Déclaration de M. Sébastien Martin, ministre délégué, chargé de l'industrie, sur la politique industrielle, à Chalampé (Alsace) le 27 octobre 2025.

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Circonstance : Déplacement sur la plateforme chimique de Chalampé (Alsace)

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les sénateurs, 
Monsieur le Maire,
Monsieur le Président de Mulhouse Alsace Agglomération et de l'association des maires du Haut-Rhin,
Monsieur le Président de l'Association des maires ruraux du Haut-Rhin, 
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le Vice-président du groupe BASF,
Messieurs les membres de la Direction du groupe BASF, Monsieur le Président-Directeur général de l'ADEME,
Monsieur le Président d'Alsachimie et de France Chimie Grand-Est, 
Monsieur le Président de la CCI Alsace de la section de Mulhouse, 
Madame la Directrice générale de France Chimie,
Mesdames et messieurs, chers amis,

Je suis très heureux d'être ici.

C'est une vraie fierté d'être parmi vous pour mon tout premier déplacement comme ministre de l'industrie. Et ce n'est pas un hasard si j'ai choisi de venir ici. Parce qu'à Chalampé, tout se résume :

L'Histoire et la modernité,
La chimie et la décarbonation, 
La France et l'Europe, 
L'industrie et les territoires.

Avant d'être ministre, vous le savez peut-être, j'ai été élu local. J'ai vu la réalité de l'industrie et l'engagement des femmes et des hommes qui la font vivre. J'ai eu la chance, sur mon territoire, de faire sortir de terre des sites industriels, de voir des entreprises produire en France, et c'est par cette expérience de terrain que j'ai acquis la conviction qu'il n'y a pas aujourd'hui de projet plus important pour notre pays que de défendre ses usines.

Mesdames et Messieurs, je crois profondément en l'industrie.

Cette industrie qui transforme la matière, qui crée des emplois, qui forme les jeunes et surtout, celle qui fait battre le cœur de nos territoires.

Mon rôle, aujourd'hui, c'est de porter cette conviction à l'échelle du pays. Et de faire travailler ensemble tous les niveaux.
L'Europe de la stratégie et de la protection. 
La France de l'action et de la décision.
Et les territoires de l'engagement et de la mobilisation.


Ici, sur la plateforme chimique de Chalampé, nous sommes au cœur d'un secteur essentiel. Une industrie indispensable à toute notre économie. Et malgré les difficultés, elle fait face.

Elle fait face à une demande mondiale en baisse. Elle fait face à une concurrence déloyale, avec des produits venus de Chine à des prix cassés et à un coût de l'énergie encore trop élevé malgré les efforts engagés.

Je le sais.... Vous le vivez, chaque jour, sur vos lignes de production et dans vos carnets de commande.

Mon discours ne sera pas celui de l'aveuglement face aux difficultés mais bien celui d'un engagement résolu pour nous battre à chaque instant aux côtés de nos industriels, de nos salariés et de nos élus.

C'est tout le sens du combat que nous menons à Bruxelles.

Car protéger nos capacités industrielles, ce n'est pas se refermer. C'est simplement faire preuve de lucidité. C'est affirmer que nous voulons continuer à produire, à innover et à investir ici, en Europe.

La France, vous le savez, plaide auprès de la Commission européenne pour une Europe qui sorte de la naïveté. Une Europe qui protège ses industries. Qui défend ses emplois. Qui assume une véritable préférence européenne, d'abord pour les filières les plus exposées, comme la chimie, mais aussi pour l'ensemble de son tissu industriel.

C'est dans cet esprit que, dès le mois de mars, mon prédécesseur Marc Ferracci a pris l'initiative de rassembler sept États membres autour d'une même idée : un plan d'urgence européen pour la chimie. Et nous avons été entendus : ce plan est désormais sur la table. Il reprend plusieurs de nos propositions, dont un soutien ciblé au coût de l'énergie, un mécanisme de modernisation des sites industriels, et un renforcement de la défense commerciale européenne.

Le sens de notre mobilisation auprès de la Commission européenne est simple : faire en sorte que chaque politique européenne consolide notre base industrielle. Parce que si l'Europe renonce à produire, elle renonce à sa puissance.

Cette ambition, elle se concrétise ici, à Chalampé.

Le rachat par BASF des parts de Domo dans Alsachimie, en juillet dernier, est une très bonne nouvelle. Ce n'est pas qu'une opération financière. C'est un choix d'avenir. C'est la preuve de l'engagement de BASF pour sécuriser le site, préserver son ancrage européen et garantir son avenir industriel.

Parce qu'ici, à Chalampé, se trouve le dernier producteur européen d'adiponitrile.

Une molécule essentielle à nos pièces automobiles, à nos composants industriels, à nos textiles techniques. En un mot : une part d'autonomie industrielle que nous devons conserver.

Et les mesures que nous défendons à Bruxelles commencent à porter leurs fruits.

Plusieurs produits sont déjà soumis à des droits de douane, je pense notamment à la vanilline, pour laquelle l'instauration de droits de douane de 130% à permis la réouverture de l'unité de production de Saint-Fons.

Une enquête a été ouverte par la commission sur les pratiques de dumping commerciales par la Chine sur l'acide adipique, fabriqué ici-même. Elle devrait aboutir d'ici la fin du mois.

