Déclaration de Mme Arlette Laguiller, porte-parole de Lutte ouvrière, sur les "effets d'annonce" du gouvernement Raffarin, la "capitulation" des dirigeants de la Gauche face à Jacques Chirac aux présidentielles, sur ses revendications, notamment le contrôle de la comptabilité des entreprises, et son appel à faire opposition aux "partis de la bourgeoisie", Nantes le 28 mai 2002.

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Circonstance : Meeting électoral à Nantes, le 28 mai 2002

Texte intégral

Travailleuses, travailleurs, camarades et amis,
L'enjeu officiel de ces élections législatives est de savoir qui constituera la majorité à l'Assemblée et quelle sera la couleur politique du futur gouvernement.
La droite mène campagne en appelant à élire une majorité de droite qui permette à Chirac de gouverner. Elle essaie de rameuter les électeurs des classes dites moyennes qui constituent sa base électorale traditionnelle. Installée de nouveau au gouvernement, elle multiplie les annonces destinées à allécher l'électorat de droite, voire d'extrême droite.
Tant que le nouveau Parlement n'est pas en place, le gouvernement Raffarin ne peut pas faire voter de lois. Mais cela ne fait rien, c'est l'effet d'annonce qu'il cherche.
Sarkozy, nommé au ministère de l'Intérieur, joue les cow-boys en faisant mine de participer sur le terrain aux opérations policières. Les heures supplémentaires, ça doit y aller par les temps qui courent, pour tout ce qui porte l'uniforme : policiers, gendarmes, douaniers. On déploie policiers et CRS aux carrefours, on les déplace le plus souvent possible pour que leur présence soit visible en tout cas par les électeurs dont on convoite les votes.
Ces opérations "coup de poing" ne servent évidemment à rien pour améliorer la sécurité des personnes dans les quartiers populaires. Les flash-balls qui seront distribués à la police ne remplaceront pas les effectifs sur le terrain et les contrôles d'identité spectaculaires n'arrêtent ni la petite, ni la grande délinquance. Ces opérations publicitaires ne sont pas destinées à cela mais à démontrer qu'avec la droite au gouvernement, l'autorité de l'Etat serait restaurée.
La mission du gouvernement Raffarin n'est pas d'arrêter la délinquance, c'est de faire élire une majorité de députés de droite.
Le deuxième axe de la publicité gouvernementale concerne les impôts. Chirac s'est engagé à diminuer dès cette année de 5 % l'impôt sur le revenu en promettant d'aller jusqu'à 30 % en cinq ans. C'est évidemment un cadeau socialement orienté. Il n'est pas destiné à cette moitié de la population qui a des salaires tellement bas qu'elle ne paie pas l'impôt sur le revenu. Mais, même les plus pauvres versent un impôt à l'Etat par le biais de la TVA et des autres taxes et impôts indirects. Et ce sont même les impôts indirects qui constituent de loin le gros des recettes de l'Etat. Et, pour ce qui est des autres contribuables, le cadeau fiscal est d'autant plus grand que l'on gagne beaucoup. Pour les 330.000 contribuables les plus aisés, 1 % des foyers fiscaux, le cadeau représentera 2.240 euros en moyenne par foyer (16.000 francs). Pour la grande majorité des contribuables payant l'impôt sur le revenu, la promesse gouvernementale ne représentera que 10 à 30 euros de réduction d'impôt !
La nomination au ministère de l'économie de Francis Mer, ex-patron d'Usinor puis d'Arcelor, géants de la sidérurgie, est encore un geste politique. Oh, ce grand patron licencieur ne fera ni mieux ni pire que les Madelin, Strauss-Kahn et Fabius qui se sont succédé à ce poste ! Mais des dizaines, sinon des centaines de milliers de patrons petits et moyens peuvent se donner l'illusion que ce n'est pas un technocrate mais un homme de terrain qui dirige l'économie.
