Déclaration de M. Robert Hue, secrétaire national du PCF, sur le rôle et la place du PCF dans le cadre de l'Europe libérale et sociale, les résultats de l'élection européenne du 13 juin 1999 et la préparation du 30 ème congrès du PCF.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Université d'été du PCF à La Seyne sur Mer du 20 au 22 août 1999

Texte intégral

Chers Camarades,
Notre université d'été se déroule en un moment où le rôle, la place du parti communiste -son existence même en tant que force politique qui compte- sont des enjeux majeurs d'une bataille politique si acharnée qu'elle n'a guère connu de répit durant les mois d'été. Cette bataille a été engagée depuis plus d'une année. Des forces considérables s'y consacrent. Du monde politique comme du monde médiatique. En France, mais aussi au niveau de l'Europe.
Et comme d'habitude en pareille circonstance, on ne recule devant rien, tous les coups sont permis. Y compris ceux qui visent les personnes, touchent à leur intégrité de citoyens, de militants pour tenter de les faire plier ou taire. Je peux en témoigner. Tout en ajoutant d'ailleurs que n'étant pas d'un naturel à me laisser impressionner, je n'ai l'intention ni de plier, ni de me taire !
L'objectif poursuivi est de contraindre la majorité et le gouvernement issus des élections législatives de 1997 à céder aux pressions de toutes sortes qui s'exercent sur lui pour qu'il s'aligne sur les positions libérales de ses partenaires européens -principalement britanniques et allemands-.
Evidemment, l'obstacle à un tel alignement réside dans la nature même et la composition de la majorité de gauche plurielle. Elle s'est constituée à partir du contenu antilibéral d'une déclaration commune adoptée par le parti socialiste et le parti communiste. Elle ne peut exister, en tant que majorité parlementaire, sans le parti communiste avec ses trente cinq députés. Et chacun sait que si Lionel Jospin et le parti socialiste faisaient leurs les orientations du manifeste néolibéral de Tony Blair et Gérard Schroeder, cette majorité ne pourrait plus exister !
Certes, les pressions que je viens d'évoquer ne sont pas sans effet. D'autant qu'au sein du parti socialiste, au gouvernement, dans l'entourage même du premier ministre, des hommes et des femmes aux convictions libérales semblables à celles des sociaux démocrates allemands ou anglais ne sont pas sans moyens pour faire valoir leurs points de vue. Et certaines décisions gouvernementales en sont marquées -qu'il s'agisse des privatisations génératrices de suppressions massives d'emploi, ou des reculades devant les résistances patronales visant à empêcher que les trente cinq heures provoquent des avancées en matière de progrès social et de créations d'emplois.
Mais c'est un fait que, contrairement à ce qui s'était produit avec le " tournant de l'austérité " près de trois ans après la victoire de la gauche en 1981, Lionel Jospin s'est refusé à déclarer inatteignables les objectifs sur lesquels il s'est engagé en 1997. Et il a nettement marqué ses distances avec le manifeste Blair-Schroeder, en indiquant clairement que cette position originale du premier ministre socialiste français par rapport à ses homologues d'autres pays européens devait beaucoup -au-delà des leçons qu'il a lui-même tirées des conséquences des engagements non tenus dans les années quatre-vingt- à la place des communistes dans sa majorité.
On ne peut donc s'étonner de l'acharnement des tenants d'une réorientation néo-libérale de la politique engagée depuis 1997 à vouloir déstabiliser l'actuelle majorité afin d'en modifier et la nature -c'est-à-dire le contenu politique sur lequel elle s'est construite- et la composition.
C'est d'abord l'utilité du parti communiste au sein de la majorité, du gouvernement qui a été mise en doute. Il ne servait à rien -proclamait-on-. Il n'avait aucune influence sur la politique gouvernementale.
