Déclarations de M. Lionel Jospin, Premier ministre, sur les relations entre la France et le Maroc, sur le plan économique, culturel et éducatif ainsi que les relations euro-marocaines, Rabat les 17 et 18 décembre 1997, Casablanca le 18.

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Circonstance : Voyage officiel de M. Lionel Jospin au Maroc, au Sénégal et au Mali du 17 au 21 décembre 1997

Texte intégral

(Arrivée à l'aéroport)
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs les Journalistes,
Je suis naturellement très heureux d'être ici avec des ministres français qui m'accompagnent, après la visite du président de la République française au Maroc en 1995, après la visite du Souverain chérifien en 1996 en France, la venue du Premier ministre français pour les entretiens avec le Premier ministre marocain, qui ont été décidés par les deux chefs de l'Etat l'année passée, témoigne de l'excellence de la relation entre le Maroc et la France, et témoigne aussi de la longue amitié qui existe entre nos deux peuples. Je ne doute pas que sur les différents dossiers que nous allons traiter dans le cadre de ces entretiens, dans le cadre de l'entretien que j'ai l'honneur d'avoir avec sa Majesté Hassan II, je ne doute pas que l'ensemble des questions économiques, culturelles, éducatives et scientifiques bilatérales, les problèmes des relations avec l'Europe, les entretiens que nous aurons sur des grands sujets internationaux, que tout cela témoignera de la convergence de nos visions.

Q - Apportez-vous des idées nouvelles ?
R - Je viens en chercher.
Q - Qu'attendez-vous de cette visite ?
R - Elle confirme une exceptionnelle relation d'amitié entre le Maroc et la France, un partenariat privilégié, et j'espère que nous fonderons les bases de nouveaux progrès, attendus par la partie marocaine et souhaités aussi parfois du côté français.
Je suis accompagné non seulement par des ministres, par des hauts fonctionnaires, par des parlementaires français, parce qu'il convient que l'ensemble du milieu politique français, la haute Fonction publique soient là présents ; mais je suis également accompagné par des chefs d'entreprises très importants qui ont noué avec les entreprises marocaines des liens féconds et qui ont des projets en cours.
Je ne doute pas aussi que cette rencontre sera l'occasion soit de concrétiser des accords qui sont en cours, soit de fonder de nouveaux projets.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)
(Allocution au dîner offert par le Premier ministre marocain, M. Abdellatif Filali)
Monsieur le Premier ministre,
Messieurs les Conseillers de Sa majesté,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous rendre visite pour ce premier Sommet franco-marocain des chefs de gouvernement qui procède de la volonté commune du Souverain marocain et du président de la République française d'organiser désormais un grand rendez-vous annuel de travail et d'amitié.

Je tiens à vous dire combien la délégation qui m'accompagne et moi-même avons été sensibles à l'accueil très chaleureux qui nous a été réservé depuis notre arrivée à Rabat cet après-midi. Parmi les ministres et les personnalités qui sont venus avec moi au Maroc, certains ont des relations étroites et anciennes avec votre pays ; d'autres le découvrent ou le redécouvrent. Pour eux tous, comme pour moi, et tous les Français, la proximité entre la France et le Maroc est rare et précieuse.

Pour les Français, le Maroc est un pays ami, une référence culturelle, un partenaire exigeant et essentiel.

Il y a les sentiments et il y a la politique. Nos deux pays sont des partenaires à la fois bien entendu sur le plan bilatéral et sur le plan de vos relations avec l'Union européenne. Nous nous comprenons bien parce que vous savez le rôle que nous jouons en Europe et que nous connaissons le vôtre au Maghreb, dans le Monde arabe et en Afrique.

Sur bien des sujets graves du moment, nos analyses sont convergentes ou se complètent. Je pense notamment au Proche-Orient.

Nos pays sont, au Sud et au Nord, les intercesseurs naturels du dialogue indispensable entre les deux rives de la Méditerranée. C'est ce rôle qui assurera dans les années qui viennent à nos relations, leur intensité et leur pérennité.

Aussi la politique d'ouverture du Maroc en direction de l'Europe a-t-elle reçue et recevra-t-elle l'appui constant de la France. En décidant de s'ancrer à l'Union européenne, le Maroc a fait un choix lucide et ambitieux. La France fera tout ce qui est en son pouvoir pour que cette décision porte des fruits positifs pour le peuple marocain.

