Interview de M. Serge Papin, ministre des PME, du commerce, de l'artisanat, du Tourisme et du pouvoir d'achat, à BFM TV le 7 novembre 2025, sur la plate-forme d'e-commerce chinoise SHEIN et le commerce dans les centres-villes.

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Média : BFM TV

Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Il est 8 h 29 et vous êtes bien sur RMC et BFM TV. Bonjour Serge PAPIN.

SERGE PAPIN
Bonjour Apolline DE MALHERBE.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes ministre des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l'artisanat, du tourisme et du pouvoir d'achat, n'en rajoutons plus. Je vous avais reçu lorsque vous étiez à la tête de la grande distribution, puisque vous avez été l'un des patrons emblématiques.

SERGE PAPIN
De la COOPÉRATIVE U.

APOLLINE DE MALHERBE
De la COOPÉRATIVE U.

SERGE PAPIN
C'est plus des commerçants que de la grande distribution.

APOLLINE DE MALHERBE
On va y venir, évidemment. Maintenant, en tout cas, ce que vous incarnez, c'est effectivement la question du commerce. Et il y a du boulot, à la fois sur la lutte contre la désertification des centres-villes. On y viendra dans un instant, puisqu'un rapport vient de vous être remis avec des propositions choc. Mais bien sûr, SHEIN, on se demande pourquoi vous ne l'avez pas interdit plus tôt. Enfin, vous n'étiez pas là, mais vous, les Gouvernements successifs.

SERGE PAPIN
Oui, alors moi, écoutez, pourquoi on est intervenu sur SHEIN ? Aussi, pourquoi je suis intervenu sur SHEIN ? C'est que les premières discussions que j'ai pu avoir avec les parties prenantes, les représentants du commerce, les représentants des PME, ils m'ont tout de suite parlé de ça. Ils m'ont dit q : " Il y a une espèce de far-west numérique et qu'il se vend tout et n'importe quoi sur ce site. Et il faut absolument intervenir ". Alors là, il y a eu, avec les produits illicites, les armes…

APOLLINE DE MALHERBE
… Les poupées sexuelles, les armes, mais si je vous demande pourquoi vous ne l'avez pas fait plus tôt, c'est que ces témoignages que vous avez recueillis de ces commerçants, nous, ça fait des années qu'on en parle. Ça fait des années qu'on les entend.

SERGE PAPIN
Apolline DE MALHERBE, ça fait trois semaines que je suis au ministère.

APOLLINE DE MALHERBE
Tout à fait. Ce n'est pas à vous, personnellement, Serge PAPIN, que je parle franchement, mais je suis quand même toujours surprise. Vous avez été à Roissy hier, vous allez nous le raconter. Vous avez ouvert les paquets SHEIN et 90 % de ces paquets, me semble-t-il, vous allez me le confirmer, comportaient des choses qui ne sont pas aux normes. Vous auriez pu le voir ou vos prédécesseurs auraient pu le voir plus tôt.

SERGE PAPIN
On a fait une opération coup de poing qui est coordonnée avec les Douanes et la DGCCRF. Donc, il faut saluer leur travail. Tous les colis ont été ouverts et en effet, alors, il y a des choses complètement aberrantes.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez vu quoi ?

SERGE PAPIN
Alors, je vais vous dire, on a vu par exemple, tiens, je regarde vos ongles, Apolline, parce que figurez-vous combien vous mettez le petit vernis à ongles.

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, il se trouve que j'ai acheté une marque française précisément parce que je me suis dit qu'il fallait, mais ça m'a coûté cher. Ça m'aurait coûté moins cher si je l'avais acheté sur SHEIN.

