est-ce qui va changer avec Alexandre PORTIER au ministère de la Réussite scolaire ?

ALEXANDRE PORTIER
Ça fait un mois que je suis ministre. La loi est votée depuis six ans, donc il y a un immense chantier pour arriver à la mettre en œuvre. Ce que je souhaite, c'est qu'on soit d'arrache-pied sur le dossier parce que j'en en fait une priorité. Il ne peut pas y avoir de réussite scolaire, -il faut bien qu'on le comprenne - si on n'arrive pas à créer un climat scolaire totalement dédié aux apprentissages. Et on a, aujourd'hui, 200 établissements en France qui testent des solutions qui sont très différentes et qui montrent qu'on peut y arriver.

ROMAIN DESARBRES
Alors, qu'est-ce qui pourrait changer ? Qu'est-ce qu'il faudrait mettre en place ? Comment ça se passe dans les établissements où il y a l'interdiction effective ?

ALEXANDRE PORTIER
Il y a plusieurs types de solutions qui ont été testées et c'est ça qui est intéressant. Il faut écouter le terrain. J'y suis très attaché. On a des solutions qui passent par la mise en place de casiers, des solutions qui passent par la mise en place tout simplement de pochette plastique. Et puis, certains établissements font appliquer la sanction. Et ces trois solutions produisent des résultats. Mais tout n'est pas qu'une question de normes administratives, de décrets. C'est d'abord une question de cap. Et je vois bien que, en cette rentrée, on a beaucoup d'établissements qui se demandaient jusqu'où on allait aller en la matière. Moi, je le dis très clairement, il faut qu'on aille jusqu'au bout et qu'on puisse mettre en œuvre cette interdiction au plus tôt.

ROMAIN DESARBRES
Quelles sont vos remontées… les remontées de terrain ? C'est-à-dire qu'on voit des élèves avec un téléphone portable à partir de quel âge ? En quelle classe ?

ALEXANDRE PORTIER
Pendant longtemps, on en voyait au lycée. Puis, petit à petit, au collège, avec notamment un palier important à l'entrée en sixième, quand on a un peu plus de temps de transport à faire, etc. On en voit maintenant à l'école primaire. Et donc, l'interdiction, là, qu'on doit mettre en œuvre, celle qui est inscrite dans la loi, elle porte sur l'école primaire, sur le collège, et c'est un chantier immense. Et le grand palier qu'on doit accomplir, c'est qu'on n'ait plus de jeunes demain, qui passent en sixième avec cette habitude du téléphone, qu'on arrive à les recentrer sur les apprentissages, sur le lien avec l'enseignant qui est le geste pédagogique par excellence. J'ai un clin d'œil, ce matin, pour tous les enseignants de France qui y travaillent dur ; et puis, évidemment, arriver à les recentrer sur la relation à l'autre. Parce que quand on va à l'école, c'est aussi pour rencontrer des camarades, pour taper le ballon dans la cour d'école, pour arriver à avoir des échanges sur tout ce qui se passe à cet âge-là.

ROMAIN DESARBRES
Évidemment. Donc, si je vous suis, si d'un coup de baguette magique, vous pouviez interdire le portable à l'école, il serait interdit dès qu'on franchit la grille du lycée, du collège, de l'école primaire ? Même dans la cour de récréation ?

ALEXANDRE PORTIER
Je vais vous prendre un exemple sur ce qui a été mis en place, par exemple, dans un collège du Rhône. Très concrètement, on a l'établissement qui a acquis des pochettes plastiques, qui récupère, le matin avec les surveillants, les téléphones portables, et les élèves ne l'ont pas pendant la journée, ils les récupèrent à la sortie. Ça permet aux jeunes d'être totalement investis dans ce temps d'apprentissage qui est absolument nécessaire.

ROMAIN DESARBRES
Donc, à partir de quand vous allez… entre guillemets, et quelle va être votre méthode ? Et à partir de quand vous allez mettre la pression sur les proviseurs, les directeurs d'école, pour qu'ils soient sensibilisés à votre combat, pour la pause numérique ?

ALEXANDRE PORTIER
Ce que je souhaite, c'est que vraiment on puisse y aller le plus tôt possible, parce que je pense qu'il y a une urgence nationale. On parle de la santé de nos jeunes. C'est une mission sur laquelle on n'a pas le droit de faillir, et qu'on y aille le plus tôt possible, en étant le plus pragmatique possible. Il y a des solutions à mettre en place. Il y a aussi des questions auxquelles il faut répondre pour les enseignants. Il y a des interrogations, il y a des doutes. Tous ceux qui l'ont testé nous font des bons retours. Il faut que cette parole-là, on puisse la mettre sur la table, la partager, et comme beaucoup de Français, je ne comprendrai pas qu'on ne soit pas en mesure de la mettre en œuvre au plus tard à la rentrée scolaire 2025.

