Texte intégral
JEFF WITTENBERG
Bonjour François REBSAMEN.
FRANÇOIS REBSAMEN
Bonjour Jeff WITTENBERG.
JEFF WITTENBERG
Merci d'être avec nous ce matin. Comment le Socialiste que vous êtes, puisque c'est votre parti d'origine - vous nous direz d'ailleurs si vous y êtes toujours - réagit-il à ce qui s'est passé hier à l'Assemblée nationale ? Je le rappelle, une motion de censure votée par une partie de la gauche, les Insoumis, les Ecologistes et les Communistes, mais refusée par l'immense majorité des députés socialistes. Est-ce que c'est le début d'un nouveau paysage politique pour vous ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Si vous me le permettez, trois mots pour dire quand même quelle est la chance ce matin peut-être de voir l'horizon s'éclaircir quelque peu. D'abord, la trêve à Gaza annoncée, confirmée ; un espoir pour beaucoup, beaucoup de Français, d'Israéliens et de Palestiniens. Ça, c'est la première chose. La deuxième, vous venez de l'indiquer, c'est évidemment le non-vote de la censure avec une partie, une grande, une immense majorité des socialistes qui se détachent, 8 sur 66. Donc on voit bien que l'immense majorité des socialistes présents à l'Assemblée…Bien sûr. Et puis, troisièmement, permettez-moi de dire quand même l'adoption de mon budget des collectivités locales au Sénat.
JEFF WITTENBERG
On va y venir.
FRANÇOIS REBSAMEN
Alors, vous me posez la question sur les socialistes. Moi, je suis très heureux de voir que les socialistes ont pris leur responsabilité et ont accepté la main tendue de François BAYROU. On n'en parle peut-être pas assez, mais il y a une main tendue. Il y a des socialistes qui ont des revendications, qui les exposent. Et puis, il y a le Premier ministre qui répond par une lettre et qui leur dit voilà ce que je réponds à vos propositions. C'est ça, la démocratie. C'est l'échange. C'est la recherche du compromis.
JEFF WITTENBERG
Monsieur REBSAMEN, vous avez entendu aussi le numéro 1 socialiste. Il a été clair. Les Socialistes peuvent à nouveau censurer à tout moment et ils restent dans l'opposition. C'est clair et net, dans ce que dit en tout cas Olivier FAURE.
FRANÇOIS REBSAMEN
Bien sûr, ils ne font pas partie, mais cela a été bien décrit par…
JEFF WITTENBERG
Vous leur dites qu'il faut aller plus loin ? Qu'est-ce que vous leur dites ? Est-ce que vous dites que vous êtes toujours parti socialiste ? Vous avez toujours votre carte.
FRANÇOIS REBSAMEN
Je leur dis continuons de discuter, continuons de discuter, continuons de débattre. Faites des propositions et nous accepterons, - je parle du Gouvernement - celles qui semblent aller dans l'intérêt des Français. C'est ce qui a été fait. Augmentation de l'ONDAM. Un certain nombre de dispositions, notamment la suppression, la fin des 4 000 postes dans l'éducation nationale, cette suppression. Bon, donc des réponses ont été apportées et il y aura peut-être de nouvelles demandes qui seront faites et on les étudiera. C'est ça le débat, le compromis.
JEFF WITTENBERG
Vous avez occupé des fonctions éminentes au sein de ce parti. Est-ce que vous dites à Olivier FAURE et à la direction du PS aujourd'hui : " allez plus loin et rejoignez-nous " ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je ne me permets pas de leur dire ça. Je leur dis, je salue le courage qu'ils ont eu hier de prendre cette position. Je souhaite que ce débat avec le Gouvernement continue, que la main tendue soit toujours acceptée. C'est l'essence même - je veux le redire comme ça - de la démocratie que de chercher des compromis, de chercher à avancer ensemble. Vous savez, c'est une des tares du scrutin majoritaire. Dans le temps, à 51%, on avait tout ; à 49, on n'avait rien. C'était violent. Et ça nous empêchait de passer ces compromis. Maintenant, on peut le faire.
JEFF WITTENBERG
Vous avez toujours… Puisque vous ne m'avez pas répondu ; vous avez toujours votre carte au Parti Socialiste ?
FRANÇOIS REBSAMEN
J'ai créé un parti qui s'appelle la Fédération progressiste et je suis membre de ma section à Dijon, voyez-vous, dont j'ai été maire pendant si longtemps, du Parti Socialiste.
JEFF WITTENBERG
Donc vous êtes toujours au Parti Socialiste techniquement, comme on dit.
FRANÇOIS REBSAMEN
Oui, bien sûr.
JEFF WITTENBERG
Vous parliez à l'instant de tout ce qui a été finalement, non pas cédé, mais discuté et finalement adopté grâce à une discussion avec le Parti socialiste. Mais tout cela a un coût. Comment on va compenser effectivement la non-suppression des emplois des enseignants, le passage de trois jours, le maintien d'un seul jour de carence ? Comment on va faire, dans ce budget, pour faire les économies qui, finalement, sont les mêmes que celles du temps du Gouvernement BARNIER ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Il faut faire des économies. La motion de censure, telle qu'elle avait été votée à l'époque et qui a fait chuter monsieur BARNIER, eh bien, elle n'a pas effacé d'un seul coup, vous en doutez, et la dette et le déficit. Et donc, elle reste là, cette dette. Et il faut la réduire progressivement. Je vais prendre l'exemple des collectivités territoriales. Elles étaient imposées à plus de 5 milliards d'euros par Michel BARNIER ; ce qui ne correspondait pas du tout à ce qu'attendaient les collectivités. Elles sont prêtes, les maires, les conseils départementaux, ils sont prêts à faire des efforts. Ils savent très bien qu'il y a une part, disons 7% de la dette nationale qui est portée par les collectivités locales. Donc ils s'attendent à faire cet effort parce que cet effort national doit être partagé mais à hauteur de ce qu'il représente dans la dette, c'est-à-dire par exemple 2 milliards, ce que j'ai fait adopter hier.
