Déclaration de Mme Dominique Voynet, secrétaire nationale des Verts, sur la préparation du programme des Verts pour les élections législatives, à Paris le 23 mars 2002.

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Circonstance : Convention thématique consacrée à la mise en discussion du programme des Verts pour les élections législatives, à Paris le 23 mars 2002

Texte intégral

Cher(e )s ami(e )s,
Il m'est particulièrement agréable d'ouvrir cette Convention thématique consacrée à la mise en discussion du programme des Verts pour les législatives.
Je suis heureuse, en plus des membres du CNIR, d'y accueillir les Secrétaires Régionaux, les responsables de Commissions et de nombreux candidats pour l'élection des 9 et 16 juin.
La remise en chantier du programme faisait partie des engagements que j'avais pris lors de mon élection au poste de Secrétaire Nationale. Avec l'audit participatif, qui suit son cours, l'adoption d'un Programme national de Formation que vous discuterez en CNIR demain après-midi, la réunion des secrétaires régionaux (il y en a eu deux déjà, bientôt trois), et la convocation fin juin de la première conférence nationale des Secrétaires de groupes locaux, la discussion du programme fait partie d'un chantier plus vaste pour réformer les Verts et leur fonctionnement, et les mettre en meilleure position pour répondre aux nouvelles demandes de la société.
Un premier échange a eu lieu déjà autour du Contrat Vert et des propositions de Noël Mamère, notre candidat à la présidentielle. Il a permis l'adoption d'axes de campagne et de mesures concrètes fortes : elles marquent l'originalité du candidat Vert dans un débat qui manque un peu de sel.
Le document dont nous discutons aujourd'hui reprend la quasi-totalité de ces mesures, et tout cela est forcément complémentaire. Mais il a un statut un peu différent : il s'agit à la fois de creuser ce que sont les valeurs et les options fondamentales de notre mouvement, et de commencer à examiner ce qu'elles signifient quand elles sont confrontées à la réalité des contradictions de la vie, à la demande du mouvement social, et à l'exercice des responsabilités, qu'elles soient européennes, nationales ou locales.
Tracer une direction et voir ce qu'elle peut nous indiquer quand elle s'inscrit " ici et maintenant ", quand elle prend en compte le temps, par exemple celui d'une législature, c'est le propos de ce programme.
Nous ne nous sommes pas livrés à un exercice de marketing politique. Notre problème n'est pas de lister les quatre ou cinq mesures clefs qui seront reprises dans les commentaires et focaliseront le débat pour quelques jours seulement.
Notre souci est d'exposer aux électeurs une cohérence globale et concrète qui fasse entendre, comprendre et apprécier notre originalité : le projet écologiste, le projet des Verts, entend aller à la racine des choses, à la racine d'un mode de développement insoutenable qui produit à la fois du désordre environnemental, du désordre économique et du désordre social.
Certes, il faut réparer, il faut rattraper des décennies accumulées de dégâts et d'irresponsabilité. Mais il faut surtout anticiper, amorcer le processus lent et compliqué du changement vers une autre organisation écologique et sociale. Ce changement doit s'effectuer dans le cadre de la démocratie : il ne peut aller plus vite que ne l'autorise la volonté de nos concitoyens mesurée par leurs votes. Il doit en même temps s'appuyer sur les ferments de transformation d'ores et déjà présents dans les combats du quotidien, dans l'évolution des modes de vie, dans les crises et les failles de l'existant. L'équilibre entre le long terme et le possible est justement la tension qui fait la dignité de la politique, en tout cas si elle veut faire bouger les choses.
Il y a ceux qui s'enferment dans le protestataire, dans l'énoncé des solutions idéales, et dans les explications par des causes simples, en général des causes uniques. Leurs remèdes vont vite, mais ils ne vont pas loin. Ils font la mode mais pas le changement
Il y a ceux qui s'enferment dans la gestion de l'existant, dans l'accompagnement du réel et pour lesquels l'exercice de la responsabilité se réduit à naviguer plus ou moins habilement entre des écueils, à imaginer des subterfuges pour différer le traitement des problèmes et finalement justifier l'abandon de toute transformation en profondeur.
Tel n'est pas notre parti pris.
Nous ne sommes ni une avant-garde autoproclamée qui dit ce qui doit être, ni une technocratie éclairée qui dit ce qui peut être.
Les propositions que nous formulons n'ont aucun sens en dehors de la mise en mouvement de millions de personnes placées en situation de responsabilité et de changement de leurs propres façons de vivre au quotidien.