Alors, si Chirac a la majorité qu'il convoite, on aura la reproduction de ce qui s'est passé entre 1995 et 1997 avec le duo Chirac/Juppé.
La gauche, de son côté, tente de faire des législatives l'occasion de se remettre de sa double défaite de la présidentielle.
La première défaite a été que, pour la première fois depuis plus de trente ans, le candidat de la gauche n'a pu être présent au second tour de l'élection présidentielle. Entre la précédente présidentielle de 1995 et celle de 2002, Jospin a perdu deux millions et demi d'électeurs. Avec le million et demi de voix perdues par Robert Hue, cela fait quatre millions de voix en moins pour les deux principaux partis du gouvernement de la gauche plurielle.
Ces quatre millions de voix perdues sont la sanction de l'électorat populaire pour cinq ans de gouvernement Jospin, pour ces cinq ans pendant lesquels le monde du travail n'a trouvé auprès du gouvernement aucune protection contre les licenciements collectifs, contre la précarité ; aucune protection contre l'arrogance patronale et contre cette injustice sociale flagrante que constitue l'envolée des profits et des revenus de la bourgeoisie alors qu'en même temps, le monde du travail s'appauvrit. Les quelques mesures progressistes comme la CMU ou le PACS, qui sont à mettre à l'actif des cinq ans du gouvernement de gauche, ont pesé bien peu au yeux des classes populaires face au passif : 9 millions de femmes et d'hommes contraints de vivre avec moins de 4.200 francs par mois, la paupérisation croissante, les retraites menacées, les services publics privatisés, l'état d'abandon croissant des quartiers populaires.
La défaite électorale de Jospin éliminé dès le premier tour est la sanction de l'arrogance de ces ministres de gauche, serviles avec le grand patronat, méprisants à l'égard des travailleurs, ressemblant en tout point aux ministres de la droite, à ceci près qu'ils prétendent représenter le progrès social.
C'est cette défaite de Jospin, qui a été celle de toute la gauche gouvernementale, qui a permis à Le Pen d'être présent au second tour de l'élection présidentielle. Le Pen a un peu progressé, mais finalement très peu, dans l'électorat. Ce n'est pas sa propre progression mais c'est le recul important de Jospin qui a permis à Le Pen d'être présent, à 200.000 voix près, au deuxième tour.
Mais, entre les deux tours, la gauche a ajouté une deuxième défaite à la première en choisissant non seulement de faire voter pour Chirac mais de faire la campagne de celui-ci auprès de l'électorat populaire. Chirac aurait été élu haut la main contre Le Pen avec les voix du seul électorat de droite mais, grâce à la gauche, il a été plébiscité !
Pour justifier cette abdication devant Chirac, la gauche a brandi la menace du danger de l'élection de Le Pen. Mais c'était un mensonge grossier.
Les dirigeants de la gauche savaient que ce n'est pas parce que Le Pen était présent au deuxième tour qu'il pouvait être élu. Le Pen et Mégret ont totalisé 5 millions de voix au premier tour, la droite chiraquienne à peu près le double. Même si la gauche avait refusé de voter pour Chirac, par quel miracle Le Pen aurait-il pu doubler le nombre de ses électeurs en quinze jours ?
Gonfler artificiellement le danger lepéniste, prétendre que Le Pen pouvait être élu, voire qu'un danger fasciste menaçait toute la société, était un mensonge aussi grossier qu'intéressé. Ce mensonge était destiné à empêcher les électeurs du Parti socialiste et du Parti communiste et leurs propres militants de s'interroger sur la politique menée par le gouvernement Jospin. Il était destiné à étouffer toute critique contre une politique désastreuse pour les classes laborieuses. Mieux, la baudruche Le Pen gonflée, les responsables de cette politique désastreuse, les Fabius, Strauss-Kahn, Hollande, pouvaient plastronner à la télévision et tenter de se refaire une vertu républicaine en se posant en adversaires résolus de l'extrême-droite.