La vie a montré que les choses ne sont pas aussi simples. A la fois avec les décisions gouvernementales que j'ai rappelées tout à l'heure, prises malgré notre avis négatif, et d'autres décisions, plus positives, marquant, avec l'action des ministres communistes, l'importance de l'apport communiste à la majorité et au gouvernement.
Ce fut alors le lancement de la candidature de Daniel Cohn-Bendit affirmant haut et fort à la fois ses convictions libérales, favorables à la domination des marchés financiers, et sa volonté de modifier la composition de la majorité en amoindrissant la place qu'y occupe le parti communiste.
Faut-il considérer, comme le font certains commentateurs, que le résultat des élections européennes aurait consacré le succès de cette opération, et qu'il faudrait dès lors recomposer la majorité au profit du courant social libéral ?.
Je ne le pense pas. Je suis même convaincu du contraire. Et c'est d'abord Daniel Cohn-Bendit lui-même qui en a fait la démonstration. Constatant l'effet désastreux de ses premières déclarations appelant à affaiblir le parti communiste, il s'est empressé de proclamer que cela avait été une erreur de sa part et que, non, l'enjeu des élections européennes n'était pas là ! Et c'est sur cette base -en se présentant comme étranger aux calculs politiciens- qu'il a obtenu son résultat du 13 juin.
Certes, dès le soir des élections, une fois les voix engrangées, il s'est empressé de revenir à ses premières déclarations. Mais il n'en reste pas moins -et on le sait dans son entourage- qu'il n'aurait pas obtenu un tel résultat sur de telles orientations. Les Français ne confondent pas élections législatives et élections européennes. Et c'est tout à fait logiquement que le premier ministre a considéré que le résultat de ces dernières ne conduisait nullement à quelque " rééquilibrage " que ce soit de son gouvernement.
Des protestations s'élèvent du côté des amis de Daniel Cohn-Bendit et des militants médiatiques de la campagne visant à une réorientation néo-libérale de la politique française. Certains, parmi ces derniers, s'efforcent de présenter ces protestations comme la preuve qu'il faudra désormais compter avec le courant Cohn-Bendit -parfois artificiellement affublé du nom de " troisième gauche " alors qu'il est seulement une variante de social-libéralisme-. Et en passer par ses volontés.
Mais, chers camarades, en politique mieux vaut penser par soi-même, en regardant en face la réalité. Et quel que soit le talent de ces " faiseurs d'opinion ", la réalité c'est que les protestations en question, par leur virulence même, marquent le dépit devant l'échec d'une opération politicienne ayant pourtant bénéficié d'énormes moyens.
L'on tente de présenter désormais les Verts comme une force indépendante au sein de la majorité, et capable de peser sur elle en menaçant de se retirer du gouvernement ? Mais, là encore, c'est la réalité qu'il faut regarder. Elle est double : la majorité resterait majoritaire quand bien même les Verts s'en retireraient. On sait que ce n'est pas le cas avec les communistes. Et puis, qu'on veuille bien me le pardonner, mais il faut appeler un chat un chat : en 1997, aucun député Vert n'aurait été élu sans la décision du parti socialiste de ne pas présenter de candidat dans les circonscriptions concernées. Et il en sera de même lors des prochaines échéances législatives -pour lesquelles d'ailleurs nous sommes bien seuls à proposer l'introduction de la proportionnelle-. La situation, on le sait, est différente concernant les communistes. L'exemple de 1997 est là, avec 35 députés communistes élus alors qu'aux précédentes élections européennes notre score avait été du même niveau que celui de juin dernier.
Alors, chers amis, laissons les manipulateurs d'opinion à leurs calculs, et abordons la période qui vient, avec les problèmes à résoudre, les avancées à conquérir, sereinement, mais avec esprit offensif. Les communistes ne se laisseront pas impressionner par ceux qui -à l'instar des illuminés prédisant la catastrophe planétaire au rendez-vous de l'éclipse du 11 août- prédisent pour la énième fois, la mort certaine du parti communiste pour demain.
