Interview de M. Alain Juppé, président de l'UMP, dans "La Lettre de la Nation magazine" du 19 juillet 2002, sur l'avenir du gaullisme au sein de l'UMP et sur le calendrier politique de l'UMP.

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Média : La Lettre de la Nation Magazine

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LDLN: Certains s'inquiètent de voir disparaître les idées gaullistes au sein de l'UMP. Que voudriez vous leur dire pour les rassurer.
Alain Juppé: Toute ma vie politique se confond et se conjugue avec la vie du RPR. Je n'avais jamais pris d'engagement politique avant le 5 décembre 1976 et donc tout ce que j'ai fait en politique s'identifie parfaitement avec la vie de notre mouvement. C'est dire que je suis bien loin d'aborder cette période dans un état de détachement complet. Comme nombre de nos compagnons, j'éprouve une sorte d'arrachement par rapport à un engagement militant qui dure depuis plus de 25 ans.
Mais, je crois aussi qu'il faut distinguer dans la vie politique, les structures et les idées. Il faut que les structures changent. Il faut que nous nous dépassions en matière d'organisation pour faire encore mieux que ce que nous avons fait dans le passé. Nous avons tous en mémoire que le mouvement gaulliste a d'ailleurs plusieurs fois connu des mutations. En revanche, ce qui est le fond de notre engagement, notre idéal gaulliste, lui bien sur, il doit être pérenne. Il ne faut pas qu'il disparaisse dans la transformation qui est en cours aujourd'hui.
L'originalité du gaullisme, fusion profonde entre le patriotisme et l'humanisme est probablement la meilleure réponse à ces inquiétudes. Le patriotisme, c'est à dire l'amour de la patrie, l'amour de la France mais un patriotisme qui pour nous est totalement étranger au nationalisme xénophobe. Ce n'est pas un repli sur soi, c'est une ouverture grâce au message universel que porte la France. Et puis, en même temps, l'humanisme, c'est à dire comme le disait beaucoup mieux le Général de Gaulle une certaine idée de l'homme, de sa liberté, de sa responsabilité, de son esprit de partage. Il porte en lui aussi l'idée de rassemblement et de primauté de l'intérêt général. Nous n'avons donc pas à avoir peur car nous savons bien que ces idées n'ont jamais été aussi modernes et qu'elles trouveront évidemment et naturellement toute leur place dans cette nouvelle structure.
LDLN: Quelles sont les prochaines étapes pour l'UMP ?
Alain Juppé: Après les assises extraordinaires du RPR qui se tiendront le 21 septembre, l'UMP connaîtra fin octobre un congrès fondateur. Il aura à prendre trois ou quatre décisions fondamentales.
D'abord, je souhaite la mettre en numéro un parce que cela m'apparaît le plus symbolique et le plus significatif, l'adoption d'une charte des valeurs que nous avons en commun. Si nous faisons une union, c'est parce que nous avons des choses à partager, des idées à partager, des convictions à partager, sinon l'Union n'a pas de sens. Je crois qu'il faut commencer par-là. Ensuite, des statuts qui sont actuellement en cours d'élaboration, mais aussi un nouveau nom afin d'exprimer mieux l'ensemble de nos valeurs. Et enfin, l'élection des dirigeants nationaux du mouvement pour la durée des mandats qui sera fixée dans les statuts. Après ce congrès fondateur, nous mettrons définitivement en place les instances locales de la future UMP, dans chaque département et dans chaque circonscription. Lorsque ces instances auront été mises en place, c'est-à-dire début 2003, nous tiendrons un congrès ordinaire, et là les procédures prévues par les statuts pour permettre l'expression des sensibilités au sein de l'Union pourront jouer. Le comité exécutif de l'UMP qui en a discuté au cours des derniers jours a pensé en effet qu'avant de cultiver nos différences, il était bon d'affirmer notre unité, nos ressemblances, et que le congrès fondateur était fait pour marquer l'union sur les valeurs, sur l'idéal, ce qui facilitera ensuite l'expression de la diversité.
LDLN: Au final, pourquoi l'UMP ?
Alain Juppé: Parce que notre force a toujours été de nous régénérer, de renaître, de nous rassembler. Nos électeurs nous le demandent, notre pays l'exige pour avancer, se transformer, revivre.
Sommes nous décidés, autour de Jacques Chirac, à réunir toutes les forces qui feront de ce quinquennat, celui de la réforme, celui d'un nouveau départ pour la France ? Ma réponse est oui, tous ensemble.
Propos recueillis par Jean-Luc Bourget,
directeur de la publication La Lettre de la Nation.
(Source http://www.rpr.org, le 2 septembre 2002)