Il n'y a pas jusqu'à leur capitulation honteuse devant Chirac qu'ils n'aient pas présenté comme l'expression de leur anti-fascisme. Pensez donc ! Quel exemple d'abnégation que de faire voter pour le chef de la droite qu'ils ne cessaient de vilipender quelques jours auparavant encore !
Mais la gauche se trouve, à l'heure des législatives, confrontée à ses propres mensonges. Comment accuser Chirac de complaisance vis-à-vis de l'extrême droite alors même que, pendant quinze jours, la gauche l'a présenté comme le seul rempart contre une menace fasciste ? Un petit incident qui vient de se dérouler illustre bien la position pitoyable de la gauche. Le nouveau chef du RPR, Serge Lepeltier, s'est permis de dire qu'en cas de triangulaire entre un candidat du Front national, un candidat de gauche et un candidat de la droite parlementaire, il n'est pas question pour ce dernier de se retirer, même s'il est moins bien placé que le candidat de la gauche. L'individu n'a fait que dire tout haut ce que ses compères dirigeants de la droite pensent tout fort. Et, rappelons-le, Chirac lui-même a pris soin d'inviter ostensiblement à un de ses principaux meetings électoraux ces personnages de la droite parlementaire qui s'étaient fait élire présidents de leur région avec les voix du Front national et cela, avant même le deuxième tour de la présidentielle, c'est à dire au moment même où les dirigeants de la gauche s'échinaient à faire voter pour lui. Tout cela n'a pas empêché les dirigeants de la gauche de réagir à la déclaration cynique de Lepeltier en donnant le spectacle lamentable de crier à "la trahison du pacte passé à la présidentielle" !
Et ce sont ces gens-là, pleurnichant devant la droite qui, elle, ne se cache pas pour faire les yeux doux à l'extrême droite, qui prétendent aujourd'hui que, voter pour eux, c'est s'opposer à Le Pen ! Mais si Le Pen représentait une réelle menace de prise de pouvoir fasciste, comment imaginer que cette gauche lâche et velléitaire puisse s'y opposer ?
Pendant la campagne des législatives, le Parti socialiste se remet à gauchir son langage, à promettre qu'il ne touchera pas aux retraites, qu'il augmentera les bas salaires ! Qu'est-ce que cela lui coûte ? S'il se retrouve en minorité dans la prochaine Assemblée, il n'aura pas à tenir ses promesses. Et s'il a la majorité, il saura les oublier, comme il a su oublier les rares engagements pris avant l'accession de Jospin au pouvoir.
Tous ces gens-là nous veulent sans mémoire et sans dignité. Eh bien non, nous ne le sommes pas !
Que la majorité gouvernementale soit de droite ou de gauche, cela ne changera rien pour les travailleurs.
Les uns comme les autres continueront à prendre aux pauvres pour donner aux riches. Les uns comme les autres favoriseront les actionnaires au détriment des travailleurs qu'ils méprisent. Les uns comme les autres laisseront les grandes entreprises licencier et aggraver le chômage. Les uns comme les autres continueront à faire des économies sur la Santé, sur l'Education nationale, sur les transports collectifs, sur tous les services publics. Les uns comme les autres aggraveront la paupérisation du monde du travail.
Alors, il ne faut pas les laisser faire.
Mais ce n'est pas dans les urnes que se trouve le salut. Le grand patronat n'est sensible qu'au rapport de force. Il continuera à licencier, à baisser les salaires, à laisser remplacer les emplois stables par des emplois précaires. Il continuera à le faire tant qu'une réaction massive du monde du travail, décidé à défendre son droit à l'existence, ne l'arrêtera pas !
Pour le grand patronat, il n'y a même pas eu de trêve électorale. Pendant la campagne présidentielle, les plans de licenciements ont continué à tomber, avec leurs conséquences désastreuses non seulement pour les travailleurs qui en sont victimes mais aussi pour toutes les villes concernées.