Nous soutenons pleinement l'instauration de droits de douane protecteurs face aux pratiques de concurrence déloyale et sur des mesures ciblées.

Et nous irons plus loin s'il le faut, pour défendre toute la chaîne de valeur. Parce que c'est comme ça que l'on protège concrètement nos usines, nos emplois, nos compétences et nos territoires.

Savoir enfin nous défendre à l'échelle européenne en refusant d'accueillir les surcapacités asiatiques ne veut pas dire pour autant refuser le changement.

Notre mission n'est pas de cultiver l'immobilisme mais bien de rendre notre industrie plus innovante, plus sobre, et plus compétitive.

Et pour cela, le Gouvernement agit. Nous baissons les impôts de production. Nous avons d'ailleurs inscrit, dans le projet de loi de finances, une réduction de 1,3 milliard d'euros de la CVAE.

Nous soutenons l'innovation de rupture avec France 2030, pour que nos usines restent à la pointe. Et, grâce à l'action d'EDF, nous donnons de la visibilité aux industriels sur le prix de l'énergie.

À Chalampé, cette transformation est déjà en marche. Alsachimie, avec le projet KARA, montre la voie en réduisant drastiquement ses émissions annuelles. Et d'autres initiatives locales, dans l'hydrogène vert ou les réseaux de chaleur, vont dans la même direction.

Je veux également saluer et souligner la qualité du projet d'extension du réseau de chaleur de Mulhouse Alsace Agglomération, Cher Fabian Jordan. Il permettra d'utiliser la chaleur de récupération de sites voisins, dont celui de Butachimie.

Je sais, Monsieur le Président de l'ADEME, qu'après un premier soutien absolument nécessaire pour sécuriser le projet dans sa première phase technique, une seconde

Mais tout cela, Mesdames et Messieurs, n'aurait aucun sens sans les territoires eux mêmes.

Je veux finir sur ce sujet, parce qu'il est au cœur de mon engagement d'élu local et aujourd'hui de ministre.

L'industrie, ce n'est pas seulement de l'économie. C'est de la fierté, des savoir-faire transmis, des familles qui vivent de leur métier. C'est la dynamique d'un territoire, sa stabilité et son avenir.

Ici, à Chalampé, ce sont 1 300 emplois directs et près de 3 000 emplois indirects. Derrière ces chiffres, il y a un écosystème vivant : des entreprises, des commerces, des écoles, des familles, des compétences enracinées.

Et Chalampé n'est pas un cas isolé. C'est un maillon fort dans un ensemble territorial remarquable : le Sud Alsace. Un Territoire d'industrie, qui a fait le choix d'investir dans la décarbonation, l'innovation et la formation. Avec le programme Blue Industries Sud Alsace comme avec le Campus Industrie 4.0, on voit ici que l'industrie du futur sera ancrée dans la vie quotidienne des habitants.

Cette dynamique n'a rien d'un hasard, elle repose sur la mobilisation de tous : les élus, que j'aurais l'occasion de rencontrer dans quelques minutes, les entreprises, les acteurs de terrain.

C'est grâce à eux que le Sud Alsace avance vite et fort. 10 nouveaux sites industriels ont ouvert ou se sont développés sur le territoire en 2024. Les résultats sont là. C'est une réussite collective, et une fierté partagée.

J'irai même un pas plus loin.

À un moment où l'on parle de dignité au travail, l'industrie apporte des réponses concrètes.

Elle valorise les compétences. Elle offre des parcours évolutifs et des salaires attractifs. Elle donne du sens et de la stabilité. Elle permet à chacun de vivre et de travailler là où il a choisi de vivre, de transmettre un savoir-faire, une fierté, une continuité.

Voilà pourquoi ce combat pour les territoires est le fil rouge de mon action.

La réindustrialisation n'a de sens que si elle recrée de la valeur, de la fierté et des perspectives locales.

L'industrie dans nos territoires, c'est la fabrique du quotidien et du futur. C'est là que se joue notre cohésion nationale.

Notre responsabilité, aujourd'hui, c'est de relier les échelles : l'Europe qui donne le cadre, la France qui organise, les territoires qui incarnent. C'est dans cette articulation que se construit une industrie qui fait nation. Une industrie qui fait la France de demain.

Mesdames et Messieurs, sans doute la période que nous vivons est-elle plus difficile pour notre industrie et je n'en ignore rien.

Mais je crois que c'est justement ici, en Alsace, dans cette terre à l'histoire si particulière que nous devons lancer l'offensive et nous mobiliser.

Nous mobiliser pour une Europe qui protège,

Nous mobiliser pour une France qui accompagne ses industriels et leur fait confiance,

Nous mobiliser pour faire de nos Territoires d'industrie les partenaires et les faiseurs indispensables de notre réussite.

Voilà ma feuille de route et celle que je conduirai sous l'autorité du Président de la République, du Premier Ministre et du Ministre de l'Economie et des Finances.

Face aux péripéties de la vie politique, sachons penser en industriels. Voyons loin, soyons ancrés dans nos territoires et ayons à cœur de porter les valeurs du travail, de l'engagement et de la solidarité.

Vive notre Industrie, 
Vive la République
Et Vive la France !


Source https://www.economie.gouv.fr, le 29 octobre 2025