JEFF WITTENBERG
Ce que vous avez fait adopter au Sénat.
FRANÇOIS REBSAMEN
Grâce au Sénat, je voudrais le dire ici, grâce au Sénat qui s'est très bien comporté, qui a travaillé vraiment profondément.
JEFF WITTENBERG
Vous pensez comme François BAYROU qu'il y a - et c'est encore une source d'économie selon lui - trop d'agences en France pour accompagner l'action publique. Par exemple, il y a l'ADEME, l'agence pour l'environnement qui est ciblée régulièrement par des élus de droite. Est-ce que vous êtes sur cette ligne vous aussi ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Il faudrait, et je crois que ça va être fait, il faudrait faire une revue quand même de l'ensemble des agences qui existent en France. Il y a plus de 1 000 agences qui sont là.
JEFF WITTENBERG
Il faut supprimer, monsieur REBSAMEN ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je vous dis, on va faire la revue. Je ne propose pas de supprimer, mais il faut que chacun assume ses responsabilités. Les agences qui sont les opérateurs de l'État empêchent bien souvent les Françaises et les Français de savoir que l'aide qui leur est apportée au niveau local, en réalité, elle vient d'une décision gouvernementale. Et donc, les gens croient que c'est l'agence qui leur apporte. Non, c'est un opérateur de l'État. Donc il faut lister tout ça. Il faut qu'eux aussi s'appliquent les mêmes consignes que l'État, à savoir réduire leurs dépenses de fonctionnement.
JEFF WITTENBERG
Deux questions pour terminer cet entretien. Il nous reste deux minutes. Une question d'abord sur la retraite. Vous, en 2023, puisque les discussions vont s'ouvrir aujourd'hui, le conclave voulu par François BAYROU, vous aviez dit que ce n'est pas un bon choix d'aller à 64 ans et d'augmenter la durée de cotisation. Vous êtes toujours sur cette ligne ? Il faut revenir sur les 64 ans ? Réponse simple.
FRANÇOIS REBSAMEN
Oui, je vais essayer d'être le plus simple possible. Mais c'est brutal de passer comme cela par le 49.3 à la décision des 64 ans. Les partenaires sociaux - et c'est le gros problème - ont été écartés du débat sur cette modification de l'âge légal de départ à la retraite. Là, ils sont au travail. Et moi, j'attends beaucoup des partenaires sociaux. Je pense qu'on a cette chance en France de pouvoir avoir du dialogue social avec des organisateurs.
JEFF WITTENBERG
Il faut revenir sur les 64 ans ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Mais c'est eux qui nous le diront.
JEFF WITTENBERG
Mais vous, monsieur REBSAMEN, vous le souhaitez ? Vous avez un avis.
FRANÇOIS REBSAMEN
Je prendrai... Je laisse les partenaires sociaux. Je ne vais pas faire d'injonction aux partenaires sociaux. Je les laisse débattre. Je sais très bien que la CFDT a pris des positions. J'espère qu'avec Force ouvrière et la CGT, ils vont trouver des solutions. Et ils vont proposer des solutions. Et elles seront transposées à ce moment-là au Parlement. François BAYROU en a pris l'engagement.
JEFF WITTENBERG
François REBSAMEN, une déclaration - c'est notre dernière question - a fait couler beaucoup d'encre cette semaine. C'est lorsque vous avez dit que vous respectiez toutes les forces politiques sauf le RN. Les responsables du RN vous ont dit que vous ostracisiez finalement 11 millions d'électeurs. Et même la porte-parole du Gouvernement, Sophie PRIMAS, a dit que ce n'était pas l'avis du Gouvernement. Mais c'est toujours la vôtre ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Non. Ma position, elle est claire. Bien sûr que je respecte l'ensemble des votes des Français. Je respecte la représentation nationale. Mais je combats depuis toujours la xénophobie, le racisme et l'antisémitisme. Et ça ne va pas s'arrêter aujourd'hui.
JEFF WITTENBERG
Mais vous mettez tous les élus du RN dans cette famille-là ?
FRANÇOIS REBSAMEN
Je suis clair. Tant que les élus du RN ne portent pas ces discours de haine, de racisme, d'antisémitisme… Ils sont élus et je les respecte en tant qu'élus.
JEFF WITTENBERG
Vous les mettez finalement... Enfin, vous leur dites aujourd'hui que vous respectez finalement…
FRANÇOIS REBSAMEN
Je leur demande de ne pas porter ces idées de haine qu'ils ont portées bien souvent. C'est clair. Et je les combattrai, ces idées, bien évidemment. C'est l'histoire de ma vie, de les combattre.
JEFF WITTENBERG
Merci, François REBSAMEN.
FRANÇOIS REBSAMEN
Merci.
JEFF WITTENBERG
Ministre de l'Aménagement des territoires. Et c'est la suite de « Télématin ». Merci beaucoup.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 janvier 2025