Regardons donc l'exemple d'une ville comme Soissons. Après avoir subi la fermeture de l'usine Wolber, filiale de Michelin, voilà que quatre des principales usines de la ville ferment leurs portes et jettent dehors leurs travailleurs ! Mais qu'est-ce qu'ils vont devenir ? Où trouver du travail puisqu'à Soissons même il n'y en a plus ? Déménager ? Mais où ? Et comment le faire lorsqu'on a plus de 40 ou 50 ans ?
L'année dernière, c'était Saint-Lô avec Moulinex-Brandt, Calais avec Lu-Danone, Marignac avec Péchiney. Cette année, Soissons, Fécamp. Mais combien d'autres villes sont et seront sinistrées, avec des travailleurs transformés en chômeurs, des commerçants ruinés et des villes entières sans avenir ?
On nous a conviés à élire un président de la République et maintenant des députés. Mais les véritables décisions, celles qui pèsent immédiatement sur la vie sont prises par les grandes entreprises qui ont un rôle considérable dans la vie économique et sociale. L'activité de ces entreprises résulte de la collaboration de milliers de travailleurs, auxquels il faut ajouter bien souvent celle de centaines de sous-traitants. Elle affecte des centaines de milliers, sinon des millions de consommateurs. Elle affecte toute une ville, toute une région car les salaires que les entreprises paient contribuent à faire vivre une multitude de professions dites indépendantes, des commerçants aux artisans, en passant par les médecins.
Mais, en vertu de la sacro-sainte propriété privée, le droit de décider appartient aux seuls propriétaires, aux gros actionnaires, sans que la collectivité puisse se mêler de leurs décisions, même lorsque celles-ci sont désastreuses pour la majorité de la population.
Voilà pourquoi, dans toutes les élections, dans toutes mes interventions, je revendique que les comptabilités des entreprises soient rendues publiques pour que les travailleurs d'une entreprise, que les consommateurs concernés, que l'ensemble de la population, puissent contrôler la marche des grandes entreprises. Il faut supprimer le secret commercial et le secret bancaire et obliger les grandes entreprises à ouvrir leurs comptabilités aux travailleurs, aux consommateurs et à toute la population.
Il faut que la population puisse contrôler toutes les décisions d'une entreprise et vérifier l'usage qu'elle fait de l'argent qu'elle gagne et qu'elle dépense.
Et, même lorsqu'une entreprise devient déficitaire après des années d'activités florissantes, les bénéfices distribués aux gros actionnaires ont bien été accumulés. Contrôler les entreprises, c'est aussi contrôler les comptes en banque de leurs propriétaires et des principaux actionnaires.
Seul, ce contrôle des travailleurs et de la population permettrait de montrer que les licenciements collectifs ne sont pas justifiés et qu'ils sont destinés uniquement à faire augmenter les profits, surtout boursiers.
Il faut imposer l'interdiction des licenciements collectifs sous peine de réquisition. Seule la population travailleuse a, à la fois, l'intérêt et la force d'imposer les mesures radicales indispensables pour assurer le plein emploi. Le plein emploi est aussi le moyen pour garantir des retraites convenables à tous, public comme privé après 37 ans et demi d'activité.
Ces mesures ne sont pas utopiques, comme le répètent les bonnes âmes pour qui le droit des patrons d'user et d'abuser de la propriété privée de leurs entreprises est un droit absolu. C'est moins utopique en tout cas que de croire que le gouvernement, quelle que soit sa couleur politique, prendra les mesures radicales pour défendre les intérêts des travailleurs et de la société contre les licenciements boursiers, contre l'avidité patronale.
Mais ces mesures, il faudra les imposer.
Comme il faudra imposer à l'Etat de se donner les moyens pour assurer des services publics convenables. Car, dans les conditions d'existence de la classe ouvrière, il n'y a pas seulement le montant des salaires qui compte.
