Déclaration de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur le développement des relations économiques et culturelles avec la Gambie, Paris le 24 février 1998.

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Circonstance : Visite de M. Sem Yahya Jammeh, Président de la République de Gambie à Paris le 24 février 1998

Texte intégral

Monsieur le Président de la République,
C'est avec plaisir que nous pouvons vous accueillir aujourd'hui à Paris en " visite officielle ". Cette expression, "visite officielle", qui relève d'un vocabulaire classique en matière de relations internationales, prend, dans le cas de la Gambie, le relief particulier que donne la nouveauté.
Je ne vous cache pas, Monsieur le Président, qu'une certaine curiosité s'éveille en nous, Français, quand nous entendons parler de la Gambie. L'explorateur Richard Jackson passa quatre années, de 1620 à 1624 à la recherche des légendaires trésors, qu'on disait enfouis aux sources du fleuve Gambie, et en fit, dans un ouvrage intitulé "La découverte du royaume de Salomon", un récit émerveillé. Plus tard, et de manière plus scientifique, c'est en remontant le cours du fleuve Gambie qu'en 1795 l'explorateur écossais Mungo Park est parti à la recherche des sources du Niger. L'imaginaire ainsi nourrit l'affection.
La Gambie fait partie intégrante d'une région à laquelle notre pays est attaché par des liens humains, culturels, politiques, qui datent de plusieurs siècles.
C'est pourquoi je ne doute pas, Monsieur le Président, que le renforcement des échanges et le dialogue approfondi qui s'est d'ores et déjà établi entre la France et la Gambie favorisera ici une meilleure connaissance de votre beau pays où puisque j'ai eu la chance de m'y rendre en septembre dernier lorsque j'ai participé au Sommet des Chefs d'Etats du Comité Inter-Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel (le CILLS). A cette occasion, Monsieur le Président, vous m'aviez fait l'honneur de me recevoir en audience et vous m'aviez déjà exposé vos projets de développement pour la Gambie, et aussi l'attachement que vous portiez à la contribution de la France dans ce domaine.
J'ai conservé un souvenir très vif de cet entretien. La Gambie exerce actuellement la présidence du CILLS. Vous attachez à juste titre un grand prix à votre rôle à la tête de cette institution. Permettez-moi de souligner ici que la France continuera à apporter au CILLS l'aide nécessaire pour la réalisation de ses objectifs.
Monsieur le Président,
Votre visite en France marque également la reconnaissance des réformes importantes que vous avez su lancer et mener à bien dans le domaine institutionnel, permettant ainsi à la Gambie de renouer avec ses traditions démocratiques anciennes et, par là même, avec la communauté internationale. La France en a suivi avec intérêt et sympathie les différentes étapes.
Ce retour de la démocratie manifeste la sagesse et la maturité du peuple gambien qui, à trois reprises, a exprimé son attachement aux nouvelles institutions dont il se dotait en se rendant massivement et pacifiquement aux urnes.
Ce succès est à mettre tout autant à votre crédit, Monsieur le Président, car vous avez su conduire à leur terme, avec fermeté et détermination, les différentes étapes d'un processus de démocratisation que vous avez lancé en 1996.
J'en cite ici les principales étapes :
- adoption d'une nouvelle constitution par référendum en août 1996 et levée de l'interdiction des partis politiques,
- tenue d'élections présidentielles en septembre 1996 puis d'élections législatives en janvier 1997. Tous ces scrutins se sont déroulés sous le contrôle d'une Commission nationale électorale indépendante.
Par ailleurs vous avez lancé un programme de réformes économiques visant à renforcer l'autonomie alimentaire de la Gambie, à diversifier ses sources de développement économique et à améliorer ses infrastructures.
Monsieur le Président,
Tout en établissant des liens d'amitié avec de nouveaux partenaires, vous avez également su conserver et renforcer la relation privilégiée qui vous unit avec votre unique voisin : le Sénégal.
Vous avez aussi à coeur de donner à la Gambie un rôle éminent au sein des différents organismes régionaux africains. J'ai parlé du CILLS, on pourrait aussi citer la CEDEAO et l'Organisation de mise en valeur du fleuve Gambie, véritable vecteur d'intégration régionale qui unit votre pays au Sénégal, à la Guinée-Bissau et à la Guinée pour l'exploitation des ressources du bassin du fleuve qui a donné son nom à votre pays.
Par ailleurs votre récente proposition de médiation dans le conflit de Casamance témoigne de votre volonté de contribuer à l'apaisement d'un conflit auquel, comme vos voisins, vous devez faire face avec ses conséquences les plus douloureuses et les plus déstabilisantes que sont l'afflux de réfugiés et le développement du banditisme.
La réussite du processus de démocratisation a permis à la Gambie de renouer avec la communauté financière internationale, la France s'est réjoui . Il lui sera ainsi possible de plaider avec succès - j'en suis convaincu - la cause de la Gambie au sein de l'Union européenne mais aussi auprès des institutions de Bretton Woods.
Cette démocratisation réussie devrait aussi permettre à l'avenir d'envisager, si la Gambie le souhaite et si les pays membres y sont disposés, l'intégration de votre pays au sein de l'UEMOA.
Nous accueillons aujourd'hui en France un interlocuteur avec lequel nous pourrons dialoguer et travailler. En Afrique, bien sûr, mais aussi au sein du Conseil de sécurité des Nations unies où votre pays siège pour deux ans, et dont il exercera la présidence en mars prochain. Et à cet égard, les occasions de dialogue ne manqueront pas, tant les sujets sont nombreux qui requièrent notre attention et notre concertation. Que ce soit au Proche-Orient avec l'affaire iraquienne ou en Afrique avec les crises qui affectent malheureusement en trop grand nombre ce continent.
Monsieur le Président,
Comme vous le savez, la France a de tout temps été aux côtés de la Gambie. Elle l'a été pour accompagner son processus de retour à la démocratie, elle l'a été et l'est toujours pour l'assister dans le redressement de son économie et l'engagement d'un véritable développement en faveur des populations.
A cet égard, l'accord de coopération culturelle, scientifique, technique et économique qui a été signé aujourd'hui entre nos deux pays constitue la traduction formelle de notre intention de renforcer et d'approfondir notre coopération dans ces domaines. Toutefois, je sais qu'il est déjà des secteurs où notre coopération donne entière satisfaction. Je pense en particulier à l'Alliance française de Banjul qui est très fréquentée et particulièrement appréciée des Gambiens.
D'autre part, l'invitation qui vous a été faite, et à laquelle vous avez répondu favorablement, de participer au prochain sommet des Chefs d'Etats d'Afrique et de France, à Paris, du 26 au 28 novembre prochain, témoigne du resserrement de nos relations.
Je puis vous assurer aujourd'hui que les liens d'amitié si forts ainsi créés entre Français et Gambiens permettront sans aucun doute le développement de notre coopération à tous les niveaux, une connaissance et une appréciation réciproques, et que je m'emploierai, pour ma part, et, j'en suis certain avec votre aide, à les renforcer./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 septembre 2001)