Par une même disposition d'esprit, nous souhaitons oeuvrer, dans le respect de l'identité de chacun, à une coopération sincère en Méditerranée. Le Maroc et la France partagent depuis toujours cet appel formulé il y a longtemps par Jacques Berque : "je n'appelle pas à d'indésirables fusions, non plus qu'à l'oubli de ces autres réseaux qui nous engagent : européo-occidental pour la France, afro-asiatique pour les Arabes. Mais, j'appelle à l'échange possible... J'appelle à des dialogues, fussent-ils conflictuels, à condition qu'ils soient pertinents, au lieu de la réciproque ignorance".

Le Maroc et la France sont d'anciennes et solides nations. Leur mémoire s'unit à leur volonté : celle d'affirmer pour le plus grand profit de tous les peuples riverains de la Méditerranée des années de concorde. La volonté d'imaginer une aire de sécurité et de prospérité dont les marchés maghrébin et européen seraient les moteurs.

Soyez assurés d'un appui ferme de la France dans votre démarche. Nous voyons avec intérêt le constant approfondissement de la démocratie marocaine, menée sous l'impulsion de Sa Majesté Hassan II que j'ai rencontré cet après-midi, dont témoigne la grande année électorale que vous venez de vivre. Le Maroc s'ouvre sur l'extérieur en respectant sa culture.
Et, sur ce plan je suis convaincu qu'au-delà des rapprochements liés aux flux des échanges et aux investissements, aussi intenses soient-ils entre nos pays, c'est dans notre proximité de culture que se situent la compréhension et l'affection mutuelle que nous nous portons. Cette culture est celle très ancienne de la Méditerranée, qui s'épanouit de façon différente en France et au Maroc, mais qui nous unité profondément. Et c'est pourquoi vous nous trouverez toujours disposés à approfondir et à perfectionner la qualité de nos échanges.

Permettez-moi de conclure sur deux sujets qui me tiennent à coeur.Je soulignerai que nos liens bénéficient d'abord de la présence des 30 000 Français du Maroc et des 700 000 Marocains qui vivent en France. Ces femmes et ces hommes ressentent une double appartenance fraternelle qu'il convient absolument dans les années qui s'ouvrent de développer et de protéger. C'est pourquoi nous entendons pour notre part rendre plus aisés les échanges : je prendrai les mesures destinées à faciliter et humaniser la délivrance des visas. Il nous faut combattre l'immigration clandestine qui naît dans l'illusion et se termine dans la misère. Mais il ne faut surtout pas entraver la curiosité de la jeunesse, le mouvement des affaires, l'élan des sentiments et le goût d'apprendre. Les dirigeants français sont unanimes sur la question.

J'ai parlé d'appartenance fraternelle. Je soulignerai aussi notre harmonie sur le plan international : je salue le fait que nous partagions la même volonté de coopération en Afrique, les mêmes doutes mais aussi les mêmes espérances pour les questions du Proche-Orient, la même résolution sur la Méditerranée. Permettez-moi de conclure sur ces messages d'espérance et de solidarité pour lever mon verre en l'honneur de Sa Majesté Hassan II, Roi du Maroc et en votre honneur, Monsieur le Premier Ministre, et pour adresser des voeux de prospérité et de bonheur au peuple marocain.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)



(Allocution lors de la réunion élargie)
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Je me réjouis que les décisions prises par le souverain marocain et par le président de la République française en 1996 lors de la visite de Sa Majesté Hassan II en France pour que se tiennent désormais régulièrement, sur une base annuelle, des entretiens franco-marocains au niveau des deux Premier ministres, accompagnés des ministres. Cette décision me conduit aujourd'hui avec ceux qui m'accompagnent, à vous rencontrer, Monsieur le Premier ministre, pour donner plus de force encore à la relation privilégiée entre le Maroc et la France.

Le Maroc est pour nous un partenaire historique, un ami de longue date, un pays qui compte, non seulement dans l'ensemble méditerranéen, mais aussi par ses prises de position constructives sur toute une série de questions internationales, y compris les questions actuelles brûlantes.