Il faut que les enfants des classes populaires puissent bénéficier d'une éducation gratuite et convenable, c'est-à-dire susceptible de compenser ce que les familles les plus démunies ne peuvent pas offrir matériellement et culturellement.
Il faut que non seulement on cesse de fermer des hôpitaux ou des maternités de proximité, mais qu'on en crée en nombre suffisant, équipés et avec le personnel nécessaire. Il est inadmissible, par exemple que ceux qui ont à s'occuper d'autistes, de myopathes ou de victimes de la maladie d'Alzheimer, parents, proches ou gens de bonne volonté, soient contraints de manifester dans la rue car on manque cruellement d'établissements hospitaliers spécialisés.
Il faut qu'existent partout des transports publics convenables, et pas seulement sur quelques grandes lignes de prestige, mais aussi pour desservir les quartiers populaires. Il faut que les services postaux et les télécommunications soient à la disposition de tous à des prix abordables au lieu de fermer des bureaux de poste dans nombre de villages et dans les quartiers populaires des villes. Il faut arrêter de privatiser des pans entiers des services postaux, en transformant d'ailleurs par la même occasion une partie du personnel de la Poste en employés à statut privé, vacataires ou précaires.
Les moyens financiers nécessaires à tout cela, l'Etat pourrait les trouver. Il suffirait d'arrêter toute aide, toute subvention aux patrons des entreprises privées. Et si cela ne suffit pas, au lieu de diminuer les impôts des plus riches, comme les impôts sur les bénéfices des entreprises, l'Etat devrait les augmenter.
Alors, oui, après les élections, il faudra imposer au gouvernement et au patronat nos revendications vitales ! Il faudra nous retrouver ensemble, nous organiser pour peser sur le patronat, pour peser sur le gouvernement !
En faisant élire Chirac, le Parti socialiste, le Parti communiste et les Verts ont montré que, même à leurs yeux, la gauche et la droite c'est pareil.
Ce qui compte pour l'avenir, ce n'est certainement pas de voter pour les candidats de la gauche pour s'opposer à ceux de la droite, puisque tous autant qu'ils sont, ils sont plus complices que rivaux. Et ce n'est pas non plus en votant pour les candidats de la gauche qu'on empêchera le Front national de maintenir son influence électorale, voire de se renforcer. Car ce sont précisément ces partis de droite ou de gauche qui se sont succédé au pouvoir qui ont créé et entretenu les conditions pour faire croître une extrême droite électoralement forte dans ce pays. Et si Le Pen a trouvé un certain écho même dans les quartiers populaires, c'est parce que la misère y grandit et parce que les partis de gauche au gouvernement ont démontré qu'ils ne représentent aucun espoir d'amélioration.
Le Front national et son millionnaire de chef ne sont pas seulement porteurs d'un programme rétrograde, de préjugés réactionnaires, racistes et xénophobes, ils sont surtout les ennemis jurés de la classe ouvrière. Ils le montrent déjà en tentant d'opposer les uns aux autres les travailleurs nés en France et les travailleurs immigrés alors que Français et immigrés, c'est tous ensemble que les travailleurs de toutes origines forment une seule et même classe ouvrière. Une seule classe ouvrière capable de se défendre contre le patronat et le gouvernement à son service.
Alors, face aux partis bourgeois de gauche et de droite et contre l'extrême droite qui, en plus d'être aussi bourgeoise que les autres, est porteuse d'idées mortelles pour les travailleurs, il faut que s'affirme le camp des travailleurs.
C'était le sens de ma candidature lors de l'élection présidentielle. C'est pour permettre à ce courant d'affirmer sa présence que Lutte ouvrière présente des candidats dans toutes les circonscriptions de ce pays.
Voter pour eux, c'est affirmer qu'il est vital pour les travailleurs d'imposer les mesures radicales dont je viens de parler.
Voter pour eux, c'est voter pour des femmes et des hommes qui seront fidèles au camp des travailleurs.
