Interview de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, à France Info le 7 mars 2002, sur les remous au sein du mouvement humanitaire français.

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Circonstance : Démission de Mme Sylvie Brunel, de la présidence de l'association Action contre la faim (AICF)

Média : France Info

Texte intégral

Q - Comment réagissez-vous aux remous provoqués dans le monde des organisations humanitaires par la démission de Sylvie Brunel ?
R - Ce n'est pas la première crise du mouvement humanitaire français. Cette réaction forte de Sylvie Brunel nous met face à la réalité de l'incroyable évolution du mouvement humanitaire. Nous sommes passés de l'engagement et de l'aventure de la fin des années 1960 aux interventions avec des moyens financiers considérables, souvent en provenance d'agences multilatérales, c'est à dire des fonds publics. Nous sommes ainsi face à des entreprises professionnalisées, amenées parfois à se faire concurrence entre elles. Ce qui se passe est la preuve que nous avons raison d'être vigilants et exigeants à l'égard de fonds d'origine publique et, plus encore, des donateurs.
Je voudrais dire également que cette crise là ne doit pas pour autant tarir l'élan de générosité qui permet aux ONG d'accomplir sur le terrain, le plus souvent, un excellent travail.
Q - Monsieur le Ministre, la présidente démissionnaire d'Action contre la faim appelle aujourd'hui l'Etat à remettre de l'ordre et à exiger plus de transparence dans le monde humanitaire. Premièrement, est-ce votre rôle ? Deuxièmement, en avez-vous les moyens à travers ce que vous-même êtes en train de préparer à la délégation à l'action humanitaire ?
R - Il faut trouver le point d'équilibre entre, d'une part, cette nécessité de liberté dans l'engagement et, d'autre part, le besoin de cohérence, éventuellement aussi de contrôle, dans l'utilisation de ces fonds, qu'il s'agisse de fonds privés ou de fonds publics. En tout cas, il faut faire en sorte que le dialogue entre l'Etat et les ONG soit un peu resserré pour éviter toute dérive et gagner en efficacité.
De manière plus générale, le gouvernement a conduit depuis deux ans une réflexion sur son rôle dans les crises humanitaires : comment intervenir ? Faut-il le faire avec le relais des agences onusiennes ou avec les ONG ? En utilisant les moyens militaires et civils de l'Etat ? C'est pour répondre à ces questions que nous avons été amenés à créer une délégation à l'action humanitaire au sein du ministère des Affaires étrangères qui deviendra opérationnelle très prochainement.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 mars 2002)