C'est un pays qui a fait résolument le choix de la modernité, à la fois dans l'ajustement des structures économiques pour répondre aux défis de la mondialisation, et pour tirer profit de l'accord de libre-échange progressif conclu avec l'Union européenne. Modernité qui ne se limite d'ailleurs pas au champs de l'économie, mais qui trouve aussi son prolongement dans un certain nombre d'évolutions institutionnelles et politiques qui relèvent naturellement de la souveraineté du Maroc. Cette modernité, cette capacité à s'insérer dans le monde d'aujourd'hui, n'abolit pas pour autant l'importance des liens qui doivent continuer à se tisser et à se renforcer entre le Maroc et la France.

Naturellement, la France sera aux côtés du Maroc dans le mouvement de rapprochement qu'il opère en direction de l'Union européenne. Si à Luxembourg, à la fin de la semaine dernière, nous avons ouvert la démarche d'élargissement vers l'Est et le centre de l'Europe, ce n'est pas, pour nous Français, dans l'idée que les liens que l'Europe doit nouer avec son environnement méditerranéen doivent se détendre, bien au contraire. Cela reste pour nous un des objectifs de la politique de l'Union européenne. Entre la France et le Maroc, la relation est exemplaire. Elle est partagée par l'ensemble des autorités publiques françaises et le gouvernement que je conduis dans sa vision du monde et de ses relations avec le Maroc est attaché à cette relation privilégiée. S'il peut s'y ajouter en plus le fait que tel ou tel des membres de ce gouvernement a noué, parfois dès la naissance, parfois de leur vie ou de l'engagement de leur père, des liens privilégiées, affectifs, qui en font presque des enfants du Maroc, je ne peux que m'en réjouir. Cela ajoute à la détermination politique le symbole, le signe de tout ce qui nous unit. Notre relation est bilatérale sur le plan économique et sur le plan culturel. Toute l'insistance que vous avez mise sur la réforme de l'Education, les questions sociales, les problèmes de l'immigration, les problèmes du codéveloppement, toutes ces questions sont fondamentales.

Au-delà des progrès que nous avions faits avec vous sur les problèmes de l'endettement, par exemple, sur un certain nombre de protocoles, nous sommes attachés à un certain nombre de grands projets qui peuvent se concrétiser et dont certains se concrétisent d'ailleurs aujourd'hui même.
Tout cela revient à vivre la relation franco-marocaine, qui ne se limite pas à notre confrontation fraternelle, mais qui s'ouvre sur le regard que nous portons en commun, comme je l'ai dit tout-à-l'heure, sur un certain nombre de grandes questions internationales.

Je crois que j'aurai l'honneur et le plaisir de m'entretenir tout à l'heure avec Sa Majesté Hassan II. Je veux vous dire la disposition de ce gouvernement à travailler à l'exemplarité de la relation franco-marocaine. Nous avons esquissé des pistes. C'est à ceux qui nous entourent et nous accompagnent de les concrétiser dans les mois et les années qui viennent.

(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)
(Inauguration du lycée Massignon)
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs,
C'est, vous le devinez aisément, avec un réel plaisir que l'ancien ministre de l'Education nationale que je suis, participe à la fois à l'inauguration et au premier anniversaire du lycée Massignon, nouvel établissement d'enseignement français au Maroc.

C'est aussi un sentiment de fierté que ressent bien légitimement le Premier ministre français en contribuant à mettre en valeur les efforts déployés par son pays pour entretenir dans le monde un réseau, sans égal, d'établissements scolaires à l'étranger.

Cet établissement nouveau mérite bien une inauguration d'envergure, ne serait-ce que pour manifester notre intention de poursuivre une politique volontariste en faveur de l'enseignement du français à l'étranger. De tels établissements sont un hommage rendu à notre enseignement public, à notre diplomatie culturelle, à la vitalité de la Francophonie, mais aussi à l'ouverture du Maroc au monde.

Ils sont donc au coeur de notre relation politique.Notre réseau au Maroc est depuis toujours le plus important puisqu'il scolarise quelques 17 000 élèves dans 5 lycées, 5 collèges et 18 écoles et que les deux tiers de ces élèves sont marocains !
Quand on a pour langue maternelle un grand véhicule de communication internationale tel que la langue arabe, il n'est pas évident de se donner pour ambition d'en acquérir un second. C'est pourtant le choix fait depuis longtemps par les autorités marocaines en autorisant l'ouverture de notre réseau à leurs nationaux et c'est aussi le choix individuel que font chaque année tant de familles marocaines.