Nous avons beaucoup à faire pour contribuer à ce que le mouvement populaire s'empare des problèmes posés à notre peuple aujourd'hui pour faire valoir des solutions novatrices. .
C'est la signification de la pétition nationale que nous proposons depuis le début de l'été à la signature des françaises et des français.
Vous l'avez remarqué il s'agit bien, avec cette pétition, de faire grandir l'exigence de mesures structurelles fortes susceptibles de répondre vraiment aux urgences sociales.
C'est vrai en matière d'emploi, avec notre proposition d'un moratoire sur tous les plans de licenciement et la proposition de loi antilicenciement des députés communistes. .
C'est vrai, également, à propos de la seconde loi sur les 35 heures. Notre exigence est claire : il faut un texte sensiblement amendé, permettant de déboucher sur la création d'emplois en nombre significatif.
C'est vrai, de la même façon, en ce qui concerne nos propositions en faveur de la justice sociale avec, notamment, l'augmentation des salaires, des retraites, des minimas sociaux.
Oui, nous avons beaucoup à faire pour que notre parti soit bien à la hauteur des responsabilités et des ambitions qui sont les siennes. Nous ne laisserons personne nous en détourner.
L'université d'été qui s'achève aujourd'hui aura permis de poursuivre le débat engagé dans notre parti au lendemain des élections européennes.
Ces trois journées de réflexion en auront sans nul doute été un moment fort. C'est l'objectif que nous nous étions fixé. Il ne s'agit pas, bien sûr, de " boucler " par avance la discussion préparatoire au 30è congrès. Au contraire, les grands défis que nous avons à relever exigent un immense effort d'élaboration collective. Cet effort, nous venons de l'engager. Il va nous occuper pendant les mois à venir. Nous avons la responsabilité de tout faire pour lui donner toute son ampleur. Créons les conditions permettant à tous les communistes d'y participer. N'occultons aucune des questions qui nous sont posées.
Parmi ces questions il en est une, chacun le voit bien, absolument essentielle : quelle est la conception de la transformation sociale du parti communiste ? Et que devient-elle dès lors que ce parti participe à un gouvernement dirigé, et dominé, par le parti socialiste ?.
A question directe, réponse directe. Nous concevons la transformation sociale comme la réponse concrète aux problèmes posés à notre société.
Ces problèmes, on les connaît. Ce sont les inégalités, les injustices. C'est la citoyenneté confisquée. C'est la prédominance de rapports de domination des plus forts, des plus riches, sur tous les autres, au détriment du nécessaire développement de rapports nouveaux de coopération entre les hommes, les hommes et les femmes, les peuples, les Etats. Et on ne peut y faire face qu'en transformant en profondeur la société. En bouleversant, en révolutionnant ses priorités : c'est l'être humain qui doit être premier, et non l'argent, la rentabilité des capitaux.
Les militants communistes de 1999 considèrent peut-être cette définition de la transformation sociale comme une banalité. Je suis tenté de dire : " tant mieux ". C'est que la mutation que nous avons engagée a permis quelques évolutions par rapport à d'autres époques marquées par une conception bien différente, conditionnant la transformation de la société à une préalable -et d'ailleurs fort aléatoire- " prise de pouvoir " pour " appliquer " à la société un modèle préétabli.
C'est progressivement que nous avons rompu avec cette conception. Pour envisager la transformation sociale comme un processus, comme une suite de luttes, de conquêtes du mouvement populaire. Avec un parti communiste qui, au coeur de ce mouvement populaire, doit intervenir pour formuler ses propositions et contribuer à animer les luttes à partir des aspirations, des attentes des citoyens eux-mêmes. Un parti communiste déployant toutes ses capacités de rassemblement sur toutes les questions effectivement posées dans la société.