SERGE PAPIN
Alors, je vais vous dire, j'ai ouvert un colis. Il y a cent petits flacons de vernis à ongles, donc des produits dont on ignore la provenance. Et je vais vous dire, deuxième cas aussi grave, c'est que ces produits-là, ils sont destinés à la revente de manière complètement illicite. C'est du trafic. Derrière, des produits qui ne payent pas la TVA, bien sûr. Donc, ces produits-là, un, ne sont pas aux normes et deux, nourrissent un commerce illicite. Ça fait beaucoup quand même, ça fait beaucoup. Moi, je trouve que c'est grand temps qu'on s'en occupe.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est au minimum deux raisons là, typiquement pour ce genre de colis. Qu'est-ce que vous avez vu d'autre ?

SERGE PAPIN
Ce qui est intéressant aussi, c'est qu'actuellement, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de choses qui passaient entre les mailles du filet. Il n'y a pas que SHEIN. Donc, le travail aujourd'hui que fait la DGCCRF et les Douanes, c'est sur l'ensemble des plateformes. Donc, il faut absolument qu'on protège le consommateur. Tiens, il y avait un autre produit, c'était pour blanchir les dents. Vous vous rendez compte ? On ne sait même pas d'où ça vient. Il y avait marqué en anglais, surtout rincez-vous bien la bouche.

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, j'imagine.

SERGE PAPIN
Il y a plein de produits comme ça, suspects, douteux. Alors, les normes, ça va d'une étiquette mal faite jusqu'à la toxicité du produit. Donc, il faut absolument qu'on protège le consommateur et qu'on protège les commerçants.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est ce que j'allais vous dire. Ces normes-là, évidemment, c'est d'abord la question de ceux qui vont mettre ce produit sur leurs dents ou sur leurs ongles. Mais c'est aussi l'incroyable distorsion de concurrence. C'est-à-dire que nos commerçants ici, en France, ceux qui produisent aussi en France, respectent scrupuleusement des normes, qui d'ailleurs souvent leur empoisonnent la vie, mais qui le font et qui le font pour protéger effectivement le consommateur.

SERGE PAPIN
C'est une concurrence déloyale.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais s'ils font cet effort et que parallèlement, on arrive avec ce genre de produit. Donc, ma question est, un, vous avez suspendu. Deux, quand vous voyez ça, est-ce que vous ne vous dites pas qu'il faut purement et simplement arrêter ? Arrêter tout ça et interdire ?

SERGE PAPIN
Déjà, il s'est passé des choses depuis mercredi. Depuis quand le Premier ministre a dit, voilà, ça y est, on lance la démarche, la procédure pour arrêter SHEIN. Donc, je peux vous dire que le SHEIN d'aujourd'hui, ce n'est pas du tout le même que mercredi dernier. Donc, toute la marketplace, là, dont tous ces produits dont on ignore la provenance et qui sont irrespectueux complètement des normes, ils n'en vendent plus. Ça, c'est fini, pour l'instant.

APOLLINE DE MALHERBE
Alors, tout est pour l'instant, non ? Parce que vous ne pouvez pas, tous les jours, aller à Roissy, ouvrir tous les paquets, Monsieur PAPIN.

SERGE PAPIN
En tous les cas, maintenant, ce qui est certain, c'est que ce qui ne respecte pas les normes, c'est que la DGCCRF est mobilisée. Donc, elle va sanctionner. Je rappelle que SHEIN, il a 190 millions d'euros d'amende en cours. Donc, c'est quand même pareil.

APOLLINE DE MALHERBE
Précisément sur ce type de question et sur le marketing. Le patron de SHEIN vous a écrit, Donald TANG. D'abord, il dit qu'il va prendre des mesures fermes et immédiates afin de présenter le cadre de conformité qu'il met en place. Et il vous propose une rencontre. Est-ce que vous lui avez répondu ? Est-ce que vous allez le rencontrer ?

SERGE PAPIN
Écoutez, moi, quand j'étais chef d'entreprise, quand j'avais une confrontation dans un contexte comme ça, et quand je rencontrais la personne en face, c'était pour négocier, on est bien d'accord. Là, pour l'instant, je n'ai rien à négocier avec Monsieur TANG. Il doit se mettre au droit de ce qu'exige le droit français en matière de concurrence et en matière de normes. Pour l'instant, je n'ai pas du tout l'intention de le rencontrer. Je n'ai rien à négocier avec lui.

