Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames,
Messieurs,
Comme il est d'usage, je viens devant vous pour la séance au cours de laquelle votre avis sera rendu sur la saisine du Premier Ministre relative à la convergence des SMIC. C'est pour moi la première occasion de participer à une réunion du Conseil Economique et Social dans le cadre de mes fonctions au gouvernement. J'en suis honoré et heureux.
Vous savez toute l'importance qu'attache le Président de la République au rôle de votre Assemblée. Le gouvernement n'a pas manqué dès sa prise de fonction, de s'adresser à vous pour contribuer aux décisions qu'il doit prendre, en particulier sur ce sujet difficile du " Smic multiple ".
J'ai conscience que les délais qui vous ont été impartis étaient excessivement brefs. Je mesure l'effort réalisé par la commission temporaire, son président M. LAROSE, le rapporteur M. GAUTIER, et tous ses membres ; et je les en remercie vivement.
Je remercie également tous les membres du conseil qui participent à cette séance, et je tiens à dire au président DERMAGNE toute ma reconnaissance pour son accueil et pour le dynamisme avec lequel il a souhaité impliquer le Conseil sur ce dossier.
Je savais bien qu'en suggérant au Premier Ministre de vous saisir, je vous entraînerais sur un terrain difficile et parfois conflictuel. Mais je ne crois pas que l'on doive vous tenir à l'écart des sujets les plus délicats, bien au contraire. Le Conseil Economique et Social est au carrefour des grands enjeux économiques et sociaux et doit, dans cet esprit, contribuer au développement de la démocratie sociale mieux structurée et plus féconde que le gouvernement appelle de ses vux.
Je suis convaincu que vos débats, et votre avis aideront le gouvernement, et sans doute aussi les partenaires sociaux, à mieux affronter les difficultés inhérentes à ce dossier du SMIC.
J'ai d'ailleurs pu mesurer la volonté de votre conseil de hisser sa réflexion à ce niveau, en évitant les positions de principe qui auraient ignoré sa vocation de conseil du gouvernement, au service de l'intérêt général, au nom de la société civile.
L'avis sur lequel vous vous prononcerez demain contribuera à mon sens à illustrer la dynamique que peut apporter votre conseil au progrès social, dans le respect des contraintes économiques. Je précise que ma participation à cette séance n'a d'autre objet que de témoigner la considération que je porte au Conseil et de vous délivrer quelques unes des réflexions que m'inspire le problème des SMIC. Mais je me garderai bien d'intervenir dans le débat sur les amendements, débat qui va se poursuivre, je crois, jusqu'au vote final demain.
J'ai conscience que vous auriez aimé disposer de davantage de données chiffrées de la part des administrations, en particulier sur la contribution que les finances publiques pourraient apporter à la convergence des SMIC. Je pense que vous avez également bien mesuré les raisons pour lesquelles les services de l'Etat n'ont à ce jour voulu présumer en rien du choix du scénario de convergence, ni même de son financement.
C'est précisément à partir des conclusions de votre avis que le travail d'élaboration de ce scénario va se faire. De mon point de vue, il faudra aller vite. Et j'entends bien tenir l'engagement que j'ai pris devant la commission nationale de la négociation collective le 24 juin dernier, à savoir revenir devant elle en septembre avec un projet de convergence des SMIC.
Car je crois qu'au nombre des erreurs de conception de la loi sur la réduction du temps de travail, il y a ce mécanisme obscur et technocratique de l'article 32 qui conduit chaque année à créer un nouveau SMIC, d'ailleurs mensuel et non plus horaire. Cela n'est pas juste pour les salariés. Cela pèse sur la négociation collective en matière de salaire. C'est enfin complètement illisible. Et il ne suffit certainement pas de dire comme le fait la loi que le système prend fin en 2005, car rien n'est prévu pour assurer une convergence des SMIC. Bien au contraire, la divergence s'accentue avec le temps !
Je n'aurai garde d'oublier comme l'a fait semble t-il le précédent gouvernement, que l'enjeu des SMIC ne peut être réduit ni à sa dimension sociale ni à sa dimension économique. Il reviendra au gouvernement dans le cadre de la révision du dispositif sur les 35 heures, de donner enfin aux entreprises et aux salariés une perspective pluriannuelle claire garantissant l'emploi et la justice sociale. C'est le sens des propositions que je ferai à partir de votre rapport, après concertation avec les partenaires sociaux cet été.
Enfin, je voudrais souligner tout l'intérêt que le gouvernement portera aux avis que votre conseil rendra à la rentrée sur l'attractivité de notre territoire, d'une part, et sur la dimension sociale de la construction européenne d'autre part. Sur ces sujets majeurs, votre conseil peut aider le gouvernement dans l'élaboration de sa politique.
D'une manière générale, je souhaite que votre conseil contribue effectivement, de par la qualité des débats qui fondent ses avis, à la fin des contradictions factices entre l'économique, qui serait par nature synonyme de rigueur voire d'austérité, et le social qui renverrait à une générosité plus ou moins irresponsable. Nous ne pouvons pas préparer l'avenir avec de tels schémas.
La force du pacte social, la richesse du dialogue social, notre capacité de négociation sont des atouts pour l'économie, et donc pour l'emploi. La diversité des composantes de votre assemblée , illustration vivante de la richesse sociale de notre pays, doit éclairer les choix du gouvernement, non seulement sur les décisions qu'il doit prendre, mais aussi sur l'espace qu'il doit effectivement laisser aux partenaires sociaux, à tous les niveaux de la vie des entreprises.
Je souhaite donc que vos débats confortent la démarche de ce gouvernement qui entend faire davantage confiance aux partenaires sociaux pour servir le progrès économique et social.
Pour autant je n'ignore pas les responsabilités de l'Etat. Vous pouvez compter sur moi pour conjuguer dialogue social et souveraineté nationale. Le premier exemple en sera sans doute la convergence des SMIC.
Je vous renouvelle mes remerciements pour vos travaux sur ce sujet qui sera, qu'on le veuille ou non, au cur de l'actualité sociale de l'été.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 10 juillet 2002)