Texte intégral
Je vous remercie tous, d'abord, d'être venus à l'occasion de ce rendez-vous, cet après-midi. Je sais que beaucoup de Français qui travaillent à Téhéran sont en vacances.
Je ne fais jamais de déplacement de ce type sans rencontrer la communauté française, même brièvement. Je tiens beaucoup à ce contact car c'est une façon qui complète - je trouve - heureusement mes entretiens avec les différentes autorités des pays où je me déplace. Cela complète le travail d'analyse et d'évaluation que l'on fait pour mieux connaître les situations.
Je suis venu en Iran, après en avoir parlé avec le Président de la République et le Premier ministre, parce que nous avons pensé tous les trois que c'était le bon moment pour venir. Je vais parler avec prudence parce qu'il y a certainement parmi vous toutes sortes de gens beaucoup plus experts que moi sur l'Iran, et de mille façons. Nous avons donc pensé que c'était un bon moment. Un contexte nouveau a été créé par le corps électoral iranien qui a voulu, avec l'élection du nouveau président et ses suites, exprimer une volonté de changement. Evidemment, c'est une volonté de changement à l'intérieur d'une continuité car les sociétés ne changent pas comme cela. Cette élection nous est apparue comme quelque chose de très fort, surtout au vu des chiffres de participation et du score obtenus par le président Khatami. Elle a constitué un élément vraiment nouveau.
A partir de là, les Européens ont alors commencé à réfléchir à la façon d'appréhender cette question iranienne : dialoguer ou pas, avec en mémoire une série d'actes extrêmement contestables ou inacceptables. Dans les années passées, quand le dialogue avait eu lieu entre les Européens et l'Iran, on parlait de "dialogue critique". Il s'agissait, en réalité, d'un dialogue extrêmement espacé et qui ne portait que sur des reproches.
Compte tenu de ce contexte nouveau, nous avons décidé au sein de l'Union européenne, il y a quelques mois, d'abandonner ce concept et de repasser, pour ceux qui le voudraient, à un dialogue normal. Nous renouons le dialogue. Ce qui ne veut pas dire que l'on escamote actuellement les sujets de désaccords et de contentieux. Mais nous avons pensé, à quinze, que le moment était venu de répondre aux ouvertures qui étaient faites par ce nouveau président, ces désirs de dialogue avec l'Occident, avec l'Europe, avec les pays dont nous faisons partie. Mais, il faut que ce soit un dialogue prudent, circonspect, un dialogue qui soit fait dans la clarté, sans faire l'impasse sur aucun sujet.
Nous n'avions pas, au niveau français, de raisons spéciales d'attendre pour que je fasse ce déplacement. Je dois dire que personnellement j'avais une très grande curiosité, un très grand désir de venir sur place entendre les principaux protagonistes de ce jeu politique iranien et compléter mon appréciation même si le ministère regorge de spécialistes de grande qualité et si beaucoup d'analyses ont été utilisées, rassemblées et exploitées. Mais, je voulais, dans les fonctions qui sont les miennes, procéder à une évaluation qui va se poursuivre.
J'ai eu deux journées très intéressantes, très remplies avec des entretiens longs, de vraies discussions, pas trop formelles et, dans certains cas, pas formelles du tout. J'ai rencontré le président de la République, le vice-président, le président Rafsandjani, le président du Parlement - que je viens de quitter - et j'ai passé des heures et des heures de discussions, soit à deux, soit en séance élargie, soit en déjeunant ou en dînant, avec mon homologue iranien. Nous avons vraiment parlé de tout. Le dialogue s'est déroulé comme je le souhaitais. Nous avons passé en revue tous les volets bilatéraux, les relations politiques, économiques et culturelles. Nous avons discuté des perspectives dans chaque domaine et j'ai pointé le doigt, pour les questions bilatérales, sur tous les problèmes, toutes les difficultés, que ce soient les plus concrètes, comme le fait que les ingénieurs qui viennent travailler pour une entreprise dont le contrat a été signé n'aient pas de visa, ou l'existence de tracasseries sans fin - qui sont le fait des bureaucraties partout dans le monde, même si chacune a son style particulier. Il y a toutes sortes de problèmes, comme celui de l'IFRI -, où je suis allé et où j'ai rencontré une équipe fort sympathique - de l'enseignement du français dont nous avions espéré qu'il allait se développer à partir d'un accord conclu en 1996 mais qui ne s'est pas encore concrétisé. Il y a eu un vrai débat parce que les Iraniens observent qu'il y a de telles sortes de problèmes en France pour leurs étudiants. A nos yeux, ce n'est pas comparable, mais nous discutons.