ROMAIN DESARBRES
Écoutez, c'est une mesure qui va faire parler, en tout cas. Il y a certains de mes confrères qui vont vous interroger, comme moi ce matin, pour demander comment allez-vous faire, quelle va être votre méthode. Et c'est un dossier qui va être suivi sur Europe1, évidemment, et CNEWS.
Je voulais vous parler également du niveau scolaire en France. Vous êtes le ministre délégué à la Réussite scolaire, Alexandre PORTIER, invité ce matin de « la grande interview » CNEWS/Europe1. De nombreux parents sont inquiets parce que le niveau scolaire des enfants baisse. Ça veut dire qu'une partie de la population ne saura pas bien lire, ne saura pas bien écrire, ne saura pas bien compter, ne saura pas bien réfléchir. C'est tout un pays qui en pâtit. Quel est votre diagnostic sur cette baisse du niveau scolaire déjà ?

ALEXANDRE PORTIER
On vit un effondrement national…

ROMAIN DESARBRES
A ce point ? Un effondrement national du niveau scolaire ?

ALEXANDRE PORTIER
Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt. Quand on a un tiers des enfants de ce pays qui sortent de l'école primaire sans savoir lire et écrire correctement, c'est une faillite collective, tout simplement. On ne peut pas dire autre chose. Quand on a les plus mauvais classements PISA en 2023 de toute notre histoire ; personne ne peut dire que c'est une victoire. C'est un échec collectif. Et donc, il est impératif qu'on redresse la barre. Pourquoi ? Déjà pour nos jeunes. Pour leur permettre d'être autonomes, c'est à ça que sert l'école, permettre à des jeunes de se construire, de se construire en capacité de saisir toutes les opportunités de la vie. Aussi pour répondre aux défis économiques du pays. Je suis en charge du lycée professionnel. On a besoin du lycée professionnel pour répondre aux enjeux de souveraineté énergétique, économique, industrielle. Et donc, la priorité, c'est qu'on puisse redresser le niveau.

ROMAIN DESARBRES
Ces élèves qui lisent mal se retrouvent désormais en fac. Une prof professeure de droit au Mans dit que certains de ses élèves ne savent pas décrire un cas simple. Ça veut dire quelles formes de futurs policiers, de futurs avocats, de futurs commissaires-priseurs, toutes les professions du droit qui ne savent pas décrire un cas simple, qui ne savent pas écrire, qui ne savent pas le sens des mots.

ALEXANDRE PORTIER
C'est dramatique et inquiétant. Mais c'est aussi le reflet de tout un tas de décisions délirantes qu'on a pu voir ces dernières années. Et notamment, le redoublement peut aussi avoir pour vertu de rattraper des élèves et de leur permettre de consolider des acquis plutôt que de les laisser croire qu'ils vont y arriver.

ROMAIN DESARBRES
Il faut le retour du redoublement ?

ALEXANDRE PORTIER
Oui, il faut. Et il faut surtout que ce redoublement soit confié et soit positionné entre les mains de ceux qui savent ce qu'est l'éducation, c'est-à-dire les enseignants, les chefs d'établissement.

ROMAIN DESARBRES
En règle générale, il n'y a jamais eu autant de vacances en France. 15 jours à la Toussaint, après les deux mois de l'été. Il va y avoir 15 jours à Noël, 15 jours en février et 15 jours à Pâques. Est-ce qu'il n'y a pas un problème de temps de travail ?

ALEXANDRE PORTIER
Sur ce sujet, il faut vraiment qu'on se dise tout. Et tout ça veut dire que, si on regarde bien, les élèves français sont parmi ceux qui travaillent le plus en Europe aujourd'hui. La question n'est pas tant le niveau ou le nombre d'heures que la manière dont on travaille. Et la refonte, la remise à plat des agendas de nos élèves est une priorité pour faire qu'ils soient plus orientés et sur les matières fondamentales, par exemple le matin et avec de l'activité, plus de culture l'après-midi. Beaucoup de pays ont fait ce choix-là et on voit les résultats à l'arrivée.

ROMAIN DESARBRES
Oui, mais il n'y a pas un temps de travail également à la maison, j'allais dire. Parce que quand on se met la tête entre les mains devant ces livres, on apprend, les élèves ne sont pas plus idiots aujourd'hui qu'il y a cinquante ans, donc, il y a du temps à son bureau, devant un livre, devant les livres de mathématiques, de Français ?

ALEXANDRE PORTIER
C'est là que ça rejoint la question du téléphone portable. Aujourd'hui, les jeunes passent 5 h 30 par jour sur les écrans et sur le téléphone portable en particulier. Est-ce que vous croyez que ça laisse du temps après pour aller lire, pour aller voir des spectacles, voir des épisodes de théâtre, pour simplement échanger avec les autres ?

