Texte intégral
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Bonjour Ernest-Antoine Seillière. L'année commence bien. Apparemment vous allez tenir vos promesses. La bataille reprend et s'amplifie. Je m'explique. Vous achevez ce soir à Champs sur Marne vos sept forums régionaux avant le Congrès exceptionnel du MEDEF dans une semaine, le 15, à Lyon. Deux mille entrepreneurs vont voter pour dire leurs demandes pour le prochain quinquennat. Leurs demandes, leurs souhaits ou leurs exigences ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, notre démarche a été simple. Nous avons été sur le terrain, dans la France entière, nous avons rencontré les entrepreneurs que nous représentons et nous leur avons dit pour assurer l'avenir de notre pays dans l'Europe dont on voit bien qu'elle se fait et qu'elle se fait vite : que devons-nous, nous entrepreneurs, proposer au pays dans notre domaine de compétences ? Et nous avons donc, sujet après sujet, passé en revue les grands problèmes des entrepreneurs et de la société française et nous allons proposer des solutions. Alors par exemple, si vous voulez, sur le plan du travail dans notre pays, la place du travail, la valeur du travail, nous allons demander que chacun retrouve la liberté de travailler autant qu'il le veut !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Pourquoi ? Le travail n'est pas libre en France ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Attendez, les 35 heures vous interdisent, vous le savez bien, d'aller plus loin dans votre effort même si vous le souhaitez, même si vous le voulez !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors les 35 heures, vous les avez détestées et combattues, le MEDEF
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous continuons, nous continuons
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors est-ce que si la droite arrive au pouvoir vous lui demandez d'abroger la loi des 35 heures ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Très simplement nous lui disons ou bien vous introduisez dans ce dispositif les vraies souplesses supplémentaires qui permettent aux partenaires sociaux dans l'entreprise, dans le métier de déterminer ensemble, en fonction des circonstances de leur entreprise, de leur métier, ce qu'il faut faire pour travailler, comment on travaille et vous laissez donc les Français travailler ou bien alors, c'est vrai, je pense à ce moment-là qu'il faudra abroger ce dispositif, que nous sommes les seuls au monde à avoir mis en place et les seuls en Europe. Alors ceci est pour nous une véritable exigence.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : On supprime la loi Aubry ou on la contourne, c'est ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oh écoutez, je crois qu'il faut être franc, en quatre ans la loi Aubry a produit des effets sociologiques énormes, les Français n'ont plus vis-à-vis du travail la même position qu'avant, je pense qu'il faut reconnaître le phénomène sociologique, on ne va demander l'abrogation de la loi, mais de grâce qu'on permette aux Français de travailler même dans le cadre de ce dispositif unique au monde.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Je continue à prendre quelques exemples. La retraite, Ernest-Antoine Seillière, à 55 ans, à 60 ans ou quand on le décide ? à la carte ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Tout à fait clairement à la carte, quand on le décide, les règles encore une fois qui sont imposées depuis maintenant une cinquantaine d'années dans ce domaine sont périmées, le pouvoir politique, de droite ou de gauche peu importe, s'efforce depuis des années et des années de dissimuler le phénomène, on ne le traite pas, on fait des rapports, nous voulons pousser le pouvoir politique à prendre la chose en main et à décider et nous voulons faire en sorte que chacun puisse gérer sa retraite comme il l'entend et qu'on se mette devant le sujet plutôt que de vouloir l'éviter.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Votre démarche, même si on commence à s'habituer à ce que fait le MEDEF, est plutôt inédite. Est-ce que ce n'est pas aux politiques, aux grands politiques de choisir, de décider les grands choix pour le pays ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Je crois que ceux qui prendront le pouvoir demain ou qui le garderont seront ceux qui décideront, ça va de soi, en démocratie politique c'est le pouvoir politique qui décide. Mais nous voulons faire en sorte dans notre pays, comme dans tous les pays du monde, que les entrepreneurs, ceux qui font la richesse du pays, les biens les services, ceux qui font l'emploi, ceux qui font la croissance, soient des partenaires, des interlocuteurs, qu'ils soient entendus et que donc notre force de proposition soit reconnue et que bien entendu dans les décisions des politiques on trouve assez largement ce que les entrepreneurs proposent. Si on veut l'ignorer, hélas, nous irons vers le déclin.