Interviews de M. Dominique Galouzeau de Villepin, ministre des affaires étrangères, à TF1, France 2 et à des radios à Jérusalem le 25 juin 2002, sur les réactions française et européenne, d'une part, israéliennes et palestiniennes d'autre part, au discours du président américain Georges Bush concernant la réforme de l'Autorité palestinienne, la tenue d'élections et la lutte contre le terrorisme, les relations entre la France et Israël.

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Circonstance : Tournée au Proche-Orient de M. Dominique Galouzeau de Villepin, du 23 au 26 juin 2002

Média : France 2 - Site web TF1 - Le Monde - Télévision - TF1

Texte intégral

(Interview à TF1 à Jérusalem, le 25 juin 2002) :
Q - Quel est votre sentiment après le discours de Bush ?
R - C'est un plan qui marque d'importantes convergences d'objectifs avec la France, l'Union européenne, une détermination très claire à lutter contre le terrorisme, qui marque aussi la nécessité d'une réforme de l'Autorité palestinienne. Il y a des mesures qui ont été prises, elles doivent être appliquées et il faut aller plus loin.
Il y a aussi la nécessité d'élections. Quand j'ai rencontré Yasser Arafat, il a clairement marqué cette volonté d'élections pour le début de l'année prochaine. C'est évidemment important mais cela ne peut suffire. Il faut de ce point de vue un processus politique, une perspective de paix et il faut un cadre face au processus. La conférence internationale paraît pour les Français et les Européens qui se sont exprimés à Séville, comme le bon cadre possible et il faut aussi un calendrier, car l'urgence de la situation dans la région le commande.
Q - Pourtant on a l'impression que le fossé est important, quand même, entre la position européenne et française d'une part et américaine de l'autre parce que le Président américain met une conditionnalité quand même à cet espoir, cette perspective qu'il donnerait aux Palestiniens. Les Américains disent qu'ils ne veulent plus d'Arafat, or vous, vous dites "Arafat doit encore rester"
R - Notre volonté commune c'est de faire avancer les choses. On voit bien la spirale dans laquelle est prise cette région : spirale de la violence, du terrorisme, tout ceci n'est pas acceptable, il faut arrêter cette situation et dans ce contexte, il faut unir nos volontés, notre capacité à faire bouger les choses. Les Américains ont un rôle très important à jouer mais aucun Etat ne dispose seul des moyens de régler le problème. Il faut donc, avec beaucoup de pragmatisme, je crois, essayer les uns, les autres d'unir nos forces avec les complémentarités de nos diplomaties pour pouvoir espérer débloquer la situation.
Q - Il semble pourtant que les Américains ont bien un monopole de fait ici dans la région avec les Israéliens dans le dialogue, dans les éventuels moyens de pression. Qu'est-ce que l'Europe va apporter dans ce dialogue, ce tête-à-tête aujourd'hui ? Est-ce qu'elle a vraiment les moyens de peser ?
R - Je le redis, la complémentarité est indispensable. Personne ne peut détenir seul les moyens de régler la question : pas plus les deux parties qu'aucune autre puissance et c'est bien la nécessité de faire avancer les esprits, d'offrir un espoir à l'ensemble des parties. Quand on voit la situation dans les Territoires palestiniens, la détresse qui est aujourd'hui celle de cette population qui n'a pas d'avenir, de possibilité de vie quotidienne avec l'occupation et le couvre-feu. Quand on voit l'angoisse qui pèse aujourd'hui sur le peuple israélien, angoisse devant la menace terroriste qui peut frapper à tout moment, on se dit qu'il y a une nécessité, et aucune politique de sécurité ne peut seule répondre à cette angoisse, à ce problème. Il faut véritablement un plan, un processus politique. Le cadre nous l'avons : il y a un consensus de la société internationale pour choisir la conférence. La conférence peut permettre de regrouper l'ensemble des parties, de la communauté intéressée, le Quartet est un outil important avec les Nations unies, la Russie, les Etats-Unis, l'Union européenne, tout ceci peut permettre de crédibiliser un processus politique indispensable.
Q - Monsieur le Ministre, c'est la première fois que vous veniez à la Moqataa, à Ramallah, que vous rendiez visite à Yasser Arafat dans ces conditions, dans un bâtiment troué d'explosions, de trous d'obus avec des épaves de voitures, de sacs de sable ? Quelle a été votre impression ?