C'est un engagement lucide et réaliste car le rayonnement et la prospérité du
Maroc passent aussi par la maîtrise qu'auront nombre de ses enfants de
plusieurs langues.
Pour cette raison, nul n'ignore ici que nos établissements, victimes de leurs succès, ne suffisent plus à la demande. Nul ne méconnaît les frustrations et parfois le désarroi de certaines familles qui ne peuvent trouver place dans une école de l'Agence ou, comme ont dit encore aujourd'hui, de la "Mission universitaire". C'est pourquoi il fallait trouver ensemble un nouvel élan qui tienne compte à la fois des réalités comptables et de nos intérêts mutuels bien compris.
Je me félicite donc qu'autorités marocaines et françaises aient fait preuve d'imagination pour répondre à la demande opiniâtre des familles. Ainsi est né, ici même, il y a exactement un an, un nouveau type d'établissement : "les établissements autofinancés", relevant - comme ceux de l'Agence - de la Convention de coopération de 1984. Placés sous la tutelle de l'Office scolaire et universitaire international (OSUI), association française sans but lucratif, une chaîne nouvelle du savoir est en train de se constituer sur le modèle de "Massignon". A Rabat, El Jadida et Agadir, trois nouveaux collèges, dont certains deviendront lycées, se sont ouverts en septembre dernier. A la prochaine rentrée, d'autres verront le jour sans doute à Fès et dans les provinces du Nord. Ainsi s'élargissent les bases de notre coopération éducative et s'adapte notre diplomatique.
Massignon est un succès. Il accueillait 200 élèves dès la première année, 310 aujourd'hui ; il en accueillera 500 à la rentrée 98 et en comptera 800 en régime de croisière, c'est-à-dire de la maternelle à la terminale. Il offre comme les établissements de l'Agence, à la fois un enseignement français conforme aux programmes et aux instructions, et un enseignement de langue et civilisation arabes qui les conduiront jusqu'à l'option internationale du baccalauréat, dont je me permets de rappeler le taux de réussite en 1997 : 97 % !
C'est en effet la meilleure réponse qui puisse être donnée aux familles marocaines que d'associer étroitement, dans un même projet d'établissement, enseignement français et composante de langue et civilisation nationale, qui sont garants à la fois des racines et de l'ouverture internationale. Je profite de l'occasion pour remercie le ministère marocain de l'Education nationale qui met à la disposition du réseau français au Maroc quelque 180 enseignants et 4 inspecteurs. Que nos partenaires sachent combien nous y sommes sensibles et combien nous apprécions la qualité des enseignants choisis.