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Est-ce que c'est une stratégie d'opposition ou de réflexion critique, de pression sur l'Etat ou les gouvernants et est-ce que vous resterez sur la même ligne quelle que soit l'équipe au pouvoir ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui. Quelle que soit l'équipe au pouvoir parce que nous sommes non-partisans. Notre problème n'est pas de savoir si c'est x ou y.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Non-partisans.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non-partisans, c'est-à-dire que nous ne soutenons personne, nous ne soutenons aucun parti politique mais nous fournissons à ceux-ci des analyses et des propositions. Vous savez on a toujours dit ah les entrepreneurs, ils se plaignent, ils sont frileux. C'est absolument faux, nous sommes les seuls actuellement, les seuls à proposer dans les domaines fondamentaux de la Sécurité sociale, de la retraite, du chômage, des formules de modernisation, de réforme.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Et on est ingrat avec vous parce qu'on ne vous comprend pas, c'est ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, on feint de ne pas vouloir entendre parce que c'est plus commode de crier à bas le MEDEF que bien entendu d'entrer en discussion, en débat avec nous sur des modèles d'ailleurs qui existent dans le monde entier et qu'on ne veut pas regarder.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ernest-Antoine Seillière, Lyon ce sera donc le résultat de plusieurs mois, que dis-je de plusieurs années d'action du MEDEF. Après le 15 janvier, après vous vous arrêtez ou vous continuez ? Vous vous taisez ou vous continuez ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ah nous continuons, c'est-à-dire que nous avons arrêté à Lyon, bien entendu, nos propositions, nous l'avons fait avec 2 000 entrepreneurs qui vont voter à la machine à voter, nous espérons être soutenus, il y aura d'ailleurs à travers le pays, dans les 165 MEDEF territoriaux, dans les centaines de fédérations un travail de fond, de démarche et nous allons, comme nous le disons, on n'aime pas la formule mais c'est bien vrai, harceler les politiques en leur disant : cessez de ne pas regarder en face les problèmes de notre pays et réglez les.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Qu'est-ce que ça veut dire harceler ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ca veut dire des démarches incessantes, de contact à tous les niveaux, au niveau des élus locaux, au niveau des élus nationaux, au niveau des candidats à la présidence de la République pour leur faire connaître les propositions qui, selon nous vont être susceptibles de faire réussir notre pays. Notre campagne, monsieur Elkabbach, s'appelle En avant l'Entreprise, en avant la France, ne l'oubliez pas !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Il y aura, Ernest-Antoine Seillière, un candidat chouchou du MEDEF ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Pas du tout ! Nous n'avons absolument aucun chouchou, notre seul chouchou c'est la réussite de notre pays. Ca c'est vrai et nous avons donc aucune détermination pour laisser la liberté chacun de faire dans le monde de l'entreprise ce qu'il veut en matière politique, c'est évident.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors les Français viennent de plébisciter l'euro, pour les entrepreneurs est-ce qu'il y a un message, quel est-il, quelles réformes ou quelles innovations, à votre avis, les Français ont-ils réclamé en choisissant de cette façon l'euro ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez d'abord, un premier message. Merci à tous ceux qui ont mis en place très bien et très rapidement l'euro, les entrepreneurs en ont largement leur place, les banques ont parfaitement fait leur travail, ne l'oubliez pas, des centaines de milliers d'agents dans des dizaines de milliers d'agences ont fait un travail de premier plan, je veux le souligner, les commerçants ont fait un travail de premier plan, tout le monde s'y est mis et nous avions, nous les entrepreneurs, pendant 10 ans pris le franc fort de façon à conduire à l'euro. Donc merci à tous ceux qui l'ont mis en place cette stratégie de réussite. Et puis il y a surtout un deuxième message. Regardez avec quelle facilité les Français ont accepté l'euro ! Ils ont envie de modernité, de changement, de réformes, ils veulent pouvoir avancer dans l'avenir qui s'ouvre à eux avec confiance et avec force et cela c'est un vrai témoignage !