Sur le plan économique, nous avons examiné quels étaient les domaines de développement. Potentiellement, il y a en beaucoup, mais il faut que les Iraniens créent les conditions propices à la venue des entreprises, qui ne viennent pas, sauf exception, sans un environnement offrant un minimum de sécurité et de stabilité juridiques.
Certes, petit à petit, ce pays améliorera les conditions de coopération économique pour les investissements étrangers. Mais, pour l'heure, le système reste compliqué. Je suis convaincu qu'il y a beaucoup à faire car l'intérêt - réciproque -, traditionnel de la France pour l'Iran n'est pas qu'une formule pour discours. Il y a vraiment une histoire qui ne demande qu'à être réveillée. Mais il faut avoir les bonnes conditions pour travailler. D'autre part, nous avons procédé à des échanges très intéressants, même si souvent, les points de vue sont très différents, sur l'innombrable série de crises qui existe dans à peu près toutes les régions avoisinantes. Sans parler des crises potentielles, nous avons parler des guerres ouvertes, comme l'Afghanistan, des situations extrêmement difficiles, comme l'Iraq, ou des zones de tension difficiles, comme le Proche et le Moyen-Orient.
Nous avons passé méthodiquement en revue ces questions et je dois dire que c'est très intéressant d'entendre, même si les systèmes de référence ne sont pas identiques, l'analyse des dirigeants actuels de l'Iran, pays qui se voit bien cerné de facteurs de déstabilisation et qui lui aussi aspire à la sécurité de ses frontières.
J'ai donc fait cet exercice avec curiosité, intérêt et prudence. Je vais procéder maintenant à une évaluation au retour avec tous ceux qui m'ont accompagné, parlementaires et hauts fonctionnaires, avec nos spécialistes. J'en parlerais avec les autres Européens. C'est une étape importante. Nous avons une perspective de développement des relations aux niveaux politique et diplomatique. Normalement, mon homologue devrait venir à Paris. L'idée d'une venue du président iranien à Paris a été actée, sans rien précisé de plus pour le moment. Il s'agit d'une étape à venir, si tout se déroule bien. Il y aura toujours des difficultés car il n'y a pas de relations bilatérales sans difficultés, même entre des pays qui sont très proches et semblables comme en Europe. Il s'agit de savoir si ces difficultés bloquent le processus ou pas. Notre démarche vise à faire en sorte que se crée une dynamique qui permette d'avancer. Si cela se produit, je crois qu'il y aura vraiment beaucoup à faire et si vous êtes ici, représentatifs de cette communauté des Français en Iran qui pourrait redevenir beaucoup plus nombreuse si les circonstances s'y prêtaient, c'est que, d'une façon ou d'une autre, soit pour des raisons privées, soit pour des raisons professionnelles, vous y avez intérêt et êtes convaincus que ce potentiel existe.
Voilà la ligne actuelle de la diplomatie française. Voilà ce que je suis venu faire. On ne sait pas plus, on ne sait pas moins. C'est une étape importante. Parmi les suites immédiates et concrètes, il y a un certain nombre de missions et de consultations dont nous avons retenu le principe avec mon homologue pour reprendre toute une série de sujets qui ont été abordés. Dans certains cas, nous avons pu avancer, dans d'autres, nous avons simplement photographié les positions. Il faut retravailler. Il y a deux choses. Je vais envoyer ici, dès que possible, le directeur général des Relations culturelles, M. François Nicoullaud, pour passer en revue toutes les questions touchant au redémarrage de la coopération culturelle - si on arrive à débloquer les problèmes. D'autre part, nous avons obtenu l'accord des Iraniens pour des consultations consulaires portant sur l'ensemble des sujets touchant à la vie des gens, pas uniquement des visas bien sûr, mais tous les problèmes qui tournent autour de la vie ici qui ne doit pas être toujours simple mais intéressante. Il s'agit quand même d'un pays peu ordinaire, dans tous les sens du terme. Je voulais simplement que la communauté française sache ce que l'on fait, sur quoi et dans quel esprit nous travaillons. Je voulais aussi vous faire le résumé de cette visite.