APOLLINE DE MALHERBE
On ne négocie pas avec Monsieur TANG ?

SERGE PAPIN
Non, il faut être ferme. Il faut être ferme. Il faut résister. J'utilise ce mot parce qu'on est en train de se faire envahir. Il faut se protéger. Il faut se protéger. C'est le mot juste.

APOLLINE DE MALHERBE
Jusqu'où est-ce qu'il faut se protéger ? Je ne sais pas si vous avez vu sur le journal Les Echos, le patron de la BPI, Nicolas DUFOURCQ, qui a cette phrase. Il dit : " Le tsunami chinois détruira toutes les PME de la Pologne jusqu'au bout de la Bretagne. L'Europe doit se fermer, au moins temporairement, le temps de se réarmer ". Il parle plutôt de l'industrie, mais ça a évidemment un impact sur le commerce. Est-ce qu'il faut, à un moment, se dire : " On met tout sur pause ?

SERGE PAPIN
Il faut qu'on ait un petit peu de temps. Il a un peu raison de ce point de vue-là. En plus, quand on voit, par exemple, les États-Unis qui, eux…

APOLLINE DE MALHERBE
Il dit d'ailleurs qu'on est pris en tenaille entre les États-Unis et la Chine.

SERGE PAPIN
L'Europe est un peu le continent où c'est plus facile. On a aujourd'hui, regardez en Europe, les colis qui viennent des plateformes. C'est 4,5 milliards de colis. 600 avions qui sont tous les jours…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais précisément, je vous pose la question. Est-ce qu'il ne faut pas mettre carrément sur pause ? On met sur pause le temps de se réarmer, comme dit Nicolas DUFOURCQ.

SERGE PAPIN
C'est ce qu'on est en train de faire. Et puis surtout, la meilleure façon de se défendre, c'est d'aider nos commerçants. Parce que j'ai lu une petite étude qui dit quand même que nos concitoyens, ils aiment le commerce de centre-ville. Ils ont envie de voir un commerce vigoureux. Voilà, les deux sont liés. Mais vous avez raison. Si on peut avoir un petit peu de temps pour s'organiser, je partage ce que dit le patron de la BPI.

APOLLINE DE MALHERBE
Serge PAPIN, vous dites : " Les Français, les consommateurs, ils aiment avoir un centre-ville vivant ". Mais ils aiment aussi quand même consommer sur SHEIN. Il y a 25 millions de consommateurs sur SHEIN. Qu'est-ce que vous dites ce matin aux Français et aux Françaises qui nous écoutent ? Je pense notamment aux témoignages que j'ai eus cette semaine, qui disent : " Moi, je n'ai pas eu les moyens d'aller ailleurs. SHEIN m'a permis de m'habiller ", y compris sur une question qui est la question des grandes tailles, qui est la question d'une mode plus adaptée. Qu'est-ce que vous leur dites à ceux-là ?

SERGE PAPIN
Alors, je comprends. D'abord, je ne suis pas là pour faire la morale. Les gens, ils consomment…

APOLLINE DE MALHERBE
Ils ont le sentiment qu'on leur fait la morale aujourd'hui ?

SERGE PAPIN
Non, pas du tout. Moi, je vais vous dire, je pense qu'il y a deux aspects d'une même personne. Il y a le consommateur et le citoyen. Le consommateur, c'est le produit que je veux. Le citoyen, c'est le pays où je vis. Et donc, de plus en plus, il y a une menace, quand même, sur ces produits qui ne sont en effet pas chers. Pourquoi ils ne sont pas chers ? Parce qu'ils ne respectent aucune norme. D'ailleurs, au passage, j'ai une petite parenthèse, mais au BHV, où ils sont sous surveillance, etc., où là, maintenant, ils sont obligés de respecter les normes, les produits, il n'y a pas une différence énormissime avec ce qui se vend dans d'autres commerces.