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Oui mais quelquefois ils craignent à propos de l'Europe sociale et d'ailleurs tous les candidats parlent d'Europe sociale et vous les entrepreneurs qu'est-ce que vous mettez dans ce concept d'Europe sociale ? Par exemple les droits sociaux acquis de longue lutte, est-ce que la France doit les garder ou est-ce que la France doit s'aligner sur les Etats européens qui ont chez eux un minimum social ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, la France doit être dans la moyenne européenne de façon à ne pas être en quelque sorte handicapée dans la compétition, ça va de soi. Et nous sommes partisans d'une Europe sociale, nous sommes d'ailleurs très connus pour l'être dans les milieux de patronat européens où nous préconisons la politique sociale, et d'ailleurs je vais être franc, pour une raison simple : nous avons tellement de contraintes, un droit du travail tellement complexe, tellement épais, tellement difficile que si nous nous mettons à la moyenne européenne, nous les entrepreneurs français nous pourrons travailler mieux qu'avant. Et donc nous sommes demandeurs d'une politique sociale à la moyenne européenne.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ca veut dire la régression sociale pour beaucoup ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Pas du tout, ça veut dire la suppression de la loi dite de modernisation sociale qui bloque la restructuration des entreprises quand c'est nécessaire, bien entendu l'aménagement des 35 heures puisque nous sommes les seuls à être en quelque sorte interdits de travailler quand c'est nécessaire et dans d'autres domaines, comme par exemple celui de la fiscalité où chacun le sait nous sommes à 100 milliards d'euros de prélèvements au-dessus de la moyenne européenne.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Donc l'Europe vous dites bravo parce que ça va être le plus petit dénominateur commun en matière sociale !
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, parce que je crois que ce sera la moyenne européenne qui s'imposera, harmonisation dans tous les domaines. Vous savez, on fait déjà ses courses maintenant en euros très facilement d'un côté à l'autre d'une frontière qui devient de plus en plus théorique, l'harmonisation vous la verrez se mettre en place dans les domaines sociaux, dans les domaines fiscaux et c'est comme ça que notre pays réussira.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ernest-Antoine Seillière, les médecins se mettent se mettent en grève, les médecins libéraux réclament à l'Etat des augmentations. Est-ce que ce n'est pas un paradoxe ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors nous sommes sortis de la Sécurité sociale et nous nous en félicitons parce que quand on voit des médecins libéraux faire grève, qu'est-ce que ça veut dire ? Ils sont leur propre employeur, ils font la grève contre qui ? Et aller chez la ministre pour réclamer des augmentations, nous disons bien que la confusion est totale, il n'y a pas de paritarisme, pas de gestion autonome de quiconque, on est sous la dépendance du pouvoir politique, on est dans une situation de quasi-fonctionnaire
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Mais comment on résout ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors nous avons proposé, nous, une nouvelle architecture pour faire en sorte qu'il y ait
JEAN-PIERRE ELKABBACH : En attendant la nouvelle architecture, les médecins, vous les augmenteriez ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, le bonheur d'être sorti de la Sécurité sociale c'est que nous ne sommes plus obligés de prendre position là-dessus et que nous n'avons plus de cortège devant le MEDEF. Alors qu'on aille voir maintenant la ministre sur le sujet puisque, semble-t-il, c'est l'Etat qui veut toujours se mêler de tout !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Est-ce que vous serez candidat à votre succession ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : On verra ça au lendemain des élections politiques, je verrai ça avec le conseil exécutif, est-ce que ça les intéresse que je reste ou est-ce qu'au contraire il vaudrait mieux que quelqu'un d'autre soit là, pour moi c'est indifférent mais je ferai ce qui rendra le plus service à l'entreprise.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Vous voulez dire ça va dépendre du .
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Du nouveau contexte, qu'est-ce qu'on voudra faire, est-ce qu'on aura voulu en effet entendre ce que nous avons proposé, est-ce qu'on voudra mettre en uvre la réforme, le dialogue et faire en sorte que la France gagne
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Si c'est un président plutôt de droite, Ernest-Antoine Seillière dira j'ai accompli ma mission, je peux m'en aller
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors là, vous avez tout faux.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : C'est pas ça, je m'occupe de mon entreprise
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Voilà, je m'occupe de mon entreprise et pas de savoir ce que la démocratie politique fera de l'Elysée, figurez-vous !