R - C'est le choc d'un endroit, et d'une ville dévastée et ceci évidemment marque très fortement l'esprit et ne rend que plus urgente la nécessité d'agir. On sent bien que cette région vit une épreuve terrible, mais la situation peut être demain encore plus dramatique encore. Il y a là une urgence, une nécessité pour les diplomaties de tous nos Etats, un devoir et ce devoir, c'est d'être présents, c'est le sens de ma présence ici, de la déclaration qui a été celle des Européens à Séville, du discours du président Bush. Nos responsabilités sont mises à l'épreuve. Il faut unir nos volontés, et cela, seul, peut permettre de dessiner un chemin.
Q - Comment avez-vous trouvé Yasser Arafat ? L'homme n'est-il pas trop abattu, n'a-t-il pas accusé le coup, quand même, d'un déni de représentativité par la première puissance mondiale du président Bush ?
R - Il est le représentant élu de l'Autorité palestinienne et il est déterminé à avancer, à se réformer. Il a conscience qu'il faut réformer l'Autorité pour lui donner plus de crédibilité, d'efficacité. Il est conscient de la nécessité de nouvelles élections et m'a confirmé que ces élections se tiendraient au début de l'année prochaine. Tout ceci est important pour permettre d'avancer dans la voie politique. Il y a aujourd'hui des volontés qui s'expriment, il faut les encourager. C'est notre rôle à tous de ne fermer aucune porte, si ce n'est celle, essentielle, du terrorisme. Le terrorisme est inacceptable pour tous. Nous devons le combattre mais la paix doit être encouragée. Il faut porter un espoir pour tous ces peuples.
Q - Depuis deux jours, vous êtes au Moyen-Orient, vos propos sont plutôt dramatiques pour parler des conséquences du terrorisme. Pour nous, même en Europe, il pourrait y avoir des kamikazes pro-palestiniens, un terrorisme de solidarité pro-palestinien, en Europe, chez nous, à Paris, par exemple ?
Q - Nous l'avons vu le 11 septembre. Personne aujourd'hui ne peut se sentir à l'abri. Les Français ont été frappés au Pakistan. Il y a donc une menace terroriste qui profite aujourd'hui de moyens technologiques exceptionnels, de réseaux, d'argent, et nous devons comprendre l'interaction entre les crises et la vie internationale. Il n'y a pas de crise qui puisse être qualifiée seulement de régionale, on le voit avec la situation en Inde et au Pakistan, on l'a vu en Afghanistan. Il est donc important de ne pas se satisfaire d'un état de fait, de ne pas considérer qu'il suffit d'abaisser la tension pour être rassuré. Il faut régler les crises et c'est à cela que la volonté internationale doit s'appliquer.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juin 2002)
(Interview à France 2 à Jérusalem, le 25 juin 2002) :
Q - Il y a quelques mois les relations franco-israéliennes sont passées dans une zone de turbulence. Votre visite ici a permis d'aplanir ce qui était des différends ?
R - J'ai voulu marquer l'émotion de la France, la compassion française de ce que vivent tous les jours de façon dramatique les Israéliens : ce sentiment d'angoisse au quotidien devant la menace terroriste. Il faut dire le caractère inadmissible de cette menace et le refus français d'accepter ce terrorisme.
Bien évidemment, on a abordé tous les sujets avec des représentants de la société civile, les autorités israéliennes et je crois qu'il y a une vraie attente, un vrai désir de France dans ce pays.
Q - Les Israéliens sont preneurs d'une intervention française plus forte dans le processus politique ?
R - Les Israéliens sont désireux de régler ce qui est au quotidien leur souci fondamental, c'est à dire la sécurité. Et la conviction française c'est que la sécurité seule ne peut suffire. Il y a bien un problème et il faut donc une solution politique, il faut une perspective politique, un espoir pour l'ensemble des peuples de la région. C'est à cela aussi que nous voulons travailler en liaison avec l'ensemble des partenaires de la communauté internationale, avec les Américains qui ont insisté sur un certain nombre de points où il y a convergence avec nos propres objectifs : la réforme de l'Autorité palestinienne, les élections nécessaires, la lutte contre le terrorisme. Tout cela est indispensable.
Mais il faut une perspective, un outil, un cadre. La conférence internationale peut être ce cadre et il faut un calendrier car il y a une véritable urgence.