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, ce que vous voulez dire, c'est que là, les produits qui sont vendus au BHV, parce qu'ils ont été obligés de traverser les filtres du respect, là, ils ont enlevé une partie de ce qu'ils vendent sur leur site.

SERGE PAPIN
Pourquoi je m'adresse en même temps au citoyen ? Parce qu'on va en payer le prix à terme. S'il n'y a plus de production en France, s'il n'y a plus de commerce, et si ce que font les plateformes chinoises, ça s'appelle du dumping. Le dumping, c'est de la concurrence déloyale pour, in fine, quand on a tout détruit, on prend la place.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est de la prédation. Pour vous, ce sont des prédateurs.

SERGE PAPIN
C'est de la prédation. Et moi, je vais vous dire une chose, et je vais m'en occuper. Je peux vous dire, là, ça, c'est le truc qui me tient à coeur. On va prouver à nos concitoyens qu'il y a du made in France accessible dans ce pays. Et ça, il faut qu'on se mobilise. J'étais au salon du made in France hier. Tous les exposants que j'ai vus, ils m'ont dit : " Mais attendez, nous, on ne s'adresse pas à la France d'en haut. On veut vendre nos produits au plus grand nombre. Et on aimerait bien que vous veniez nous voir pour prouver que le made in France, ça peut être aussi accessible. Beaucoup plus durable ".

APOLLINE DE MALHERBE
Un mot, Serge PAPIN, sur ce que vous disiez du BHV et des rayons du BHV. Initialement, vous n'étiez pas favorable à ce qu'il y ait, en tout cas, vous disiez, et on espère encore que ça ne se fera pas. De fait, ça s'est fait. Mais au fond, si je vous écoute, il y a eu un côté vertueux, qui est qu'au moins, ça a sélectionné, en quelque sorte, les produits qui respectent les normes et ceux qui ne les produisent pas. Est-ce qu'au fond, de ce point de vue-là, vous vous dites : " Mettre SHEIN dans un magasin physique, en dur, était peut-être une bonne chose " ?

SERGE PAPIN
Ça prouve qu'en effet, d'abord, ils ont fait attention, parce qu'ils savaient que les services…

APOLLINE DE MALHERBE
Les sous-observations, comme vous dites.

SERGE PAPIN
Les sous-observations. Donc, ils ont mis des produits respectueux de la qualité, respectueux des normes. Et à ce moment-là, j'ai vu, moi, par exemple, un jean à quarante euros ou cinquante euros. Il n'y a pas de grande différence avec ce qui peut se pratiquer dans d'autres commerces français.

APOLLINE DE MALHERBE
Un dernier mot sur une forme d'hypocrisie. Il y a un partenariat entre LA POSTE et TEMU. Vous trouvez ça normal, vous ?

SERGE PAPIN
Écoutez, LA POSTE, il faut qu'elle fasse son boulot. Elle est chargée de livrer les colis, etc. Bon, moi, je ne souhaite pas qu'on fasse comme ça des numéros avec des partenaires qui sont représentants des plateformes. Je note que TEMU, ce n'est pas tout à fait la même chose. Mais après…

APOLLINE DE MALHERBE
Ils ont quand même été épinglés cette semaine aussi pour vendre notamment des armes.

SERGE PAPIN
TEMU ?

APOLLINE DE MALHERBE
TEMU.

SERGE PAPIN
D'accord, OK. Alors, donc, j'ai eu une discussion à ce sujet. On m'a dit : " Monsieur le Ministre, c'est peut-être quand même mieux que LA POSTE livre les colis plutôt que ça soit DHL ". Bon, OK, voilà. Mais après…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais pardon, vous comprenez bien. Et je vois votre malaise là-dessus, Serge PAPIN. Vous comprenez bien la difficulté. On a d'un côté, on se dit, c'est en train d'être une déferlante et il faut refuser, il faut mettre des taxes, il faut mettre deux euros, cinquante euros sur les... Et en même temps, on a LA POSTE qui dit : " Ouais, mais bon, ça nous fait du boulot ".