La loi électorale est ainsi faite que les députés d'un courant politique ne sont pas élus en fonction de ce qu'ils représentent, mais en fonction des marchandages et des alliances avec d'autres courants politiques. Si les élections étaient à la proportionnelle, avec le nombre de votes en faveur de ma candidature à la présidentielle, Lutte ouvrière devrait avoir une trentaine de députés à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire plus que les Verts ou les partisans de Chevènement. Mais, même cette loi électorale antidémocratique qui nous écarte du Parlement ne nous amènera pas à abandonner notre programme et notre fidélité aux intérêts du monde du travail pour quelques sièges à l'Assemblée nationale.
Mais, après tout, malgré les obstacles de la loi électorale, malgré l'opposition des appareils des grands partis, il dépend des électeurs, il dépend de vous, qu'un certain nombre de candidats de Lutte ouvrière soient présents au deuxième tour et peut-être qu'ils puissent être élus. Cela ne changerait pas la couleur politique de l'Assemblée mais les électeurs seraient certains d'y envoyer des représentants, fidèles à leurs idées et qui ne renieraient pas les leurs, les travailleurs, pour quelque promesse que ce soit.
C'est en raison de cette fidélité à notre camp que le vote pour les candidats de Lutte ouvrière aura une signification que tout le monde comprendra.
Le monde du travail, c'est-à-dire les ouvriers, les employés, les chômeurs, les retraités, du privé comme du public, les enseignants, le personnel hospitalier, les petits artisans et paysans qui n'exploitent qu'eux-mêmes, représente la majorité dans ce pays, bien que les travailleurs immigrés soient injustement privés du droit de vote.
Pour peser sur la vie politique, il faut que les travailleurs s'affirment en tant que force politique indépendante par rapport à toutes les forces politiques au service de la bourgeoisie. Ce n'est pas dans les urnes que cette force pourra se déployer au point de faire vraiment peur au grand patronat, au point de le faire reculer. Mais les élections constituent tout de même une occasion de se faire entendre et de se retrouver autour d'une politique.
Oui, il faut que chaque élection soit une occasion pour l'électorat ouvrier d'affirmer ses intérêts propres, ses intérêts de classe. Il faut que les électeurs des classes populaires affirment leur droit de vivre convenablement, eux qui produisent toutes les richesses du pays et sans qui rien d'utile ne se ferait. Il faut qu'ils affirment leur opposition aux licenciements faits pour enrichir les actionnaires. Il faut qu'ils affirment leur droit à un salaire et à une retraite correctes. Il faut qu'ils affirment leur opposition à ce qu'on arrose le patronat de subventions et de cadeaux fiscaux au détriment des services publics jetés aux prédateurs des capitaux privés. Il faut qu'ils affirment leur droit de contrôler les comptes des entreprises et des banques afin que les richesses créées par ceux qui travaillent ne soient pas dilapidées par la classe privilégiée ou gaspillées dans la spéculation alors même que les classes populaires s'appauvrissent. Il faut qu'ils affirment la nécessité de faire renaître un mouvement ouvrier vigoureux et un parti qui soit exclusivement le représentant des intérêts politiques du monde du travail, un nouveau parti communiste.
Ce parti est indispensable pour défendre les objectifs politiques du monde du travail, pour les unifier, pour faire en sorte que, face aux différents choix politiques avancés par les partis de la bourgeoisie, soient défendus des choix correspondant aux intérêts des travailleurs et des chômeurs.
Alors, travailleuses, travailleurs, camarades et amis, aidez-nous dans cette campagne électorale comme au-delà. Faites en sorte que la politique que nous opposons à celle des partis bourgeois soit la plus largement connue. Faites en sorte que les candidates et les candidats de Lutte Ouvrière
obtiennent le plus grand nombre de voix possible.
Votez et faites voter pour les candidats de Lutte ouvrière !

(source http://www.lutte-ouvriere.org, le 29 mai 2002)