Déclaration de M. Georges Sarre, président du Mouvement des citoyens, sur la politique industrielle du gouvernement, la volonté d'abandon de l'industrie nucléaire, notamment avec la fermeture de l'unité de production de mox de la COGEMA, la privatisation d'EDF, Pont Saint-Esprit, le 25 février 2002.

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Circonstance : Conférence de presse à Pont Saint-Esprit, le 25 février 2002

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
L'affaire de l'unité de production de mox à Marcoule est très significative tant de la méthode Jospin que de la manière dont les verts s'y prennent pour contourner la démocratie la plus élémentaire dans ce pays. De quoi s'agit-il ? A cause du risque sismique, la COGEMA va fermer d'ici la fin de 2003 son unité de production de mox à Cadarache. Elle souhaite donc regrouper à Marcoule toutes ses capacités de production en les portant de 115 à 195 tonnes par an. Une déclaration d'utilité publique lui est nécessaire. Elle doit être précédée d'une enquête publique. Pour ouvrir cette dernière, il faut l'autorisation du ministre de l'Industrie et de celui de l'Environnement. Le premier l'a donnée dans des délais normaux. Le second, depuis plusieurs mois, ne donne aucune réponse ; or, le temps presse maintenant, si l'on veut que les installations soient opérationnelles à la date voulue.
Je rappelle qu'il ne s'agit pas de l'autorisation de produire, mais de l'autorisation d'informer les citoyens, de leur donner la possibilité de s'exprimer. Le ministre vert de l'Environnement, Yves Cochet, soutien déclaré de Noël Mamère, se déclare, dans ses discours, dans ses motions de congrès, partisan de la démocratie participative. Voilà un cas concret où il pouvait y avoir au moins un commencement de débat démocratique sur le nucléaire. Il n'en veut pas. Il le refuse. Il sait qu'il se trouverait rapidement en minorité. Les Français acceptent le nucléaire. Alors, le ministre vert bloque la procédure par son abstention, empêche le débat par son silence. C'est un véritable déni de démocratie pour un individu qui a sans cesse le mot de démocratie à la bouche.
Mais, le comportement de ce ministre, qui bafoue l'intérêt général, est encore plus retors, plus pervers. Il espère ainsi bloquer l'aval du cycle du combustible nucléaire. Sans le mox, sans le retraitement, le problème des déchets nucléaires finira par avoir une dimension insupportable. Alors, il espère par ce procédé sournois arriver à retourner l'opinion. Son objectif ultime est que la France " sorte du nucléaire ". Ses grands frères allemands y sont bien arrivés dans leur pays. La fin justifiant les moyens, peu importe à ses yeux que la République en soit offensée.
A juste titre, des élus du Gard rhodanien et l'ensemble des syndicats de la COGEMA m'ont saisi. Après les avoir reçus, j'ai écrit personnellement à Lionel Jospin, le 24 janvier dernier, pour lui demander d'assumer sa responsabilité de Premier ministre, de trancher entre, ce qui est le moins une différence d'appréciation, ou entre deux membres de son gouvernement. J'attends toujours la réponse ; et cette attente est aussi celle de toute une population, celle de dizaines de salariés. Je lui ai donné une autre occasion de se montrer au-dessus de telles mesquineries partisanes à lui qui voudrait devenir Président de la République. Le 5 février dernier, j'ai posé à l'Assemblée nationale une question orale sans débat. Il s'était fait représenter par François Patriat, secrétaire d'Etats aux petites et moyennes entreprises. Il m'a répondu à côté. Malgré mes protestations, le gouvernement de Lionel Jospin a refusé de décider.
Nous avons là une excellente illustration de la méthode Jospin : ne jamais assumer soi-même les décisions difficiles inhérentes à la fonction occupée. Il n'applique pas une politique que le peuple a approuvée lors des élections. Il le dit lui-même : il est " réactif " à l'air du temps, aux décisions qui viennent d'ailleurs. Il dépend des sondages au détriment du suffrage universel. Il se défausse ainsi sur le juge, sur l'Europe ou encore, plus gravement, sur le marché. Ensuite, l'air désolé, il peut dire qu'il aurait bien voulu, mais qu'il n'a pas pu, car les autres n'ont pas voulu. C'est l'homme de l'esquive érigée en principe de gouvernement. Le pouvoir ne l'intéresse que pour le pouvoir. Il est candidat, comme il le reconnaît, pour le plaisir, pour son plaisir, pour son bon plaisir.
