Texte intégral
Je vous remercie d'avoir cité Jean Monnet. L'Europe traverse un moment charnière de son histoire. M. le Premier ministre l'a rappelé hier : elle fait face à une menace existentielle. La Russie d'aujourd'hui n'est pas celle qu'a connue le président Chirac ou même le président Hollande ni celle d'il y a cinq ou dix ans. Elle consacre 10% de sa richesse nationale et 40% de son budget à son industrie de défense. Elle produit autant d'équipements militaires que toute l'Europe réunie.
Trois ans après le début de sa guerre d'agression, la Russie continue de pilonner l'Ukraine parce qu'il y a onze ans, le peuple ukrainien a voulu suivre son aspiration européenne et qu'elle a décidé de l'en empêcher. Si nous nous mobilisons depuis trois ans aux côtés des Ukrainiennes et des Ukrainiens, c'est aussi parce que la Russie agresse la France ainsi que plusieurs de ses alliés européens.
Elle l'a fait en Roumanie en perturbant les élections présidentielles, ce qui a conduit à leur annulation ; en Pologne, en instrumentalisant les migrations pour perturber la vie politique nationale ; en mer Baltique, en sectionnant ou en faisant sectionner des câbles sous-marins ; en France, en menant des attaques cyber et informationnelles - nous avons tous entendu parlé des étoiles de David, des mains rouges, des cercueils, et cetera, et cetera.
C'est pourquoi, dans ce moment, nous avons besoin que l'Europe se réveille et se tienne aux côtés des Ukrainiennes et des Ukrainiens pour obtenir une paix durable, et non un simple cessez-le-feu que la Russie violerait comme elle l'a fait ces dernières années.
Rien qui concerne l'avenir de l'Ukraine et de l'Europe ne s'est décidé hier à Riyad, pour une bonne raison : seuls les Ukrainiens peuvent décider d'arrêter le combat. Croyez-vous vraiment et sincèrement qu'après trois ans durant lesquels ils ont tout donné pour défendre l'intégrité de leur territoire, ils déposeraient les armes parce qu'une discussion a eu lieu en Arabie saoudite ? Evidemment non !
Vous affirmez soutenir le peuple ukrainien et je vous remercie de le faire mais c'est un soutien du bout des lèvres. Or si nous voulons une paix durable, si nous refusons un cessez-le-feu fragile, une pause transitoire qui permette à la Russie de se réarmer pour reprendre les hostilités quelques semaines ou quelques mois plus tard - comme elle l'a déjà fait dans le passé -, alors il nous faudra lui opposer de la résistance et de la force.
Je veux vous rassurer : personne n'a parlé, ni en France ni nulle part ailleurs dans le monde, d'envoyer aujourd'hui des troupes en Ukraine. Lorsque le Premier ministre britannique évoque l'envoi de troupes, il ne l'envisage que lorsque la paix aura été trouvée, de manière à la garantir et à la consolider. Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie ; c'est la Russie qui agresse l'Ukraine depuis trois ans et qui nous agresse. Pour que cela cesse, il faut faire preuve de force et non pas de faiblesse.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 février 2025