Q - La gauche israélienne et aussi les Palestiniens hors micro sont très déçus par les propositions américaines. Ils ont l'impression qu'en fait c'est un feu vert pour une politique israélienne beaucoup plus activiste dans les Territoires. C'est votre sentiment ?
R - Je crois qu'aujourd'hui la communauté internationale a un devoir de résultat. Chacun a des atouts, mais il y a un devoir de résultat. Il y a une grande complémentarité entre les positions des uns et des autres. Aucun pays ne détient la solution. Il n'y a pas de remède miracle, et c'est bien dans cette complémentarité en utilisant la capacité de chacun à avancer qu'il faut travailler.
Donc, je crois que le pragmatisme est à l'ordre du jour et qu'il faut tirer chaque fil qui peut permettre de fonder un nouveau processus de paix dans la région.
Q - Vous avez donc vu Yasser Arafat dans ce qu'il reste de son quartier général. Cela vous a surpris ?
R - Cela correspond à l'idée que l'on se faisait mais quand on touche du doigt cette réalité cruelle, ces villes occupées, cette Moqataa dévastée, on mesure toute la détresse du peuple palestinien, le choc de l'absence d'avenir, ce sentiment de détresse très profond de ne pas pouvoir être maître de la journée qui vient avec le couvre-feu qui pèse. Donc, tout cela est extrêmement lourd, mais il est important aussi que chacun des représentants de cette Autorité palestinienne puisse s'engager avec détermination dans le combat contre le terrorisme. Il faut marquer des points sur ce terrain. Dans le processus de réformes, là aussi, il faut marquer des points. On a besoin de résultats et la nouvelle élection que le président Arafat a annoncée, qui se tiendra au début de l'année prochaine, est un élément qui peut, peut-être aussi, donner un nouveau sens à l'avenir pour la région.
Q - L'élection est-elle possible dans cette situation ?
R - Il faut la préparer, cela fait partie des exigences. Je crois qu'il faut que nous soyons responsables et cohérents. Il y a besoin de nouvelles élections, et la France de son côté, l'Union européenne, je pense, auront à cur d'apporter aussi leur contribution. Tout doit être fait pour permettre justement à cette solution politique d'émerger.
Q - Vous avez trouvé Yasser Arafat déterminé ?
R - Je l'ai trouvé très conscient de la situation, de la nécessité d'avancer. Il a indiqué très fortement son engagement face au terrorisme, dans le cadre d'un processus de paix, je crois que maintenant la balle est dans le camp de chacun. Il faut faire avancer la paix tous ensemble
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juin 2002)
(Interview à des radios à Jérusalem, le 25 juin 2002) :
Q - Premier voyage d'un ministre novice des Affaires étrangères dans cet Orient compliqué. Votre passage est pratiquement terminé ici en tout cas au cur du volcan. Votre première impression ?
R - Je serai demain en Arabie Saoudite et vous savez le rôle qui est celui de l'Arabie Saoudite dans la recherche de la paix. Mon impression, c'est l'urgence, l'urgence devant une angoisse, qui est celle de peuples qui vivent la tragédie au quotidien. On ne peut pas rester inactif, ce n'est évidemment pas acceptable et ce n'est pas l'intérêt du monde. Nous devons tous prendre notre part dans le poids de ce fardeau.
Q - Qu'est-ce que vous avez ressenti en arrivant hier après-midi à Ramallah lorsque vous avez vu ce quartier général en partie détruit et le président Arafat apparemment sous le coup de ce qui avait été prononcé la veille par le président américain Georges Bush ?
R - Beaucoup d'émotions bien sûr, ces villes occupées, encerclées, de cette population civile qui a le sentiment de ne pas avoir d'avenir, qui est soumise au couvre-feu, à une vie quotidienne extrêmement difficile. Il est essentiel de pouvoir répondre et de donner un espoir à ces populations, c'est tout le sens de cette visite, du côté palestinien ; c'est tout le sens aussi des contacts que j'ai eus en Israël qui font ressortir le même sentiment d'angoisse devant la menace terroriste qui guette, qui frappe de façon aveugle. Ce sentiment d'être confronté à la fois à l'angoisse des uns, au désespoir des autres doit conduire la communauté internationale à se mobiliser. Il n'y a pas de fatalité, la volonté politique peut apporter une réponse à cela et ce sentiment d'urgence c'est la conviction de la France. Il y a un devoir de la communauté internationale d'agir, d'offrir une perspective de paix, de se mobiliser pour faire face à ce qui, aujourd'hui, apparaît véritablement comme une situation dramatique.