Une telle évolution nous a conduit à appréhender tout autrement le rôle et la place du parti communiste. Il ne pouvait plus s'agir de le définir " à côté " de la société ou, par principe, automatiquement " en avant " de la société.
Il ne pouvait plus être question de répondre aux questions concrètes, aux problèmes immédiats de la société et des citoyens par la promesse d'un lointain et très hypothétique avenir. Il fallait, au contraire, travailler à ancrer l'action du parti communiste dans la réalité comme elle est ; en ne négligeant aucune des questions qui s'y trouvent posées ; et en renonçant à les distinguer selon que nous, communistes, les jugions fondamentales ou subalternes.
C'est ainsi que s'est imposée l'exigence d'une profonde mutation du parti communiste. Le sens de cette mutation, c'était de retrouver l'identité communiste française dans sa capacité à entretenir des liens étroits avec notre peuple, ses aspirations, ses rêves, ses luttes.
Dans sa capacité, surtout, à contribuer à rassembler notre peuple plutôt que de l'inviter simplement -comme on le faisait communément- à se rallier à un projet élaboré par les seuls communistes, et dont ils se réservaient, le moment venu, le " rôle dirigeant " comme on disait, dans sa mise en oeuvre.
Il a donc fallu réfléchir à modifier profondément les comportements communistes issus des conceptions et des pratiques anciennes.
Il a fallu commencer à reconstruire, sur des bases nouvelles, des rapports étroits avec le mouvement social, le mouvement syndical dans sa diversité, avec les intellectuels, avec le mouvement démocratique en général.
Il a fallu porter une attention particulière à tous les mouvements qui, issus des changements de la société, y font grandir des exigences politiques nouvelles : le féminisme, l'écologie, l'antiracisme. Et souvent dans des formes également nouvelles, qui empruntent beaucoup, pour les restituer de façon moderne, à certaines conceptions libertaires qui ont joué un rôle important dans la naissance et le développement du mouvement ouvrier français. Je pense, par exemple, à celles et ceux, de tous horizons, qui bousculent les formes traditionnelles de l'action à propos du chômage et de la précarité, du droit au logement, des sans-papiers, de toutes les formes d'exclusion ; ou encore à la diversité et au non conformisme des militants qui s'emploient à prévenir et à faire reculer le terrible fléau que constitue le Sida. Et plus généralement à tous ces mouvements qui agissent contre toutes les formes de discrimination et pour une vraie reconnaissance du droit à la différence.
Oui, il nous a fallu entreprendre, et il nous faut absolument- réussir tous ces efforts pour une meilleure inscription de notre parti, de l'action de ses militants, de ses élus et responsables dans la société française d'aujourd'hui, au coeur des bouleversements qui l'agitent et la transforment.
C'est tout cela qui nourrit le travail d'élaboration de notre stratégie, ainsi que la réflexion sur les indispensables changements à opérer dans la conception et le mode de fonctionnement de notre parti.
J'ai bien conscience que cette mutation peut parfois surprendre, dérouter un certain nombre de communistes. D'ailleurs, elle n'est pas exempte de tâtonnements, de recherches parfois difficiles.
Mais je ne regrette absolument pas que nous l'ayons engagée. Et j'ai la certitude que les communistes ne le regrettent pas non plus. Ils l'ont exprimé dans nos récents congrès : ils veulent que leur parti soit " dans le coup ", c'est-à-dire porteur d'une vision d'avenir moderne et mobilisatrice.
Ils veulent agir dans un parti utile, efficace dans le combat contre toutes les discriminations, les injustices, les dominations du capitalisme.
Ils veulent un parti communiste capable d'intervenir dans la société, avec les citoyens et le mouvement social, réellement en prise sur toutes les questions qui y sont posées, toutes les difficultés qu'il faut surmonter, tous les défis nouveaux qu'il faut affronter.
J'ai évoqué il y a un instant les doutes, les interrogations suscités par cette mutation. Je ne les prends pas à la légère.
