Texte intégral
Mon Colonel,
Mon Commandant,
Mesdames et messieurs les officiers, sous-officiers et militaires du rang,
Je suis heureuse et honorée de vous retrouver ici, sur ce camp de Tapa que je connais. J'y étais venue en novembre 2021, lorsque j'étais vice-présidente de la Commission de la Défense et des forces armées à l'Assemblée nationale et que je rédigeais mon rapport sur la préparation à la haute intensité. Ici, j'ai pu profiter de l'éclairage et des avis des soldats qui vous ont précédés pour nourrir mon rapport, et je vous assure que lorsque la guerre en Ukraine a éclaté trois mois plus tard, vos prédécesseurs avaient anticipé beaucoup de ce qui s'est passé.
C'est pourquoi, dès ma renomination, je me suis portée volontaire auprès du ministre des armées Sébastien Lecornu afin de revenir ici pour partager avec vous ce réveillon de la Saint-Sylvestre.
Je suis certaine que je garderai longtemps le souvenir de ce moment marquant, pas seulement parce que c'est mon premier déplacement après avoir retrouvé mon ministère, mais surtout parce que ce moment est fort et chaleureux. J'espère qu'il en sera de même pour vous.
Je voudrais commencer par remercier nos partenaires et amis Estoniens. Notre présence sur cette base, la plus grande du pays, est l'illustration que l'histoire qui relie l'Estonie, la France et nos partenaires européens et otaniens est en perpétuel développement. Et, alors que la démocratie recule parfois aux marges de l'Europe, comme ailleurs dans le monde, je me réjouis de pouvoir compter à la fois sur nos alliés présents dans le camp ; et sur vous, les soldats de la mission Lynx, qui veillez aussi à la sécurité du Vieux Continent.
Car c'est le propre de nos armées et des soldats qui les composent, d'être engagés partout dans le monde au service de la liberté, de nos valeurs fondamentales et de nos intérêts, dans le respect de nos alliances et du droit international. Et c'est bien ce que vous faites ici, aux côtés de nos partenaires européens et otaniens. Vous êtes là où sont nos responsabilités. Et je le suis avec vous, tant pour vous exprimer la reconnaissance de la Nation que pour constater la réalité des conditions de votre mission.
Vous, soldats de la mission Lynx, manifestez la cohésion de l'alliance qui unit les pays de la vieille Europe entre eux et avec nos alliés de l'Otan. Surtout, vous incarnez la solidité de nos armées.
J'ai une confidence à vous faire : je n'ai pas été surprise de ce qui m'a été présenté cet après-midi car je connais vos qualités.
Elles sont celles de vos régiments, de vos unités et de vos services : de soldats marqués par leurs histoires, leurs traditions et leurs engagements antérieurs.
Elles sont aussi celles de chacun d'entre vous, du colonel au dernier arrivé, car dans la chaîne que vous formez, chaque maillon compte et doit tenir. Pour lui et pour le groupe. Et bien sûr, le ministère des Armées fait partie de cette chaîne que vous formez, car pas une minute ne passe sans qu'il ne se soucie de celles et ceux qui font honneur aux armes de la France.
Alors que la guerre n'est pas loin, qu'elle rode aux frontières ou ravage des pays, en Afrique, au Moyen-Orient ou, plus proche, en Ukraine, vous êtes appelés à vous tenir prêts. Prêts à intervenir sur court préavis, dans la sous-région, pour protéger nos ressortissants et tenir les engagements de la France auprès de nos partenaires.
Car ici, en Estonie, dès lors que vous êtes descendus de l'avion, que vous avez posé le pied sur le tarmac de l'aéroport, vous êtes devenus les sentinelles de l'Est. L'Europe toute entière vous regarde, avec admiration, confiance et gratitude, car elle compte sur vous.
Cette mission est délicate, elle demande à la fois une vigilance permanente et une coopération efficace avec les autorités du pays qui nous accueille.
Dans cette mission qui est la vôtre, c'est par l'entraînement que vous devez apporter la preuve, chaque jour, de votre préparation et de votre opérationnalité. C'est par celui-ci que vous êtes en mesure de vous projeter avec rapidité et efficacité à la moindre alerte, face à la première menace. C'est aussi par celui-ci que l'interopérabilité avec nos partenaires otaniens se renforce chaque jour. Vous créez ainsi, exercice après exercice, des liens indéfectibles entre les forces armées de nos différents pays.
Ce qui me frappe en vous rencontrant ici, c'est la fraternité d'armes qui vous unit, par-delà vos grades et vos unités. Et que vous étendez désormais à vos frères d'armes européens. Oui, l'union fait la force. C'est une formule qui, malgré son usage répété, ne perd pas de sa vérité.