(source http://www.medef.fr, le 9 janvier 2002)
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Eh bien, notre démarche a été simple. Nous avons été sur le terrain, dans la France entière, nous avons rencontré les entrepreneurs que nous représentons et nous leur avons dit pour assurer l'avenir de notre pays dans l'Europe dont on voit bien qu'elle se fait et qu'elle se fait vite : que devons-nous, nous entrepreneurs, proposer au pays dans notre domaine de compétences ? Et nous avons donc, sujet après sujet, passé en revue les grands problèmes des entrepreneurs et de la société française et nous allons proposer des solutions. Alors par exemple, si vous voulez, sur le plan du travail dans notre pays, la place du travail, la valeur du travail, nous allons demander que chacun retrouve la liberté de travailler autant qu'il le veut !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Pourquoi ? Le travail n'est pas libre en France ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Attendez, les 35 heures vous interdisent, vous le savez bien, d'aller plus loin dans votre effort même si vous le souhaitez, même si vous le voulez !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors les 35 heures, vous les avez détestées et combattues, le MEDEF
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Nous continuons, nous continuons
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors est-ce que si la droite arrive au pouvoir vous lui demandez d'abroger la loi des 35 heures ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Très simplement nous lui disons ou bien vous introduisez dans ce dispositif les vraies souplesses supplémentaires qui permettent aux partenaires sociaux dans l'entreprise, dans le métier de déterminer ensemble, en fonction des circonstances de leur entreprise, de leur métier, ce qu'il faut faire pour travailler, comment on travaille et vous laissez donc les Français travailler ou bien alors, c'est vrai, je pense à ce moment-là qu'il faudra abroger ce dispositif, que nous sommes les seuls au monde à avoir mis en place et les seuls en Europe. Alors ceci est pour nous une véritable exigence.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : On supprime la loi Aubry ou on la contourne, c'est ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oh écoutez, je crois qu'il faut être franc, en quatre ans la loi Aubry a produit des effets sociologiques énormes, les Français n'ont plus vis-à-vis du travail la même position qu'avant, je pense qu'il faut reconnaître le phénomène sociologique, on ne va demander l'abrogation de la loi, mais de grâce qu'on permette aux Français de travailler même dans le cadre de ce dispositif unique au monde.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Je continue à prendre quelques exemples. La retraite, Ernest-Antoine Seillière, à 55 ans, à 60 ans ou quand on le décide ? à la carte ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Tout à fait clairement à la carte, quand on le décide, les règles encore une fois qui sont imposées depuis maintenant une cinquantaine d'années dans ce domaine sont périmées, le pouvoir politique, de droite ou de gauche peu importe, s'efforce depuis des années et des années de dissimuler le phénomène, on ne le traite pas, on fait des rapports, nous voulons pousser le pouvoir politique à prendre la chose en main et à décider et nous voulons faire en sorte que chacun puisse gérer sa retraite comme il l'entend et qu'on se mette devant le sujet plutôt que de vouloir l'éviter.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Votre démarche, même si on commence à s'habituer à ce que fait le MEDEF, est plutôt inédite. Est-ce que ce n'est pas aux politiques, aux grands politiques de choisir, de décider les grands choix pour le pays ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Je crois que ceux qui prendront le pouvoir demain ou qui le garderont seront ceux qui décideront, ça va de soi, en démocratie politique c'est le pouvoir politique qui décide. Mais nous voulons faire en sorte dans notre pays, comme dans tous les pays du monde, que les entrepreneurs, ceux qui font la richesse du pays, les biens les services, ceux qui font l'emploi, ceux qui font la croissance, soient des partenaires, des interlocuteurs, qu'ils soient entendus et que donc notre force de proposition soit reconnue et que bien entendu dans les décisions des politiques on trouve assez largement ce que les entrepreneurs proposent. Si on veut l'ignorer, hélas, nous irons vers le déclin.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Est-ce que c'est une stratégie d'opposition ou de réflexion critique, de pression sur l'Etat ou les gouvernants et est-ce que vous resterez sur la même ligne quelle que soit l'équipe au pouvoir ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Oui. Quelle que soit l'équipe au pouvoir parce que nous sommes non-partisans. Notre problème n'est pas de savoir si c'est x ou y.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Non-partisans.