Certains redoutent qu'en lieu et place de la vision dogmatique de la transformation sociale avec laquelle nous avons rompu, il n'y ait plus rien. Une absence de visée, de projet, laissant le champ libre à tous les opportunistes.
Et les conditions dans lesquelles nous sommes placés depuis juin 1997, en participant à un gouvernement dominé par le parti socialiste ne sont pas sans poser problème.
Je veux le dire nettement : notre ambition de transformation sociale, la perspective que nous en proposons ne sauraient se résumer à notre participation au gouvernement.
Nous n'avons, de ce point de vue, aucune illusion.
Certes il est possible, par le moyen de la participation gouvernementale, de faire évoluer un certain nombre de choses dans un sens favorable aux intérêts des citoyens. Et nous nous y employons, sans rien négliger de tout ce qui peut le permettre. L'action déterminée et efficace des ministres communistes en témoigne.
Mais nous connaissons parfaitement les limites de l'action gouvernementale quand le choix du parti socialiste dominant est d'aménager le système capitaliste, de transiger avec lui.
Notre rôle, au sein d'un gouvernement où nous sommes évidemment minoritaires, ne peut donc être de convaincre la majorité de la nécessité de faire une autre politique : la politique du communisme.
Je le répète : nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour pousser en avant la politique du gouvernement ; pour lui donner chaque fois que possible un vrai contenu de gauche, permettant de répondre véritablement aux attentes sociales des français.
Et nous avons l'intention de continuer à faire ainsi.
Mais l'essentiel est sans doute ailleurs. L'essentiel est dans le mouvement populaire, dans sa capacité à se rassembler, à porter avec suffisamment de force, de radicalité, des exigences neuves, jusqu'à en rendre incontournable la satisfaction.
C'est pourquoi, il ne suffit pas de tout ramener au rapport des forces au sein du gouvernement pour avancer dans cette voie. En rester là, ce serait même courir un sérieux risque d'impuissance.
Je veux y insister : ce qui est déterminant, c'est le développement du mouvement populaire, dans la diversité des initiatives dont il est capable. Et cela pose la question de la capacité des communistes à informer, proposer, impulser, ouvrir la perspective de changements qui, de toute façon, impliqueront d'autres rapports de force.
On ne fera pas l'économie de cette intervention du mouvement populaire dans la définition et la mise en oeuvre de choix politiques neufs. Cela doit être clair : nous ne cherchons nullement à en faire l'économie ! C'est tout au contraire pour contribuer à en favoriser l'essor que nous avons à nous interroger sur le parti communiste qu'il faut à cette ambition.
J'ai la conviction qu'il doit être un parti différent de celui des décennies précédentes. Je le pense profondément. Et dire cela ce n'est pas dénigrer le passé ou, pis encore, le renier. Il ne serait pas digne d'insulter le passé. Mais il serait suicidaire d'insulter l'avenir !
Je l'ai dit : nous voulons agir en faveur de la transformation sociale, ouvrir la perspective d'une société débarrassée de l'exploitation et des aliénations que fait peser sur elle le capitalisme.
Et pour cela, oui, il y a besoin d'un parti communiste dans la société française.
Un parti pleinement communiste, c'est-à-dire résolument anticapitaliste, porteur en toutes circonstances des protestations, des souffrances et des aspirations des citoyens.
Un parti moderne, attentif à tout ce qui bouge dans la société, sachant choisir les priorités de son action non pas à partir de présupposés mais en fonction des questions posées aujourd'hui à notre peuple et au monde moderne.
Un parti en prise sur le réel, informé et conscient des formidables capacités de développement qu'il recèle. Et, en même temps, un parti qui sache ne pas couper les ailes à l'imagination, au souffle, à la part de rêve sans lesquels on ne donnera pas de véritable élan à l'action pour changer le monde.
Un parti communiste capable de jouer un rôle moteur dans l'animation et la mise en mouvement d'une grande force communiste démocratique.