SERGE PAPIN
Oui, alors, elle fait son boulot. Le partenariat qui a été mis en avant, donc avec TEMU, il a été mis en avant par TEMU, pas par LA POSTE.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est pire, j'ai envie de vous dire. Pardon, mais ça veut dire que LA POSTE, elle le fait, mais elle le fait en loucedé.

SERGE PAPIN
Non, non, non, non. Elle était... Non, non, non, non. Elle n'a pas souhaité forcément le mettre en avant. Bon, il y a eu un changement…

APOLLINE DE MALHERBE
Elle prend les sous, mais elle se dit que ça ne fait pas très moral.

SERGE PAPIN
Non, non, non, non, Apolline De MALHERBE, il y a eu un changement de directeur général à LA POSTE. On est en discussion. Je rappelle que c'est le ministre LESCURE qui s'occupe…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous ne voulez pas non plus qu'on vous mette tout sur le dos. Je veux bien comprendre.

SERGE PAPIN
Exactement. On va regarder ce qu'il y a dans le contenu de cet accord, mais c'est vrai qu'il faut de la cohérence.

APOLLINE DE MALHERBE
Serge PAPIN, est-ce que vous allez sauver nos centres-villes ?

SERGE PAPIN
Écoutez, je viens d'être destinataire d'un rapport. Je salue les rapporteurs qui sont Dominique SCHELCHER, de COOPÉRATIVE U, la maire…

APOLLINE DE MALHERBE
L'un de vos successeurs.

SERGE PAPIN
Mon successeur. La maire de Saint-Quentin et le directeur de la banque des territoires. Donc, ils ont remis un rapport très intéressant. Très intéressant. Et il y a neuf points dedans. Je parlais de deux ou trois points qui sont structurants pour moi. Alors, le premier, c'est qu'il y a des outils. L'outil, c'est la foncière qui permettra, quand il y a des rideaux tirés, de donner accès plus facilement soit à des nouveaux commerçants, soit à grandir des commerces existants. Et cette foncière, elle est dotée, donc ce n'est pas rien, par la banque des territoires, soutenue d'un budget de cent millions d'euros.

APOLLINE DE MALHERBE
Qui donneront priorité à certains commerçants. Serge PAPIN, je voudrais qu'on rentre tout de suite vraiment dans le dur en écoutant un témoignage. Ce matin, j'ai Nordine qui m'a appelé. Il est à Draguignan, dans le Var. Et dans un mois, il ferme boutique. Il a une boutique de prêt-à-porter depuis trois ans. Mais il dit qu'il est à la croisée, précisément, de tous les problèmes antiques dont on vient de parler. On l'écoute.

NORDINE, GERANT VAR
Je ferme le magasin qui est dans l'axe principal de la ville de Draguignan à fin du mois de novembre. Alors, c'est très dur de les entrer parce que premièrement, il y a une place de parking. Énormément d'insécurité. Donc, les gens ne veulent plus venir. Et puis, les prix, les gens sont partout avec Internet.

APOLLINE DE MALHERBE
Comment vous le vivez, Nordine ?

NORDINE
On a baissé les bras, tout simplement.

APOLLINE DE MALHERBE
Il dit qu'il a fini par renoncer. Qu'est-ce que vous dites à Nordine ce matin ? Quelles sont les solutions concrètes sur lesquelles vous allez vous appuyer ?

SERGE PAPIN
Nordine, je ne connais pas ce qui se passe à Draguignan. Mais par exemple, cette foncière, elle peut être utile pour l'accompagner quand même dans son projet. Avant que, évidemment, s'il a décidé de fermer, c'est plus compliqué. Mais en tous les cas, ces foncières, elles sont là pour accompagner. Il a parlé de la sécurité. Je comprends ça. Bon, il y a Laurent NUNEZ, le ministre de l'Intérieur. Dans les projets, il y a un aspect très important sur la sécurité du commerce en centre-ville. On va avoir l'occasion d'en parler. Donc ça, ça fait partie des points.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous lancerez un projet là-dessus ? Il y a la question aussi du pouvoir des maires. Est-ce que vous voulez redonner une forme d'initiative, de pouvoir de décision aux maires sur qui s'implante ou pas et sur comment les aider ?