Q - La position de l'Europe vis-à-vis du discours du président américain : vous l'analysez comment ? Est-ce que le discours correspond à ce qu'attend l'Union européenne ?
R - Il y a une convergence d'objectifs entre la France, l'Union européenne et les Etats-Unis. Il y a une nécessité absolue qui est la lutte contre le terrorisme, il est inacceptable, il est condamnable sous toutes ses formes. Il doit faire l'objet véritablement d'une mobilisation très grande. Il y a aussi le besoin de réforme de l'Autorité palestinienne et le président Arafat, quand je l'ai rencontré, s'est engagé à avancer dans la voie de ces réformes, à multiplier les mesures pour plus de transparence, d'efficacité, pour mieux répondre aux exigences de l'action. Il faut des résultats dans ce domaine et puis il y a l'élection, la perspective nécessaire d'élections. Le président Arafat s'est engagé à les tenir au début de l'année prochaine pour les élections présidentielles et législatives en janvier, en mars pour les élections municipales et il lui faut se préparer, il faut les rendre possible. Comment tenir des élections dans des territoires occupés ? Il faut pouvoir donner les moyens au peuple palestinien de se prononcer et personne ne peut le faire à sa place.
Q - L'Europe reste attachée à une conférence internationale. George Bush n'en a pas dit un mot dans son discours. Vous pensez qu'elle a encore un avenir ?
R - L'Europe est attachée à faire avancer la perspective de la paix, elle est attachée comme la France à obtenir des résultats. Il faut être pragmatique, il y a des convergences avec nos amis américains, aussi des complémentarités. Il y a la nécessité d'unir nos volontés, nos capacités pour déboucher sur des perspectives concrètes de paix. Dans ce contexte, la politique de sécurité peut permettre un certain nombre de résultats ; elle doit faire face à la menace terroriste, mais elle ne peut suffire. Aucune politique de sécurité ne permet seule d'aboutir et d'offrir un espoir à des peuples en difficulté ; il faut aussi une solution. Dans ce contexte, la solution qui est aujourd'hui sur la table, celle qui recueille le plus grand consensus sur la scène internationale, c'est la conférence internationale. Une conférence qui réunirait l'ensemble des parties au conflit, des bonnes volontés de la communauté internationale. Nous avons besoin d'unir nos capacités, nos volontés pour offrir véritablement un espoir à cette région. Pourquoi se disputer, relever ce qui nous sépare aujourd'hui alors qu'il faut impérativement, au contraire, s'attacher à ce qui nous unit pour agir ensemble.
Q - C'est un discours que l'on entend depuis des semaines, des mois, voire des années et pour autant le dossier s'enlise et la crise continue ?
R - La situation aujourd'hui est nouvelle : d'abord par l'intensité du drame que vivent les Israéliens, les Palestiniens de leur côté et par le contexte du monde dans lequel nous sommes de l'après 11 septembre. Il y a une interdépendance entre les crises et la situation mondiale. Personne ne peut ignorer la gravité des crises, dites régionales pudiquement, auxquelles fait face le monde. C'est vrai de la crise entre l'Inde et le Pakistan, c'est vrai de la crise qu'a connue l'Afghanistan, c'est vrai aujourd'hui de la crise du Proche-Orient, on ne peut pas tout simplement s'habituer à voir baisser la tension et oublier. Il y a un devoir de trouver des solutions sans quoi, comme toujours, ce sont ceux qui représentent le désordre, ceux qui font leur miel de la haine qui l'emportent. Il appartient à tous ceux qui défendent des valeurs communes, qui sont soucieux de défendre la justice, un monde plus solidaire, de se réunir pour faire avancer les propositions de paix.
Le devoir de résultat est très grand et nos peuples ne s'y trompent pas. Nos peuples ne veulent plus de solutions en l'air, de paroles toutes faites, ils veulent avancer, des résultats, nous serons jugés là-dessus les uns et les autres et je pense que la communauté internationale aujourd'hui en a pleinement conscience.
Q - L'Arabie Saoudite devait présenter un plan, ensuite reconnu par tous les Arabes, le monde entier presque a appuyé ce plan et aujourd'hui dans le discours du président Bush, par exemple, il n'en parle pas un seul instant et plus personne n'en parle ?