Je sais que votre engagement, ici en Estonie, constitue un entraînement dense et intense. Mais je sais aussi que vous pouvez en être fiers. Et je pense que, lorsqu'il sera l'heure pour vous de repartir en France, malgré le froid, vous emporterez avec vous d'heureux souvenirs de votre passage au camp de Tapa. Il y a le devoir et la mission, bien sûr, et il y a la camaraderie, la vie dans ce camp, et plus largement la vie dans ce pays de l'Est qui, pour beaucoup de Français, demeure bien loin.
Voilà, la soirée s'avance, et en France où sont les familles d'un grand nombre d'entre vous, à quelques heures du nouvel an et bien plus pour ceux dont la famille est en outre-mer, les préparatifs s'achèvent et les soirées commencent. J'espère que vous avez pu appeler vos proches ou que vous le ferez tout à l'heure.
Mes pensées sont donc aussi tournées vers vos conjointes et vos conjoints, vers vos enfants, vos parents, frères et soeurs, vos amis. Vers tous ceux avec lesquels vous ne passez pas ces fêtes parce que votre devoir vous a appelé loin de vos foyers. Il y aura sans doute un peu de tristesse : une place à table qui n'est pas occupée, les cris de joie des enfants que vous n'avez pas entendus quand ils ont ouvert leurs cadeaux le soir de Noël.
Je sais ce que vivent vos familles et ce que nous leur devons pour que vous puissiez accomplir sereinement votre mission. C'est pour cela que la loi de programmation militaire s'est accompagnée d'un important plan famille 2 que le Président de la République Emmanuel MACRON a demandé au ministre des Armées Sébastien LECORNU de déployer.
C'est aussi pour cela que nous travaillons à améliorer les conditions de vie des militaires, à simplifier les relations avec votre administration.
Le ministre des Armées m'a également confié la mise en oeuvre et le suivi du Plan d'accompagnement des blessés et de leurs familles. Pour simplifier les prises en charge et les démarches administratives. Pour mieux réparer les préjudices subis.
Et aussi pour reconnaître enfin pleinement la réalité des blessures psychiques. Comme je n'ai eu de cesse de le faire pendant deux ans, je vais m'assurer que ce plan reste vivant, en vérifiant régulièrement que les mesures sont bien adaptées, et que leur mise en oeuvre ne rencontre pas d'obstacle. Je veux que ce plan puisse être amélioré après chaque retour d'expérience qui ferait naître une bonne idée ou qui corrigerait un dysfonctionnement.
Vous le voyez, ce plan est destiné à nous assurer que lorsqu'un militaire est blessé, il n'a pas à mener un combat de trop contre l'administration, mais qu'il peut se concentrer sur l'essentiel : se soigner.
Vous le savez, comme Ministre déléguée auprès du ministre des armées, je suis plus particulièrement chargée de la mémoire et des anciens combattants.
A ce dernier titre, je suis attachée à faire connaître à nos concitoyens, à notre jeunesse, les engagements contemporains de la France. Pour renforcer le lien armées-Nation. Et vous en écrivez une page.
Je crois à la nécessité de partager l'ampleur et la singularité de votre engagement. Il nous faut recueillir et promouvoir davantage le témoignage des soldats engagés dans les OPEX ou dans des missions opérationnelles hors de nos frontières.
Avec vous, nous devons construire un récit collectif que nous pourrons alors transmettre aux générations futures. Connaître ce récit nous grandit comme citoyens.
Il faut pour cela que la société soit prête à entendre ce qui aura été votre histoire, à comprendre au nom de quelles valeurs votre engagement dans différentes missions a été rendue nécessaire.
Il faut pour cela que la reconnaissance et l'estime de la Nation se manifestent, et je veillerai à ce que ce soit davantage encore le cas lors des cérémonies patriotiques, que nous voulons réinventer.
Soldats, soyez fiers de votre mission et de votre engagement au service de nos valeurs et au service de la République, comme je suis fière d'être avec vous ce soir.
Le moment est venu pour moi de vous présenter mes voeux pour l'année qui va débuter tout à l'heure. Des voeux de réussite dans votre mission, pour le succès des armes de la France. Des voeux d'épanouissement dans l'accomplissement de votre mission. Et des voeux plus personnels aussi de bonheur individuel, pour vous et vos proches.
Le réveillon se passe traditionnellement en famille ou entre amis. Considérez comme moi que nous sommes un peu les deux ce soir, et abordons le reste de la soirée dans la chaleur de la simplicité et de la bonne humeur.
C'est aussi au nom de cette simplicité que j'invite les plus courageux ou les plus matinaux d'entre vous à se joindre à moi et à mon cabinet pour une petite course à pied demain matin.
Il est maintenant temps de conclure. Permettez-moi de me faire votre porte-parole pour remercier toutes les équipes de restauration, qui nous ont concocté ce repas, et tous ceux qui ont organisé cette belle soirée.
Et sur ce, la main dessus, pour la suite du réveillon !
Source https://www.defense.gouv.fr, le 7 janvier 2025