SERGE PAPIN
Les maires doivent avoir la main, pour moi, sur les autorisations d'ouverture, sur la régulation. Et puis, il y a un point important, justement, par rapport aux maires. Parce que vous savez ce qui se passe actuellement ? Il y a beaucoup de travaux qui sont faits pour les mobilités douces. C'est bien. Mais il faut absolument qu'il y ait un débat, un dialogue avec les commerçants. Parce que moi, j'ai beaucoup de commerçants, ceux que je rencontre, ils me disent : « Maintenant, dans les villes, il y a des travaux. On ne nous en parle pas assez ».

APOLLINE DE MALHERBE
Ce que vous appelez les mobilités douces, c'est quoi ? C'est les rues piétonnes ?

SERGE PAPIN
Exactement. Donc il faut qu'on pense à l'accessibilité.

APOLLINE DE MALHERBE
Qui ne sont pas faites avec les commerçants ?

SERGE PAPIN
Il faut qu'on fasse attention à l'accessibilité à chaque fois. Et alors, dans ce rapport, il y a un métier qui est proposé : c'est animateur de commerce.

APOLLINE DE MALHERBE
Ça va fonctionner comment et c'est qui et c'est quoi ?

SERGE PAPIN
Il y en a déjà 500. C'est des managers, pardon. Animateur, c'est ce que j'ai en tête. Mais manager, c'est le statut.

APOLLINE DE MALHERBE
Manager de centre-ville.

SERGE PAPIN
Manager de centre-ville ou manager de commerce. Manager de commerce de centre-ville. En fait, ils vont s'occuper de l'animation du centre-ville, événementialiser. Surtout, ils vont être une espèce d'interface entre les commerçants et les municipalités pour parler, par exemple, quand il y a un plan de travaux, quand il y a un changement de statut d'une rue, etc. Ils vont pouvoir organiser les choses.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est-à-dire qu'on rencontre cette question-là, mais ce n'était pas déjà le rôle, je ne sais pas, d'un adjoint au commerce ?

SERGE PAPIN
Non, là, c'est une spécialisation. Souvent, les maires n'ont pas toujours le temps de faire ça. Donc là, il y a une personne dédiée. Il y en a déjà 500 qui existent.

APOLLINE DE MALHERBE
Et ça marche ?

SERGE PAPIN
Et ça marche très bien. Donc, c'est un métier nouveau pour lequel il y a des formations aussi particulières. Et moi, je soutiens vraiment cette initiative. Donc, si vous voulez foncière d'un côté, qui est un outil financier, outil humain avec le manager de centre-ville…

APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce qu'il faut aussi revoir ? On a parlé de la concurrence du e-commerce, mais il y a aussi la question de la très grande distribution. Est-ce qu'on est au bout ? Alors, vous êtes, de ce point de vue-là, je pense, vous avez le témoignage aussi de votre première vie, votre vie de patron de la COOPÉRATIVE U. Est-ce qu'on est au bout d'un modèle de commerce qui était celui de l'extérieur des villes ?

SERGE PAPIN
Oui. C'est sûr que le commerce de périphérie, c'était plus il y a quelques temps. Là, maintenant, on a un retour vers les centres-villes. Donc, au fond, ce qui est important, c'est la proximité dans les villes. Et d'ailleurs, les enseignes de distribution, elles se positionnent maintenant. Et d'ailleurs, ce qui est intéressant, c'est de noter qu'elles structurent aussi parfois quand il y a une petite supérette, un petit supermarché. Ça permet aux commerces de plus petite taille de s'épanouir autour. Donc, ça, c'est quelque chose d'intéressant.

APOLLINE DE MALHERBE
Les deux peuvent se faire ensemble. Merci beaucoup, Serge PAPIN.

SERGE PAPIN
Ça peut se conjuguer.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 7 novembre 2025