Texte intégral
JOURNALISTE
Bonjour Véronique LOUWAGIE.
VERONIQUE LOUWAGIE
Bonjour.
JOURNALISTE
Soyez la bienvenue. Vous êtes la ministre déléguée chargée du Commerce, de l'Artisanat et des PME, et vous répondez aux questions de Daïko DOUY pour l'interview politique de la matinale.
DAÏKO DOUY
Bonjour madame.
VERONIQUE LOUWAGIE
Bonjour.
DAÏKO DOUY
Merci d'être avec nous. On va voir les conséquences des nouveaux droits de douane sur le commerce, les PME, qui sont vos missions ministérielles. Mais avant tout, une première question plus politique : comment réagissez-vous à la proposition de Laurent WAUQUIEZ, de placer les personnes sous OQTF les plus dangereuses en centre d'attention à Saint-Pierre et Miquelon ? C'est une bonne idée ou ça sort un peu de nulle part ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Vous savez, en qualité de ministre du Commerce, de l'Artisanat, des PME, de l'Économie sociale et solidaire, je suis complètement mobilisée pour conduire une politique économique ambitieuse et responsable au service des Français.
DAÏKO DOUY
Ça, ce n'est pas du tout une réponse à ma question.
VERONIQUE LOUWAGIE
Mais je ne suis pas là pour commenter, en qualité de ministre, les propositions de tel ou tel responsable politique.
DAÏKO DOUY
En qualité d'adhérente des LR qui va devoir se prononcer dans quelques semaines entre Bruno RETAILLEAU et Laurent WAUQUIEZ, que l'un des candidats porte cette proposition-là, vous ne pouvez pas nous dire, là, que vous n'avez rien à faire et que ça ne vous intéresse pas.
VERONIQUE LOUWAGIE
J'ai indiqué il y a quelques jours, quelques semaines, déjà, que ce n'est que je ne me prononcerai pas en faveur d'un tel ou tel candidat. Étant dans un Gouvernement avec Bruno RETAILLEAU, étant ancienne Députée, avec comme président de groupe Laurent WAUQUIEZ, je resterais, je dirais, éloignée de la ligne politique, de choisir l'un ou l'autre. Voilà. Moi, je suis complètement mobilisée pour répondre aux enjeux des Français, également en ce moment, parce qu'il y a des enjeux importants.
DAÏKO DOUY
On va y venir madame. Et plus vite, vous me répondriez, franchement, à ma question, plus vite, on viendra à l'autre sujet. Non, mais juste, est-ce qu'on est dans un cadre de surenchère, dans le cadre d'une campagne interne, où Laurent WAUQUIEZ, pour se distinguer de Bruno RETAILLEAU, fait des propositions les plus chocs possibles pour marquer l'actualité et les esprits ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Il y a une campagne, il y a deux candidats. Donc, chacun fait des propositions et c'est, effectivement, au travers de ces propositions, de recueillir probablement le maximum d'adhérents qui votera pour lui. Donc, je laisse les candidats évoluer dans leur campagne électorale. Il y a encore quelques jours, pour recueillir un certain nombre d'adhésions et ensuite un mois jusqu'à la campagne. Donc, je les laisse organiser leur campagne en restant un petit peu éloigné de celle-ci.
DAÏKO DOUY
Ce n'est pas de considérer qu'il y a deux Frances. Une France de l'outremer... qui accueillerait les OQTF les plus dangereux, et puis la métropole. C'est un peu ça qu'on reproche à Laurent WAUQUIEZ. Et c'est ma dernière question.
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, non. Il y a une France. Il y a la métropole, l'outremer. Il y a des vrais enjeux en outre-mer. Étant ministre de la Consommation, je m'occupe aussi de ces enjeux, parce qu'il y a des questions de pouvoir d'achat, il y a toutes les questions qui concernent Mayotte au regard des événements climatiques qu'il y a eu. Il y a des enjeux particuliers en outre-mer et il faut les prendre en compte.
DAÏKO DOUY
Et donc, ne pas maîtriser ces territoires, ce qui peut donner cette impression-là, de proposition.
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, effectivement. Il faut toujours être très attentif à ces territoires. On aurait tendance, quelquefois, à les oublier. Et je pense qu'il y a un effort très important fait depuis quelque temps pour les prendre en compte dans l'ensemble des politiques. Et c'est une bonne chose.