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non-partisans, c'est-à-dire que nous ne soutenons personne, nous ne soutenons aucun parti politique mais nous fournissons à ceux-ci des analyses et des propositions. Vous savez on a toujours dit ah les entrepreneurs, ils se plaignent, ils sont frileux. C'est absolument faux, nous sommes les seuls actuellement, les seuls à proposer dans les domaines fondamentaux de la Sécurité sociale, de la retraite, du chômage, des formules de modernisation, de réforme.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Et on est ingrat avec vous parce qu'on ne vous comprend pas, c'est ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, on feint de ne pas vouloir entendre parce que c'est plus commode de crier à bas le MEDEF que bien entendu d'entrer en discussion, en débat avec nous sur des modèles d'ailleurs qui existent dans le monde entier et qu'on ne veut pas regarder.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ernest-Antoine Seillière, Lyon ce sera donc le résultat de plusieurs mois, que dis-je de plusieurs années d'action du MEDEF. Après le 15 janvier, après vous vous arrêtez ou vous continuez ? Vous vous taisez ou vous continuez ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ah nous continuons, c'est-à-dire que nous avons arrêté à Lyon, bien entendu, nos propositions, nous l'avons fait avec 2 000 entrepreneurs qui vont voter à la machine à voter, nous espérons être soutenus, il y aura d'ailleurs à travers le pays, dans les 165 MEDEF territoriaux, dans les centaines de fédérations un travail de fond, de démarche et nous allons, comme nous le disons, on n'aime pas la formule mais c'est bien vrai, harceler les politiques en leur disant : cessez de ne pas regarder en face les problèmes de notre pays et réglez les.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Qu'est-ce que ça veut dire harceler ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ca veut dire des démarches incessantes, de contact à tous les niveaux, au niveau des élus locaux, au niveau des élus nationaux, au niveau des candidats à la présidence de la République pour leur faire connaître les propositions qui, selon nous vont être susceptibles de faire réussir notre pays. Notre campagne, monsieur Elkabbach, s'appelle En avant l'Entreprise, en avant la France, ne l'oubliez pas !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Il y aura, Ernest-Antoine Seillière, un candidat chouchou du MEDEF ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Pas du tout ! Nous n'avons absolument aucun chouchou, notre seul chouchou c'est la réussite de notre pays. Ca c'est vrai et nous avons donc aucune détermination pour laisser la liberté chacun de faire dans le monde de l'entreprise ce qu'il veut en matière politique, c'est évident.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Alors les Français viennent de plébisciter l'euro, pour les entrepreneurs est-ce qu'il y a un message, quel est-il, quelles réformes ou quelles innovations, à votre avis, les Français ont-ils réclamé en choisissant de cette façon l'euro ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez d'abord, un premier message. Merci à tous ceux qui ont mis en place très bien et très rapidement l'euro, les entrepreneurs en ont largement leur place, les banques ont parfaitement fait leur travail, ne l'oubliez pas, des centaines de milliers d'agents dans des dizaines de milliers d'agences ont fait un travail de premier plan, je veux le souligner, les commerçants ont fait un travail de premier plan, tout le monde s'y est mis et nous avions, nous les entrepreneurs, pendant 10 ans pris le franc fort de façon à conduire à l'euro. Donc merci à tous ceux qui l'ont mis en place cette stratégie de réussite. Et puis il y a surtout un deuxième message. Regardez avec quelle facilité les Français ont accepté l'euro ! Ils ont envie de modernité, de changement, de réformes, ils veulent pouvoir avancer dans l'avenir qui s'ouvre à eux avec confiance et avec force et cela c'est un vrai témoignage !