Je vous remercie d'être là et j'espère que nous allons tous passer un chaleureux, chaud et bref moment car il n'y a plus beaucoup de temps avant l'avion.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2001)
Je ne fais jamais de déplacement de ce type sans rencontrer la communauté française, même brièvement. Je tiens beaucoup à ce contact car c'est une façon qui complète - je trouve - heureusement mes entretiens avec les différentes autorités des pays où je me déplace. Cela complète le travail d'analyse et d'évaluation que l'on fait pour mieux connaître les situations.
Je suis venu en Iran, après en avoir parlé avec le Président de la République et le Premier ministre, parce que nous avons pensé tous les trois que c'était le bon moment pour venir. Je vais parler avec prudence parce qu'il y a certainement parmi vous toutes sortes de gens beaucoup plus experts que moi sur l'Iran, et de mille façons. Nous avons donc pensé que c'était un bon moment. Un contexte nouveau a été créé par le corps électoral iranien qui a voulu, avec l'élection du nouveau président et ses suites, exprimer une volonté de changement. Evidemment, c'est une volonté de changement à l'intérieur d'une continuité car les sociétés ne changent pas comme cela. Cette élection nous est apparue comme quelque chose de très fort, surtout au vu des chiffres de participation et du score obtenus par le président Khatami. Elle a constitué un élément vraiment nouveau.
A partir de là, les Européens ont alors commencé à réfléchir à la façon d'appréhender cette question iranienne : dialoguer ou pas, avec en mémoire une série d'actes extrêmement contestables ou inacceptables. Dans les années passées, quand le dialogue avait eu lieu entre les Européens et l'Iran, on parlait de "dialogue critique". Il s'agissait, en réalité, d'un dialogue extrêmement espacé et qui ne portait que sur des reproches.
Compte tenu de ce contexte nouveau, nous avons décidé au sein de l'Union européenne, il y a quelques mois, d'abandonner ce concept et de repasser, pour ceux qui le voudraient, à un dialogue normal. Nous renouons le dialogue. Ce qui ne veut pas dire que l'on escamote actuellement les sujets de désaccords et de contentieux. Mais nous avons pensé, à quinze, que le moment était venu de répondre aux ouvertures qui étaient faites par ce nouveau président, ces désirs de dialogue avec l'Occident, avec l'Europe, avec les pays dont nous faisons partie. Mais, il faut que ce soit un dialogue prudent, circonspect, un dialogue qui soit fait dans la clarté, sans faire l'impasse sur aucun sujet.
Nous n'avions pas, au niveau français, de raisons spéciales d'attendre pour que je fasse ce déplacement. Je dois dire que personnellement j'avais une très grande curiosité, un très grand désir de venir sur place entendre les principaux protagonistes de ce jeu politique iranien et compléter mon appréciation même si le ministère regorge de spécialistes de grande qualité et si beaucoup d'analyses ont été utilisées, rassemblées et exploitées. Mais, je voulais, dans les fonctions qui sont les miennes, procéder à une évaluation qui va se poursuivre.
J'ai eu deux journées très intéressantes, très remplies avec des entretiens longs, de vraies discussions, pas trop formelles et, dans certains cas, pas formelles du tout. J'ai rencontré le président de la République, le vice-président, le président Rafsandjani, le président du Parlement - que je viens de quitter - et j'ai passé des heures et des heures de discussions, soit à deux, soit en séance élargie, soit en déjeunant ou en dînant, avec mon homologue iranien. Nous avons vraiment parlé de tout. Le dialogue s'est déroulé comme je le souhaitais. Nous avons passé en revue tous les volets bilatéraux, les relations politiques, économiques et culturelles. Nous avons discuté des perspectives dans chaque domaine et j'ai pointé le doigt, pour les questions bilatérales, sur tous les problèmes, toutes les difficultés, que ce soient les plus concrètes, comme le fait que les ingénieurs qui viennent travailler pour une entreprise dont le contrat a été signé n'aient pas de visa, ou l'existence de tracasseries sans fin - qui sont le fait des bureaucraties partout dans le monde, même si chacune a son style particulier. Il y a toutes sortes de problèmes, comme celui de l'IFRI -, où je suis allé et où j'ai rencontré une équipe fort sympathique - de l'enseignement du français dont nous avions espéré qu'il allait se développer à partir d'un accord conclu en 1996 mais qui ne s'est pas encore concrétisé. Il y a eu un vrai débat parce que les Iraniens observent qu'il y a de telles sortes de problèmes en France pour leurs étudiants. A nos yeux, ce n'est pas comparable, mais nous discutons.
