Déclaration de M. Georges Sarre, président du Mouvement des citoyens, sur le projet social de Jean-Pierre Chevènement, candidat du MDC à l'élection présidentielle de 2002, auquel ont adhéré des syndicalistes appartenant à toutes les composantes du mouvement syndical français, Paris, le 16 février 2002.

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Circonstance : Rencontre avec les signataires de l'appel aux syndicalistes en faveur de la candidature de Jean-Pierre Chevènement à l'élection présidentielle le 16 février 2002

Texte intégral

Chers Amis,
Chers Camarades,
La République ne peut être elle-même que si elle est sociale. C'est-à-dire si elle assure à chaque citoyen la possibilité de subvenir à ses besoins et à ceux des siens. La solidarité doit jouer alors en faveur de ceux qui ne peuvent travailler. L'emploi, le droit du travail, la protection sociale sont donc des exigences républicaines. Aussi, il est important que de nombreux représentants de toutes les couches de salariés se prononcent pour Jean-Pierre Chevènement. Il veut relever la France avec la République. Il veut que la République soit pleinement sociale. Il est significatif que, dès son origine, ce mouvement de soutien à Jean-Pierre Chevènement ait reçu l'adhésion de syndicalistes, appartenant à toutes les composantes du mouvement syndical français. Dans ce domaine, aussi, devant l'urgence, il y a des clivages qu'il faut savoir dépasser.
Pour être sociale, la République ne peut être absente du champ de l'économie. Elle dispose alors de deux principaux leviers : la loi et le service public. Issue du débat public et démocratique entre les citoyens, la loi protège les plus faibles parce qu'elle est égale pour tous. La loi, expression de l'intérêt général, est garantie par la force de l'Etat, de la République donc. Or, on voit bien que le règne de la loi est, aujourd'hui, de plus en plus critiqué et discrédité au profit du contrat. Un des rares propos un peu consistant de Jacques Chirac, lors de sa déclaration de candidature, fut une apologie du contrat. De son côté, Martine Aubry, qui a rédigé le programme du parti du " possible " candidat, a dit tout le bien qu'elle pensait du contrat. Or, le contrat, c'est le fruit d'un rapport de forces entre des parties privées, donc rarement entre des parties égales.
Le contrat consacre l'infériorité du faible. Le contrat laisse seul l'employé devant l'employeur. Certes, il y a le syndicat. La vocation du syndicalisme est même d'essayer de rééquilibrer le rapport de forces. Mais, vous savez d'expérience combien ce rééquilibrage est difficile, combien l'employeur possède de moyens pour l'empêcher ou, tout au moins, pour qu'il ne soit jamais parfait. La puissance du syndicalisme dépend donc d'abord, bien sûr, de l'adhésion des salariés. Mais, elle doit aussi être confortée par la force de la loi. Le monde du travail a besoin d'une République vigoureuse, qui sache s'affirmer et faire respecter la loi.
Le service public est un autre moyen pour la République. Par ce biais, elle peut impulser et entraîner l'économie ; elle peut aménager le territoire ; elle peut intervenir pour procéder aux corrections nécessaires, sans avoir recours à une lourde bureaucratie. Jacques Chirac et Lionel Jospin, d'un commun accord, liquident les services publics en les privatisant. Ils se disent contraints par Bruxelles par les " talibans " de la concurrence. Mais, ces contraintes, c'est eux qui les acceptent ! Les directives, c'est eux qui les approuvent !
Aujourd'hui, ils en sont à vouloir privatiser EDF. Ils se chamaillent pour savoir si l'Etat doit rester ou non majoritaire ; vain pugilat quand la logique du profit est rouleau compresseur ! Vain pugilat, car tout seuil finit par sauter !

Avec France Télécom, nous voyons les premiers dégâts à terme : endettement excessif d'une entreprise qui a trop acheté trop cher à l'étranger. Et aussi l'équivalent de vingt départements qui n'est pas couvert par le téléphone portable. Enfin, comment ne pas signaler que Jean Claude Gayssot, ministre communiste des Transports, s'apprête à mettre en bourse la société des Autoroutes du Sud de la France ? L'idéologie de la mondialisation ultra-libérale fait décidemment des ravages !
Cette même idéologie menace de démanteler notre protection sociale. Sur la suggestion intéressée du Medef, commence à pointer l'idée d'introduire au sein de l'assurance-maladie au nom d'une prétendue meilleure efficacité un peu de concurrence, juste un peu de concurrence, au début bien sûr. De même, Lionel Jospin et Jacques Chirac veulent instiller progressivement et de manière détournée la retraite par capitalisation. Nos deux compères sont prudents, ils connaissent l'attachement des Français à la répartition. Mais, Lionel Jospin a déjà obtenu le soutien du président du plus important fond de pension américain. La faillite retentissante d'Enron ne les gêne pas. Pourtant, les salariés de cette entreprise ont perdu non seulement leur emploi, mais aussi leur retraite. Nos deux sortants et leurs amis veulent jouer en bourse les économies des travailleurs. Avec le secteur public, nous avions en France un fond de pension national collectif. Il assurait l'avenir économique du pays. Il était le socle de la solidarité entre les générations. Ils finissent de le mettre à l'encan.
Alors, il faut alimenter le marché des capitaux pour subvenir à tant de braderies. L'argent de la protection sociale est une proie désignée. Ils tentent même de faire vibrer la corde du patriotisme. Les fonds de pension anglo-saxons posséderaient 40 % du CAC 40. De qui la faute ? Ils voudraient nous faire croire que des fonds de pension français investiraient en France. Peut-être d'ailleurs, si c'est leur intérêt. Mais, ils iront ailleurs, si leur intérêt est autre. Le problème des retraites dans notre pays sera résolu par l'emploi et la démographie.
Chers Amis, Chers Camarades,
Avec Jean-Pierre Chevènement, nous avons la possibilité de voir s'arrêter l'hémorragie des acquis sociaux, l'anéantissement des conquêtes du mouvement ouvrier. Pour la France et pour la République, nous ne devons pas laisser passer cette chance.
Nous devons convaincre tous ceux qui pourraient se laisser séduire par celui qui nous a fait, il y a sept ans, le coup de la " fracture sociale ", ou par ces candidats qui vont agiter comme un talisman leur appartenance à une gauche qu'ils ont vidée de tout sens. Je ne veux même pas évoquer les impasses rhétoriques sur les " travailleuses, travailleurs ".
Jean-Pierre Chevènement est connu. Jean-Pierre Chevènement est crédible. Jean-Pierre Chevènement est fiable. A vous d'en convaincre les salariés.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)