En même temps, elles ouvrent à ces millions de personnes, la possibilité en terme institutionnel, en terme de politiques publiques, en terme de réformes concrètes, d'exercer justement cette responsabilité et d'accéder à cette autre façon de vivre au quotidien.
Cette autre façon emprunte forcément des voies et chemins diversifiés, complexes, complémentaires.
Voilà aussi pourquoi notre programme essaie de couvrir le maximum des champs sociaux et des thèmes correspondant à la pratique humaine.
À sa lecture, vous constaterez bien sûr encore beaucoup d'imperfections ou de lacunes. Je proposerai donc que nous poursuivions l'échange et que nous tenions l'an prochain à l'automne une Convention Programmatique du même type pour améliorer encore nos propositions, qu'il nous faudra de toute façon, dans le cadre des EGEP, par exemple, les soumettre aux secteurs les plus variés de la société civile.
Mais vous constaterez aussi les progrès considérables effectués depuis quelques années.
Nous sommes désormais en situation, en raison de l'expérience acquise, non seulement pour tel ou tel, mais par notre collectif dans son ensemble, d'aller au-delà des généralités et des bonnes intentions sur la plupart des questions qui traversent la société française.
Les mises à jour ou les mises à niveau en matière de santé, d'éducation, de recherche, de justice, de sécurité, de sport, de jeunesse, de fiscalité, de préservation de nos régimes sociaux, complètent ainsi les domaines où nous sommes plus traditionnellement attendus comme l'environnement, les transports, l'énergie, l'agriculture, ou les solidarités sociales et internationales.
Il se trouvera forcément des bonnes âmes pour dire qu'en nous intéressant à ces domaines, en devenant plus généralistes, nous perdrons en qualité sur nos métiers de base !
Il s'en trouvera d'autres pour dire exactement l'inverse !
On nous dira peut-être qu'après tout, il n'y a pas de spécificité écologiste sur pas mal de questions
À tous ceux-là, il faut je crois répondre que notre projet est d'organiser la convergence, la synthèse et le dépassement de trois sources fondamentales :
Le patrimoine, déjà riche, du mouvement écologiste à l'échelle internationale,
Les acquis des traditions démocratiques et transformatrices des décennies précédentes,
Les pratiques concrètes qui rendent actuelle l'exigence de développement durable.
Jacques Chirac a cru utile, au Mont Saint-Michel, de prendre à partie une écologie partisane, sectaire, réglementariste, étatiste, vaguement obscurantiste et pourquoi pas totalitaire
Il a bien fait de ne pas dire qu'il pensait aux Verts, car cette écologie-là est un fantasme qui ne nous concerne pas !
À côté du mot écologie, les termes que vous rencontrerez le plus dans notre programme sont le mot d'égalité, de solidarité, de responsabilité, de prévention, de durabilité, d'innovation et de démocratie.
Dans un monde marqué à la fois par l'augmentation des écarts de savoirs et de pouvoirs, et par le nivellement, ou l'écrasement de la diversité, il est bon que les Verts reprennent les thèmes de l'intérêt général, de la réduction des inégalités, de l'universalité des droits et de la variété de leur cheminement.
Les Verts sont aussi les véritables républicains de ce début de siècle : c'est pour cela qu'ils inscrivent leur avenir dans le cadre de nouvelle façon de gouverner les affaires de la planète.
Cher(e)s ami(e)s,
Il vous appartient donc de débattre de ce document, qui a déjà intégré plus de 250 propositions d'amendements. Je remercie celles et ceux qui ont fait vivre ce premier travail, les rédacteurs et aussi les Commissions dont le rôle va croissant dans le mouvement.
Une fois adopté, il sera édité sous la forme d'une sorte de nouveau livre vert. Les propositions concrètes qu'il contient feront l'objet d'un tiré à part, mieux adapté à une diffusion très grand public.
Avec le contrat vert, avec le programme des Verts, nous sommes en situation d'aller à la rencontre de nos concitoyens.
Chaque candidat, chaque candidate des Verts doit désormais se faire le porte-parole de Noël Mamère pour la présidentielle.
Dans la proximité comme dans la communication large.
Du score de Noël dépend le score de chacun d'entre nous dans nos circonscriptions et le poids des Verts par rapport à leurs partenaires.
C'est dans la dernière période, dans les dernières semaines voire dans les derniers jours, que se décident en général les votes en faveur des Verts.
Les électeurs auront dans quelques jours une idée exacte de ceux qui vont concourir et de leurs propositions : le décor sera en place.
A nous de faire la différence sur le contenu, sur le fond, sur le sens, sur les grands enjeux.
Nous ne manquons pas d'arguments.
A nous toutes et tous de mettre le paquet !
(source http://www.les-verts.org, le 29 mars 2002)