ROMAIN DESARBRES
À force de ne pas évaluer, on ne sait pas quel est le niveau des élèves. Il y a une vraie réticence des professeurs à évaluer le niveau des élèves. Comment vous l'expliquez ? C'est purement démagogique ? C'est purement idéologique, plus précisément ?

ALEXANDRE PORTIER
On a aujourd'hui plus d'évaluations. Mais la question n'est pas seulement là pour moi. Il s'agit aussi qu'on puisse redonner toute leur force au diplôme, et je pense notamment au brevet. C'est pour ça que la réforme du brevet est importante. Il faut que ce brevet, il veuille dire quelque chose et que ce soit un véritable sas qui conditionne l'entrée au lycée.

ROMAIN DESARBRES
Mais sur l'évaluation du niveau des élèves, pour savoir quel est le niveau des élèves, il faut les évaluer. Et plus on est évalué, plus on voit le niveau évoluer. On peut réagir s'il baisse et, accessoirement, se satisfaire s'il augmente. Est-ce qu'il faut plus souvent évaluer le niveau des élèves ?

ALEXANDRE PORTIER
Il y a déjà plus d'évaluations. Ce qu'il faut, c'est aussi qu'on puisse retirer toutes les leçons et quand on fait des évaluations, ça puisse après se traduire dans des gestes pédagogiques au niveau de la classe et aussi dans des améliorations sur la formation de nos enseignants, c'est quand même l'un des chantiers dont on ne parle jamais, alors qu'il est absolument fondamental.

ROMAIN DESARBRES
Oui. Alexandre PORTIER, ministre en charge de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel. Le Conseil scientifique de l'éducation a constaté que les élèves de sixième avaient de grandes difficultés en fractions, des divisions, des fractions. Exemple, la moitié d'entre eux, la moitié des élèves de sixième ne savaient pas lorsqu'on les a testés, à la question : combien y a-t-il de quarts d'heure dans trois-quarts d'heure ? On se demande si c'est un problème de mathématiques ou de Français, là.

ALEXANDRE PORTIER
C'est effrayant et c'est sans doute les deux à la fois, c'est un problème de logique. Le français et les maths sont logiques dans les deux cas. Mais derrière, il faut comprendre ce que ça implique pour le pays, ce n'est pas qu'une question scolaire, c'est vraiment l'avenir du pays qui est en jeu. Le premier défi qu'on a aujourd'hui, c'est d'arriver à se nourrir dans un pays, à se loger, arriver à faire tourner notre économie, arriver à répondre aux défis du siècle. On manque, par exemple, d'ingénieurs dans ce pays, il nous manque 30 % d'ingénieurs pour arriver à apporter tous les projets de développement de la France. Et si on n'est pas capable d'avoir des élèves au niveau en maths, on ne pourra pas relever ce défi de souveraineté nationale.

ROMAIN DESARBRES
Je voulais vous entendre également sur la laïcité. En deux ans, les atteintes à la laïcité ont été multipliées par deux. Ce sont vos chiffres. Comment vous expliquez cette hausse des atteintes à la laïcité ? Est-ce qu'il y a trop de laxisme politique, trop de petits renoncements ? Comment voyez-vous les choses ?

ALEXANDRE PORTIER
Je crois qu'il y a deux choses qui sont liées. Premièrement, on a des provocations de plus en plus fortes contre la laïcité et contre ceux qui doivent la défendre dans les établissements. Et puis, ensuite, on voit qu'à chaque fois dans notre histoire que nos dirigeants ont eu la main qui tremblait, ont eu des hésitations, deuxièmement, ce sont nos enseignants qui l'ont payé très cher dans les établissements et sur le terrain. Je pense notamment à la période qu'on a vécue entre 1989, l'affaire du Waldeckreil, et 2004. Au moment où il y a eu la loi, la suite a été beaucoup plus claire dans les établissements.

ROMAIN DESARBRES
Cette réalité, vous avez décidé de vous y attaquer à bras-le-corps, plus de fermeté. Il faut enfin regarder les choses en face, c'est ça qui va faire bouger les choses ?

ALEXANDRE PORTIER
Il faut qu'on sorte du déni et il faut qu'on arrête le pas de vague et les premiers à le demander, ce sont d'abord ceux qui sont en première ligne : les surveillants, les enseignants, tous les personnels de proximité, les chefs d'établissement qui ont besoin de ce soutien total de l'institution. Un Ministre, c'est d'abord un serviteur, étymologiquement, on est là pour appuyer tous ceux qui, sur le terrain, portent cette belle mission de l'école.

ROMAIN DESARBRES
Ça, c'est capital, parce qu'en fait, ce sont les valeurs de la République dont on parle.