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Oui mais quelquefois ils craignent à propos de l'Europe sociale et d'ailleurs tous les candidats parlent d'Europe sociale et vous les entrepreneurs qu'est-ce que vous mettez dans ce concept d'Europe sociale ? Par exemple les droits sociaux acquis de longue lutte, est-ce que la France doit les garder ou est-ce que la France doit s'aligner sur les Etats européens qui ont chez eux un minimum social ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, la France doit être dans la moyenne européenne de façon à ne pas être en quelque sorte handicapée dans la compétition, ça va de soi. Et nous sommes partisans d'une Europe sociale, nous sommes d'ailleurs très connus pour l'être dans les milieux de patronat européens où nous préconisons la politique sociale, et d'ailleurs je vais être franc, pour une raison simple : nous avons tellement de contraintes, un droit du travail tellement complexe, tellement épais, tellement difficile que si nous nous mettons à la moyenne européenne, nous les entrepreneurs français nous pourrons travailler mieux qu'avant. Et donc nous sommes demandeurs d'une politique sociale à la moyenne européenne.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ca veut dire la régression sociale pour beaucoup ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Pas du tout, ça veut dire la suppression de la loi dite de modernisation sociale qui bloque la restructuration des entreprises quand c'est nécessaire, bien entendu l'aménagement des 35 heures puisque nous sommes les seuls à être en quelque sorte interdits de travailler quand c'est nécessaire et dans d'autres domaines, comme par exemple celui de la fiscalité où chacun le sait nous sommes à 100 milliards d'euros de prélèvements au-dessus de la moyenne européenne.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Donc l'Europe vous dites bravo parce que ça va être le plus petit dénominateur commun en matière sociale !
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Non, parce que je crois que ce sera la moyenne européenne qui s'imposera, harmonisation dans tous les domaines. Vous savez, on fait déjà ses courses maintenant en euros très facilement d'un côté à l'autre d'une frontière qui devient de plus en plus théorique, l'harmonisation vous la verrez se mettre en place dans les domaines sociaux, dans les domaines fiscaux et c'est comme ça que notre pays réussira.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Ernest-Antoine Seillière, les médecins se mettent se mettent en grève, les médecins libéraux réclament à l'Etat des augmentations. Est-ce que ce n'est pas un paradoxe ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors nous sommes sortis de la Sécurité sociale et nous nous en félicitons parce que quand on voit des médecins libéraux faire grève, qu'est-ce que ça veut dire ? Ils sont leur propre employeur, ils font la grève contre qui ? Et aller chez la ministre pour réclamer des augmentations, nous disons bien que la confusion est totale, il n'y a pas de paritarisme, pas de gestion autonome de quiconque, on est sous la dépendance du pouvoir politique, on est dans une situation de quasi-fonctionnaire
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Mais comment on résout ça ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors nous avons proposé, nous, une nouvelle architecture pour faire en sorte qu'il y ait
JEAN-PIERRE ELKABBACH : En attendant la nouvelle architecture, les médecins, vous les augmenteriez ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Ecoutez, le bonheur d'être sorti de la Sécurité sociale c'est que nous ne sommes plus obligés de prendre position là-dessus et que nous n'avons plus de cortège devant le MEDEF. Alors qu'on aille voir maintenant la ministre sur le sujet puisque, semble-t-il, c'est l'Etat qui veut toujours se mêler de tout !
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Est-ce que vous serez candidat à votre succession ?
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : On verra ça au lendemain des élections politiques, je verrai ça avec le conseil exécutif, est-ce que ça les intéresse que je reste ou est-ce qu'au contraire il vaudrait mieux que quelqu'un d'autre soit là, pour moi c'est indifférent mais je ferai ce qui rendra le plus service à l'entreprise.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Vous voulez dire ça va dépendre du .
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Du nouveau contexte, qu'est-ce qu'on voudra faire, est-ce qu'on aura voulu en effet entendre ce que nous avons proposé, est-ce qu'on voudra mettre en uvre la réforme, le dialogue et faire en sorte que la France gagne
JEAN-PIERRE ELKABBACH : Si c'est un président plutôt de droite, Ernest-Antoine Seillière dira j'ai accompli ma mission, je peux m'en aller
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Alors là, vous avez tout faux.
JEAN-PIERRE ELKABBACH : C'est pas ça, je m'occupe de mon entreprise
ERNEST-ANTOINE SEILLIERE : Voilà, je m'occupe de mon entreprise et pas de savoir ce que la démocratie politique fera de l'Elysée, figurez-vous !
(source http://www.medef.fr, le 9 janvier 2002)