Dans cette synergie franco-marocaine, il était naturel que ce lycée prenne le nom de Louis Massignon, à la fois illustre arabisant, homme d'action et homme de foi, "un homme qui n'avait qu'une parole devant Dieu et devant les hommes", selon la belle formule d'un de ses proches. Louis Massignon a pleinement mérité que sa vie et son oeuvre soient honorées par l'inscription de son nom au frontispice d'un établissement. J'appelle les élèves éduqués ici à s'inspirer de ses leçons de volonté et de tolérance. Qu'ils sachent aussi que le Maroc a motivé sa vocation profonde, après un diplôme consacré à l'histoire marocaine, à travers l'oeuvre de Léon l'Africain. Qu'ils n'oublient pas qu'après avoir fondé la revue des Etudes islamiques (1930), puis le Comité France-Maghreb (1953), cet intellectuel oecuménique s'est rendu à Madagascar pour visiter le souverain marocain Mohammed V qui s'y trouvait alors en exil. On retrouve bien dans ce geste l'homme fidèle et visionnaire que fut Louis Massignon. Il est bon que cet hommage solennel lui soit rendu en présence de son fils que j'ai tenu à associer à l'événement et qui partage plus que tout autre l'émotion de l'instant.
Permettez-moi de conclure en remerciant les autorités marocaines ici présente, tous les parents d'élèves, la direction et le corps professoral, les autres personnels et bien sûr les élèves de leur travail. Il n'est jamais facile de mener un projet pédagogique et a fortiori de l'imaginer et de lui donner vie. C'est déjà un succès qui s'annonce, je n'ai pas à vous souhaiter une pleine réussite, mais à la constater solennellement.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)
(Allocution devant la communauté française)
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi d'abord de saluer chaleureusement les personnalités marocaines ici présentes. Nous venons à l'issue de ces deux journées de travail, d'évoquer la qualité et la régularité du dialogue entre la France et le Maroc dans toutes ses composantes politiques, économiques, culturelles mais aussi amicales et plus simplement fraternelles. C'est dans cet état d'esprit que j'ai été reçu hier soir par sa Majesté le Roi Hassan II : notre ambition commune est de consolider nos relations, qui doivent rester privilégiées.
Nous venons de dire devant la presse notre satisfaction de ce partenariat riche, l'excellence des relations culturelles et économiques : la France reste le premier partenaire commercial du Maroc et la France continuera à participer à l'effort exemplaire de modernisation du Maroc. L'accord que nous avons conclu sur la conversion de 1,4 MdF de dettes en investissements devrait y contribuer. Le Maroc pourra ainsi encourager les investissements privés qui ne prendront toute leur mesure qu'avec la poursuite des réformes engagées notamment dans les domaines de la fiscalité, du droit (droit des sociétés et droit du travail notamment), de la justice enfin.
Aujourd'hui, la France comme le Maroc sont confrontés à un monde nouveau où le libre échange et la concurrence sont universels, où les règles du jeu s'élaborent pour partie en dehors de nous. C'est la mondialisation. Dans ce cadre nouveau, il faut que l'Europe donne à tous et en particulier au Maroc, l'ouverture nécessaire tout en lui permettant de s'adapter et de se moderniser. La France saura apporter tout son appui à cette démarche dans le cadre de l'Union européenne.
Je tiens à saluer ici tous les représentants des pays de l'Union européenne ainsi que les Ambassadeurs des pays francophones.
Permettez-moi, Monsieur le Premier ministre, de m'adresser maintenant à mes compatriotes. Je vois dans votre présence, la preuve du bien fondé de notre ambition. Vous êtes la communauté française. Sachez que l'intérêt que vous portez à ce beau pays, à sa culture, à sa personnalité, a beaucoup de prix à mes yeux. Cet effort que nous voulons développer pour créer entre nos deux pays des liens étroits de partenariat, de coopération, est aussi le vôtre. Vous en partagez la responsabilité et je vous en remercie. Le développement des entreprises françaises au Maroc dans le cadre garanti du nouveau Code marocain des investissements et dans le cadre du nouvel accord de protection et d'encouragement réciproque des investissements doivent contribuer à nourrir ces liens.
Soyez également assurés que nous sommes attentifs à vos préoccupations, de Français résidant à l'étranger. Votre ancrage au Maroc, pour certains depuis plusieurs générations, est exemplaire de ce que savent faire les Français pour créer, pour entreprendre, pour produire des richesses.
Mais je ne méconnais pas aussi les difficultés que vous rencontrez. Je me doute que nos écoles, nos lycées, même s'ils sont pour vous essentiels, vous donnent quelques soucis. Mais vous savez combien nous sommes attentifs à notre réseau d'enseignement à travers le monde. C'est très important à la fois pour les familles françaises qui résident à l'étranger, pour la défense, la promotion de la langue française et pour notre présence au Maroc.
Je connais les débats en cours relatifs à notre réseau d'enseignement français au Maroc. Je sais aussi que les ministres qui m'accompagnent ont eu l'occasion de rencontrer les représentants des parents d'élèves, des enseignants et des délégués du CSFE au sujet des problèmes qui vous préoccupent : nous ferons en sorte de maintenir ce réseau - unique au monde, faut-il le souligner - la qualité de son enseignement et des conditions financières d'accès qui ne pénalisent personne.Vous savez que depuis deux ans se sont développés des établissements nouveaux - quatre à ce jour -. J'ai moi-même inauguré aujourd'hui le lycée Massignon à Casablanca. Nous avons là, grâce au dynamisme de l'Office Scolaire et Universitaire International,la possibilité de mieux répondre à la demande d'enseignement français que le réseau traditionnel des établissements de l'AEFE ne pouvait plus satisfaire.
C'est par les actions de coopération éducative avec nos partenaires marocains de l'Education nationale que nous apporterons la vraie réponse aux objectifs ambitieux que s'est fixé le Maroc pour l'éducation des générations nouvelles.
C'est grâce à l'excellente coopération de tous les acteurs de la communauté éducative - enseignants, parents, directeurs d'établissements, services de l'Ambassade - que nous pouvons nous réjouir d'avoir ce magnifique outil dont on connaît l'excellence des résultats.
Je tiens à féliciter au passage ceux de nos enseignants qui ont accepté de travailler à des tâches de coopération éducative avec l'enseignement public marocain, en particulier au travers des projets de partenariat pédagogique Voilà ce que je voulais vous dire ici, ce soir, dans ce cadre que je trouve, par sa symbolique, particulièrement approprié à une telle rencontre, car il se rattache à la tradition du Maroc : la tente sous laquelle est célébrée l'amitié, la paix et la fraternité.

Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)
(Rencontre avec les opérateurs économiques)
Monsieur le Conseiller de Sa Majesté,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
C'est, pour moi, un grand plaisir de clôturer en votre compagnie cette matinée de travail placée sous le double signe de l'amitié et du partenariat. Cette rencontre, qui témoigne de la volonté des opérateurs économiques de nos deux pays d'amplifier les échanges entre les deux rives de la Méditerranée, m'offre en particulier l'occasion de vous dire combien la France espère de l'évolution des relations euro-marocaines et a confiance en elles.
L'évolution de l'Union européenne, dont l'intégration vient de franchir une importante étape, est riche de promesses pour le Maroc. Pourtant, je connais les inquiétudes qu'elle suscite ici et je sais quel sentiment elle a pu engendrer : celui d'être quelque peu oublié, voire négligé par les pays européens. Je sais également que vous, les représentants des milieux économiques, nourrissez certaines craintes. Je tiens donc à marquer auprès de vous ma conviction forte : en choisissant de s'ancrer à l'Union européenne, le Maroc a fait un choix lucide et ambitieux.
Lucide, car le lien tissé par le Maroc avec l'Europe s'intègre parfaitement à la stratégie de développement économique et social du royaume, qui constitue pour l'Union un partenaire solide et crédible. Ambitieux, parce que, je le sais, l'accord d'association signé en 1996 exige des efforts d'adaptation importants en vue de l'établissement d'une zone de libre-échange. Ces réformes, vous les avez engagées : il faut les poursuivre afin qu'elles portent tous leurs fruits.
A ce choix résolu du Maroc, l'Union européenne répond et répondra avec détermination.
Je sais que vous regrettez, parfois non sans raison, certains retards, des lenteurs ou des complications dans la mise en place des outils économiques et financiers européens. Il n'y a là, pour l'essentiel, croyez-le bien, des difficultés techniques ou bureaucratiques et non une remise en cause de notre volonté de construire une relation forte et originale. Convenons-en ensemble : la responsabilité des difficultés est, sans doute, partagée entre l'Union européenne et le Maroc. Ne nous laissons pas gagner par le désenchantement, et sachons trouver les moyens de confirmer notre volonté commune de développer un partenariat authentique et fructueux.
Je le souligne : la réussite des dispositions de l'accord d'association repose avant tout sur une implication commune et continue des Européens et des Marocains. Soyez, en tout cas, assurés de la détermination de la France, et de celle de mon gouvernement, à s'engager résolument à cette fin.
L'accord d'association, par l'ampleur de son programme financier, par l'élargissement et l'approfondissement des domaines de coopération, par le souffle politique qu'il a fait naître, ne doit pas se trouver en panne du fait, de contretemps qui sont parfaitement surmontables. La ligne budgétaire MEDA, dont l'enveloppe atteint 450 millions d'écus, constitue un appui financier majeur pour le Maroc. Ses résultats vont s'accélérer et être, pour vous, de plus en plus apparents et évidents.
Au coeur de cette association, la France restera le meilleur avocat du Maroc au sein de l'Europe. Avec d'autres, mon pays s'emploie activement à confirmer et à renforcer l'orientation méditerranéenne de l'Union. Il plaide, aujourd'hui, pour que les relations du Maroc avec l'Europe soient plus équilibrées, plus confiantes et qu'elles restent une priorité.
Plus équilibrées, d'abord. Le Maroc est, aujourd'hui, un partenaire reconnu et respecté de la communauté internationale. Le nouveau partenariat que nous engageons en est la traduction. En se préparant à mettre en oeuvre les dispositions de l'accord d'association avec l'Union européenne, le Maroc devra s'attacher à exploiter au mieux les avantages compétitifs qu'il possède.