Sur le plan économique, nous avons examiné quels étaient les domaines de développement. Potentiellement, il y a en beaucoup, mais il faut que les Iraniens créent les conditions propices à la venue des entreprises, qui ne viennent pas, sauf exception, sans un environnement offrant un minimum de sécurité et de stabilité juridiques.
Certes, petit à petit, ce pays améliorera les conditions de coopération économique pour les investissements étrangers. Mais, pour l'heure, le système reste compliqué. Je suis convaincu qu'il y a beaucoup à faire car l'intérêt - réciproque -, traditionnel de la France pour l'Iran n'est pas qu'une formule pour discours. Il y a vraiment une histoire qui ne demande qu'à être réveillée. Mais il faut avoir les bonnes conditions pour travailler. D'autre part, nous avons procédé à des échanges très intéressants, même si souvent, les points de vue sont très différents, sur l'innombrable série de crises qui existe dans à peu près toutes les régions avoisinantes. Sans parler des crises potentielles, nous avons parler des guerres ouvertes, comme l'Afghanistan, des situations extrêmement difficiles, comme l'Iraq, ou des zones de tension difficiles, comme le Proche et le Moyen-Orient.
Nous avons passé méthodiquement en revue ces questions et je dois dire que c'est très intéressant d'entendre, même si les systèmes de référence ne sont pas identiques, l'analyse des dirigeants actuels de l'Iran, pays qui se voit bien cerné de facteurs de déstabilisation et qui lui aussi aspire à la sécurité de ses frontières.
J'ai donc fait cet exercice avec curiosité, intérêt et prudence. Je vais procéder maintenant à une évaluation au retour avec tous ceux qui m'ont accompagné, parlementaires et hauts fonctionnaires, avec nos spécialistes. J'en parlerais avec les autres Européens. C'est une étape importante. Nous avons une perspective de développement des relations aux niveaux politique et diplomatique. Normalement, mon homologue devrait venir à Paris. L'idée d'une venue du président iranien à Paris a été actée, sans rien précisé de plus pour le moment. Il s'agit d'une étape à venir, si tout se déroule bien. Il y aura toujours des difficultés car il n'y a pas de relations bilatérales sans difficultés, même entre des pays qui sont très proches et semblables comme en Europe. Il s'agit de savoir si ces difficultés bloquent le processus ou pas. Notre démarche vise à faire en sorte que se crée une dynamique qui permette d'avancer. Si cela se produit, je crois qu'il y aura vraiment beaucoup à faire et si vous êtes ici, représentatifs de cette communauté des Français en Iran qui pourrait redevenir beaucoup plus nombreuse si les circonstances s'y prêtaient, c'est que, d'une façon ou d'une autre, soit pour des raisons privées, soit pour des raisons professionnelles, vous y avez intérêt et êtes convaincus que ce potentiel existe.
Voilà la ligne actuelle de la diplomatie française. Voilà ce que je suis venu faire. On ne sait pas plus, on ne sait pas moins. C'est une étape importante. Parmi les suites immédiates et concrètes, il y a un certain nombre de missions et de consultations dont nous avons retenu le principe avec mon homologue pour reprendre toute une série de sujets qui ont été abordés. Dans certains cas, nous avons pu avancer, dans d'autres, nous avons simplement photographié les positions. Il faut retravailler. Il y a deux choses. Je vais envoyer ici, dès que possible, le directeur général des Relations culturelles, M. François Nicoullaud, pour passer en revue toutes les questions touchant au redémarrage de la coopération culturelle - si on arrive à débloquer les problèmes. D'autre part, nous avons obtenu l'accord des Iraniens pour des consultations consulaires portant sur l'ensemble des sujets touchant à la vie des gens, pas uniquement des visas bien sûr, mais tous les problèmes qui tournent autour de la vie ici qui ne doit pas être toujours simple mais intéressante. Il s'agit quand même d'un pays peu ordinaire, dans tous les sens du terme. Je voulais simplement que la communauté française sache ce que l'on fait, sur quoi et dans quel esprit nous travaillons. Je voulais aussi vous faire le résumé de cette visite.
Je vous remercie d'être là et j'espère que nous allons tous passer un chaleureux, chaud et bref moment car il n'y a plus beaucoup de temps avant l'avion.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2001)