Texte intégral
Monsieur le Ministre, cher Fouad Hussein,
Merci pour votre accueil chaleureux à l'occasion de ma première visite en Irak. C'est un plaisir et un honneur pour moi d'être ici aujourd'hui, et cela pour deux raisons notamment.
D'une part, parce que nos deux pays entretiennent des liens historiques et étroits d'amitié. La France n'a jamais cessé de se tenir aux côtés de l'Irak. Je pense tout particulièrement à notre opposition historique à l'occupation de 2003 et à la lutte contre le terrorisme. Ensemble, nous avons combattu et nous avons défait Daech.
D'autre part, c'est la deuxième raison, parce que l'Irak est en train d'écrire une nouvelle page de son histoire. L'Irak aujourd'hui n'est pas celui de 1990, ni de 2003, ni de 2014. Et la France veut se tenir résolument à ses côtés dans ce moment charnière, avec un principe directeur : soutenir l'Irak dans les choix souverains qu'il se fixe pour bâtir son avenir. C'est là tout le sens de l'accord de partenariat stratégique signé en janvier 2023 par le Président de la République et le Premier ministre al-Soudani.
Dans cet esprit, la France soutient tout d'abord l'Irak dans sa volonté d'exercer sa pleine souveraineté. Nous en sommes convaincus, un Irak fort et indépendant est source de stabilité pour toute la région, aujourd'hui menacée par le conflit qui s'est ouvert le 7 octobre et la poursuite des activités déstabilisatrices de l'Iran.
C'est la raison pour laquelle nous avons soutenu dès la première heure les conférences dites de Bagdad, format unique dans cette région fragmentée, qui regroupe autour de l'Irak les pays voisins arabes, la Turquie, l'Iran et les organisations régionales. Ces conférences consacrent le retour de l'Irak, pôle d'équilibre et de stabilité, son rôle moteur et son rang dans la région. Elles doivent permettre d'initier de nouvelles coopérations régionales et d'évoquer les crises du Moyen-Orient. Une nouvelle conférence de Bagdad doit se tenir bientôt - nous en avons parlé - en présence du Premier ministre irakien et du Président de la République. Dans un environnement régional bouleversé, ce format sera plus important que jamais pour favoriser la sécurité et la stabilité du Moyen-Orient.
Nous soutenons aussi la souveraineté irakienne, avec le développement de notre coopération militaire bilatérale, en renforçant les capacités opérationnelles des forces armées irakiennes. Nous travaillons également à accroître les formations pour les magistrats, la sécurité civile et les forces de police. La France contribue aux ambitions de diversification et de développement économique et industriel de l'Irak pour répondre aux besoins de la population. La stabilité du pays, la créativité de sa jeunesse donnent à l'Irak un fort potentiel. Nous encourageons les entreprises françaises à développer leurs relations commerciales, à investir en Irak, en recréant progressivement des liens qui s'étaient distendus entre les entreprises françaises et irakiennes.
Enfin, nous renforçons les liens qui existent entre nos deux peuples. La France s'engage auprès de la population irakienne dans toutes ses composantes. Nous voulons renforcer les liens entre les étudiants, les chercheurs, les artistes, les athlètes, les membres d'associations, et tous les acteurs de la vie politique, économique, sociale et culturelle irakienne.
Nous le faisons en nous appuyant sur la jeunesse irakienne, qui est l'une des plus grandes richesses de ce pays. Nous souhaitons développer nos partenariats universitaires, en particulier dans les domaines de l'ingénierie, de l'agriculture, de l'archéologie, avec un programme de bourses conjoint développé avec le ministère de l'enseignement supérieur. Nous le faisons en nous appuyant sur l'Institut français d'Irak, actif depuis 70 ans, avec ses antennes de Bagdad et d'Erbil, qui proposent une programmation riche, tournée vers l'avenir. Nous le faisons enfin en enseignant dans les écoles et universités irakiennes la langue française et en aidant l'Irak à valoriser son patrimoine.
Je terminerai en évoquant, comme vous l'avez fait Monsieur le Ministre, la situation régionale. Il est essentiel que l'Irak ne soit pas entraîné dans des conflits qu'il n'a pas choisis. À cet égard, je tiens à saluer les efforts du Gouvernement, du Premier ministre pour préserver la stabilité du pays.
Il est aussi crucial de poursuivre ensemble la lutte contre le terrorisme dans la région, y compris en Irak, comme nous l'avons fait sans relâche ces dernières années dans le cadre de la Coalition internationale contre Daech, à la demande des autorités irakiennes. Nous ne pouvons pas laisser dix années de succès contre le terrorisme être remis en cause. La France reste prête à contribuer autant que nos partenaires irakiens le souhaiteront à cet effort militaire et sécuritaire.
Sur la Syrie, je retiens de notre échange que nos approches convergent largement. La transition politique doit permettre à la Syrie de devenir un pôle de paix et de sécurité. Cela passe par la cessation de toutes les hostilités et le respect de l'intégrité territoriale syrienne. Dans une période de transition, il faut aussi éviter que la Syrie ne sombre dans la fragmentation, et donc garantir l'inclusivité de la transition politique.
Je voudrais pour conclure dire un mot du conflit israélo-palestinien. La guerre lancée par les massacres terroristes du 7 octobre n'a que trop duré. Il faut désormais cheminer vers une solution politique. À Gaza, un cessez-le-feu, accompagné de la libération de tous les otages et d'une entrée massive de l'aide humanitaire, est indispensable. Ce cessez-le-feu doit permettre de poser les jalons du jour d'après. Nous soutenons à cet effet le plan arabe pour la reconstruction, le désarmement du Hamas et son exclusion de la gouvernance au profit d'un retour de l'Autorité palestinienne. Au-delà de Gaza, c'est la perspective même d'une solution à deux Etats - pourtant la seule qui puisse garantir paix et sécurité, aux Israéliens comme aux Palestiniens - qui se trouve aujourd'hui remise en cause. Face à cette impasse, la France et l'Arabie saoudite organiseront en juin une conférence internationale sur l'établissement d'un Etat palestinien. Dans cette perspective, le Président de la République a marqué notre disponibilité à reconnaître l'Etat de Palestine si la dynamique diplomatique que nous avons lancée permet d'initier un processus de reconnaissance mutuelle - reconnaissance de la Palestine d'une part, normalisation avec Israël d'autre part - et d'apporter les garanties de sécurité nécessaires à tous. Nous comptons sur les efforts de l'Irak dans ces efforts cruciaux pour la stabilité de la région.
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs,
Forts des liens d'amitié et de respect profonds qui nous unissent, nous avons à coeur d'être à vos côtés. Vous pourrez compter sur moi pour poursuivre le renforcement de nos relations, dans l'intérêt de nos deux peuples. Et je vous remercie une nouvelle fois pour votre accueil chaleureux.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 avril 2025