La France souhaite que s'établissent avec l'Europe des relations plus confiantes. Avec l'aide de la France, le Maroc doit approfondir la mise à niveau de son économie. Un enchaînement vertueux doit découler du rapprochemen du Maroc et de l'Union : l'ouverture aux échanges, l'attractivité du pays, la stabilité et la sécurité pour les investisseurs. La confiance réciproque de l'Europe et du Maroc est un atout déterminant pour confirmer la confiance des investisseurs.
Enfin, je tenais à vous confirmer l'attachement de la France à l'équilibre de la politique extérieure de l'Union européenne entre l'Est et le Sud. Cet effort que fait la France pour plaider une priorité des relations avec les pays de la Méditerranée, je souhaite le poursuivre avec fermeté. Le Maroc peut et doit nous y aider en accompagnant son ancrage à l'Union d'une ouverture plus grande vers ses partenaires méditerranéens, condition supplémentaire de l'arrivée massive d'investisseurs.
Cette dimension européenne ne conduit toutefois à aucune remise en cause de la richesse de notre relation bilatérale, bien au contraire. Premier défenseur du Maroc auprès de l'Union européenne, la France souhaite de la même manière maintenir et développer cette relation bilatérale, privilégiée.
J'entends aujourd'hui un discours ambiant et dominant qui est envahi par la notion de "mondialisation". Il m'apparaît pourtant que cette mondialisation ne signifie pas que, dans le concert mondial, tous les pays se trouveront à équidistance. Il restera des proximités particulières, qui perdureront au-delà du rapprochement général entre pays du monde qu'entraînent les progrès fulgurants de la technologie et l'ouverture des marchés. La qualité des liens entre la France et le Maroc ne peut être remise en question. Il y a, bien sûr, un lien plus direct qu'auparavant entre Bruxelles et Rabat. Nous l'avons souhaité et je pense qu'il était nécessaire. Il me semble aussi que sur cette ligne, entre Rabat et Bruxelles se trouve Paris, et que personne n'oubliera cette étape majeure.
Notre relation restera privilégiée. Ma présence au Maroc, accompagné de membres de gouvernement français, en est un nouveau témoignage.
Sur le plan économique et financier, le Maroc a bénéficié traditionnellement d'une aide importante de la France. Notre relation privilégiée est confirmée à nouveau par la signature récente d'un accord sur la dette entre MM. Strauss-Kahn et Jettou, qui sont avec nous. La dette extérieure du Maroc pèse lourd et constitue un handicap pour la croissance économique du pays.
C'est pourquoi nous avons décidé de poursuivre ensemble une gestion dynamique de cette dette. L'accord signé prolonge un processus qui permet au Maroc, au lieu de rembourser sa dette pour sa valeur nominale, d'utiliser les montants normalement consacrés au service de la dette à des investissements privés. Il porte sur 1,4 milliard de francs, soit au total 3 milliards de francs sur une période de trois ans.
L'importance de cet accord manifeste, une fois de plus, la confiance de la France en l'avenir économique du Maroc. Cet effort est l'exemple même du concours sur lequel vous pourrez compter. Et sans préjuger des résultats des discussions que nous avons engagés hier, et que nous poursuivrons cet après-midi, dans le même esprit, les résultats de ce premier sommet des chefs de gouvernement français et marocain sont d'ores et déjà très encourageants. Ils se traduisent par des engagements concrets favorisant la mise à niveau de l'économie marocaine.
Ayez confiance en la France, ayez confiance en l'Union européenne, désireux d'accompagner le Maroc sur la voie du développement et à la prospérité. Croyez en la volonté des gouvernements de nos deux pays d'assurer conjointement le suivi d'un processus qui a engendré de grandes espérances en France et au Maroc. La rencontre d'aujourd'hui traduit notre fidélité à cet objectif et notre volonté politique de réussir.

Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre attention.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 juin 2001)