Si, d'aventure, les Français élisaient Lionel Jospin, nous pourrions être inquiets pour l'avenir de l'industrie nucléaire. En elle-même, l'entente passée entre le Parti socialiste et les verts constituent une véritable menace. Déjà, ces derniers ont obtenu d'être présentés par le PS dans 42 conscriptions. Ils pourraient espérer constituer un groupe à l'Assemblée nationale et ainsi détenir un moyen de chantage permanent sur le gouvernement. Surtout, Lionel Jospin attend le résultat de Noël Mamère pour déterminer le contenu de l'accord. Si ce dernier obtenait un pourcentage suffisant, Lionel Jospin n'hésiterait pas à sacrifier l'indépendance énergétique de la France, l'avantage compétitif que détient notre économie avec une électricité relativement bon marché et un moyen de production qui n'émet pas de gaz à effets de serre.
Il faut en finir avec les chimères irresponsables. Il faut dire les choses comme elles sont : l'éolien, c'est du vent. L'énergie éolienne n'est pas une énergie nouvelle. L'énergie éolienne est vieille comme la marine à voile. L'énergie éolienne est vieille comme le moulin du meunier. L'énergie éolienne est vieille comme les puits artésiens des jardins potagers. L'éolienne a un coût faramineux. Par décret, EDF est obligé de l'acheter à 8,38 centimes d'euro le kilowattheure, quand le nucléaire produit celui-ci à 3 centimes et le combiné gaz à 3,3 centimes. L'éolien, de plus, ne dispense pas de construire des équipements de production classiques ou nucléaires. Car, le vent ne souffle pas toujours. Car, le vent souffle à des forces différentes. Car, le vent ignore qu'il y a des heures de forte consommation et qu'il y a des heures creuses. Donc, à tout moment, il faut pouvoir suppléer les caprices du vent. L'éolien mange l'espace. Si le projet actuel de construction de cinq mille éoliennes était appliqué , pour remplacer 2,4 % de la production nucléaire de l'an 2000, il confisquerait 650 km2 , soit plus d'un dixième d'un département français moyen. Enfin, l'éolien pollue les paysages d'autant plus qu'il faut l'installer en vue sur les crêtes, là où souffle le vent.
Autre menace sur le nucléaire : la privatisation d'EDF. Lionel Jospin s'est prononcé pour commencer à instiller du capital privé dans celui d'EDF, l'Etat devant rester majoritaire. On sait que de tels seuils finissent toujours par sauter. Jacques Chirac, lui au moins, a été plus francs ; Il s'est prononcé sans détour pour la privatisation de l'entreprise. L'affaire s'étalera sur quelques années pour ne pas assécher le marché des capitaux. Comme toujours, comme dans tout, à quelques nuances près, les deux sortants proposent la même politique. Or, le nucléaire n'est rentable que sur le long terme. EDF privatisée se désintéressera d'une filière énergétique qui ne satisfera pas l'avidité des actionnaires.
Jean-Pierre Chevènement veut conserver à EDF son statut d'entreprise intégralement publique, pour qu'elle puisse assumer ses missions de service public. La péréquation tarifaire est un élément essentiel dans l'aménagement du territoire. Surtout, EDF a un rôle d'impulsion et d'entraînement de l'économie française, notamment dans les secteurs de haute technologie. Il faut sans tarder lancer la construction du prototype de l'EPR, le réacteur de la prochaine génération. Il faut s'intéresser à un réacteur de moyenne puissance, qui ne soit pas proliférant et qui pourra être exporté. Il faut développer la recherche sur le réacteur à haute température. La loi Bataille de 1991 sur les déchets nucléaires doit être loyalement appliquée pour résoudre ce problème qui reste le principal problème du nucléaire. L'arrêt de Super Phénix, imposé par les verts en 1997 a été un recul.
Dans les dix orientations qu'il a présentées à Vincennes, le 9 septembre dernier, Jean-Pierre Chevènement a insisté sur l'importance de la politique industrielle. Le nucléaire en est un élément clef. Il a aussi indiqué toute l'importance qu'il attachait à l'effort de recherche. Les crédits, venant de divers secteurs, qui devront lui être consacrés, seront portés dans les meilleurs délais à 3 % du PIB.
Vous voyez ainsi toute l'importance que revêt à nos yeux l'affaire du mox. Elle est significative à plusieurs titres. Elle est emblématique de l'avenir que nous voulons pour la France et pour la République.
(Source http://goerges-sarre.net, le 5 mars 2002)