ALEXANDRE PORTIER
L'école, c'est le ciment républicain, c'est le lieu où on arrive à comprendre, pour un enfant, ce qu'est une Nation, ce qu'est un pays, ce qu'est son histoire, c'est là qu'on arrive à construire le collectif. Il ne faut jamais l'oublier, l'école, c'est le premier service public de France. Il y a beaucoup plus d'écoles dans ce pays que de mairies et c'est là qu'on apprend ce qu'est une Nation.

ROMAIN DESARBRES
Je voulais vous entendre également sur cette information révélée par Europe 1. Une institutrice du Gard à Alès a été mise en examen pour violence sur des élèves. Elle aurait notamment volé le goûter des enfants. Ça, c'est... Ça marque, ça frappe. Que savez-vous de ce qui s'est passé ?

ALEXANDRE PORTIER
Il y a une procédure en cours et vous comprendrez la prudence sur le sujet. Pour autant, je voudrais quand même réaffirmer un principe qui est important, c'est que quand des parents nous confient leurs enfants à l'école, ils nous confient, par définition, ce qu'ils ont de plus précieux. Il faut évidemment que tous nos agents soient d'une exemplarité totale et qu'on soit aussi d'une fermeté totale sur les sanctions en cas de manquement.

ROMAIN DESARBRES
Beaucoup de parents mettent leurs enfants dans le privé, car les professeurs y sont moins souvent absents. On se souvient évidemment d'Amélie OUDEA-CASTERA, qui y avait fait référence lors de son entrée au ministère de l'Éducation, ça avait fait beaucoup parler. Les élèves sont mieux tenus dans le privé, c'est ce qu'on entend également. Je voulais avoir votre avis. Est-ce que c'est un exemple à suivre, tiens, l'école privée ?

ALEXANDRE PORTIER
Moi, je n'aime pas quand on oppose public et privé. J'ai été dans les deux systèmes.

ROMAIN DESARBRES
Certains parents le font et vont vers le privé.

ALEXANDRE PORTIER
Je connais les qualités des deux systèmes. J'ai été dans une école communale, j'ai eu un lycée privé. Je n'ai pas de gêne à en parler. Ce qui me semble important, c'est qu'on arrive à tirer les bonnes initiatives des deux côtés. Et ce matin, j'ai une pensée vraiment pour les enseignants qui, à tous les niveaux, quels que soient les territoires, et parfois dans des territoires difficiles, où la mission d'enseignement n'est pas aisée, se battent et nous permettent d'avoir de très beaux résultats.

ROMAIN DESARBRES
Mais comment vous expliquez que dans le privé, il y a moins d'absences des profs ? Comment ça s'explique ?

ALEXANDRE PORTIER
Le modèle est différent. Il y a, par définition, dans le privé, un choix d'adhésion à un établissement, à un projet pédagogique, mais c'est pour ça qu'on ne peut pas tout à fait comparer les deux modèles. Il y a des qualités dont on doit s'inspirer, mais le public, et je suis un enfant du service public, j'ai enseigné dans le public, je suis profondément attaché, a aussi des vraies forces et il tient une mission scolaire dans ce pays qui est absolument fondamentale. Et il faudrait aussi qu'on arrête un peu l'école bashing en permanence. L'école française est quand même admirée à bien des égards aussi dans le monde entier.

ROMAIN DESARBRES
Je voulais vous parler des violences aux mineurs. On constate une hausse du nombre de mineurs mis en cause pour violences graves, des jeunes totalement sortis du système scolaire. Qu'est-ce que ça vous inspire ? Est-ce que ça veut dire que notre système judiciaire est dépassé pour cette ultra-violence juvénile ?

ALEXANDRE PORTIER
Vous l'aurez compris, on n'est plus dans une question scolaire. Moi, e qui m'avait beaucoup frappé en juin-juillet 2023, quand il y avait eu les émeutes, c'est qu'on expliquait que c'était la faute de l'école, que l'école n'en faisait pas assez. On est dans les problématiques d'autorité familiale et aussi judiciaire. Il faut d'autres dispositifs que l'école pour traiter ces situations-là, ces cas-là, avec fermeté, avec aussi humanité, parce qu'un jeune n'est jamais condamné à reconduire en permanence ses erreurs ou ses fautes.

ROMAIN DESARBRES
Alexandre PORTIER, invité de la grande interview CNEWS-Europe1, ministre en charge de la réussite scolaire et de l'enseignement professionnel. Merci beaucoup d'être venu.

ALEXANDRE PORTIER
Merci beaucoup.

ROMAIN DESARBRES
Ce matin sur CNEWS et sur Europe 1. Bonne journée à vous, à bientôt.

ALEXANDRE PORTIER
Merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 octobre 2024