R - Parce que les propositions américaines veulent aujourd'hui faire avancer sur un certain nombre de points très précis la négociation : les élections, la réforme de l'Autorité palestinienne, la lutte contre le terrorisme. Mais nous, les Européens nous sommes conscients qu'il faut inscrire cette action dans le plus long terme, dans une perspective politique. Il faut s'atteler ensemble, au même moment, à ces deux tâches s'il l'on veut véritablement recréer l'espoir et de ce point de vue la contribution des pays arabes est évidemment centrale, le plan de paix porté par l'Arabie Saoudite, le sommet de la Ligue arabe de Beyrouth, la réunion de Charm el-Cheikh, tous ces efforts sont aujourd'hui présents et les uns et les autres savent très bien l'objectif qui est le nôtre. Tout le monde partage le même objectif : la création d'un Etat palestinien, d'un Etat palestinien viable, démocratique, souverain, pacifique, qui puisse vivre aux côtés d'Israël, en paix, en sécurité. Chacun connaît bien aujourd'hui cet objectif. Alors pourquoi attendre ? Il est essentiel que chacun prenne la mesure de la gravité, de l'intensité du drame chaque jour, et qu'à partir de là on se dise qu'il n'y a pas de fatalité et que l'on unisse nos efforts.
Q - Quand vous dites qu'il ne faut pas attendre, est-ce qu'en fait les grandes puissances n'attendent pas cyniquement l'après-Arafat ?
R - Nous sommes au-delà des hommes parce que la souffrance des peuples aujourd'hui nous interpelle, et cette réalité très forte doit nous conduire dans le cas très particulier de la situation de l'Autorité palestinienne à nous rappeler qu'il s'agit d'une autorité palestinienne élue, personne ne peut l'ignorer, le peuple palestinien doit décider de son sort, de ce qu'il représente et nous devons accepter cette règle fondamentale. A partir de là, que nous soyons soucieux de les faire avancer plus vite, plus fort, bien sûr ; le dialogue international est là pour cela ; la règle diplomatique est là pour peser, lourdement s'il le faut et essayer d'inciter chacun. C'est le sens du dialogue que j'ai eu avec Yasser Arafat et c'est un dialogue que je crois constructif, nous pouvons essayer de convaincre. Aujourd'hui, l'objectif de chacun : c'est la paix et c'est très important que chacun apporte le témoignage de sa volonté pas à pas. Il nous faut avancer pas à pas, avec le souci du résultat mais aucun délai ne doit être accepté, aucun préalable ne doit être posé quand il s'agit d'un enjeu aussi fondamental que celui de la paix.
Q - Vous avez parlé des élections palestiniennes. Ne craignez-vous pas que les élections consacrent la victoire des mouvements radicaux comme le Hamas, le djihad islamique ?
R - Aujourd'hui, le peuple palestinien est confronté à un choix très important pour son avenir et il doit savoir dans quel sens il doit aller. Evidemment, nous sommes là pour essayer d'éclairer le chemin. Notre conviction c'est qu'il n'y a pas d'alternative à un Etat palestinien capable de vivre en paix avec un Etat israélien qui doit aussi pouvoir vivre en sécurité.
Ce sont les exigences de la région, ce sont véritablement les nécessités qui sont à la fois portées par la mémoire de ces deux peuples et en même temps par l'exigence d'une vie meilleure pour demain. A partir de là, il nous appartient d'aider, d'appuyer, nous sommes là pour cela. La diplomatie internationale est là pour aider, pour appuyer ses efforts avec humilité, constance, détermination, nous n'avons pas le droit de baisser les bras quand c'est difficile, et si je suis ici aujourd'hui, dans cette région, alors même que la situation dramatique que l'on connaît se développe, c'est bien pour témoigner que la diplomatie doit être là quand les choses ne vont pas sinon l'action que nous menons n'a pas de sens.
Q - Comment avez-vous trouvé Yasser Arafat humainement ?
R - Je l'ai trouvé désireux d'aller de l'avant, déterminé à s'engager dans un processus de réformes, à développer la crédibilité indispensable qui doit être celle de l'Autorité palestinienne.
Il y a des efforts à faire, des mesures à prendre. Il est important que chacun là où il est puisse faire le chemin.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 juin 2002)