DAÏKO DOUY
C'est une forme de réaction, quand même, à la proposition de Laurent WAUQUIEZ. Enfin, on va venir à l'essentiel de ce pourquoi vous êtes là. Quelles peuvent être les conséquences de l'augmentation des droits de douane, de ces nouveaux droits de douane, sur le commerce ? Quand je parle du commerce, ce n'est pas les grands échanges d'import-export. C'est au quotidien, dans vos commerces de détail, dans vos grandes surfaces. Qu'est-ce que ça peut avoir comme conséquence ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Il est fort de constater que l'augmentation de ces droits de douane, c'est un choc majeur pour les Européens, pour les Français. Nous mesurons aujourd'hui que, probablement, ça aura un impact de quelques dixième de points sur le PIB. Donc, il y a ces augmentations qui vont produire des effets sur un certain nombre de produits. Les éléments les plus impactant, ce sont ces entreprises qui exportent aujourd'hui. Nous avons 28 000 entreprises qui sont fortement impactées. 40% d'entre elles exportent plus de 50% de leurs chiffres aux États-Unis. Donc, il peut y avoir une restriction, une diminution des volumes. Donc, cela peut impacter la croissance. Derrière, c'est l'activité de nos entreprises. Ce sont également les emplois. Et puis cela crée de l'incertitude aujourd'hui, au niveau des Français. Nous voyons l'impact sur la consommation. Nous voyons l'impact sur le niveau d'épargne. En février, il y a eu un niveau d'épargne très important en France. Donc, au niveau de la France, il s'agit de protéger les Français. Et cette protection, elle ne peut se faire qu'au niveau européen. Moi, je me réjouis, en tout cas, qu'il y ait une réponse européenne ferme, une unité et une réponse collective. Ça, ça me paraît très important au niveau de l'Europe.
DAÏKO DOUY
La semaine prochaine, vous réunissez le Conseil national du Commerce. C'est ça le nom de cette institution. Comme hier, il y a eu la réunion du Conseil national de l'industrie. C'est quoi le but de cette réunion ? C'est que les professionnels vous fassent remonter les premières difficultés qu'ils voient arriver ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui. L'important, c'est d'avoir des échanges fluides, qu'effectivement, ces professionnels nous fassent remonter leurs préoccupations. Les secteurs qui vont être le plus impactés, nous mesurons bien les impacts directs, indirects. Il peut y avoir également, en impact indirect, un certain nombre de flux commerciaux qui étaient destinés vers les États-Unis, qui se rapportent vers la France, qui déstabilise.
DAÏKO DOUY
Ça, ça peut être par exemple, des produits chinois qui viennent en France et qui déstabilisent.
VERONIQUE LOUWAGIE
Tout à fait.
DAÏKO DOUY
Mais peut-être, dans ce cas-là, ils peuvent tirer les prix à la baisse. Donc, le consommateur en profiterait ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, le consommateur en profiterait. Mais il faut aussi que nous protégions nos industriels, les circuits commerciaux. Donc, il est important de pouvoir écouter, échanger avec ces professionnels pour faire remonter. Vous savez, il y a une première liste, là, qui est retenue au niveau européen, pour faire état des droits de douane qui seront mis en place vers les États-Unis. Une deuxième liste est en cours de préparation. Et ça permet aussi d'alimenter la deuxième. Nous sommes là pour protéger les entreprises, les soutenir et les accompagner également, s'il y a des modifications, je dirai, à intervenir.
DAÏKO DOUY
Quand vous parlez de protection, c'est des protections financières. Est-ce qu'on peut imaginer que l'État crée des systèmes d'aide pour venir justement en aide à des entreprises qui seraient en difficulté ? Qu'est-ce que vous appelez par protection ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Pour protéger, il faut anticiper, faire un certain nombre de points. S'il y a des difficultés de trésorerie, cela peut exister, il faudra que nous prenions contact avec les organismes financiers : le système bancaire, voire avec BPI France. J'étais hier avec le président de la Fédération Française Bancaire. Donc, ce sont des travaux qui peuvent être conduits pour préparer et anticiper ces difficultés de trésorerie. Il peut y avoir aussi des risques de défaillance d'entreprises. Donc, il faut que nous anticipions et que nous ayons des éléments, en aval, pour réagir et mettre en place tous les outils qui sont à notre disposition.
