Zoé : ça y est Stéphanie, j’ai réservé mes vacances pour cet été !
Stéphanie : ah super tu vas où alors ?
Zoé : Je pars à Venise, j’ai trop hâte !
Stéphanie : C’est super Venise, mais il y a beaucoup de touristes ! D’ailleurs, tu as vu, la municipalité a mis en place une taxe de 5 euros à payer pour entrer dans la Cité des Doges les jours d’affluence ?
Zoé : ah ouais, nan, je savais pas du tout, pourquoi ?
Stéphanie : c’est pour lutter contre le tourisme de masse.
Générique : attends je t’explique.
Stéphanie : le tourisme est un atout économique majeur pour la France. En 2022, nous avons accueilli 74,5 millions de touristes. Avant la crise du Covid, c’était plus de 90 millions par an !
Zoé : La France est un des pays les plus visités au monde, non ?
Stéphanie : C’est même LE pays le plus visité au monde, suivi de l’Espagne et des Etats-Unis ! Le tourisme en France représente d’ailleurs entre 3 et 4 % du produit intérieur brut donc de la richesse produite en France ! Et il y emploie 1,29 million de personnes (soit 4,8 % de l’emploi total du pays). C’est encore plus marquant dans les îles Canaries où le tourisme représente 35 % du PIB et 40 % des emplois !
Concernant les recettes issues des séjours des touristes étrangers en France : elles ont atteint 63,5 milliards d’euros en 2023.
Zoé : mais c’est énorme !
Stéphanie : oui, c’est 12 % de plus qu’en 2019, avant la pandémie.
Zoé : Mais si le tourisme est bénéfique pour l’économie pourquoi certaines villes comme Venise instaurent une taxe qui risque de dissuader les touristes ?
Stéphanie : parce que le tourisme de masse a des effets négatifs et certaines villes ou sites touristiques en sont victimes.
Zoé : On parle de tourisme de masse mais aussi de surtourisme pour décrire la saturation des sites touristiques. Mais pourquoi ce phénomène ?
Stéphanie : Parce que le niveau de vie de l’ensemble de la population mondiale a augmenté au cours des dernières années : les voyages sont de plus en plus accessibles financièrement. L’avion, en réduisant les distances, facilite le tourisme. Puis, en parallèle, les réseaux sociaux font depuis peu la publicité d’endroits souvent inadaptés à la foule.
Zoé : tu veux dire que tout le monde part en vacances au même endroit ?
Stéphanie : C’est presque ça ! D’après l’Organisation mondiale du tourisme, 95 % des touristes mondiaux visiteraient moins de 5 % des terres émergées. À l’échelle de la France, c’est 80 % de l’activité touristique qui se concentre sur 20 % du territoire.
Zoé : Quelles sont les conséquences de cette hyper-concentration ?
Stéphanie : il y a d’abord des conséquences environnementales avec de graves effets sur la biodiversité. Prenons l’exemple d’Etretat. Ce petit village de 4 km2 accueille près d’1,5 million de touristes par an ! Tous veulent prendre une photo de carte postale, pourtant les falaises ne peuvent pas accueillir autant de personnes ! Certains touristes veulent aussi repartir avec un autre souvenir : un galet de la plage. Sauf que ce n’est pas qu’un simple caillou : il protège les falaises contre l’érosion. Les falaises commencent donc à s’effondrer menaçant de détruire la beauté du site.
Zoé : oh, nan, ça serait dommage !
Stéphanie : Etretat n’est qu’un exemple parmi tant d’autres sites qui sont en danger à cause du surtourisme ! L’Unesco a établi une liste du patrimoine mondial en péril et a demandé aux responsables du site de mettre en place des mesures fortes pour protéger le patrimoine. En septembre 2023, Venise a d’ailleurs échappé de peu à l’ajout de la ville à cette liste…
Zoé : il y a d’autres mesures que la taxe ?
Stéphanie : oui ! De nombreux sites touristiques instaurent des quotas. De nombreux musées ont déjà adopté le principe de réservation : cela permet de contrôler le nombre de personnes présentes dans le lieu.
Zoé : mais cette mesure n’est valable que pour les musées non ?
Stéphanie : pas du tout ! Près de Marseille, l’accès aux calanques nécessite une réservation préalable. C’est pareil pour certaines villes comme Dubrovnik en Croatie qui limite l’accès 4 000 visiteurs par jour face aux hordes de touristes venus visiter les lieux où ont été tournées des scènes de la série « Game of Thrones ». Mais il y a aussi des îles comme Porquerolles en France qui accueillaient jusqu’à 12 000 personnes par jour avant d’instaurer une limite à 6 000 personnes en 2021.
Zoé : c’est bien cela permet de mieux profiter du lieu puisqu’il y a moins de monde !
Stéphanie : exactement ! Mais certains lieux doivent même être totalement interdits pour être préservés.
Zoé : Comme le cas de l’île vierge de Crozon en Bretagne dont l’accès est interdit au public depuis 2020 ?
Stéphanie : par exemple oui ! En plus d’être trop nombreux, les touristes ne sont pas toujours respectueux du lieu qu’ils visitent et laissent leurs déchets dans la nature ce qui perturbe la biodiversité locale et participe de la détérioration du lieu. L’interdiction est parfois la seule solution.
Zoé : oui j’ai vu des images du camp de base de l’Everest dans l’Himalaya…
Stéphanie : Et le tourisme de masse a aussi un impact sur la population locale !
Zoé : lesquels ?
Stéphanie : d’abord, certaines villes ne sont pas adaptées pour accueillir beaucoup de monde donc le flux de touristes peut mettre à mal le bon fonctionnement des services publics. Cela impacte la qualité de vie des locaux : les moyens de transports sont surchargés, il y a plus de bruit le jour comme la nuit…etc.
Zoé : Le surtourisme fait aussi augmenter les prix non ?
Stéphanie : effectivement, le coût de la vie augmente dans les lieux touristiques : le prix des logements s’accroît, mais aussi celui des biens et services !
Zoé : ah oui, à Paris, les logements sont très chers !
Stéphanie : C’est vrai Zoé : en effet, plus il y a d’hôtels ou de locations saisonnières, moins il y a de logements et plus les prix immobiliers augmentent : les populations les moins favorisées ont donc de plus en plus de mal à se loger.
Zoé : et comment lutter contre cela ?
Stéphanie : plusieurs solutions existent ! Au pays Basque par exemple, 24 communes ont mis en place une mesure dite « de compensation » : depuis le 1er mars 2023, pour pouvoir louer un appartement en tant que meublé touristique, un propriétaire doit aussi mettre un bien équivalent en location à l'année.
Zoé : Mais on ne peut pas inciter les touristes à aller ailleurs ?
Stéphanie : Si ! Il existe des initiatives de démarketing qui visent à promouvoir des sites moins connus pour rediriger les touristes ou à mettre en valeur les lieux à des périodes différentes pour étaler la fréquentation sur l’année.
Zoé : ah ben parfait ! alors s’il faut éviter l’été à Venise, je partirai plus tard !
Stéphanie : super, du coup tu restes au boulot alors ? 😉
Décryptage. Le tourisme de masse
Temps de lecture 5 minutes 55 secondes
S'il représente un atout économique majeur, le tourisme de masse, aussi appelé surtourisme, peut avoir des conséquences très négatives sur l'environnement ou encore sur la population locale. Comment freiner ce phénomène ? Quels sont les moyens mis en oeuvre par les sites touristiques pour réguler l'afflux de visiteurs ?