Un parti -et c'est extrêmement important- pleinement valorisant pour les individus qui en sont membres, ou qui s'y intéressent d'une manière ou d'une autre.
Les rapports entre le parti et ces hommes, ces femmes ne peuvent pas être fondés sur une conception instrumentale, à sens unique, selon laquelle ne serait digne d'intérêt que ce qui serait utile au parti. Oui, c'est bien un militantisme enrichissant au plan humain, proposant des formes d'engagement gratifiantes pour les individus eux-mêmes, pour leur propre développement, qu'il nous faut inventer et faire vivre.
Et cela suppose, pour les adhérents, une revalorisation sensible de leur rôle et de leurs pouvoirs dans le parti. Ce qui ne se réduit pas à des consultations formelles, épisodiques ; à des questions auxquelles ils seraient simplement invités à répondre par OUI ou par NON.
Vous le voyez, chers camarades, c'est d'un parti radicalement nouveau que je parle. C'est de reconstruire une identité communiste moderne, anticonformiste, ouverte sans réticence sur le monde et sur la société, complètement disponible à tout ce que les citoyens font entendre, expriment diversement, sous des formes elles-mêmes très diverses.
Faut-il chercher dans le passé des moyens, des références susceptibles de conforter l'identité communiste ? Ou ne faut-il pas, plutôt, investir avec audace toutes les potentialités modernes nous permettant d'être pleinement le parti communiste d'aujourd'hui, dans le sens que je viens d'indiquer ?
Pour ma part, c'est dans cette démarche de mutation profonde que je suis totalement engagé.
Parce qu'elle est à mes yeux, vous le savez, absolument indispensable.
J'ajoute : elle est également urgente.
Sans elle, j'en suis convaincu, c'est la question même de l'existence d'un parti communiste en France qui est posée.
Nous avons une toute autre ambition que celle de limiter notre action à rassembler les seules voix de la protestation.
Nous voulons être, bien sûr, le parti qui les rassemble. Mais aussi, d'un même mouvement, le parti qui contribue à les inscrire dans le fort mouvement d'une construction moderne de l'avenir.
Je mesure l'étendue de ce que tout cela implique, et tout particulièrement du point de vue des directions, de leur fonctionnement et de leur renouvellement. Je parle ici de toutes les directions, à commencer par la direction nationale.
Je mesure ce que cela implique comme renouvellement. Et je l'assumerai.
Je l'ai dit, je suis engagé totalement dans la mutation de notre parti. Je veux, de toutes mes forces, réussir ce parti communiste nouveau qu'appellent les immenses défis de civilisation de notre époque.
Je souhaite que notre 30è congrès en fonde les bases et débouche sur la naissance, très vite, d'une formation politique communiste moderne. C'est aux communistes eux-mêmes, à tous les communistes, qu'il appartient naturellement de décider des conditions permettant d'aller dans ce sens, si telle est leur volonté.
Notre parti aura alors, j'en suis sûr, une direction profondément renouvelée, à l'image de la société d'aujourd'hui. Une direction qui comptera en son sein, un nombre sensiblement accru de jeunes, de femmes, d'acteurs du mouvement social.
Si nous parvenons à atteindre cet objectif -et j'ai la conviction qu'il est à notre portée- alors j'estimerai avoir bien travaillé pour contribuer à ce que nous franchissions ensemble une nouvelle étape : celle d'un communisme français, à l'échelle et à la hauteur des enjeux du 21è siècle.
Voilà dans quel esprit j'aborde la préparation du 30è congrès du parti communiste.
Je voulais vous en faire part.
Ensemble, nous allons maintenant travailler à développer le débat dans tout le parti, avec tous les communistes.
J'ai la conviction qu'ils sont décidés à construire avec audace et esprit offensif l'avenir de leur parti.
J'ai confiance.
(source http://www.pcf.fr/documents, le 8 février 2001)