DAÏKO DOUY
C'est quoi la grande crainte des acteurs du commerce ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Il y a une forme d'incertitude aujourd'hui, finalement. Nous mesurons difficilement les impacts. Quand il y a des augmentations des droits de douane, de l'ordre de 20% sur un certain nombre de produits, qui va supporter ces 20% ? Il y a probablement l'industriel qui exporte. De l'autre côté de l'Atlantique, il y a l'importateur. Il y a aussi des circuits dans le réseau de distribution, avec des grossistes, des distributeurs un peu plus individuels, particuliers. Puis il y a le consommateur. Donc, finalement, nous ne maîtrisons pas aujourd'hui l'impact dans la chaîne. Probablement que c'est le consommateur américain qui en supportera le plus. Mais l'industriel va en supporter peut-être une partie. Il y aura des réductions de volume. Donc, c'est l'incertitude qui existe. Nous ne connaissons pas très bien les impacts. Et ça, ça participe à une perte de confiance, à une diminution aussi de la consommation. Et tout ça a des répercussions au niveau économique.
DAÏKO DOUY
D'accord. Donc, ça, c'est une première prise d'information. La semaine prochaine, réunion du Conseil national.
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, voilà, mardi prochain.
DAÏKO DOUY
Alors, vous êtes experte comptable de profession ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Oui, c'est ça.
DAÏKO DOUY
Quand vous étiez députée LR, vous étiez spécialiste du budget. Voilà. Je pose la question à la ministre. Vous allez me dire que vous n'êtes pas ministre du Budget. Mais voilà, on considère que ça va avoir une conséquence de 0,5% sur le PIB, en moins, pour les Français. Est-ce qu'on va pouvoir avoir les mêmes objectifs budgétaires avec cette possible crise économique ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Le Premier ministre l'a rappelé il y a quelques jours. L'objectif, c'est de suivre cette trajectoire budgétaire pour nous amener à un déficit de 3% en 2029. Nous avons un déficit qui est prévu.
DAÏKO DOUY
Mais est-ce que c'est tenable, cette promesse-là, avec les conséquences de cette augmentation des droits douaniers ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Ça va nécessiter probablement des réajustements. Mais à chaque fois, vous savez qu'en fait, un budget en fin d'année ou en début d'année. Le budget doit être adapté à un certain nombre d'éléments qui viennent impacter. Des éléments qui ne sont pas forcément connus. Ils sont d'un impact moindre ou plus fort. Là, effectivement, il y a des impacts quand même forts. Il faudra s'adapter, réagir. Il y a déjà eu des mises en réserve qui ont été effectuées, à hauteur de 9 milliards d'Euros. Je sais que ma collègue en charge des Comptes publics, Amélie DE MONTCHALIN, travaille sur ce sujet. Nous travaillons, tous ministres de Bercy, pour, en tout cas, respecter une trajectoire budgétaire qui va aussi servir les Français. Nous ne pouvons pas rester avec un endettement de la nature et du montant qu'il est avec une charge financière relativement importante.
DAÏKO DOUY
Il vit bien le bloc central ? Parce qu'on voit qu'il y a des tensions entre les Républicains et des macronistes. Pas au niveau des ministres, hein. Au niveau des Députés, avec les meetings de ce week-end ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Alors, les meetings de ce weekend, ce sont : chaque formation politique porte ses engagements. Et je pense qu'on a toujours intérêt à pousser nos convictions.
DAÏKO DOUY
Vous êtes une LR qui travaille avec les macronistes, mais le bloc central, lui, derrière, se fissure un petit peu. Ça a l'air difficile en ce moment ?
VERONIQUE LOUWAGIE
Non, mais je crois que chacun a des points de vues, chacun a des convictions. Il s'agit de les porter. Nous ne pouvons pas renoncer à nos convictions, parce que ça, ça serait difficile... dans le temps. Donc, je pense qu'il faut porter orientations, les pousser, en faire état. Et puis ensuite, il y a une piste d'atterrissage où on se retrouve tous.
DAÏKO DOUY
Merci beaucoup madame, bonne journée à vous.
VERONIQUE LOUWAGIE
Merci à vous.
JOURNALISTE
Merci Madame la ministre, belle journée. Et on va vous libérer, parce que vous avez une réunion urgente, paraît-il. A 8 h 15, je vais vous laisser sortir, maintenant, de notre plateau. Merci et bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 avril 2025