Communiqués des pays de la CEE, sur le coup d'Etat en URSS et l'aggravation de la situation en Yougoslavie, La Haye le 20 août 1991.

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Circonstance : Réunion ministérielle extraordinaire des pays de la CEE, à La Haye le 20 août 1991, à la suite du coup d'Etat en URSS

Média : Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères - Bulletin d'information du ministère des affaires étrangères

Texte intégral

La Communauté européenne et ses Etats membres expriment leur profonde préoccupation face au coup d'état en Union soviétique. Ils condamnent fermement l'éviction du Président Gorbatchev de ses fonctions et la prise de tous les pouvoirs par un "Comité d'Etat pour l'état d'urgence" comme un acte clairement inconstitutionnel et une violation flagrante des obligations de l'Union soviétique au titre de l'Acte final de Helsinki et la Charte de Paris. La Communauté et ses Etats membres demandent que l'ordre constitutionnel soit restauré immédiatement et que le Président Gorbatchev soit rétabli dans ses fonctions et droits de chef d'Etat de l'Union soviétique.
- Bien que les résultats des événements en cours en Union soviétique ne soient pas clairs, le premier décret de ce Comité d'Etat, instituant, entre autres, la suspension des organes démocratiquement élus et la censure des média, ne laisse planer aucun doute sur la vraie nature du régime qui détient maintenant les rênes du pouvoir en Union soviétique. Gardant à l'esprit toutes les implications de la situation, ils appellent instamment les autorités soviétiques, en conformité avec les engagements que leur pays a souscrits dans l'Acte final de Helsinki et la Charte de Paris, à s'abstenir de tout acte d'intimidation ou de violence.
- La Communauté européenne et ses Etats membres sont convaincus que le maintien au pouvoir du nouveau régime ne peut que mettre fin au processus de réformes démocratiques en Union soviétique et aux améliorations remarquables du climat international auxquelles le Président Gorbatchev a si largement contribué et qu'ils estiment être une condition essentielle pour une coopération fructueuse entre eux et l'Union soviétique.
- Ils appellent instamment les dirigeants actuels à permettre l'accès à tous les représentants élus du peuple soviétique ainsi qu'au Président Gorbatchev lui-même. La Présidence a reçu mandat de contacter ces personnes afin de s'assurer de leur bien-être et de leur faculté d'exercer pleinement leurs droits et libertés.
La Communauté et ses Etats membres tiennent ceux qui ont pris le pouvoir pour responsables des conséquences possibles de leurs actions sur la stabilité, la sécurité et la coopération en Europe et sur les relations internationales en général. Ils sont conscients des préoccupations spéciales des pays d'Europe centrale et orientale à cet égard.
- Par solidarité avec ces pays, la Communauté et ses Etats membres réaffirment leur désir de conclure des accords d'association avec la Hongrie, la Pologne et la Tchécoslovaquie dans un avenir rapproché. Dans ce même esprit, ils réitèrent leur soutien complet au processus de réformes en cours en Bulgarie et en Roumanie. Ils soulignent également leur engagement de renforcer leurs contacts avec l'Albanie. La Commission explorera les voies et moyens pour développer la coopération avec la Bulgarie, la Roumanie et l'Albanie.
- Ils notent que le coup d'état est intervenu la veille de la signature prévue du nouveau Traité d'Union, qui aurait représenté un pas important sur la voie d'une amélioration des relations internes et de la stabilité en Union soviétique. Ils réitèrent leur conviction que les problèmes existant dans les relations entre les républiques constituantes d'Union soviétique ne peuvent être surmontés qu'à travers la négociation et le dialogue. En particulier, ils sont sérieusement préoccupés par les rapports faisant état d'actions militaires dans les pays baltes et lancent un appel pressant aux autorités soviétiques de s'abstenir de toute menace ou recours à la force contre les gouvernements et les représentants démocratiquement élus des peuples baltes.
- La Communauté européenne et ses Etats membres insistent pour que l'Union soviétique se conforme à tous ses engagements et traités internationaux, y compris ceux se rapportant au retrait des troupes et au désarmement. Ils s'attendent à ce qu'elle respecte l'intégrité et la sécurité de tous les Etats en Europe. La Communauté et ses Etats membres individuellement suspendront leur aide économique sous forme de crédits pour l'aide alimentaire et l'assistance technique aussi longtemps que l'Union soviétique ne retournera pas à l'ordre constitutionnel et au plein respect de ses obligations internationales au titre de la Charte de Paris. Toutefois, ils poursuivront l'aide humanitaire d'urgence à condition qu'elle parvienne à la population dans le besoin. Les Etats membres sont invités à envisager des actions similaires.
- Par ailleurs, la Communauté et ses Etats membres sont de l'avis que tant que l'ordre constitutionnel et les libertés démocratiques n'auront pas été restaurées, leur participation à la réunion à Moscou de la Conférence sur la Dimension humaine dans le cadre de la CSCE ne peut se justifier.
Déclaration sur la Yougoslavie.
- Sur la base d'un examen de la situation en Yougoslavie à la lumière des compte-rendus de l'émissaire de la Présidence, la Communauté et ses Etats membres ont exprimé leur grave préoccupation devant les fréquentes violations du cessez-le-feu qui ont à nouveau entraîné de sérieuses pertes en vies humaines.
- Ils accueillent avec satisfaction la disponibilité de toutes les parties concernées à commencer des négociations sur l'avenir de la Yougoslavie et appellent instamment toutes les parties à faire preuve de bonne foi dans la conduite de ces négociations. Ces dernières devraient se fonder sur les principes suivants : tout changement de frontière interne et externe par la force n'est pas acceptable et toute solution devrait garantir les droits des minorités dans toutes les Républiques. En particulier, ils appellent les parties concernées à faire tout leur possible afin d'assurer que le processus de négociation ne soit pas mis en péril par de nouvelles violences.
- La Communauté et ses Etats membres continueront de suivre de près la situation en Yougoslavie et se tiendront prêts à faciliter, par leur aide, le processus de négociation et à contribuer à une mission de vérification internationale du cessez-le-feu si tel est le désir des parties.