Interview de M. Jean-Louis Borloo, porte-parole de l'UDF, à Europe 1 le 14 mars 2002, sur la "grève" des parrainages des candidats à l'élection présidentielle de la part des maires.

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Média : Europe 1

Texte intégral

On a parlé de la fracture sociale il y a quelques années ; je crois que là, on est à la fracture politique. Les maires, aujourd'hui, les élus de terrain, ont le sentiment qu'ils font tourner le pays, eux. Eux, sur le terrain, sont bien obligés de travailler les uns avec les autres, dans des logiques de projets, on travaille avec des gens de différents bords. Ils essaient de faire avancer les trucs et ils sont le sentiment que le cirque national ne correspond pas à leurs attentes.
On continue à avoir des incantations au lieu de regarder comment faire tourner tout simplement le pays. Il y a une fracture politique entre ce monde virtuel de Paris et de la grande administration et le monde réel des villes et village de ce pays. Et donc, ils ne veulent pas donner, ils sont gênés aujourd'hui pour donner un parrainage réducteur, parce qu'ils se sentent porteurs de projets plutôt que porteurs d'un clan ou d'un parti. J'appelle cela la grève des parrainages", mais c'est une formule. Mais sur le fond, c'est vrai : ils sont embarrassés. Pas parce qu'ils se planquent, parce qu'ils sont gênés de cette campagne, de la façon dont cela se passe.
Vous dites "les gens ne savent pas trop, ça ne les intéresse pas, ils ne vont pas voter, on sent qu'ils sont entre désenchantement et colère", eh bien les élus, les vrais, sont à peu près dans le même état d'esprit, parce qu'ils ne sont jamais que le reflet de leurs habitants et de leurs concitoyens. Concrètement, ils ne donnent pas leur parrainage aux candidats qui les sollicitent. Ou, en tous les cas, avec beaucoup de difficultés - et il n'y a pas que J.-M. Le Pen, toutes les formations politiques ont du mal à l'obtenir des maires. Il y a une espèce de grosse irritation de ceux qui font marcher le pays.
Que demandent-ils ? Que l'on traite les problèmes de sécurité, de logement, de routes au plan local par les régions. Que l'on arrête cette espèce de monstruosité française unique au monde. Depuis la fin de l'Union soviétique et de l'Armée rouge, c'est la plus grande organisation du monde qui est aujourd'hui injuste et inefficace. Alors les maires disent : "Les gens en difficulté, c'est nous qui les avons, les problèmes de drogue, c'est nous qui les avons, les gamins qui rackettent à la sortie de l'école, les usines qui ferment ou qui ouvrent, c'est nous qui les avons ! Alors donnez-nous le pouvoir et les moyens !"
(Source :Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 15 mars 2002)