Déclaration à la presse de M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, sur les relations entre la France et le Kurdistan et la situation au Proche-Orient, Erbil le 23 avril 2025.

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Circonstance : Audience auprès de M. Nechirvan Barzani, Président du Kurdistan d'Irak

Texte intégral

C'est une grande joie pour moi d'être aujourd'hui avec vous à Erbil pour mon premier déplacement en Irak, que je ne concevais pas sans une étape au Kurdistan. Et je veux vous remercier, ainsi que le président Massoud Barzani et le Premier ministre Masrour Barzani pour la chaleur de votre accueil, le témoignage de votre amitié.

Parce qu'il y a une amitié particulière qui lie la France et le Kurdistan, le peuple kurde et le peuple français. Depuis plus de 30 ans, nous avons développé des liens solides et fraternels fondés sur des combats communs et l'attachement à la liberté. C'est à l'initiative de la France que, le 5 avril 1991, le Conseil de sécurité des Nations unies adopta la résolution 688 qui jeta les bases d'une autonomie kurde en Irak.

Plus récemment, c'est le combat contre Daech qui a renforcé nos liens et je crois pouvoir parler d'une véritable fraternité d'armes. Nos soldats continuent de mener ce combat aux côtés des Peshmerga, des forces de sécurité irakiennes et des Forces démocratiques syriennes. Je veux saluer devant vous le courage, la vaillance et les sacrifices consentis par les Peshmerga.

Il n'y a pas de paix et de prospérité au Moyen-Orient sans la préservation du pluralisme dans la région. Je l'ai dit tout à l'heure au patriarche chaldéen, Mgr Sako, à qui j'ai exprimé la fidélité indéfectible de la France.

Aujourd'hui, à nouveau, je vous ai assuré, Monsieur le Président, ainsi qu'aux autorités régionales, dans leur pluralité, de la solidarité de la France et de l'esprit de dialogue qui nous animent.

Solidarité d'abord face à Daech, notre ennemi commun qui, malgré son affaiblissement, reste en mesure de frapper. Ni la France, ni le Kurdistan d'Irak, tous deux cruellement éprouvés dans leur chair par le terrorisme islamiste, ne peuvent risquer une remise en cause des acquis de dix ans de combats. Nous restons déterminés à apporter toute l'aide nécessaire à nos partenaires dans cette lutte.

Solidarité aussi face aux conséquences des conflits qui bouleversent toute la région. Les foyers de crise sont nombreux, de la guerre de Gaza aux tensions avec l'Iran, en passant par les conséquences de la chute de Bachar al-Assad et les défis de la transition syrienne. Et si Erbil a été frappé en son cœur durant l'année 2023 et en janvier 2024, l'Irak et la région autonome du Kurdistan sont globalement parvenus à se tenir à l'écart de ces tensions régionales. Elles contribuent aux tentatives d'apaisement.

Le dialogue politique et diplomatique que nous entretenons avec les autorités de la région autonome est précieux pour parvenir à apaiser la spirale néfaste initiée par le massacre terroriste du 7 octobre 2023. Je pense notamment à notre coordination étroite, M. le Président, pour appuyer les efforts du général Mazloum et de l'ensemble des forces politiques kurdes syriennes pour s'unir et peser positivement sur la transition en cours en Syrie, afin d'assurer qu'il soit garanti le pluralisme, les droits et les intérêts des Kurdes et de toutes les communautés syriennes et la poursuite du combat contre le terrorisme islamiste. Je m'entretiendrai tout à l'heure avec le général Mazloum à ce sujet.

Face à ces défis, la France reste convaincue que la vigueur des institutions démocratiques, dont le Kurdistan d'Irak offre un exemple dans la région, est une force. C'est tout l'enjeu des élections législatives qui se sont tenues dans la région autonome en octobre dernier et des élections législatives fédérales qui sont prévues à l'automne prochain. La France a soutenu et continuera de soutenir ces processus électoraux.

C'est tout l'enjeu également des discussions en cours en vue de la formation du gouvernement régional, ce qui permettra au Kurdistan d'être plus résilient face aux turbulences régionales.

C'est tout l'enjeu enfin du dialogue entre Erbil et Bagdad, dont la France estime qu'il peut renforcer l'unité de l'Irak, sa sécurité et sa prospérité, et donc également la sécurité et la prospérité de la région autonome en son sein.

Nous avons, Français et Kurdes, beaucoup à faire ensemble, Monsieur le Président. Notre action diplomatique et culturelle au Kurdistan se traduit par des réalisations concrètes quotidiennes.

Je suis venu vous redire notre attachement à cette relation et son renouvellement pour qu'ensemble, nous continuions à construire l'avenir. C'est là le sens de notre action pour appuyer la formation de la jeunesse avec l'Institut français d'Erbil, l'Institut français du Proche-Orient et les deux écoles françaises Danielle Mitterrand, à Souleimaniyé et Erbil. Ces établissements contribuent à la diffusion du français, de la culture et aux échanges étudiants et scientifiques.

Et nous œuvrons également au développement économique du Kurdistan à travers notre appui aux relations d'affaires. Une dynamique qui a été lancée avec le Forum économique France-Kurdistan qui s'est tenu en septembre dernier, sur laquelle nous avons capitalisé pour renforcer encore davantage nos liens économiques.

Voilà, Monsieur le Président, les sujets dont je souhaitais m'entretenir en confiance avec vous et les autorités régionales. Je l'ai fait dans l'esprit d'amitié, de solidarité et de fidélité qui définit nos relations, Français et Kurdes.

Merci encore pour votre accueil.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 avril 2025